COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
17e Chambre B
ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION
ARRÊT AU FOND
DU 28 JANVIER 2016
N° 2016/114
JPM
Rôle N° 15/01852
[N] [P]
C/
CPCAM DES BOUCHES DU RHONE
ARS Provence - Alpes - Côte d'Azur (anciennement DRASS)
LE PREFET DE REGION
Grosse délivrée
le :
à :
Madame [N] [P]
Me Jean-Claude PERIE, avocat au barreau de MARSEILLE
ARS Provence - Alpes - Côte d'Azur
Monsieur LE PREFET DE REGION
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Arrêt en date du 28 janvier 2016 prononcé sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation en date du 08 octobre 2014, qui a cassé l'arrêt rendu le 29 mars 2013 par la Cour d'appel d'Aix -en -Provence (9èC)
APPELANTE
Madame [N] [P], demeurant [Adresse 1]
comparante en personne
INTIMES
CPCAM DES BOUCHES DU RHONE, demeurant [Adresse 2]
Représentée par Me Jean-Claude PERIE, avocat au barreau de MARSEILLE
ARS Provence - Alpes - Côte d'Azur (anciennement DRASS), demeurant [Adresse 3]
non comparant
Monsieur LE PREFET DE REGION, demeurant [Adresse 4]
non comparant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 03 Novembre 2015 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur Jean-Pierre MASIA, Président de Chambre
Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller
Madame Sophie PISTRE, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Caroline LOGIEST.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 janvier 2016.
ARRÊT
Réputé contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 janvier 2016.
Signé par Monsieur Jean-Pierre MASIA, Président de Chambre et Madame Caroline LOGIEST, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
Le 24 janvier 1972, Madame [N] [P] est entrée au service de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Bouches-du Rhône en qualité d'employée classement-tri-écritures. Elle a été affectée au centre d'[Localité 1] puis de [Localité 3].
A compter de décembre 1979, elle a été élue conseiller prud'hommes et a exercé ce mandat jusqu'en 2008.
Le 1er juillet 2007, elle a fait valoir ses droits à la retraite alors qu'elle avait le niveau 3.
Considérant qu'elle avait été victime, pendant plusieurs années, de harcèlement moral et de discrimination syndicale et réclamant le paiement de diverses sommes, elle a saisi, le 11 juin 2008, le conseil de prud'hommes de Salon. L'instance a été transférée au conseil de prud'hommes d'Arles.
Par jugement de départage du 26 juillet 2011, le conseil de prud'hommes d'Arles l'a déboutée de toutes ses demandes et l'a condamnée aux dépens.
Par arrêt du 29 mars 2013, statuant sur l'appel interjeté par Madame [P], la cour d'appel d'Aix-en-Provence (9ème chambre C) a confirmé le jugement et a condamné Madame [P] à payer la somme de 500€ au titre de l'article 700 du code procédure civile.
Sur le pourvoi de Madame [P], la cour de cassation, par arrêt du 8 octobre 2014, a cassé et annulé, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 mars 2013. La cause et les parties ont été renvoyées devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.
C'est en cet état de la procédure que l'affaire a été rappelée et plaidée.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Madame [N] [P] demande à la cour de constater la dégradation de ses conditions de travail de 1985 à 2007, de constater que le motif de cette dégradation était lié à ses absences syndicales et prud'homales, de constater qu'elle n'avait pas pu bénéficier d'un déroulement de carrière comparable à celui de ses collègues et que le motif de cette différence de traitement était syndical, de dire qu'elle est bien fondée en son action au titre de la discrimination syndicale et du harcèlement moral, de constater la différence de traitement entre l'évolution de carrière de Madame [P] et celle des salariés détachés chargé de mission syndicales gérés par le département des relations sociales, d'ordonner, pour les quatre dernières années, son reclassement au niveau 5B +40% + 7 points, du 1er juillet 2003 au 28 février 2005, par application de la classification du 1er janvier 1993 et au niveau 5B avec 50 points d'expérience et 56 points pour compétence, du 1er mars 2005 au 30 juin 2007, par transposition à l'application de la classification de novembre 2004, de dire fondée sa demande de rappel de salaire sur les quatre dernières années, de dire que ses demandes indemnitaires en réparation du préjudice subi relèvent d'une prescription trentenaire, de dire qu'elle est bien fondée dans lesdites demandes indemnitaires, sauf, pour la cour, à désigner un expert avec mission de recueillir tous les éléments nécessaires à la méthodologie dite triangulaire par comparaison avec les 'responsables de gestion' du département des relations sociales , en conséquence, de condamner la Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Bouches-du Rhône à lui payer les sommes de:
-43580,78€ au titre du rappel de salaire sur les quatre dernières années;
-101362,11€ à titre de dommages-intérêts représentant la différence entre le salaire qui aurait dû être le sien comparativement au déroulement de carrière maoyen des salariés détachés affectés au département des relations sociales et celui qu'elle a perçu entre janvier 1984 et le 30 juin 2003;
-105600€ à titre de dommages-intérêts pour manque à percevoir au titre de la retraite;
-60000€ à titre de dommages-intérêts pour préjudice subi en violation du statut protecteur et harcèlement moral;
-3000€ au titre de l'article 700 du code procédure civile.
Elle demande en outre, le remise des bulletins de salaires rectifiés pour la période du 1er juillet 2003 au 30 juin 2007, d'ordonner la régularisation de sa situation à l'égard de la caisse de retraite complémentaire des cadres, de fixer les intérêts de droit à compter de la demande en justice et d'ordonner leur capitalisation.
La Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Bouches-du Rhône demande à la cour de déclarer Madame [N] [P] mal fondée en son appel, de dire, au visa de l'article L3245-1 du code du travail, que ses demandes de rappel de salaires antérieures au 12 juin 2003 sont prescrites, de dire que les demandes de dommages-intérêts visant à obtenir le paiement de salaires prescrits ne sauraient constituer un préjudice indemnisable, de confirmer, en tout état de cause, le jugement attaqué et de condamner Madame [P] à lui payer la somme de 2000€ au titre de l'article 700 du code procédure civile.
Monsieur le Préfet de Région et Monsieur le Directeur l'ARS - PACA ne se sont pas fait représenter.
Pour plus amples développements, il est renvoyé aux conclusions déposées et réitérées oralement à l'audience par les parties.
SUR CE
I - Sur la prescription
La saisine initiale du conseil de prud'hommes est du 12 juin 2008.
Il s'en suit que les demandes de Madame [P] aux fins d'obtenir le paiement de rappels de salaires sur la période comprise entre le 12 juin 2003 et le 12 juin 2008 ne sont pas affectées par la prescription quinquennale alors applicable.
S'agissant des demandes indemnitaires, Madame [P] bénéficiait au 12 juin 2008 de la prescription trentenaire. Si la loi du 17 juin 2008, entrée en vigueur le 19 juin 2008, a réduit la durée de cette prescription à 5 ans, elle a néanmoins exclu que les nouvelles règles de prescription puissent s'appliquer aux instances introduites avant son entrée en vigueur. C'est donc à bon droit que Madame [P] soutient que ses demandes indemnitaires, présentées sous l'empire de l'ancienne loi, ne sont pas prescrites .
Il sera ajouté que c'est encore à bon droit qu'elle soutient que le préjudice subi du fait d'une discrimination doit être indemnisé sur l'ensemble de la période couverte par cette discrimination.
II - Sur le fond
A) Sur la discrimination syndicale et le harcèlement moral
Pour obtenir la condamnation la Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Bouches-du Rhône à lui payer diverses sommes au titre de la discrimination syndicale et du harcèlement moral, Madame [P] soutient que:
- jusqu'en 1983, son déroulement de carrière avait été satisfaisant puisque en 1980, son salaire avait atteint le plafond retenu par la Cram pour le calcul de sa retraite; si elle avait été élue, en décembre 1979, comme conseiller prud'hommes, son mandat s'était néanmoins progressivement mis en place de sorte que ses absences pour exercer son mandat n'étaient devenues plus fréquentes qu' à compter de 1982;
- dès 1985, sa notation avait connu une véritable 'dégringolade' et son salaire avait commencé à stagner; ainsi, pendant 25 ans d'activité, elle n'avait bénéficié d'aucun avancement autre que conventionnel; au cours des entretiens annuels d'évaluation, ses supérieurs n'avaient jamais mis en cause la qualité de son travail mais avaient fait référence à ses nombreuses absences pour motif syndical ou prud'homal; elle avait été, pour cette raison, systématiquement écartée par les responsables du centre, qui recevaient chaque année une enveloppe de points à distribuer aux agents les plus méritants, du bénéfice de ces points pour l'avancement; en 2007, elle avait eu connaissance du fichier 'département relations sociales' contenant les noms des salariés de la Cpam chargés de mandats syndicaux , en l'espèce les délégués syndicaux et les membres du comité d'entreprise, ce qui lui avait alors permis de constater que, contrairement à elle, l'engagement syndical de cette catégorie de personnels n'avait, en aucune façon, nui à leur déroulement de carrière;
-les opportunités d'avancement avaient été chaque fois bloquées par sa hiérarchie; ainsi, alors qu'elle était affectée, jusqu'en 1990, sur le poste de liquidateur, ATHQ, coefficient 144, elle avait été affectée, de mars 1990 à février 1994, sur le poste de délégataire-archiviste dans des conditions d'isolement par rapport aux autres salariés, de surcroît, sans aucune assistance; en outre, il lui avait été refusé le bénéfice du coefficient 157, pourtant attribué à son prédécesseur, Monsieur [F] et, au demeurant, reconnu par l'article 35 de la convention collective dès lors que l'agent avait six mois de présence aux archives; en réponse à sa réclamation, elle avait été changée de poste et avait été replacée sur son poste antérieur de liquidateur ainsi que sur le poste de l'accueil quand l'agent en charge de cet accueil était absent; il résultait de cette méconnaissance du principe 'à travail égal, salaire égal'qu'elle aurait dû avoir le coefficient 157 dès 1987; elle était partie à la retraite en 2007 avec le coefficient 144 du niveau 3;
- de plus fort, quand le niveau IV avait été attaché au poste de l'accueil, elle n'avait pas bénéficié de ce niveau; la comparaison entre ses divers entretiens annuels permettaient de constater que, dans son évaluation de 1998, Madame [P] était reconnue comme étant un agent polyvalent chargé, entre autres, d'accueils physiques et téléphonique et en 2006, elle était décrite comme un agent 'ayant perdu sa polyvalence du fait de son absence';
-ses conditions de travail s'étaient également dégradées; elle avait toujours été volontaire pour toutes les formations; elle était reconnue, en 1985, agent polyvalent sur les postes maladie et accident du travail, apte à effectuer la liquidation et l'ordonnancement des prestations de ces deux postes; pourtant, en 1994, la mention technicien accident du travail avait disparu de sa fiche de notation de sorte que sa polyvalence n'était plus reconnue; cela équivalait à un déclassement;
-elle avait toujours été tenue à l'écart de l'information donnée aux autres salariés sur l'ouverture de postes en promotion, comme pour celui de délégué conseil ou celui de secrétaire au centre de [Localité 3]; de même, elle n'avait jamais plus été informée des différents stages de qualification comme elle l'avait signalé dans son évaluation de 1999;
-deux agents de [Localité 3] (Mesdames Amy et [X]) avaient pris leur retraite à peu près en même temps qu'elle avec le même âge et la même qualification que Madame [P], lors de leur embauche, mais avec pour ces deux agents un niveau d'études inférieur; la première avait terminé sa carrière sur le poste contrôleur de décompte au niveau 4 (336 points), la seconde avait terminé sa carrière sur le poste de délégué-conseil au niveau 4 (278 points) alors que Madame [P] avait terminé la sienne sur le poste de technicienne-prestation au niveau 3 (278 points); ses deux collègues, qui étaient au même niveau qu'elle entre 1980 et 1983,l'avaient ensuite distancée car ses absences syndicales et prud'homales avaient formé barrage au bon déroulement de sa carrière; pourtant, elle avait toujours manifesté une volonté de mobilité géographique ( une demande de poste à [Localité 2]) et/ou fonctionnelle (une demande de poste pour le service juridique de la caisse) avec si nécessaire une décharge de ses missions syndicales;
- ses qualités professionnelles n'avaient jamais été remises en cause par sa hiérarchie.
A l'appui de ses moyens, elle produit les pièces suivantes:
-une lettre de Madame [P], adressée le 8 décembre 2006 à son employeur, dénonçant le fait que malgré la promesse de réviser sa situation , elle était exclue 'une fois de plus' de la distribution des mesures promotionnelles notifiées le 6 décembre 2006;
- une lettre de Madame [P], adressée le 7 janvier 2007 à son employeur, faisant suite à un rendez-vous accordé au sujet des difficultés rencontrées par elle sur son déroulement de carrière et sollicitant la communication de son entier dossier;
-une lettre de Madame [P], adressée le 14 décembre 2008 à son employeur, dans lequel elle dénonce le 'dégraissage' du contenu de son dossier effectué entre début décembre 2006 (jour où elle avait pu le consulter en présence de l'adjointe au centre) et le début du mois de janvier, l'épaisseur de son dossier passant entre ces deux dates de 5 centimètres à un centimètres, selon elle;
-la réponse faite par la Caisse, le 23 janvier 2009, prenant acte de la demande du 14 décembre 2008;
-les documents afférents à ses notations et entretiens individuels portant sur la période 1977 à 2005 sur lesquels figurent des appréciations jugeant la qualité du travail fourni jusqu'en 1985 comme étant de bon à excellent puis entre 1986 à 1990 de moyen à assez bon, de 1990 à 1993 de assez bon à bon , voire très bon et de 1993 à 1995 de très bon à excellent. A la lecture des documents produits pour la période postérieure à 1995, il apparaît que la grille d'évaluation professionnelle des agents et le contenu de l'entretien individuel avaient changé puisque les anciens critères d'évaluation pouvant aller de insuffisant à excellent ne figuraient plus sur ces documents. Toutefois, après 1995 et pour les années suivantes, les rapports d' entretien lui reconnaissaient de bonnes qualités d'exécution de son travail et, d'une manière générale, son aptitude à traiter les dossiers et à donner les bonnes informations aux assurés. Il apparaît aussi et surtout sur les rapports susvisés d'entretien individuel en vue de son évaluation professionnelle, qu'il y était fait état, soit de manière directe soit de manière indirecte, du mandat syndical et des fonctions prud'homales de Madame [P]. Il est ainsi