COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
18e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 11 JUILLET 2016
N°2016/452
JBM
Rôle N° 14/18105
[Q] [C] épouse [L]
C/
SAS CASTORAMA FRANCE
Grosse délivrée le :
11/07/2016
à :
Me Cécile VAQUE, avocat au barreau de TOULON
Me Etienne DE VILLEPIN, avocat au barreau D'AIX-EN- PROVENCE
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le : 11/07/2016
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON - section C - en date du 30 Juillet 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 13/2129.
APPELANTE
Madame [Q] [C] épouse [L], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Cécile VAQUE, avocat au barreau de TOULON
INTIMEE
SAS CASTORAMA FRANCE, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Etienne DE VILLEPIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Sophie NORMAND-RICOUARD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 26 Mai 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Jean-Bruno MASSARD, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Chantal BARON, Présidente de chambre
Monsieur Jean-Bruno MASSARD, Conseiller
Monsieur Thierry CABALE, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Suzie BRETER.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Juillet 2016
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Juillet 2016
Signé par Madame Chantal BARON, Présidente de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Dans le délai légal et par déclaration écrite reçue le 8 septembre 2014 au greffe de la juridiction, Mme [Q] [C] épouse [L] a relevé appel du jugement rendu le 30 juillet 2014 par le conseil de prud'hommes de Toulon et à elle notifié le 14 août 2014 qui l'a déboutée de ses demandes indemnitaires à l'encontre de son ancien employeur la société SAS Castorama France.
Selon ses écritures développées oralement à l'audience du 26 mai 2016 et auxquelles il est renvoyé pour un exposé de ses moyens et prétentions, Mme [L] demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et statuant à nouveau,' de condamner la société Castorama France à lui payer 10 472,38 € de dommages-intérêts pour rupture anticipée abusive du contrat de travail, 2 000 € de dommages-intérêts pour préjudice moral, 1 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Selon ses écritures pareillement développées oralement et auxquelles il est renvoyé pour un exposé de ses moyens et prétentions, la société Castorama France sollicite la confirmation du jugement rendu et la condamnation de Mme [L] à lui payer 1 200 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Sur ce :
La société SAS Castorama France qui exploite un réseau de magasins de vente d'articles et matériaux de bricolage est régie par la convention collective nationale du bricolage.
Elle a embauché Mlle [Q] [C] devenue épouse [L] suivant contrat écrit dit de professionnalisation en vue de l'obtention du diplôme BTS «'management des unités commerciales'», tel que régi par des articles L. 6325-1 et suivants du Code du travail, à partir du 2 juillet 2012 pour une durée déterminée'jusqu'au 30 juin 2014 en qualité de conseillère de vente moyennant un salaire de 926,69 € bruts pour 151,67 heures mensuelles.
Après entretien préalable le 8 juillet 2013, la société Castorama France a notifié par lettre 11 juillet 2013 à Mme [L] la rupture anticipée du contrat liant les parties, sans préavis ni indemnité, aux motifs suivants qui fixent les limites du litige':
«'(') Vous ne vous êtes pas présentée en cours, à l'école [Établissement 1], ainsi qu'aux examens et aux rattrapages des examens, et vous n'avez fourni aucun justificatif : le 23 mai 2013, le 30 et le 31 mai 2013, le 6 et le 7 juin 2013, le 12, le 13 et le 14 juin 2013 le 20 juin 2013, le 21 juin 2013.
Dans le cadre de la signature de votre contrat de professionnalisation (') vous vous êtes engagée à travailler pour notre établissement et à suivre la formation prévue au contrat.
(') Lors de la remise du calendrier prévisionnel de vos jours de cours et d'examens, le 2 juillet 2012, figuraient déjà les dates d'examens prévus les 12, 13 et 14 juin 2013 (soumis à modifications éventuelles).
Vous n'avez pas respecté les clauses de votre contrat en refusant de suivre les enseignements dispensés par l'école, en omettant d'aller à vos examens ainsi qu'aux rattrapages proposés par l'école.
(') Par ailleurs, pour chacune des absences mentionnées, vous n'avez fourni aucun justificatif d'absence à l'école [Établissement 1] et au service du personnel.
Par conséquent, après étude de votre dossier et avoir recueilli vos explications, et après réflexion, nous vous informons de notre décision de rompre de manière anticipée votre contrat de travail à durée déterminée pour faute grave.'».
Selon l'article L. 6325-3 du Code du travail régissant notamment le contrat de professionnalisation, le salarié s'engage à travailler pour le compte de son employeur et à suivre la formation prévue au contrat.
S'agissant par ailleurs d'un contrat à durée déterminée, par application de l'article L. 1243-1 du même Code, celui-ci ne peut comme tel être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave ou de force majeure.
En l'espèce Mme [L] produit aux débats des certificats médicaux d'arrêt de travail justifiant de la légitimité de ses absences du centre de formation auquel elle était inscrite les 30 et 31 mai 2013 ainsi que le 21 juin 2013.
Elle communique aussi un extrait d'acte de son mariage le 8 juin 2013 devant l'officier d'état civil de la mairie [Localité 1] et se prévaut de l'article 6.7 de la convention collective applicable instituant en faveur des salariés le droit à un congé de quatre jours ouvrables en pareil cas
S'agissant par ailleurs des absences reprochées à la salariée du centre de formation [Établissement 1] les 23 mai, 6,7, 12, 13 et 20 juin 2013, si la réalité de ses absences est établie par la correspondance échangée entre le centre de formation et la société Castorama France, ledit centre de formation a cependant notifié à Mme [L] par lettre du 9 août 2013 ' postérieurement donc à la rupture du contrat de travail et apparemment dans l'ignorance où il était de cet événement ' «'Afin de valider votre 1ère année, nous vous engageons à venir effectuer les rattrapages des heures manquées précisées ci-dessus au centre de formation. (') D'autre part (') si vous vous absentez de nouveau à compter de la prochaine rentrée scolaire, vous serez dans un 1er temps convoquée à un entretien, et si absences récurrentes, exclue temporairement ou définitivement de notre établissement'; parallèlement sur le plan pédagogique, nous ne serions pas en mesure de maintenir votre inscription à votre examen BTS Muc en juin 2014.'».
Il résulte de ces éléments, d'une part qu'aucun reproche n'est fait par la société Castorama France à Mme [L] relativement à des absences de son lieu de travail proprement dit, d'autre part que l'intéressée justifie en partie ses absences du centre de formation où elle était scolarisée par des motifs légitimes, enfin que lesdites absences n'étaient pas elles-mêmes rédhibitoires puisqu'elles laissaient encore ouverte à la jeune salariée la possibilité de se présenter à l'échéance prévue aux épreuves du diplôme préparé, sauf à ce qu'elle accepte d'effectuer des «'rattrapages des heures manquées'».
Ainsi dans ces conditions, les manquements reprochés à Mme [L] ne constituant pas une violation par l'intéressée de ses obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rendait impossible le maintien de l'intéressée dans l'entreprise, la rupture anticipée du contrat de professionnalisation par l'employeur est en conséquence abusive.
En application de l'article L. 1243-4 du Code du travail, Mme [L] est dès lors fondée à solliciter selon le calcul vérifié exact détaillé à la page 7 de ses conclusions écrites, le paiement d'une indemnité de 10 472,38 € d'un montant égal aux rémunérations qui auraient dû lui être versées depuis la rupture jusqu'au terme prévu du contrat le 30 juin 2014.
Sa demande complémentaire en dommages-intérêts pour préjudice moral allégué doit en revanche être rejetée comme infondée à défaut de justifier d'un préjudice distinct de celui déjà ci-avant réparé.
En application de l'article 700 du Code de procédure civile, il est enfin équitable d'allouer 1 000 € à Mme [L] en remboursement de ses frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale, par mise à disposition au greffe';
Infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau';
Condamne la société Castorama France à payer à Mme [C] épouse [L] 10 472,38 € de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de professionnalisation liant les parties et 1 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile';
La condamne aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIERLA PRESIDENTE