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19/04/2016 | FRANCE | N°14/22750

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 11e chambre a, 19 avril 2016, 14/22750


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

11e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 19 AVRIL 2016



N° 2016/ 205













Rôle N° 14/22750







SCI LES LAVANDES





C/



SAS ERTECO FRANCE





















Grosse délivrée

le :

à :



Me Franck-clément CHAMLA



Me Paul GUEDJ









Décision déférée à la Cour :

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Jugement du Tribunal de Grande Instance de DIGNE-LES-BAINS en date du 13 Novembre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 12/01361.





APPELANTE



SCI LES LAVANDES poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, y domicilié, demeurant [Adresse 1]



représentée par Me Charles TOLLINCHI, avocat au barr...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

11e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 19 AVRIL 2016

N° 2016/ 205

Rôle N° 14/22750

SCI LES LAVANDES

C/

SAS ERTECO FRANCE

Grosse délivrée

le :

à :

Me Franck-clément CHAMLA

Me Paul GUEDJ

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DIGNE-LES-BAINS en date du 13 Novembre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 12/01361.

APPELANTE

SCI LES LAVANDES poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, y domicilié, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Charles TOLLINCHI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assistée par Me Franck-Clément CHAMLA, avocat au barreau de MARSEILLE,

INTIMEE

SAS ERTECO FRANCE anciennement dénommée DIA FRANCE, Société par actions simplifiée au capital de 3.143.760 €, immatriculée au RCS de CRETEIL sous le N° 303 477 038, poursuites et diligences de son représentant légal en exercice y domicilié, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 24 Février 2016 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Sylvie PEREZ, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Mme Véronique BEBON, Présidente

Madame Frédérique BRUEL, Conseillère

Madame Sylvie PEREZ, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Avril 2016.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Avril 2016,

Signé par Mme Véronique BEBON, Présidente et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par acte notarié du 11 janvier 2001, la SCI Les Lavandes a donné à bail à la société ED, devenue DIA France puis à ce jour ERTECO France, un local à usage commercial situé [Adresse 3] pour une durée de neuf ans à compter du 12 janvier 2001 et un loyer initial de 59 455 euros puis deux ans après, de 100 616 euros.

Par application des indexations annuelles, le loyer révisé s'établissait au 1er janvier 2009, à la somme de 135 135,56 euros.

Invoquant une variation de plus du quart, le preneur a, par lettre recommandée avec avis de réception en date du 20 avril 2009, notifié au bailleur une demande de révision du loyer à la valeur locative, soit à la somme de 90 000 euros, en application de l'article 145-39 du Code de commerce, proposition rejetée par le bailleur le 19 mai 2009.

Ayant chacune produit une évaluation de la valeur locative, et étant contraires sur son montant, les parties ont procédé à un échange de mémoires avant la saisine du juge des loyers commerciaux par la locataire.

Par jugement avant dire droit du 30 mars 2011, une expertise a été ordonnée, confiée à Monsieur [N] avec pour mission pour celui-ci de donner son avis sur la valeur locative des lieux loués et sur le loyer applicable à compter du 5 mai 2010. Le loyer provisionnel a été fixé à la somme de 123 769 euros à compter du 24 avril 2009.

L'expert a déposé son rapport le 13 décembre 2011 et a conclu à une valeur locative de 97 000 euros par an à la date du renouvellement du bail 12 janvier 2010.

Aux termes de son mémoire après expertise, la SCI Les Lavandes a notamment sollicité l'annulation du rapport d'expertise pour atteinte au principe du contradictoire et subsidiairement, la fixation du loyer révisé à la somme de 132 881,39 euros.

Par jugement avant dire droit du 31 janvier 2013, le juge des loyers commerciaux a invité l'expert à faire toutes observations écrites sur les termes des mémoires des parties quant aux méthodes utilisées afin d'évaluation et a ordonné sa comparution à l'audience du 16 mai 2013.