mentionné :'importantes activités syndicales et prud'homales' avec un impact jugé par le notateur comme ayant un effet négatif sur l'assiduité ou sur l'activité de l'agent (cf entretiens de 1994 ,1995, 2003, 2006) ou encore 'présence épisodique et absences imprévisibles' ( cf entretien de 1991). Il apparaît en outre sur ces mêmes documents que si, en 1985 et 1999, il lui était reconnu l'acquisition d'un bon niveau de polyvalence, en revanche, il lui était reproché, en 2003, la perte de cette polyvalence du fait de son absence après que le notateur ait fait référence à une activité professionnelle réduite du fait de ses fonctions syndicales et prud'homales. Enfin, il est mentionné sur le rapport de l'entretien individuel d'évaluation, effectué en 1999, que Madame [P] avait indiqué regretter 'de ne pas être informée de l'ensemble des stages que peut suivre le personnel' et lors du dernier entretien individuel d'évaluation, effectué en 2006, 'je constate que mes activités syndicales et prud'homales ont été un obstacle majeur à mon déroulement de carrière tant sur le plan de l'avancement que de la carrière';
-la délégation de signature donnée en 1985 par le directeur au profit de Madame [P] pour la liquidation et l'ordonnancement des prestations maladie (As) et incapacité temporaire (AT) induisant à tout le moins la reconnaissance d'une polyvalence sur ces deux catégories et la délégation de signature du directeur en 2001 au profit de Madame [P] mais ne visant plus que les prestations maladie;
-une réclamation faite par Madame [P], le 6 décembre 1992, concernant son absence de promotion malgré son ancienneté de 20 ans;
-la réponse faite le 2 février 1993 par son supérieur lui indiquant que sa note avait évolué en 1992 de 0,44 points ce qui marquait 'une reconnaissance de ses aptitudes professionnelles'
-sa délégation sur le poste d'archiviste de 1990 à 1994 et l'extrait de la convention collective du personnel des organismes de sécurité sociale prévoyant en son article 35 le droit de l'agent affecté plus de six mois consécutifs sur un emploi supérieur en tant que remplaçant à une promotion définitive;
-la nomenclature inter-branche des emplois UNCANSS visant la polyvalence comme un des critères pour le niveau d'emploi occupé par Madame [P];
-le relevé de la Cram indiquant, selon l'appelante, qu'elle avait atteint en 1980 le plafond Cram;
-un document récapitulant la situation des agents du centre de [Localité 3] où était affectée Madame [P] et indiquant que des agents entrés après elle dans l'entreprise l'avait dépassée au niveau du coefficient;
-des documents sous forme de tableaux et indices (pièces 46 à 51) visant à reconstituer le déroulement de carrière de Madame [P] montrant qu'elle était rapidement passée du coefficient 105 ( en 1972) au coefficient 144 (en 1982) et qu'après cette date, le seul avancement dont elle avait bénéficié avait résulté seulement de l'application de la convention collective et de sa nouvelle classification en 2004, Madame [P] étant partie à la retraite en 2007 avec le coefficient 205, ce dernier coefficient équivalant en réalité au coefficient 144 transposé dans la nouvelle classification de 2004-2005;
-le listing des agents affectés au département relation sociale, dont elle aurait eu connaissance en 2007 dans le cadre de ses activités syndicales . La caisse intimée demande à la cour de rejeter cette pièce (n° 54). Or, cette pièce est strictement nécessaire à l'exercice du droit fondamental de l'appelante de se défendre en justice et il n'est pas démontré que cette pièce aurait été obtenue par elle frauduleusement ou en dehors de ses fonctions. Il n' ya donc pas lieu à l'écarter. Il est également produit un panel de référence établi par ses soins à partir de ce listing. Sur ces documents figurent des noms de salariés, les âges, les coefficients, les fonctions exercées, ces salariés étant présentés comme étant investis de mandats syndicaux et ayant bénéficié, au vu de tableaux reconstituant le déroulement de carrière d'un salarié détaché au 'département relation sociale', et montrant un déroulement normal de carrière;
- des bulletins de salaire de 1978 (coefficient 135), de 1980 ( coefficient 137), de 1988 (coefficient 144), de 1993 (coefficient 185), de 2003 à 2007 (coefficient 205) pour les fonctions de technicien de prestations maladie . Le bulletin de salaire de décembre 2006 de Madame [X] avec le coefficient 230 pour les fonctions d'assistante technique conseil et celui de juin 2007de Madame [B] avec le coefficient 230 pour les fonctions d'assistante de vérification;
-le fichier du personnel du centre de [Localité 3] montrant que des salariés embauchés après Madame [P] pour un niveau professionnel identique ou comparable et embauchés après elle avaient atteint un niveau de classement supérieur au sien.
