COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
3e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 28 AVRIL 2016
N° 2016/182
Rôle N° 15/01875
SARL ATELIER PAUL ZOPPI ET FILS
C/
[R] [G]
Grosse délivrée
le :
à :
Me Elie MUSACCHIA
Me Pascale MAZEL
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 15 Janvier 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 13/04482.
APPELANTE
SARL ATELIER PAUL ZOPPI ET FILS prise en la personne de son gérant en exercice domicilié en cette qualité audit siège,, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Elie MUSACCHIA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
plaidant par Me Jean-Louis DEPLANO, avocat au barreau de NICE substitué par Me Philippe TOSSAN, avocat au barreau de NICE
INTIMEE
Madame [R] [G]
née le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 1], demeurant [Adresse 2]
représentée et plaidant par Me Pascale MAZEL, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 02 Mars 2016 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Béatrice MARS, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Sylvie CASTANIE, Présidente
Monsieur Martin DELAGE, Conseiller
Mme Béatrice MARS, Conseiller (rédacteur)
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Jocelyne MOREL.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Avril 2016
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Avril 2016,
Signé par Madame Sylvie CASTANIE, Présidente et Madame Jocelyne MOREL, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
[R] [G] est propriétaire d'une villa sise à [Adresse 2].
Elle a confié à la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils, la réalisation de travaux de menuiseries.
Arguant de l'existence de désordres, [R] [G] a saisi le Juge des référés afin d'obtenir la désignation d'un expert, qui a déposé son rapport le 3 août 2012.
Par acte en date du 22 mars 2013, la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils a assigné [R] [G] devant le Tribunal de Grande Instance de Marseille.
Dans le même temps, par acte du 4 juillet 2013, [R] [G] a assigné la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils.
Par jugement en date du 15 janvier 2015, le Tribunal de Grande Instance de Marseille a :
- Rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action en paiement de la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils,
- Condamné [R] [G] à payer à la SARL Atelier Paul Zoppi et Filsla somme de 26 300 euros au titre du solde des travaux, avec intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2013,
- Condamné la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils à payer à [R] [G] les sommes suivantes :
* 111 020 euros HT au titre des travaux de reprise des portes du couloir d'accès domotique et des marches de l'escalier, outre la TVA au jour du paiement, et avec actualisation selon l'indice BT01 de la construction, les indices de référence étant ceux en vigueur au 3 août 2012, date du rapport d'expertise, et à la date du jugement,
* 5 000 euros au titre de son préjudice de jouissance,
* 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- Ordonné l'exécution provisoire.
La SARL Atelier Paul Zoppi et Fils a relevé appel de cette décision le 9 février 2015.
Vu les conclusions de la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils, appelante, notifiées le 23 septembre 2015, aux termes desquelles il est demandé à la Cour de :
- Réformer le jugement en date du 15 janvier 2015,
Et statuant à nouveau :
- Constater que le contrat n'est pas résilié et que l'entreprise n'a jamais refusé d'exécuter ses éventuelles obligations, mais que [R] [G] l'en a empêchée,
- Constater que le rapport d'expertise est gravement critiquable au regard des dispositions de l'article 238 du Code de Procédure Civile,
- Dire et juger que le caractère évolutif des désordres concernant les portes du couloir d'accès au local domotique n'est pas certain,
- Dire et juger, concernant les portes du couloir d'accès au local domotique, que la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils est capable de reprendre l'ouvrage sans le remplacer dans sa totalité,
- Dire et juger que la solution de la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils satisfait au principe de réparation intégrale,
- Dire et juger concernant les marches d'escalier que le désordre n'est pas imputable à la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils,
En conséquence':
- Condamner [R] [G] au paiement d'une somme de 26 300 euros augmentée des intérêts de droit à compter du 4 février 2010, date de la mise en demeure,
- Condamner [R] [G] au paiement d'une somme de 4 000 euros sur le fondement de
l'article 700 du Code de Procédure Civile,
À titre subsidiaire :
- En cas de condamnation, subordonner le paiement par la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils à la restitution de l'ensemble des habillages muraux et portes constituant la décoration du couloir refusé par le maître d'ouvrage.