L'expert a déposé une note technique le 24 février 2013 et a à nouveau été désigné par jugement du 17 juillet 2013 pour un complément de mission, l'invitant à se rendre dans des locaux commerciaux loués par le preneur à [Localité 1] et utilisés comme terme de comparaison par l'expert, afin de procéder à leur mesurage.

Le rapport complémentaire a été déposé le 1er février 2014 et l'expert a conclu à une valeur locative de 101 900 euros par an HT et HC au 5 mai 2010.

Par jugement du 13 novembre 2014 assorti de l'exécution provisoire, le juge des loyers commerciaux a débouté la SCI Les Lavandes de sa demande d'annulation des rapports d'expertise de Monsieur [N], a fixé la valeur locative à la somme de 101 900 euros à compter du 5 mai 2010 comme étant la date de réception de la demande de révision du loyer et condamné le bailleur au remboursement du différentiel de loyer depuis le 5 mai 2010, avec intérêts au taux légal et capitalisés et au paiement d'une somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La SCI Les Lavandes a relevé appel de ce jugement.

Par conclusions déposées et notifiées le 23 février 2015, la SCI Les Lavandes a conclu à la réformation du jugement et en conséquence, à l'annulation des rapports d'expertise déposés les 13 décembre 2011 et 1er février 2014 et subsidiairement, demandé à la cour de ne pas les homologuer, de fixer le loyer révisé à la somme annuelle hors taxes et hors charges de 133 622 euros à compter du 12 janvier 2010. Elle a également conclu au rejet des demandes de la SAS ERTECO France et à sa condamnation au paiement de la somme de 5 000 euros à titre d'indemnité pour frais de procès.

Par conclusions déposées et notifiées le 23 avril 2015, la SAS ERTECO France a conclu au débouté de la SCI Les Lavandes de l'ensemble de ses demandes.

L'intimée a formé appel incident et conclu à l'infirmation du jugement sur le montant de la valeur locative et statuant à nouveau, demandé à la cour de fixer le loyer à compter du 24 avril 2009 à la somme de 90 000 euros, à celle de 66 650 euros à compter du 26 avril 2010, date de notification du mémoire préalable et à 57 500 euros à compter du 16 avril 2014, date de notification du mémoire après expertise.

La SAS ERTECO France a conclu à la confirmation du jugement pour le surplus et à la condamnation de la SCI Les Lavandes au paiement de la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1. Rapports d'expertise :

La SCI Les Lavandes sollicite l'annulation des rapports d'expertise de Monsieur [N] déposés les 13 décembre 2011 et 1er février 2014 sur le fondement des articles 175 et 16 du Code de procédure civile pour atteinte au principe du contradictoire pour ne lui avoir pas permis de répondre à un dire du preneur déposé en limite du délai imparti par l'expert par lequel celui-ci contestait le montant du loyer de deux termes de comparaison à Peyruis et Oraison et pour avoir manqué d'objectivité et d'impartialité en retenant les dires de la SAS ERTECO France et écartant les siens, sans procéder à des vérifications.

Ainsi que l'a relevé le premier juge, si la SCI Les Lavandes estimait ne pouvoir, dans les délais impartis par l'expert, répondre au dire déposé par le preneur, il lui appartenait de solliciter la prorogation de ce délai auprès de l'expert, diligence qu'elle n'a pas effectuée.

Il a cependant été tenu compte des griefs de la SCI Les Lavandes sur le déroulement des opérations d'expertise puisque par jugement avant dire droit du 31 janvier 2013, la comparution de l'expert en présence des parties a été ordonnée et celui-ci a, dans une note technique, répondu aux conclusions de ces dernières comme il lui était demandé. Il a de plus été ordonné un complément d'expertise portant sur un des termes de comparaison retenus par l'expert et faisant difficulté.

Il en résulte que le respect du principe du contradictoire a fait l'objet d'une attention particulière de la part du premier juge et que, sans encourir le grief d'impartialité, l'expert a donné tous éclaircissements utiles permettant à la SCI Les Lavandes de discuter l'argumentation adverse, celle-ci ne formulant par ailleurs pas de critique sur le rapport complémentaire.

Quant au défaut de production par le preneur d'éléments essentiels à la fixation de la valeur locative comme sollicités par l'expert, que la SCI Les Lavandes demande à la cour de sanctionner par application des dispositions de l'article 278 du Code de procédure civile, outre que ces dispositions ne permettent pas de prononcer la nullité du rapport d'expertise, il convient de noter que l'expert a mentionné dans sa note technique que ces informations n'étaient pas indispensables à la rédaction de son rapport de sorte que le juge chargé du contrôle des expertises n'avait pas été saisi.

Le jugement de première instance sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté la demande tendant à voir prononcer la nullité des rapports d'expertise.

2. Valeur locative :

Il est constant que par application de la clause d'indexation contractuelle, le loyer a augmenté de plus d'un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement de sorte que, en application de l'article l. 145-39 du Code de commerce, sa révision peut être demandée par la locataire pour être fixée à la valeur locative.

La SAS ERTECO France exploite un commerce d'alimentation générale dans un magasin de type supermarché à l'enseigne 'DIA', situé dans l'unique zone d'activité de [Localité 2], d'une superficie de 984,38 m², après mesurage effectué par l'expert, qui a retenu une surface pondérée de 806,41 m².

L'invitation faite par l'article R. 145-7 du code de commerce à se référer aux prix couramment pratiqués dans le voisinage, par unités de surfaces, conduit à pondérer les surfaces des locaux loués, en distinguant l'importance de celles affectées à la réception du public, à l'exploitation ou à chacune des activités diverses qui sont exercées dans les lieux.

Ainsi, il est d'usage pour les grandes surfaces à partir de 300 m² à 1 000 m² et notamment pour les supermarchés, de retenir un coefficient de 1 pour la surface de vente, de 0,30 pour les locaux à usage de réserves, laboratoires, préparations, débarras, chaufferie et 0 pour les locaux techniques, ces pondérations n'étant pas réservées aux seuls locaux dont la superficie est supérieure à 1 000m².

En l'espèce, compte tenu d'une surface de vente de 618,73 m², de celle concernant les locaux annexes de 361,85 m² et les locaux techniques de 3,80 m², il convient de retenir une surface pondérée de 727 m².

Tenant les obligations respectives des parties et la destination des lieux, l'expert judiciaire, Monsieur [N] a justement considéré que l'avantage conféré au locataire de pouvoir sous louer justifiait une majoration de la valeur locative appréciée à 5% mais que s'agissant d'un bail 'tous commerces' permettant l'implantation d'une autre activité à moindre frais, une minoration du même montant était justifiée.

L'expert a mentionné l'attractivité de la zone commerciale dans laquelle est implanté le commerce et relevé que celui-ci est idéalement placé pour l'activité exercée par la SAS ERTECO France laquelle objecte que les facteurs locaux de commercialité ont connu au cours du bail une modification défavorable pour l'ensemble des activités implantées dans la zone, conjoncture aggravée par la fermeture en 2009, d'un établissement de la société Arkema entraînant la perte de 500 emplois.

La SCI Les Lavandes reproche à l'expert d'avoir appliqué une minoration de 2% de la valeur locative en considérant que le pouvoir des ménages avait nécessairement été impacté, rappelant que la SAS ERTECO France exerce une activité de supermarché alimentaire 'hard discount', s'adressant en général à une population à revenus modestes et que la baisse de revenus des ménages ou l'augmentation du nombre de chômeurs ne constitue pas un élément défavorable à la locataire dès lors que corrélativement la population de la commune n'a pas baissé, ajoutant que la consommation de denrées alimentaires est moins sensible à la variation du revenu que d'autres produits de consommation.

Si l'étude réalisée en 2005 avec le concours de la Direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle des Alpes-de-Haute-Provence enseigne que 502 des 1111 salariés travaillant pour la société Arkema habitent la commune et que l'usine représente le quart des emplois de la commune, aucun élément ne permet de conclure à la répercussion des licenciements sur l'activité de la SAS ERTECO France, au regard de la nature du commerce destinée aux revenus modestes, marque de l'enseigne, même si l'on peut admettre, comme l'indique la SAS ERTECO France que sa clientèle ne se limite pas à un public à faible pouvoir d'achat et est depuis plusieurs années plus diversifie, l'expert relevant la faible incidence de l'impact économique ce de cette situation en ce que les dépenses alimentaires demeurent la priorité des ménages même en temps de crise.

Il n'y aura pas lieu dans ces conditions de procéder à la minoration de la valeur locative.

Concernant les termes de comparaison, il convient de relever que l'expert a fixé dans son rapport définitif, une valeur locative à compter du 5 mai 2010 et pris en compte les baux existant à cette date.

Or, par application de l'article R. 145-20 alinéa 3 du code de commerce, le nouveau prix est dû à dater du jour de la demande, c'est à dire à compter du jour de l'expédition de la lettre recommandée avec avis de réception et non pas de sa réception par l'autre partie, soit en l'espèce le 24 avril 2009, de sorte que les références retenues par l'expert se fondant soit sur un bail dont la date n'est pas connue doivent être écartées, de même que la référence concernant le supermarché de [Localité 3] selon bail à effet du 1er novembre 2009.

Pour deux des références retenues par l'expert concernant les supermarchés :

- [Localité 1] 1, location consentie à la SAS ERTECO France: il est justifié que le loyer initial prévu par le bail signé le 13 septembre 2007 s'établissait à la somme de 110 000 euros par an, valeur qu'il convient de retenir, et une valeur locative de 107,41 euros en considération d'une surface pondérée de 1 024,11 m² ;

- Oraison 2 : la SCI Les Lavandes demande d'écarter cette référence comme ne représentant pas la réalité du marché alors que le bail de ce supermarché, conclu le 24 février 2005, en fait une référence tout à fait pertinente.

Ainsi, avec les termes de comparaison concernant le supermarché situé à [Localité 4], et sur la base des coefficients multiplicateurs retenus par l'expert, il en ressort une valeur locative moyenne à la somme de 102,38 euros/m², soit un loyer annuel de 74 430,26 euros.

Concernant la taxe foncière dont le paiement incombe au bailleur qui en l'espèce, aux termes du bail, s'en est déchargé sur le locataire, il convient de déduire le montant de l'impôt foncier de la valeur locative conformément aux dispositions de l'article R. 145-8 du code de commerce.

Il en ressort un loyer annuel de 62 846,78 euros hors charges et hors taxes.

Il résulte des développements qui précèdent que le loyer révisé, à compter du 24 avril 2009 est fixé à la somme de 90 000 euros hors charges et hors taxes, à la somme de 66 650 à compter du 26 avril 2010, date de notification du mémoire préalable et à celle de 62 846,78 euros à compter du 16 avril 2014, date de notification du mémoire après expertise.

Succombant en son appel, la SCI Les Lavandes est condamnée au paiement d'une somme de 2500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Statuant publiquement, par décision contradictoire, en dernier ressort,

Confirme le jugement du 13 novembre 2014 prononcé par le tribunal de grande instance de Digne Les Bains en ce qu'il a rejeté la demande tendant à la nullité des rapports d'expertise ;

Y ajoutant :

Réformant partiellement le jugement entrepris sur le montant de la valeur locative, fixe le loyer révisé, à compter du 24 avril 2009, à la somme de 90 000 euros hors charges et hors taxes, à la somme de 66.650 euros hors charges et hors taxes à compter du 26 avril 2010 et à celle de 62.846,78 euros hors charges et hors taxes à compter du 16 avril 2014 ;

Confirme ce jugement en toutes ses autres dispositions non contraires ;

Condamne la SCI Les Lavandes à payer à la SAS ERTECO France la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne la SCI Les Lavandes aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 11e chambre a
Numéro d'arrêt : 14/22750
Date de la décision : 19/04/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence A1, arrêt n°14/22750 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-04-19;14.22750 ?
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