COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE 18e Chambre
ARRÊT AU FOND DU 18 DECEMBRE 2015
No2015/ 703
Rôle No 13/ 06025
Valérie X... C/ SOCIETE ELRES anciennement SAS AVENANCE ENSEIGNEMENT ET SANTE
Grosse délivrée le :
à :- Me Philippe BARTHELEMY, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
-Me Franck BLIN, avocat au barreau de PARIS
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de FREJUS-section Activités Diverses-en date du 22 Février 2013, enregistré au répertoire général sous le no 11/ 491.
APPELANTE
Madame Valérie X..., demeurant...- ...-83600 FRÉJUS
comparante en personne, assistée par Me Philippe BARTHELEMY, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
INTIMEE
SOCIETE ELRES anciennement SAS AVENANACE ENSEIGNEMENT ET SANTE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis, demeurant 61-69 rue de Bercy-75012 PARIS
représentée par Me Franck BLIN, avocat au barreau de PARIS (152 bis, rue de Longchamp, 75116 PARIS) substitué par Me Lise KLINGUER, avocat au barreau de NICE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 04 Juin 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Fabienne ADAM, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller faisant fonction de Président Madame Fabienne ADAM, Conseiller Monsieur Jean-Bruno MASSARD, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Julia DELABORDE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Septembre 2015, puis prorogé successivement au 8 Octobre 2015, 10 Novembre 2015 et 18 Décembre 2015.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Décembre 2015
Signé par Monsieur Jean Bruno MASSARD, Conseiller pour le Président empêché et Madame Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Madame Valérie X... aurait effectué des missions d'interim pour la société AVENANCE ENSEIGNEMENT ET SANTE, désormais société ELRES, avant d'être embauchée en qualité d'employée de restauration par cette société selon contrat de travail à durée déterminée du 1er septembre 2005 à temps partiel en remplacement d'une salariée absente Madame Z..., puis la relation s'étant poursuivie, donc en contrat à durée indéterminée ; un avenant au contrat en date du 1er juillet 2008 est venu le préciser.
Madame X... a été sanctionnée par un avertissement le 26 avril 2010 ; elle a été rappelé à l'ordre le 10 mai 2015 ; elle a été l'objet d'un deuxième avertissement le 27 mai 2011.
La salariée a été licenciée le 15 juin 2011 pour cause réelle et sérieuse.
Saisi le 30 septembre 2011 par la salariée d'une demande de requalification du contrat en contrat de travail à durée indéterminée et de l'indemnité de requalification, de l'annulation des deux avertissements, d'une contestation du licenciement et des indemnité de rupture subséquentes, le conseil de prud'hommes de Fréjus par jugement du 22 février 2013 a débouté Madame X... de l'ensemble de ses demandes, a débouté la société ELRES venant aux droits de la société AVENANCE ENSEIGNEMENT ET SANTE de sa demande reconventionnelle et a condamné la société ELRES aux dépens.
Le 19 mars 2013, Madame X... a relevé appel de ce jugement.
Dans ses écritures développées à la barre, l'appelante demande à la cour de : Requalifier le contrat de travail à durée déterminée verbal en contrat de travail à durée indéterminée ; Prononcer l'annulation de l'avertissement du 26 avril 2010 ; Prononcer l'annulation de l'avertissement du 27 mai 2011 ; Dire et juger que Madame X... a fait l'objet d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; En conséquence : Condamner la société ELRES à payer à Madame X... la somme de 969, 80 Euros d'indemnité de requalification ; Condamner la société ELRES à payer à Madame X... la somme de 1 500 Euros de dommages-intérêts comme conséquence de l'annulation des deux avertissements ; Condamner la société ELRES à payer à Madame X... la somme de 6 100 Euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse ; Condamner la société ELRES à payer à Madame X... la somme de 1 500 Euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ; Condamner la société ELRES aux entiers dépens.
Dans ses écritures également soutenues sur l'audience, l'intimée demande à la cour de : Il est demandé à la Cour d'appel d'Aix-en-Provence de :- CONSTATER la régularité du contrat à durée déterminée de Madame X...,- CONSTATER le bien-fondé des sanctions disciplinaires de Madame X...,- CONSTATER que les faits reprochés à Madame X... constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement, En conséquence,- CONFIRMER le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de FREJUS,- DIRE ET JUGER que le licenciement de Madame X... repose sur une cause réelle et sérieuse,- DEBOUTER Madame X... de l'intégralité de ses demandes,- CONDAMNER, à titre reconventionnel, Madame X... à payer à la Société la somme de 1. 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux éventuels dépens.
Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures oralement soutenues à l'audience.
MOTIFS DE L'ARRÊT :
Sur la recevabilité de l'appel :
La recevabilité de l'appel n'est pas discutée. Les éléments du dossier ne conduisent pas la cour à le faire d'office.
