COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE 18e Chambre
ARRÊT AU FOND DU 18 DECEMBRE 2015
No 2015/ 706
Rôle No 13/ 15424
Frédéric X...
C/
Société L'OREE DU BOIS GAC NOUVELLE
Grosse délivrée le :
à :
Me Joëlle MICHEL, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, vestiaire : 97
Me Laurent GARCIA, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de prud'hommes-Formation de départage de FREJUS-section E-en date du 27 Juin 2013, enregistré au répertoire général sous le no 12/ 108.
APPELANT
Monsieur Frédéric X..., demeurant...-83690 SALERNES
comparant en personne, assisté de Me Joëlle MICHEL, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, vestiaire : 97
INTIMEE
Société L'OREE DU BOIS GAC NOUVELLE, représenté par Monsieur Christian C... (président) demeurant ...-83490 LE MUY
représentée par Me Laurent GARCIA, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 09 Juin 2015 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller faisant fonction de Président Madame Fabienne ADAM, Conseiller qui en a rapporté Monsieur Jean-Bruno MASSARD, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Fabienne MICHEL.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Septembre 2015, puis prorogé successivement au 8 Octobre 2015, 10 Novembre 2015 et 18 Décembre 2015.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Décembre 2015.
Signé par Monsieur Jean Bruno MASSARD, Conseiller pour le Président empêché et Madame Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Monsieur Frédéric X... a été embauché en qualité de directeur à compter du 1er juin 1990, sans contrat écrit, par la société L'OREE DU BOIS exploitant un hôtel, société appartenant à Monsieur Jean-Claude Y..., frère de son épouse, Madame Fernande Y... épouse X... qui y travaillait également.
Le fonds de commerce a été cédé le 13 mars 2007, les contrats de travail se sont poursuivis ; un accord antérieur, en date du 13 avril 2006, prévoyait la poursuite du contrat de Monsieur X... aux conditions suivantes :- salaire mensuel net de 2. 786, 13 ¿ pour 169 heures, salaire net de 2. 000 ¿,- mêmes fonctions,- mêmes heures de présence,- habitation et repas sur place.
Le 29 juillet 2008, Monsieur X... a été placé en arrêt de travail pour maladie.
Par courrier du 30 juillet 2008, Monsieur X... a sollicité de son employeur le respect de cet accord et le paiement d'heures supplémentaires.
Le 9 août 2008, Monsieur X... a saisi le conseil de prud'hommes de Fréjus d'une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail.
Le 29 octobre 2008, le salarié a été licencié pour faute grave par la société OREE DU BOIS GAC NOUVELLE.
Devant le conseil de prud'hommes, la demande de résiliation judiciaire a été abandonnée, mais le licenciement a été contesté et diverses demandes en paiement portant sur des rappels de salaires par rapport à l'accord de 2006 et par rapport à des heures supplémentaires, et sur les indemnités de ruptures ont été formulées.
Par jugement de départage en date du 27 juin 2013, la juridiction prud'homale a débouté Monsieur X... de l'ensemble de ses demandes, a débouté la société OREE DU BOIS GAC NOUVELLE de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive et condamné Monsieur X... aux entiers dépens et à payer la somme de 1. 500 ¿ à la défenderesse sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 12 juillet 2013, Monsieur X... a relevé appel du jugement.
Dans ses écritures développées à la barre, l'appelant demande à la cour : INFIRMER le jugement rendu par le Conseil des Prud'hommes en date du 27 juin 2013, CONSTATER l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement de monsieur X..., suivant lettre de licenciement du 29 octobre 2008, DIRE ET JUGER le licenciement de M. X..., sans cause réelle et sérieuse. CONDAMNER l'employeur, la société L'OREE DU BOIS, à payer à monsieur X...,- rappel de salaires à compter de mars 2007 jusqu'à septembre 2008, soit 7380 ¿ bruts-rappel congés payés même période : 738 ¿ bruts-heures supplémentaires de 2003 à 2007 : 9. 674 heures, soit 97. 451 ¿ bruts-congés payés y afférents 9. 745, 10 ¿ bruts-heures supplémentaires du 1. 01. 2008 au 13. 07. 2008 : 453, 43 heures, soit la somme de 5. 651, 88 ¿ bruts-congés payés y afférent : 565, 19 ¿ bruts-au titre des jours fériés non payés : 913, 31 ¿ bruts-au titre des congés payés y afférent : 91, 32 ¿ bruts-au titre du bulletin de salaire du mois d'octobre 2008 : 912, 88 ¿ bruts-indemnité de préavis : deux mois soit 2. 744, 19 ¿ bruts x 2, soit la somme de 5. 488, 38 ¿- congés payés y afférent : 548, 80 ¿ bruts-indemnité de licenciement : 16. 789, 60 ¿- au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse : 98. 790, 84 ¿- au titre des dommages et intérêts pour préjudice moral : 5. 000 ¿- au titre de la remise des documents sociaux, une astreinte de 100 ¿ par jour de retard. EN TOUT ETAT DE CAUSE DEBOUTER l'employeur de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions DIRE ET JUGER que les condamnations, hormis l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, porteront intérêts au taux légal, depuis l'introduction de la demande en justice, CONDAMNER la société L'OREE DU BOIS à payer à monsieur X... la somme de 5. 000 ¿, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, CONDAMNER la société L'OREE DU BOIS aux entiers dépens..
Dans ses écritures également soutenues sur l'audience et par des moyens qui seront analysés dans le corps du présent arrêt, l'intimée conclut à la confirmation du jugement déféré, au débouté de Monsieur X... de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et à sa condamnation aux entiers dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 3. 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures oralement soutenues à l'audience.
MOTIFS DE L'ARRÊT :
Sur la recevabilité de l'appel :
La recevabilité de l'appel n'est pas discutée. Les éléments du dossier ne conduisent pas la cour à le faire d'office.
Sur le fond :
- sur le licenciement-
La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est ainsi motivée : " Nous avons eu à déplorer de votre part un agissement constitutif d'une faute grave. En effet, le 14 septembre 2008, alors que vous étiez en maladie vous vous êtes présenté à la réception de l'hôtel et vous avez devant de nombreux témoins tenu des propos grossiers envers moi même et avait eu un comportement agressif vis-à-vis du personnel et de moi même. Vous vous êtes, en effet, permis de dire en présence de témoins et notamment de clients que nous étions des voleurs et que les clients devaient impérativement vérifier leurs notes. Cette conduite met en cause la bonne marche de la société. Je vous ai personnellement convoqué à un entretien préalable auquel vous ne vous êtes pas présenté. Vous n'avez, d'ailleurs, même pas jugé utile ou courtois de nous informer des raisons de votre absence lors de cet entretien préalable. Dès lors, nous n'avons pu modifier notre appréciation au sujet des fautes qui vous sont imputées et nous vous informons qu'en conséquence nous avons décidé de vous licencier pour faute grave. Ces faits sont d'une particulière gravité, votre maintien dans l'entreprise s'avère, par conséquent, impossible ; le licenciement prend donc effet immédiatement à la date du 29 octobre 2008 sans indemnité de préavis ni de licenciement. Nous vous rappelons que vous faites l'objet d'une mise à pied à titre conservatoire. Par conséquent la période non travaillée allant du 10 octobre 2008 au 29 octobre 2008 nécessaire pour effectuer la procédure de licenciement ne sera pas rémunérée ".
La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis. Il appartient à l'employeur qui s'en prévaut d'en rapporter la réalité et la gravité.
Le fait d'insulter son employeur et particulièrement devant témoins, en l'espèce salarié mais aussi un client, et surtout dans le cadre d'une exploitation commerciale telle un hôtel, est de nature à constituer une faute grave en raison de l'atteinte à l'image de marque de l'établissement.
Ces faits sont démontrés particulièrement par le témoignage précis et circonstancié d'un client, Monsieur Z... et corroboré par celui d'une salariée Madame A... ; l'incertitude quant à la date exacte, 13, 14 ou 17 septembre 2008 n'étant pas capital, dans la mesure où d'une part, il n'est pas discuté que le salarié habitait à côté de la réception de l'hôtel et qu'il s'y rendait facilement alors même qu'il était en arrêt maladie, et qu'il est établi, par le récépissé du dépôt de plainte à la gendarmerie, que l'employeur, en la personne de Monsieur C..., a réagi immédiatement, soit le 18 septembre 2008. Par ailleurs les autres attestations versées par la société OREE DU BOIS GAC NOUVELLE et notamment le témoignage de Madame B..., salariée déléguée syndicale, viennent conforter le comportement agressif de Monsieur X.... C'est pourquoi le licenciement pour faute grave sera déclaré suffisamment fondé et Monsieur X... débouté de l'ensemble de ses demandes en paiement subséquentes à une rupture qu'il considère à tort comme abusive.
- sur les rappels de salaire-
Concernant l'accord du 13 avril 2006, il est contesté par la société OREE DU BOIS GAC NOUVELLE qui rappelle que la cession du fonds de commerce n'est intervenue qu'en mars 2007 et qui expose la situation particulière dans laquelle se trouvait l'ancien dirigeant Monsieur Y... vis à vis de sa soeur et de son beau-frère, soit Monsieur et Madame X..., situation qui n'est pas véritablement discutée par l'appelant et l'évolution qui a suivi la cession du fonds, exposée particulièrement par des salariés.
Il est relevé l'absence de contrat de travail et un élément de fait qui va dans le sens de cette situation familiale particulière à savoir que Monsieur X..., alors qu'il se prévaut d'un accord du 13 avril 2006, n'a émis de revendication à ce sujet pour la première fois que le 30 juillet 2008. Par ailleurs l'examen des bulletins de salaire démontre qu'il a parfois perçu un salaire net supérieur à 2. 000 ¿ et certes quelquefois inférieur mais sans qu'il ait jamais manifesté une quelconque contestation. Par conséquent, le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur X... de cette demande comme étant insuffisamment justifiée sera confirmé.
- sur le rappel de salaire pour heures supplémentaires-
Il résulte de l'article L3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié et qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
Monsieur X... exerçait les fonctions de directeur, était domicilié sur place et ne s'était jamais plaint d'un non paiement d'heures supplémentaires. Les témoignages versés par la société OREE DU BOIS GAC NOUVELLE démontrent la grande liberté dont il bénéficiait pour organiser son travail.
Les éléments qu'il verse pour étayer sa demande sont des attestations qui, si elles sont désormais régularisées au regard des dispositions de l'article 202 du cpc, sont cependant très vagues et très générales ; le document établi par Monsieur X... pour la dernière année, est peu lisible et, au regard de ses fonctions, aurait dû être établi précisément et contradictoirement. Dès lors, au vu des attestations versées par l'employeur qui éclairent, non seulement sur le comportement de Monsieur X... mais également sur le respect par l'employeur des dispositions légales particulièrement sur les horaires des salariés (attestation de la représentante syndicale Madame B...), il y a lieu sur ce point aussi de confirmer la décision du premier juge.
- sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile-
Monsieur X... qui succombe en son appel sera tenu aux dépens d'appel et en application de l'article 700 du CPC, ce dernier sera condamné à verser, pour les frais irrépétibles engagés en cause d'appel, la somme de 800 ¿ à la société OREE DU BOIS GAC NOUVELLE.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, en matière prud'homale, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,
Reçoit l'appel,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Condamne Monsieur Frédéric X... aux dépens d'appel et au paiement de la somme de 800 ¿ à la société OREE DU BOIS GAC NOUVELLE sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
LE GREFFIER. LE CONSEILLER POUR LE PRESIDENT EMPECHE