Ces éléments, pris dans leur ensemble, apportés par Madame [P], concernant le ralentissement de sa carrière et l'absence d'avancement aux choix après 1980, l' absence de titularisation sur le poste supérieur après six mois de délégation, la référence réitérée, lors de ses évaluations professionnelles, à ses fonctions et ses absences syndicales et prud'homales pour apprécier sa polyvalence et sa disponibilité, la transmission incomplète et expurgée de son dossier professionnel, permettent de présumer, d'une part, l'existence d'un harcèlement moral et, d'autre part, celle d'une discrimination directe ou indirecte en raison de ses activités syndicales.
Il incombe dès lors à l'employeur, conformément aux articles L1134- 1 et L1154-1 du code du travail, de prouver que sa décision était justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement et à toute discrimination.
Pour s'opposer aux demandes dirigées contre elle, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie réplique que:
-s'agissant de la demande salariale, Madame [P], sous couvert de sa demande de condamnation à lui payer un rappel de salaire pour les fonctions d'attaché juridique de niveau 5B, coefficient 275, sollicite en réalité son reclassement dans une fonction qu'elle n'avait jamais exercée, qu'elle n'avait jamais revendiquée et pour laquelle elle n' avait jamais postulée alors même que Madame [P] se fonde sur des connaissances et un savoir-faire supposés qu'elle aurait acquis dans le cadre de ses activités syndicales et prud'homales;
- l'examen attentif des différentes définitions conventionnelles des niveaux 4,5A et 5B amène à constater que Madame [P] ne disposait pas des compétences nécessaires pour occuper de tels postes;
-s'agissant des demandes indemnitaires, la classification conventionnelle de 1973 était fondée sur un système par notation avec un taux de 4% maximum d'avancement par an et de 5% supplémentaires aux plus méritants; ainsi, Madame [P], sous l'empire de cette classification, avait atteint le niveau 3 coefficient 144 avec le taux maximum d'avancement;
- par suite, une nouvelle classification du 1er janvier 1993 avait été appliquée avec des nouveaux modes d'avancement dont les processus devaient être déclenchés et validés au plus tard tous les cinq ans; toutefois, alors que les acquis de Madame [P] allaient être validés dans le cadre de ce cycle de 5 ans, ils avaient dus être gelés par suite de l'abrogation de la classification et de la création d'un nouveau système conventionnel entré en vigueur le 1er février 2005; ce nouvel accord prévoyait la prise en compte chaque année de points pour l'avancement au titre de l'expérience professionnelle et du développement professionnel ; en fonction des concordances entre les deux grilles, Madame [P], qui était technicienne de prestations maladie de niveau 3, avait été classée dans la nouvelle grille au coefficient 205 avec l'octroi de 50 points d'expérience et 23 points de compétences;
- 78% du personnel de [Localité 3] était au niveau 3 et 30% des agents entrés comme elle en 1972 étaient encore à ce niveau; la nouvelle grille ne prévoyait aucune évolution de carrière liée à la notion d'ancienneté ou à caractère automatique;
- l'absence de volonté d'évolution de carrière manifestée par le salarié investi d'un mandat privait celui-ci de la possibilité d'invoquer une quelconque discrimination, l'employeur n'étant pas tenu de d'assurer une progression de carrière par des changements d'emploi ou de qualifications;
-Madame [P] avait bénéficié d'un parcours professionnel normal et progressif; les exemples cités par celle-ci n'étaient pas probants dès lors que la situation de ces salariés était différente de la sienne; certains étaient d'un niveau inférieur au sien et la comparaison opérée faisait à tort abstraction de l'accord du 1er février 1980 concernant l'évolution de carrière des permanents syndicaux;
- les dispositions de l'article 35 de la convention collective ne trouvaient pas à s'appliquer au cas de la salariée s'agissant, en 1973 et 1974, de remplacements d'un agent en congé de maternité;
- les rapports d'évaluation avaient mis en évidence la compétence limitée de Madame [P] ce qui avait conduit son supérieur à ne pas la proposer pour une promotion.
A l'appui de sa défense, elle produit les pièces suivantes:
-les documents extraits du référentiel d'emplois et de compétences pour le niveau 5A et le niveau 3 décrivant respectivement l'identification de l'emploi, sa finalité, ses activités, ses conditions d'exercice ainsi que les critères repères des emplois visant à démontrer que Madame [P] n'avait pas les compétences requises pour répondre au profil d'un poste de niveau 4 ou5;
-le protocole d'accord du 1er février 1980 relatif à l'exercice de l'activité représentative et syndicale à la Caisse Primaire Centrale d'Assurance Maladie des Bouches-du- Rhône. Il résulte de cet accord que les permanents syndicaux inscrits sur une liste publiée par la direction générale 'auront les mêmes facilités d'action et de circulation dans les centres et services que les délégués syndicaux' qu'ils resteront soumis aux dispositions de la convention collective applicable à tout agent de la sécurité sociale et que, s'agissant de leur déroulement de carrière relatif aux avantages non automatiques , 'il sera examiné dans les conditions prévue par la direction . Néanmoins, avant toute prise de décision, une concertation s'instaurera entre le secrétaire du syndicat ou de la section syndicale de l'entreprise, à partir d'un profil de carrière médian déterminé pour la catégorie d'agents concernés dont relève le permanent en cause.'
-les protocoles d'accord du 14 mai 1992 relatif à la classification des emplois des organismes de sécurité sociale et leurs établissements et du 30 novembre 2004 relatif au dispositif de rémunération et à la classification des emplois;
-une analyse dite 'Analyse des situations comparées - Population recrutée entre 1967 et 1975" dont les conclusions sont les suivantes ' lors de son passage à la retraite, Madame [P] faisait partie de la catégorie 'employés' comme 55% des agents recrutés entre 1964 et 1975, 70% des agents entrés comme elle sans aucun diplôme, 77% du personnel entrés entre 1967 et 1975 n'ayant jamais souhaité changer d'unité de travail, les agents n'ayant jamais mis en ouvre de savoirs particuliers';
-une note du 30 janvier 1973 mettant en avant un rendement insuffisant et une mauvaise qualité du travail de Madame [P] conduisant son supérieur à demander un retrait de sa délégation et du bénéfice de l'article 35 de la convention collective;
-une note de service du 11 juin 1974 visant l'article 35 susvisé et déléguant Madame [P] sur un emploi supérieur en remplacement d'un congé de maternité;
- les appréciations personnelles émises en 1986 et 1987 par son supérieur faisant passer sa note de 13,40 à 13,46 et soulignant, en 1987, la nécessité d'un effort pour un atteindre un niveau de production et de qualité de travail plus acceptables.
-un document annexé à l'évaluation de 1987 relevant que ' Madame [P] a une des plus faibles productions des liquidateurs du centre'
- une note administrative interne du 17 juin 1986 faisant connaître au directeur du centre de [Localité 3] qu'à la suite d'un contrôle effectué sur la qualité du travail dans le service des liquidateurs, il avait été constaté un niveau jugé non satisfaisant, vu le nombre élevé d'erreurs et d'anomalies. Cette note indique notamment ' individuellement Mesdames [P] (et deux autres salariées) pénalisent assez lourdement votre unité de travail en raison de la médiocrité des résultats enregistrés.'
-les appréciations personnelles émises en 2003 par son supérieur et relevant que Madame [P] n'avait émis aucun acte de candidature sur un autre poste.
Il convient de constater, tout d'abord, que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie n'a pas versé aux débats l'intégralité du dossier professionnel de Madame [P] puisque la Caisse ne produit pas les évaluations professionnelles qu'elle est réputée pourtant détenir pour les années 1972 à 1974, 1979 à 1981, 1984, 2000 à 2002, 2004 et 2005. La cour constate d'ailleurs que l'essentiel des pièces de son dossier professionnel a été produit par Madame [P]. Force est de constater que la Caisse n'a pas totalement répondu aux accusations portées en 2007 et 2008 par Madame [P] sur le 'dégraissage' de son dossier professionnel.
Il résulte, ensuite, des rapports d'évaluation produits que si, comme le soutient la Caisse, Madame [P] avait fait l'objet d' évaluations mettant en évidence la mauvaise qualité de son travail, il n'en reste pas moins que de telles évaluations concernaient surtout les premières années de sa carrière, c'est à dire bien avant la période litigieuse de 1982 à 2007 et que, malgré de telles appréciations, son début de carrière avait néanmoins connu, de 1972 à 1980, un déroulement favorable, voire rapide. Or, il est avéré que pour la suite de sa carrière et pendant près de 30 ans, c'est à dire pour la période allant de 1980, première année d'exercice de son mandat syndical et prud'homal, jusqu'à 2007, année de son départ à la retraite, et alors que ses évaluations, notamment après 1995, la créditait de bonnes aptitudes et de bonnes qualités d'exécution de son travail, elle n'avait connu paradoxalement aucun autre avancement que celui résultant du mécanisme conventionnel ou de la nouvelle classification de 2004-2005. L'explication donnée sur la modification successive des critères conventionnels pris en compte pour déterminer un rang d'avancement ne suffit pas à expliquer ce ralentissement voire ce gel du déroulement de sa carrière pendant une si longue période alors même, en tout état de cause, que les nouveaux accords sur les conditions d'avancement ne privaient pas l'employeur de la faculté d'accorder un avancement plus rapide à un agent jugé plus méritant. L'explication supplémentaire donnée par la Caisse sur l'absence de mobilité de Madame [P] n'est pas davantage probante dans la mesure où, d'une part, il n'a été produit par la Caisse aucun élément matériel de nature à combattre les doléances manifestées par Madame [P] quand elle avait indiqué dans son évaluation de 1996 ' les réponses sur les dates de formation restent évasives alors que des agents bénéficient actuellement de cette formation' et quand elle avait à nouveau indiqué dans son évaluation de 1999 regretter 'de ne pas être informée de l'ensemble des stages que peut suivre le personnel'. D'autre part, l'évaluation professionnelle de 2003, dont la Caisse croit devoir tirer avantage en indiquant que la salariée n'avait demandé aucun poste, ainsi que celle de 2006 mentionnaient très clairement que Madame [P], qui était technicienne de prestations maladie à [Localité 3], souhaitait une mobilité aussi bien fonctionnelle, par exemple vers la sous-direction juridique, que géographique, c'est à dire à sur un poste à [Localité 2] ou dans le département.