Sur le fond :
- sur la requalification-
Le contrat de travail à durée déterminée du 1er septembre 2005 est régulier, le cas de recours visé, remplacement d'une salariée absente pour maladie étant l'un des cas prévus par l'article L1242-12 du code du travail réglementant le contrat de travail à durée déterminée. La salariée absente a été en arrêt maladie du 1er septembre au 28 septembre puis du 29 septembre au 12 octobre 2005. Il n'est pas contesté que la relation de travail avec Madame X... s'est alors poursuivie cette fois en contrat à durée indéterminée, en application de l'article L1243-11 du code du travail l'absence de Madame Z... s'étant poursuivie dans le cadre d'un congé parental mais aucun autre contrat de travail à durée déterminée n'étant venu le préciser. Lorsque la salariée remplacée a démissionné et est définitivement sortie de l'entreprise le 30 juin 2008 la société a, par avenant du 1er juillet 2008, précisé à Madame X... qu'elle était en contrat à durée indéterminée à compter du 1er juillet 2008, mais l'employeur ne conteste pas qu'en réalité le contrat à durée indéterminée a commencé dès le 13 octobre 2005. Le premier juge qui a rectifié cette situation en exprimant clairement que le contrat à durée indéterminée avait commencé le 13 octobre 2005 a fait une juste appréciation de la règle de droit. Par ailleurs, il est constaté que l'ancienneté de Madame X... a été reprise à compter du 1er septembre 2005. En conséquence, la situation de la salariée a été régularisée et elle ne subit aucun préjudice. C'est à bon droit qu'elle a été déboutée d'une demande de requalification et de l'indemnité y attachée.
- sur les avertissements-
Madame X... demande à ce que les deux avertissements qu'elle a subis soient annulés et que des dommages et intérêts lui soient alloués en réparation.
Les deux avertissements décriés visent les faits suivants :
Avertissement du26 avril 2010 :- difficultés relationnelles avec ses collègues de travail, notamment langage grossier, altercation en présence d'adultes et d'enfants ;- le fait d'avoir fait entrer en cuisine, à plusieurs reprises et pendant ses heures de travail, des personnes étrangères à la société,- altercation physique et verbale du 23 mars 2010 avec une intérimaire, Madame A...,- non-respect des règles d'hygiène (port de la charlotte, filmage et mises en chambre froide des entrées...).
Avertissement du 27 mai 2011 :- attitude insolente lors d'une réunion, le 7 avril 2011,- incident lié à une non-confirmation de sa présence ou de son absence le 7 avril 2011,- propos désobligeants et dénigrement du directeur de l'école en rapport avec son fils scolarisé dans cet établissement et lieu où travaillait Madame X....
Il résulte des pièces produites, et en rappelant qu'entre les deux avertissements Madame X... avait encore été rappelée à l'ordre sur un non respect des règles d'hygiène (présence dans l'armoire froide de barquettes de viande et de pommes boulangères non mises en chauffe et non jetées après le service, faits constatés par la directrice du service clients), que ces avertissements sont suffisamment justifiés. C'est à juste titre que Madame X... a été déboutée de sa demande d'annulation et d'indemnisation.
- sur le licenciement-
La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est ainsi motivée : " Le 9 mai 2011, nous avons appris par le secrétariat de la médecine du travail, l'AIST 83, que vous aviez décalé la date de votre visite médicale périodique et ce sans en informer votre hiérarchie. Nous vous rappelons qu'il n'est pas de votre ressort de modifier votre convocation à la visite médicale mais bien celui de votre hiérarchie. En agissant de la sorte, vous avez donc outrepassé vos fonctions. Le 17 mai 2011 lors d'un audit réalisé par Mademoiselle B..., il a été constaté la présence de deux sachets de pommes noisettes en décongélation lente dans l'une des armoires froides alors que le service était terminé. Or l'ensemble de pommes noisettes aurait dû être réchauffé pour le déjeuner des enfants. De plus, vous n'êtes pas sans ignorer qu'à l'issue du service, aucun élément ne doit rester au sein de l'armoire froide mis à part les fromages, laitages et fruits restants. L'excédent aurait donc dû être jeté à 13H30, ce qui n'avait pas été le cas. De plus, à la suite de la notification de votre avertissement du 23 mai dernier dans lequel nous faisions entre autre référence à votre échange virulent avec le Directeur de l'école où vous êtes affectée, et dans lequel nous vous demandions de faire la part des choses entre la sphère professionnelle et personnelle. Vous avez écrit personnellement au Directeur de l'établissement en date du 30 mai 2011, en lui demandant d'intervenir auprès de nous concernant le contenu de vos échanges du 8 avril dernier. Au cours de l'entretien du 16 juin 2011, vous avez reconnu une partie des faits reprochés. En effet, concernant la présence des sachets de pommes noisettes entamés dans une des armoires froides, vous avez indiqué que vous n'étiez pas à l'origine de cette faute mais que c'était votre collègue de travail qui était responsable et qu'elle l'aurait confirmé à Mademoiselle B.... Vous avez également indiqué que cette personne « faisait ce qu'elle voulait et qu'elle avait la réputation de ne pas s'entendre avec le personnel mais que vous ne souhaitez pas en rajouter d'avantage afin de ne pas l'incriminer ». Nous vous avons alors précisé que vous auriez dû nous informer des agissements de votre collègue de travail puisque cela faisait partie de votre rôle. Concernant le courrier adressé. au Directeur de l'établissement, vous expliquez que votre échange du 8 avril dernier avait eu lieu en dehors de vos horaires de travail et que le contenu de cette conversation faisait partie de votre vie privée. Or Monsieur C... soutient que cet échange avait eu lieu durant vos heures de travail et devant témoin, ce qui constituait une faute. De plus, nous vous avons notifié un avertissement le 23 mai dernier pour avoir eu un comportement inapproprié envers Mademoiselle Aurélie B..., votre supérieure hiérarchique et Monsieur C.... Malgré cette notification et nos mises en gardes verbales nous sommes de nouveau confrontés à des écarts de comportement que nous ne pouvons plus tolérer. En effet votre attitude envers notre client, véhicule une mauvaise image de l'entreprise et risque de compromettre à terme nos relations contractuelles avec ce dernier. Vos actes d'insubordination répétés ont fait l'objet depuis plusieurs mois de nombreux rappels à l'ordre verbaux. Nous avons même été dans l'obligation de vous sanctionner à plusieurs reprises pour des faits sensiblement similaires. En effet, en date du 26 avril 2010, nous vous avions notifié un avertissement pour les faits suivants :- langage grossier devant des enfants,- altercation physique et verbale avec Madame A...- non respect des dispositions de l'article 3. 3 du règlement intérieur relatif à la présence de personne étrangère à l'entreprise au sein de la cuisine, durant vos heures de travail,- non respect des règles d'hygiène (pas de port de charlotte, pas de filmage ni de mise en chambre froide des entrée) D'autre part, le 3 mai 2010 nous avions constaté à nouveau un non respect des règles élémentaires d'hygiène (présence de barquettes individuel/ es de viandes et de pommes boulangère qui auraient du être préparées) De plus, durant l'année scolaire 2007-2008, vous aviez eu des difficultés relationnelles avec une Directrice d'école ainsi que le personnel municipal du site où vous étiez affectée. Vous aviez également eu plusieurs altercations avec l'une de vos collègues de travail. Cette dernière était tombée malade et avait demandé à ne plus travailler avec vous. Jusqu'à présent, nous avions fait preuve de tolérance en vous changeant d'affectation face aux difficultés relationnelles que vous rencontriez. En effet, durant l'année scolaire 2008-2009, nous avions été informés que vous teniez des propos grossiers devant les enfants. Vous aviez alors été rappelée à l'ordre verbalement et changée d'affectation en septembre 2009. Malgré ce changement de site, nous avions eu des plaintes régulières des salariés travaillant avec vous et qui souhaitaient arrêter leur collaboration avec nous, à cause des difficultés relationnelles rencontrées avec vous. Nous vous avions à plusieurs reprises reçue pour des entretiens de recadrage et de rappel à l'ordre. Et malgré nos différentes « alertes » tant verbales qu'écrites, nous sommes au regret de constater que votre comportement général de change pas. Vous ne vous conformez pas aux directives de l'entreprise et ne tenez pas compte de nos remarques. Aussi par ces motifs et après enquête, nous prenons la décision de vous licencier pour cause réelle et sérieuse avec un préavis de 2 mois qui débutera le jour de la première présentation de cette lettre à votre domicile. "
Il s'agit d'un licenciement pour cause réelle et sérieuse. La charge de la preuve est partagée. Sur les trois griefs visés :- le déplacement de la visite médicale sans en avoir avisé sa hiérarchie-le manquement aux règles d'hygiène-demande adressée au directeur de l'école où elle travaille pour intervenir auprès de son employeur suite à l'incident objet du dernier avertissement, les parties ne font que reprendre devant la cour leurs prétentions et leurs moyens de première instance.
En l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, au vu des pièces produites, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties ; il convient en conséquence de confirmer la décision en ce qu'elle a dit le licenciement de Madame X... fondé sur une cause réelle et sérieuse.
- sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile-
En cause d'appel, la charge des dépens sera assurée par Madame X... qui succombe en son appel et en application de l'article 700 du code de procédure civile cette dernière sera condamnée à verser à la société ELRES la somme de 500 ¿ ;
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, en matière prud'homale, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,
Reçoit l'appel,
Confirme le jugement entrepris dans toutes ses dispositions,
Condamne Madame Valérie X... à payer à la société ERLES la somme de 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Madame Valérie X... aux dépens d'appel.