Vu les conclusions de [R] [G], intimée, notifiées le 25 juin 2015, aux termes desquelles il est demandé à la Cour de :
- Confirmer le jugement du 15 janvier 2015 en ce qu'il a retenu la responsabilité de la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils dans les désordres des travaux exécutés dans la villa de [R] [G],
- Prendre acte de l'appel incident de [R] [G],
- Infirmer le jugement du 15 janvier 2015 en ce qu'il a condamné [R] [G] au paiement de la somme de 26 300 euros au titre du solde des travaux,
- Débouter la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- Condamner la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils au paiement de la somme de 204 464,40 euros TTC, au titre des réparations à effectuer, somme qui sera actualisée selon l'indice BT 01 au jour du paiement, l'indice de référence étant celui du dépôt du rapport d'expertise,
- Condamner la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils au paiement de la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour privation de jouissance jusqu'à la réalisation des travaux,
- Condamner la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils au paiement de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile pour la procédure de première instance et celle de 5 000 euros pour la procédure d'appel.
MOTIFS DE LA DECISION':
- Sur les demandes de la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils :
La SARL Atelier Paul Zoppi et Fils sollicite le paiement d'une somme de 26 300 euros au titre du solde de ses travaux.
[R] [G], sollicite l'infirmation de la décision, en ce qu'elle l'a condamnée au paiement de cette somme, sans développer aucun argument au soutien de cette demande.
Dès lors aucun motif ne permet de réformer la décision sur ce point, le premier Juge, par des motifs pertinents en fait et en droit ayant à juste titre, sur la base du rapport d'expertise, retenu après reddition des comptes entre les parties, que [R] [G] était redevable d'une somme de 26 300 euros au titre du solde des travaux.
- Sur les demandes de [R] [G]':
Il convient de rappeler que l'expert avait fixé à la somme de 30 000 euros le montant du solde dû par [R] [G], somme de laquelle a été déduit le montant des travaux de reprise non contestés par la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils et tel qu'évalués par l'expert à la somme de 3700 euros.
Dès lors, contrairement à ce qu'indique [R] [G], les désordres relatifs à la porte d'entrée, 2 éléments de rangement, 4 portes salle à manger, l'habillage accès digital salle de sport, la porte cave, la porte pivotante, le bar ont déjà été pris en compte par le premier Juge.
Seuls subsistent les désordres contestés par les parties à savoir la porte du couloir d'accès domotique et les marches d'escaliers.
* Porte couloir accès domotique':
L'expert, dont les constations précises ne souffrent d'aucune critique, note': 'l'examen de cet ensemble nous a permis de relever la naissance et l'évolution de nombreux défauts sur ces ensembles menuisés et revêtement, tels que cloques et boursouflures ('). Instabilité dimensionnelle de l'ouvrage et décollement des revêtements de placage bois précieux dont l'adhésif ne remplit plus ses fonctions d'assembleurs. Soulèvement généralisé des revêtements de champs plaqués en partie courante. Déformation des plans des tabliers (concave)' Au début de notre premier accedit, une seule porte était déformée, à la fin de nos opérations cinq ('). L'origine provient d'un principe constructif inadapté ('), les travaux d'exécution en atelier n'ont pas prévu les efforts à reprendre des panneaux et ossatures dans leur élément constitutif'.
Ainsi donc, il est établi sans conteste des désordres généralisés, par l'existence de cloques et boursouflures sur les ensembles menuisiers existants, et évolutifs, l'expert notant qu'une porte était concernée au début de ses opérations et cinq à la fin.
De même, ces désordres affectant les ouvrages réalisés par la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils, résultent selon les termes du rapport': d'un principe constructif inadapté. En effet l'expert souligne'que les règles de l'art n'ont pas été respectées : 'la particularité d'ambiance du milieu confiné dans lequel a été installé l'ouvrage n'a pas été prise en compte par les poseurs qui n'ont pas procédé à la stabilisation de l'ouvrage en milieu confiné nécessaire avant l'installation, de plus l'exécution d'ouvrage constitué d'ossature replaqué n'est pas conseillé'.
Les observations de la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils quant au caractère non généralisé des désordres en ce qu'ils 'n'atteindraient que quatre portes' sont sans incidence, au vu des constatations précises de l'expert et en ce que ces désordres affectent des ouvrages haut de gamme, avec utilisation de bois précieux comme le démontrent le coût des travaux de menuiserie prévus dans les deux devis des 13 octobre 2008 et 16 octobre 2008 qui s'élèvent à plus de 484 000 euros. De même la définition par le Ministère du travail et de l'emploi de ce qu'il faut entendre, dans le monde du travail, 'd'un espace confiné''n'est d'aucun intérêt en l'espèce, s'agissant des sous sol d'une maison d'habitation.
La responsabilité de la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils qui a réalisé l'ouvrage atteint de désordres généralisés et évolutifs doit donc être retenue.
L'expert préconise, au vu de ses constations, le remplacement de l'ouvrage pour la somme de 110 720 euros HT, selon le devis du cabinet Scuoppo Musso.
La SARL Atelier Paul Zoppi et Fils conteste la nécessité d'une reprise totale de l'ouvrage et propose une simple réparation, qu'elle chiffre à la somme de 5 740 euros HT.
La proposition de la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils, que l'expert écarte en notant que cette estimation ne peut être retenue car elle ne correspond pas à la réalité des ouvrages facturés, qui au surplus ne peut permettre d'endiguer le caractère évolutif des désordres, mais également, alors qu'il s'agit de menuiserie haut de gamme et que, comme le souligne à juste titre le premier Juge, [R] [G] est en droit d'attendre des prestations de qualité et non de simples 'rafistolages' qui affecteraient l'esthétique de l'ouvrage.
La décision du premier Juge sera sur ce point confirmée.
* l'escalier intérieur accès sous-sol':
L'expert note': 'les nez de marche sont affectés de rayures et marques superficielles'. Concernant le revêtement des marches, il précise qu'il est constitué en panneaux de bois '3 ply'' hêtre qui sont destinés à la réalisation de porte et non à un revêtement de sol d'escalier.
La SARL Atelier Paul Zoppi et Fils fait valoir que ces matériaux ont été commandés par [R] [G]. Comme le souligne à juste titre le premier Juge, cette société se devait, dans le cadre du devoir de conseil vis à vis du client non professionnel, auquel elle est soumise, d'informer [R] [G] que le revêtement choisi était impropre à l'usage qui allait en être fait.
Les devis produits visant à 'une protection de l'ouvrage contre l'usure prématurée' sont de 300 euros HT pour le cabinet Scuoppo Musso, 55 727 euros pour l'entreprise Montagne et 435 euros HT pour la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils, étant précisé que l'expert estime à une demie journée de travail la durée prévisible des travaux.
[R] [G] sollicite la prise en compte du devis de l'entreprise Montagne.
Sur ce point, comme l'a retenu le premier Juge, aucun élément ne permet de retenir ce devis d'un montant de 55 727 euros pour l'application d'un revêtement et une demie journée de travail.
La décision du premier Juge sera confirmée.
* Sur le préjudice de jouissance':
L'expert a fixé à six mois la durée prévisible des travaux relatifs au porte couloir accès domotique, en ce compris l'exécution à l'identique des portes et à une demie journée ceux relatifs à l'escalier intérieur. Tenant compte de la nature des travaux, de leur localisation il y a lieu d'allouer à [R] [G] au titre du préjudice de jouissance une somme de 10 000 euros.
- Sur la demande de restitution :
La demande de 'restitution de l'ensemble des habillages muraux et portes constituant la décoration du couloir refusé par le maître d'ouvrage'' présentée par la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils sera rejetée en l'absence d'élément précis.
PAR CES MOTIFS':
La Cour, par décision contradictoire, en dernier ressort':
- Infirme le jugement en date du 15 janvier 2015 en ce qu'il a condamné la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils à payer à [R] [G] la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice de jouissance,
Statuant à nouveau':
- Condamne la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils à payer à [R] [G] la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice de jouissance,
- Confirme le jugement pour le surplus,
- Condamne la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils à payer à [R] [G] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- Condamne la SARL Atelier Paul Zoppi et Fils aux dépens avec recouvrement direct au profit des avocats de la cause, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
LA GREFFIERELA PRESIDENTE