Par ailleurs, il n'est pas davantage produit de justification objective de la prise en compte directe ou indirecte, dans plusieurs évaluations professionnelles, celles de 1991, 1994 ,1995, 2003 et 2006, des fonctions syndicales et prud'homales de Madame [P] alors que, sauf application d'un accord collectif visant à en assurer la neutralité ou à le valoriser, l'exercice d'activités syndicales ne peut être pris en considération dans l'évaluation professionnelle d'un salarié. La circonstance tirée de ce que Madame [P] avait elle-même mentionné ses fonctions est inopérante. D'ailleurs, cette référence n'a été faite qu'une seule fois par Madame [P], lors de son évaluation de 1995. De telles références, faites de manière réitérée par l'employeur au cours des autres années, n'étaient pas sans portée dès lors qu'en l'espèce, les rapports d'évaluation, notamment ceux de 1991,1994, 2003 et 2006, retenaient expressément un lien direct entre les fonctions syndicales et prud'homales et la qualité du travail fourni par Madame [P]. A cet égard, la Caisse, qui entend se prévaloir de ce qu'en 1986-1987, 'Madame [P] a une des plus faibles productions des liquidateurs du centre', ne produit pour autant aucun élément permettant d'exclure que cette appréciation de la Caisse sur le défaut de productivité de sa salariée n'était pas en réalité motivée, ce qui était illicite, par les absences pour raison syndicale et prud'homale de Madame [P]. De même, en l'état des pièces produites , il n'est pas justifié des motifs objectifs pour lesquels la Caisse lui avait retiré, en 2003, le critère de la polyvalence, ce qui avait nécessairement eu pour conséquence de réduire plus encore ses chances à une promotion , le retrait de ce critère s'expliquant en réalité , comme mentionné dans sa notation de 2006, par la prise en compte illicite par l'employeur de l'exercice d'un mandat syndical et prud'homal, considéré par la Caisse comme générateur des absences reprochées.
Il a encore été établi par Madame [P] que pendant 4 ans, de 1990 à 1994, elle avait été affectée en remplacement du titulaire du poste, Monsieur [F], sur l'emploi d'archiviste tout en conservant son coefficient 144 de technicienne de prestations maladie alors qu'il est avéré que Monsieur [F] avait le coefficient 157. Or, aucune des pièces produites par la Caisse ne justifie des motifs pour lesquels la Caisse avait refusé à Madame [P] le bénéfice de l'article 35 de la convention collective reconnaissant le droit de l'agent, affecté plus de six mois consécutifs sur un emploi supérieur en tant que remplaçant, à une promotion définitive. Si cet article 35 prévoit aussi des exceptions à cette règle, la Caisse ne fournit pour autant aucune pièce se rapportant à de telles exceptions, ses seules explications et pièces concernant d'autres délégations que celle ci-dessus.
Enfin, l'analyse dite des 'situations comparées' produite par la Caisse ne constitue aucune réponse objective aux éléments ci-dessus laissant présumer une discrimination syndicale. En effet, l'absence de discrimination ne saurait se déduire, comme soutenu par la Caisse, de ce que ' lors de son passage à la retraite, Madame [P] faisait partie de la catégorie 'employés' comme: 55% des agents recrutés entre 1964 et 1975, 70% des agents entrés comme elle sans aucun diplôme, 77% du personnel entrés entre 1967 et 1975 n'ayant jamais souhaité changer d'unité de travail, les agents n'ayant jamais mis en ouvre de savoirs particuliers'. Une telle approche statistique et globale ne répond pas à l'exigence de justifier du cas particulier de Madame [P] comparé à d'autres cas particuliers. Au surplus, la simple lecture des chiffres énoncés par cette étude démontrent, en tout état de cause, qu'au jour du départ à la retraite de Madame [P] ,45 % au moins des agents recrutés entre 1964 et 1975 avaient bénéficié d'une promotion. De même, les tableaux annexés à cette étude confirment bien que des salariés (par exemple, Mesdames [O], [Q], [E] ou encore Monsieur [L]), entrés en même temps que Madame [P] ou à une époque contemporaine, avaient pu accéder, contrairement à elle, au niveau supérieur. Les données fournies par ces tableaux se bornent à reprendre les éléments de reconstitution de la carrière de ces autres salariés (date d'entrée, qualification initiale et successive, date des promotions ) sans pour autant produire d'éléments comparatifs spécifiques plus précis. Certes, ces tableaux mentionnent l'existence chez ces autres salariés d'une mobilité géographique et le suivi d'une formation mais le critère de la mobilité était également détenu par Madame [P] laquelle n'avait en outre, comme constaté plus haut, jamais refusé de suivre les formation. En outre, la cour constate, à la lecture de la pièce n°54 déjà évoquée, que d'autres salariés que ceux ci-dessus cités, qui avaient une ancienneté comparable à celle de Madame [P] (par exemple, Messieurs [K], [H] ou [M]), avaient eux aussi connu un déroulement de carrière plus rapide. La référence faite par la Caisse à l'existence à l'accord du 1er février 1980 sur le déroulement de carrière des délégués syndicaux dans l'entreprise est à elle seule insuffisante, faute pour la Caisse de verser aux débats les éléments précis de la carrière des autres salariés pris en comparaison et pouvant expliquer cette différence.
Il s'en suit que la Caisse d'Assurance Maladie des Bouches-du- Rhône n'ayant pas fourni les éléments objectifs, il y a lieu de retenir l'existence d'une discrimination syndicale en matière de rémunération, de formation et de promotion professionnelle au préjudice de Madame [P]. En outre, les faits ci-dessus analysés constituent aussi des agissements répétés de harcèlement moral qui ont eu pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits de Madame [P] et de compromettre son avenir professionnel. L'ensemble de ces faits ayant été commis sur la période considérée du mandat syndical et prud'homal, il y a bien eu violation du statut protecteur.
B) Sur les dommages -intérêts
Les manquements commis par l'employeur en matière de discrimination syndicale, de statut protecteur et de harcèlement moral doivent être réparés par l'allocation de dommages-intérêts couvrant l'intégralité du préjudice tant financier que moral.
Pour la détermination de l'intégralité du préjudice, il y lieu de prendre en compte, tout d'abord, la nature syndicale et prud'homale de la discrimination et la violation du statut protecteur qui en a découlé ainsi que la durée de cette discrimination. Il y a lieu, ensuite, de prendre en compte l'impact que cette discrimination avait nécessairement eu sur la carrière de Madame [P] , cet impact étant caractérisé par la perte d'une chance à une promotion , à un déroulement normal de sa carrière professionnelle et à un accès à une rémunération supérieure pendant l'exécution du contrat de travail. A cet égard, Madame [P], qui avait été privée d'une possibilité de promotion par suite de la discrimination illicite peut prétendre qu'elle aurait atteint un niveau supérieur à celui qui était le sien au jour de son départ à la retraite. Les éléments analysés ci-dessus, notamment ceux tirés de la comparaison avec la situation de Mesdames [X] et [B] , permettent de retenir que, sans cette discrimination, elle aurait atteint le coefficient 230. La perte de rémunération en découlant doit donc être prise en compte dans la détermination du préjudice. En outre, doit être prise en compte, l' incidence financière sur ses droits à la retraite. Enfin, sera également pris en compte le préjudice moral résultant de la privation pendant toutes ces années du droit à bénéficier d'un déroulement harmonieux de sa carrière.
En l'état de tous ces éléments, la cour condamne la Caisse d'Assurance Maladie des Bouches-du-Rhône à payer à Madame [P] la somme de 50.000€ à titre de dommages-intérêts pour discrimination syndicale et pour violation du statut protecteur.
Compte tenu de la nature des agissements répétés de l'employeur, de la durée de tels agissements et de la dégradation des conditions de travail qui en avaient été la conséquence, la cour condamne la Caisse d'Assurance Maladie des Bouches-du-Rhône à payer à Madame [P] la somme de 10.000€ à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral.
C - Sur les autres demandes
L'équité commande d'allouer à l'appelante la somme de 1500€ au titre de l'article 700 du code procédure civile.
Les sommes de nature indemnitaire emporteront intérêts légaux à compter de l'arrêt avec capitalisation des intérêts échus sur une année entière.
La présente décision doit être déclarée opposable à Monsieur le Préfet de Région et à Monsieur le Directeur de l'ARS-PACA
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant par décision prononcée par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en matière prud'homale.
Vu l'arrêt de la cour de cassation du 8 octobre 2014.
Reçoit Madame [N] [P] en son appel.
Réforme en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud'hommes d'Arles du 22 juin 2011 et, statuant à nouveau, condamne la Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Bouches-du-Rhône à payer à Madame [N] [P] les sommes de:
-50.000€ à titre de dommages-intérêts pour discrimination syndicale et violation du statut protecteur;
-10.000€ à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral;
-1500€ au titre de l'article 700 du code procédure civile.
Dit que ces sommes de nature indemnitaire emporteront intérêts légaux à compter de l'arrêt avec capitalisation des intérêts échus sur une année entière.
Déclare l'arrêt opposable à Monsieur le Préfet de Région et à Monsieur le Directeur de l'ARS-PACA.
Déboute les parties de leurs autres demandes.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT