COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
8e Chambre C
ARRÊT AU FOND
DU 23 JUIN 2016
N°2016/445
Rôle N° 14/05230
SA HSBC FRANCE
C/
[A] [O]
Grosse délivrée
le :
à :FRISCIA
SIDER
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de FREJUS en date du 10 Février 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 2011 00738.
APPELANTE
La société HSBC France sa, nouvelle dénomination du CCF, agissant poursuites et diligences de son représentant légal, dont le siège est sis [Adresse 1]
représentée et assistée de Me Marco FRISCIA, avocat au barreau de TOULON
INTIME
Monsieur [A] [O]
né le [Date naissance 1] 1942 à [Localité 1] (93), demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Philippe-Laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et assisté de Me Sandrine BEAUGE-GIBIER, avocat au barreau de CHARTRES
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785, 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Mai 2016 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Hélène COMBES, Président, et Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Conseiller, chargés du rapport.
Madame Hélène COMBES, Président, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Hélène COMBES, Président
Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Conseiller
Madame Claudine PHILIPPE, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Juin 2016.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Juin 2016.
Signé par Madame Hélène COMBES, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 6 mai 2003, [A] [O] s'est engagé en qualité de caution solidaire à garantir le paiement de toutes les sommes dues par la 'société STRL n° SIREN 692 048 549 00020" à la Banque Harvet, et ce, dans la limite de 80 000 euros.
En 2004, [A] [O] a cédé les parts sociales qu'il détenait au sein de la société STRL et a cessé ses fonctions de dirigeant.
Par jugement du 21 septembre 2009, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'égard de la société des Transports Routiers Logisticiens-STRL, à l'issue de laquelle un plan de redressement a été arrêté le 3 janvier 2011.
Par jugement du 9 septembre 2011, le plan de redressement a été résolu et la société des Transports Routiers Logisticiens- STRL a été mise en liquidation judiciaire.
Par courrier du 19 novembre 2009 la SA HSBC France, venant aux droits de la Banque Harvet, a déclaré ses créances pour un montant de 78 742,28 euros au titre du solde débiteur du compte bancaire et pour un montant de 7 698,57 euros au titre d'un prêt.
Après avoir envoyé plusieurs mises en demeure restées infructueuses, la SA HSBC France a, par acte d'huissier du 4 octobre 2011, assigné en paiement [A] [O], en sa qualité de caution solidaire, devant le tribunal de commerce de Fréjus.
Par jugement du 10 février 2014, cette juridiction a :
- débouté la SA HSBC France de ses demandes, aux motifs qu'il n'était pas prouvé que l'article L 313-22 du code monétaire et financier avait été respecté,
- débouté [A] [O] de sa demande de dommages et intérêts
- condamné la SA HSBC France à payer à [A] [O] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Le 14 mars 2014, la SA HSBC France a interjeté appel de cette décision.
Par ses dernières écritures du 4 mai 2016, elle demande à la cour de :
- débouter [A] [O] de ses prétentions,
- infirmer le jugement déféré,
- condamner [A] [O] à lui payer la somme de 80 000 euros outre intérêts au taux légal à compter du 5 novembre 2009,
- condamner [A] [O] au paiement d'une somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et des dépens qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du même code.
A l'appui de son appel et en réponse aux arguments invoqués par l'intimé, la banque fait valoir que le cautionnement souscrit par [A] [O] n'est entaché d'aucune cause de nullité.
Elle ajoute que [A] [O], qui n'a jamais révoqué son engagement, demeure tenu à une obligation de couverture et de règlement, quand bien même celui-ci aurait cédé ses parts sociales et ne serait plus le dirigeant de la société STRL, et quand bien même la société cautionnée aurait changé de dénomination sociale.
Elle indique par ailleurs qu'elle a respecté son obligation d'information annuelle mais qu'elle ne peut en rapporter la preuve, de sorte qu'elle ne sollicite que les intérêts au taux légal, précisant que la sanction du non respect de cette obligation est la déchéance des intérêts conventionnels à l'exclusion de toute autre sanction.
Par ses dernières écritures du 13 mai 2016, [A] [O] demande à la cour de :
- confirmer le jugement déféré,
- débouter la banque de ses demandes,
- juger nul et de nul effet le cautionnement,
- juger que le cautionnement est éteint par la transformation de la société cautionnée devenue la société des Transports Routiers Logisticiens,
- constater que la dette dont se prévaut la banque n'est pas exigible faute de démontrer la clôture du compte courant,
A titre subsidiaire,
- juger que la SA HSBC France s'est rendue coupable de réticence dolosive en ne délivrant aucune information,
- juger qu'elle s'est rendue à tout le moins coupable d'une négligence fautive,
- en conséquence, constater la responsabilité de la banque qui n'a délivré aucune information,
- condamner la banque à lui payer la somme de 80 000 euros à titre de dommages et intérêts du fait du manquement à l'obligation d'information et de 'la perte de chance subie de résilier le cautionnement',
- ordonner la compensation,
- condamner la SA HSBC France au paiement d'une somme de 6 000 euros en application de l'article 700 du Code procédure Civile et aux dépens.
