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26/01/2016 | FRANCE | N°14/24381

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre a, 26 janvier 2016, 14/24381


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

1re Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 26 JANVIER 2016

O.B

N° 2016/













Rôle N° 14/24381







[L] [T]





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MONSIEUR L'AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT





















Grosse délivrée

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à :Me LEVAIQUE

Me BREU LABESSE

















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Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 27 Novembre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 12/09527.





APPELANT



Monsieur [L] [T] élisant domicile au Cabinet de Maître [V], sis à [Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 3] (RUSSIE)



de nationalité Russe, demeurant [Adres...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

1re Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 26 JANVIER 2016

O.B

N° 2016/

Rôle N° 14/24381

[L] [T]

C/

MONSIEUR L'AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT

Grosse délivrée

le :

à :Me LEVAIQUE

Me BREU LABESSE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 27 Novembre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 12/09527.

APPELANT

Monsieur [L] [T] élisant domicile au Cabinet de Maître [V], sis à [Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 3] (RUSSIE)

de nationalité Russe, demeurant [Adresse 2] RUSSIE

représenté par Me Laurence LEVAIQUE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté par Me Luc-Philippe FEBBRARO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Julie GUICHARD, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant

INTIME

MONSIEUR L'AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT E DE L'ETAT, venant aux droits de l'AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR (décret n°2012-985 du 23/08/2012) représentant [Adresse 4].

représenté par Me Marie-laure BREU-LABESSE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté par Me Francois-Xavier GOMBERT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, avocat plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 08 Décembre 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, M.BRUE, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Georges TORREGROSA, Président

Monsieur Olivier BRUE, Conseiller

Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mademoiselle Patricia POGGI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Janvier 2016

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Janvier 2016,

Signé par Monsieur Olivier BRUE, Conseiller, en l'absence du Président empêché, et Mademoiselle Patricia POGGI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Vu l'assignation du 22 juin 2012, par laquelle Monsieur [L] [T] a fait citer l'Agent judiciaire du Trésor, devant le tribunal de grande instance de Marseille.

Vu le jugement rendu le 27 novembre 2014, par cette juridiction.

Vu la déclaration d'appel du 29 décembre 2014, par Monsieur [L] [T].

Vu les conclusions transmises le 20 mars 2015, par l'appelant et ses conclusions récapitulatives du 19 juin 2015.

Vu les conclusions transmises le 22 avril 2015, par l'Agent judiciaire du Trésor et ses conclusions récapitulatives du 24 juillet 2015 .

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 24 novembre 2015.

SUR CE

Attendu que par réquisitoire introductif du 18 juin 2002, le Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Marseille a ouvert une information pour des faits de blanchiment commis de manière habituelle ;

Attendu qu'en exécution de commissions rogatoires délivrées par le magistrat instructeur, ont été saisis, au moisd'avril et de mai 2003, une villa, ainsi que deux appartements, propriété de la SCI Arcada, dont les parts sont essentiellement détenues par les époux [T], situés à [Localité 1], des comptes bancaires ouverts au nom de cette société à la banque UEB et au nom personnel de Monsieur [L] [T], à l'agence BNP Paribas de Monaco, des documents de comptabilité, un appartement situé à [Localité 2], appartenant aux époux [T], un véhicule Lexus, appartenant à Monsieur [T], ainsi que plusieurs comptes ouverts par son épouse Madame [E] [R] à l'agence BNP Paribas Private Bank de Monaco ;

Attendu qu'à l'issue de son audition par le juge d'instruction le 7 janvier 2009, Monsieur [L] [T] s'est vu notifier le statut de témoin assisté ;

Qu'une ordonnance de non-lieu a été rendue à son égard le 24 juin 2011 ;

Attendu que ses comptes personnels et ceux de la SCI Arcada, ouverts à [Localité 2], ainsi que le véhicule Lexuslui ont été restitués par ordonnance du 1er juillet 2009 ;

Attendu que l'appelant expose que les autres biens ne lui ont toujours pas été rendus ;

Attendu que se fondant sur les dispositions des articles 5-3 et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme, et des paragraphes II et III de l'article préliminaire du code de procédure pénale, invoquant la responsabilité de l'État pour fonctionnement défectueux du service de la justice, la responsabilité des juges à raison de leurs fautes personnelles, ainsi que la prise à partie, Monsieur [L] [T] réclame la condamnation de l'Agent judiciaire du Trésor à lui payer la somme de 2'874'284 €, à titre de dommages et intérêts au titre de son préjudice

économique ;

Attendu que la responsabilité de l'Etat ne peut être engagée par application de l'article 141-1 du code de l'organisation judiciaire que par une faute lourde ou par un déni de justice ;

Attendu que constitue une faute lourde, toute déficience caractérisée par un fait, ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est

investi ;

Attendu que Monsieur [L] [T] affirme, sans le démontrer que les actes d'instruction étaient globalement espacés d'un délai d'un an, alors que l'ordonnance de non-lieu, seule pièce du dossier pénal versée à la procédure révèle au contraire que de nombreux actes ont été régulièrement réalisés en cours d'information ;

Que ceux-ci sont consignés dans la notice du cabinet d'instruction produite aux débats ;

Attendu que des commissions rogatoires, notamment internationales, ont été délivrées et que plusieurs expertises financières ont été diligentées, en 2005 et 2007, outre des expertises en matière d'informatique ;

Qu'il a été procédé à plusieurs interrogatoires ;

Attendu que le déni de justice, est établi en cas de refus de répondre aux requêtes ou la négligence à juger une affaire en l'état de l'être ;

Attendu que sur la requête en restitution déposée le 21 avril 2009 par Monsieur [L] [T], le juge d'instruction a communiqué, le 23 avril 2009 le dossier au ministère public qui a pris ses réquisitions le 24 avril 2009 et qu'il a statué par ordonnance du 1er juillet 2009, faisant droit à la demande pour une partie des biens saisis ;

Attendu que la requête aux fins de restitution et la mainlevée de saisie établie à l'intention du service exécution des peines du parquet de Marseille datée du 30 novembre 2011 porte un tampon d'arrivée du 27 juillet 2012;

Que sur cette demande, le parquet a pris des réquisitions adressées aux services de police judiciaire, ainsi qu'aux services administratifs du tribunal de grande instance de Marseille, pour que soit réalisée la mainlevée des saisies pratiquées sur la villa et les appartements d'[Localité 1], sur les documents de comptabilité des sociétés et sur les comptes bancaires de Madame [E] [R] à [Localité 2] ;

Attendu que les autres copies de requêtes aux fins de mainlevée de saisie ou de saisine directe qui auraient été adressées aux magistrats instructeurs ou, au président de la chambre d'instruction, produits devant la cour par l'appelant, ne comportent pas le tampon du greffe ou le récépissé de la poste attestant de leur réception ;

Qu'elles ne figurent pas sur la notice d'instruction ;

Attendu que l'ordonnance de non-lieu rendue le 24 juin 2011 a ordonné la restitution des objets saisis ;

Que l'absence de réponse à des requêtes, ne peut donc être valablement invoquée ;

Attendu que la notion de déni de justice englobe également tout manquement de l'État à son devoir de protection juridique de l'individu, notamment lorsqu'il n'est pas statué sur une accusation dans un délai raisonnable ;

Attendu qu'il peut être invoqué par tout usager du service public de la justice ;

Que cette qualité est conférée, non seulement aux parties à l'instance, mais aussi à toute personne directement concernée par la procédure à l'occasion de laquelle elle prétend avoir subi un dommage ;

Attendu que sous réserve de la preuve de la propriété des biens, dont la restitution a été réclamée, Monsieur [L] [T] peut revendiquer cette qualité dès lors qu'il a été directement concerné d'une quelconque manière par la procédure pénale à l'occasion de laquelle ont été pratiquées des saisies à son encontre au cours de l'année 2003 ;

Qu'il est donc recevable à agir en indemnisation de mesures à caractère coercitif ayant eu pour conséquence de priver la jouissance de ses biens ;

Attendu que la durée susceptible d'être objectivement longue ne constitue pas, à elle seule, la démonstration d'un caractère fautif et anormal du déroulement de l'instance ;

Attendu qu'elle s'apprécie au regard des circonstances propres à chaque dossier, en prenant en considération, en particulier, la nature de l'affaire, son degré de complexité et le comportement de la partie qui se plaint de la durée de la procédure, ainsi que les mesures prises par les autorités compétentes ;

Attendu qu'en l'espèce le dossier portait sur des faits de blanchiment habituel commis par des mis en cause de nationalité étrangère, domiciliés temporairement en France, ayant créé notamment sur le territoire national, aux États-Unis et en Grande-Bretagne, au moins 13 sociétés, dont au moins deux sociétés offshore ;

Que des comptes bancaires étaient ouverts aux Pays-Bas et à Curaçao ;

Que commissions rogatoires internationales ont été adressées aux autorités judiciaires de trois pays différents ;

Attendu que le juge d'instruction français n'a aucun pouvoir de contrôle sur la qualité, le nombre et la date des actes d'investigation réalisés sur commission rogatoire dans des États étrangers qui dépendent du bon vouloir de ces derniers ;

Attendu que le courrier adressé, le 31 juillet 2002, par l'attaché de sécurité intérieure adjoint affecté au service de coopération technique de police internationale de l'ambassade de France à Moscou, au magistrat instructeur français, révèle les difficultés rencontrées pour poursuivre l'enquête en Russie ;

Attendu que L'État ne peut être tenu pour responsable des éventuelles carences de l'expert judiciaire qui a la qualité de collaborateur du service public ;

Attendu que l'opacité de la complexité des montages financiers a justifié des ordonnances de prorogation du délai de dépôt du rapport d'expertise initiale, ainsi que des expertises complémentaires ;

Attendu qu'il appartenait à l'appelant de réclamer la restitution des biens saisis à tout moment, comme le prévoit l'article 99 du code de procédure pénale ;

Attendu que l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi ne peut être appréciée que dans la mesure où l'exercice des voies de recours n'a pas permis de réparer le mauvais fonctionnement allégué ;

Que Monsieur [T] n'a pas relevé appel contre l'ordonnance de refus de restitution rendue le 11 mars 2009 ;

Attendu qu'il n'a demandé à être entendu qu'à la fin de l'année 2008, alors que les textes du code de procédure pénale lui permettaient de réclamer sa confrontation avec les personnes le mettant en cause à tout moment ;

Attendu qu'il apparaît, au vu de l'ensemble de ces éléments que la durée de la procédure ne résulte pas l'inertie des juges, comme le soutient Monsieur [T], mais des diverses ramifications de l'affaire, avec la participation de nombreux intervenants, exigeant des vérifications et recoupements multiples, dans plusieurs pays étrangers ;

Que l'existence d'une faute lourde de l'État n'est donc pas établie en l'espèce ;

Qu'aucun déni de justice n'est caractérisé dans le cadre de la l'instruction pénale litigieuse ;

Attendu que Monsieur [L] [T] expose que son préjudice financier est lié à

l'impossibilité, d'avoir pu, réaliser des investissements qui devaient lui rapporter des bénéfices substantiels, percevoir des intérêts sur ses capitaux, louer ses biens immobiliers, jouir de certains d'entre eux ainsi que de son véhicule Lexus ;

Qu'il insiste sur l'importance des documents comptables saisis pour son activité professionnelle et sur l'atteinte portée à sa réputation ;

Attendu qu'il produit à l'appui de sa demande en dommages et intérêts un accord de coopération souscrit entre la société New sports Limited et Monsieur [H] [O], signé par Monsieur [C] [I] ;

Attendu que les accords de coopération conclus entre la SCI [Adresse 3] et la SARL Combes Elysées et Monsieur [L] [T] , datés du 31 janvier 2001, ainsi que les budgets provisionnels versés aux débats, ne permettent pas de démontrer que l'opération d'investissement dans la construction d'un bowling restaurant pouvait être réalisé et procurer des bénéfices ;

Qu'il en est de même pour le bilan synthétique de la société Riviera. Properties établi sur papier

libre ;

Attendu que l'appelant ne justifie pas avoir donné en location les biens immobiliers avant leur saisie n'y avoir eu l'intention de le faire ;

Que l'adéquation entre les annonces de location produites avec la villa et les appartements situés à [Localité 1] et [Localité 2] n'est pas démontrée ;

Attendu que les pièces fournies sont insuffisantes pour justifier et quantifier l'existence d'un préjudice économique certain et direct ;

Attendu que la demande en dommages et intérêts formée par Monsieur [L] [T] est, en conséquence, rejetée ;

Attendu que le jugement est confirmé ;

Attendu qu'il est équitable d'allouer à l'Agent judiciaire du Trésor la somme de 2000 €, en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que Monsieur [L] [T] qui succombe est condamné aux dépens ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré,

Condamne Monsieur [L] [T] à payer à l'Agent judiciaire du Trésor, la somme de 2000 €, en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne Monsieur [L] [T] aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER P/ LE PRESIDENT EMPÊCHE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre a
Numéro d'arrêt : 14/24381
Date de la décision : 26/01/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1A, arrêt n°14/24381 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-01-26;14.24381 ?
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