Il invoque la nullité du cautionnement litigieux aux motifs, d'une part, qu'il comporte un engagement perpétuel et, d'autre part, qu'il contient une clause contraire aux dispositions des articles L 341-1, L 341-6 du code de la consommation et L 313-22 du code monétaire et financier.
Il fait en outre valoir que son engagement était limité aux dettes contractées par la société des Transports Routiers Le Poullouin- STRL et ne garantissait pas les dettes de la société des Transports Routiers Logisticiens -STRL.
Il ajoute que la dette réclamée par la banque n'est pas exigible au motif qu'il s'agit d'un solde du compte courant et que la banque ne rapporte pas la preuve de la clôture du dit compte.
Subsidiairement, [A] [O] soutient que la banque a commis une faute en ne respectant pas son obligation d'information annuelle. Il précise que ce manquement lui a été d'autant plus préjudiciable qu'il n'était plus dirigeant de la société cautionnée et que cette faute doit être sanctionnée par l'allocation de dommages et intérêts et non par la simple déchéance du droit aux intérêts.
L'ordonnance de clôture est en date du 17 mai 2016.
MOTIFS
Sur la demande en paiement de la banque
Attendu qu'il résulte des pièces communiquées que par acte du 6 mai 2003, [A] [O], dirigeant de la Société des Transports Routiers [O], STRL, s'est engagé en qualité de caution solidaire à garantir le paiement de toutes les sommes qui seraient dues par cette société à l'égard de la Banque Harvet, aux droits de laquelle vient la SA HSBC France ;
Que cet engagement était limité à 80 000 euros ;
Qu'il ressort des différents extraits Kbis produits aux débats par l'appelante, que la société cautionnée, tout en conservant le même numéro SIREN, a changé de siège social et de dénomination pour devenir la Société des Transports Routiers Logisticiens STRL ;
Que cette société des Transports Routiers Logisticiens STRL a, le 21 septembre 2009, été mise en redressement judiciaire puis a fait l'objet d'un plan de redressement, avant d'être mise en liquidation judiciaire le 9 septembre 2011, suite à la résolution du plan ;
Que par courrier du 19 novembre 2009, la SA HSBC France a déclaré ses créances pour un montant de 78 742,28 euros au titre du compte bancaire et pour un montant de 7 698,57 euros au titre d'un prêt ;
Que sur le fondement du cautionnement souscrit par [A] [O], la SA HSBC France sollicite la condamnation de cette caution au paiement de ces deux créances, dans la limite de 80 000 euros ;
Que pour s'opposer à cette demande [A] [O] soulève plusieurs moyens tenant à la validité du cautionnement, à son étendue et à l'exigibilité de la créance principale ;
Attendu que [A] [O] soutient que le cautionnement qu'il a souscrit est nul au motif qu'il comporte un engagement perpétuel ;
Mais attendu que contrairement à cette affirmation, si le cautionnement litigieux est à durée indéterminée, il contient néanmoins une clause qui prévoit que la caution peut, à tout moment, en respectant un délai de préavis de 45 jours, mettre fin à son engagement ;
Que cette clause qui permet à la caution de mettre fin à son obligation de couverture à tout moment, exclut le caractère perpétuel de l'engagement ; Que ce moyen de nullité sera rejeté ;
Attendu que [A] [O] fait valoir que l'acte de caution est nul au motif qu'il contient une clause contraire aux dispositions des articles L 341-1 et L 341-6 du code de la consommation et de l'article L 313-22 du code monétaire et financier ;
Attendu que ces textes prévoient une obligation d'information de la caution mise à la charge de l'établissement financier ;
Que toute clause contraire aux dispositions de ces articles doit être réputée non écrite mais n'est pas de nature à engendrer la nullité du contrat de cautionnement dans son entier ; Que ce moyen de nullité sera rejeté ;
Attendu que [A] [O] affirme qu'il ne s'est engagé à cautionner que les dettes de la Société des Transports Routiers [O] STRL et non celles de la Société des Transports Routiers Logisticiens STRL ;
Mais attendu que, comme il a été rappelé ci-dessus, la Société des Transports Routiers Logisticiens STRL est la nouvelle dénomination de la Société des Transports Routiers [O] STRL, la personne morale étant restée la même ;
Que la SA HSBC France est dès lors bien fondée à prétendre que ses créances à l'égard de la Société des Transports Routiers Logisticiens STRL sont garanties par le cautionnement omnibus souscrit par [A] [O] le 6 mai 2003 ; Que l'argumentation développée de ce chef par l'intimé sera écartée ;
Attendu que [A] [O] affirme que la créance au titre du compte bancaire n'est pas exigible dans la mesure où la banque ne démontre pas la clôture du compte ;
Mais attendu que la Société de Transports Routiers Logisticiens STRL a été mise en liquidation judiciaire le 9 septembre 2011 ;
Qu'il n'est pas établi que le liquidateur judiciaire a sollicité la poursuite de la convention de compte bancaire ;
Qu'au surplus, la créance au titre du compte bancaire dont il est réclamé le paiement est une créance antérieure à l'ouverture de la procédure collective ;
Qu'en application de l'article L 622-28 du code de commerce, la banque peut poursuivre la caution en paiement de cette créance, dès le jugement arrêtant le plan de redressement ou prononçant la liquidation judiciaire ;
Qu'en application de ce texte, la SA LA SOCIÉTÉ HSBC FRANCE France est bien fondée à poursuivre en paiement [A] [O], en sa qualité de caution solidaire, au titre de la créance née du solde débiteur arrêté au jour de l'ouverture de la procédure collective à l'égard de la société cautionnée ; Que ce moyen soulevé par [A] [O] sera également écarté ;
Attendu qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, il y a lieu de constater que la SA HSBC France détient à l'encontre de [A] [O], en sa qualité de caution solidaire, une créance au titre du prêt consenti à la société cautionnée et au titre du solde du compte bancaire ouvert au nom de cette société ;
Que les montants dus en principal au titre de ce prêt et au titre du solde bancaire ont été déclarés, respectivement, à hauteur de 7 698,57 euros et 78 742,28 euros ;
Que ces montants ne sont pas contestés ;
Que, cependant, la SA HSBC France reconnaît ne pas pouvoir prouver qu'elle a respecté son devoir d'information annuelle prévu l'article L 313-22 du code monétaire et financier ;
Que ce texte dispose que le défaut d'information annuelle emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement financier, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information ;
Que les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés affectés prioritairement au règlement du principal de la dette ;
Qu'en application de ce texte, la SA HSBC France est déchue du droit aux intérêts conventionnels, tant en ce qui concerne le prêt qu'en ce qui concerne le compte bancaire, à compter du 31 mars 2004, date à laquelle la première lettre d'information aurait dû être adressée à [A] [O], jusqu'au 19 novembre 2009, date de l'arrêté des comptes ;
Que [A] [O] sera condamné au paiement des créances ainsi recalculées dans la limite de 80 000 euros, montant maximum de son engagement ;
Que la dette de la caution produira intérêts au taux légal à compter du 17 janvier 2011, date de la mise en demeure ;
Attendu que la SA HSBC France sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts, le caractère abusif de la résistance de [A] [O] n'étant pas caractérisé ;
Sur la demande de dommages et intérêts formée par [A] [O] à l'encontre de la banque
Attendu que [A] [O] reprochant à la banque de ne par avoir respecté son obligation d'information annuelle, soutient que cette faute lui a causé un préjudice dont il réclame réparation par l'allocation de dommages et intérêts à hauteur de 80 000 euros ;
Mais attendu que l'omission de l'information annuelle de la caution, sauf dol ou faute distincte, est sanctionnée par la seule déchéance des intérêts ;
Qu'en l'espèce, [A] [O] ne démontre pas l'existence d'un dol ou d'une faute distincte lui ayant causé un préjudice autre que celui réparé par la déchéance des intérêts ;
Que sa demande indemnitaire sera rejetée ;
Attendu qu'il n'est pas inéquitable de laisser à la SA HSBC France la charge de ses frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La Cour Statuant publiquement et contradictoirement,
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
- Condamne [A] [O] à payer à la SA HSBC France, dans la limite d'une somme globale de 80 000 euros :
Au titre du prêt, la somme 7 698,57 euros, sous déduction des intérêts échus depuis le 31 mars 2004 et après imputation des paiements effectués par la débitrice principale au règlement du principal de la dette,
Au titre du solde du compte bancaire, la somme de 78 742,28 euros expurgée de tous les intérêts inscrits au débit du compte à compter du 31 mars 2004,
- Dit que la dette de [A] [O] produit intérêts au taux légal à compter du 17 janvier 2011,
- Déboute [A] [O] de toutes ses demandes formées à l'encontre de la SA HSBC France,
- Déboute la SA HSBC France de sa demande de dommages et intérêts et de sa demande au titre des frais irrépétibles,
- Condamne [A] [O] au paiement des dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT