COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
15e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 28 OCTOBRE 2016
N° 2016/805
Rôle N° 15/06105
SCA LA FAVORITE
C/
[K] [N]
Grosse délivrée
le :
à : Me Xavier PIETRA
Me Romain CHERFILS
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 07 Avril 2015 enregistré au répertoire général sous le n°14/1966.
APPELANTE
SCA LA FAVORITE prise en la personne de son gérant en exercice Monsieur KHALILI Nasser [R] domicilié ès qualités audit siège, demeurant [Adresse 4]
représentée par Me Xavier PIETRA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté par Me Christophe AYELA, avocat au barreau de PARIS, plaidant
INTIME
Monsieur [K] [N]
né le [Date naissance 1] 1943 à [Localité 2], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Romain CHERFILS de la SELARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté par Me Etienne GOUESSE, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Yasmine BOUSSAAD, avocat au barreau de PARIS, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 14 Septembre 2016 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Marie-Madeleine BOUSSAROQUE, Présidente, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Marie-Madeleine BOUSSAROQUE, Présidente (rédacteur)
Madame Françoise BEL, Conseiller
Monsieur Dominique TATOUEIX, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Octobre 2016, puis prorogé au 28 Octobre 2016.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Octobre 2016,
Signé par Madame Marie-Madeleine BOUSSAROQUE, Présidente et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCEDURE
Le lotissement [Établissement 1] situé [Adresse 2]ES est divisé en 5 lots.
Les lots numéro 3 et numéro 4 constituent l'immeuble CALIFORNIE FAVORITE dont Monsieur [K] [N] est un des copropriétaires.
Un cahier des charges du lotissement établi par acte notarié du 27 mai 1952 et état modificatif du 8 décembre 1952 prévoyait des zones non aedificandi et des volumes non altius tollendi, concernant notamment le lot numéro 5 situé dans une zone basse du terrain, afin de ne pas porter préjudice aux bâtiments situés sur la partie haute du lotissement.
La SCA LA FAVORITE a acquis le lot n° 5 sur lequel elle a fait édifier un immeuble, ainsi qu'un mur de soutènement.
Le 30 mars 1994 le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Établissement 1] a fait assigner la SCA LA FAVORITE devant le tribunal de grande instance de Grasse afin d'obtenir le prononcé de la démolition des constructions édifiées en violation du cahier des charges, et par jugement du 26 novembre 2002, cette juridiction, statuant après l'organisation d'une expertise judiciaire confiée à Monsieur [W] [F], a notamment ordonné la mise en conformité de la construction édifiée par la SCA LA FAVORITE, au terme d'une procédure à laquelle était intervenue le syndicat des copropriétaires de l'immeuble CALIFORNIE FAVORITE ainsi que Monsieur [K] [N] en sa qualité de co-loti, .
Sur appel de ce jugement la cour d'appel d'Aix en Provence a rendu le 9 janvier 2006, un arrêt régulièrement cité dans les décisions postérieures, qui a :
- constaté que les dispositions du jugement qui déclaraient recevable l'intervention volontaire du syndicat des copropriétaires [Adresse 3] et de Monsieur [K] [N] n'était pas contestées
- déclaré les appels recevables
- confirmé le jugement du 26 novembre 2002 en ce qu'il avait ordonné la mise en conformité de la construction édifiée par la SCA LA FAVORITE , dénommé [Établissement 2] , sur le lot numéro 5 du lotissement [Établissement 1], et la destruction des parties de l'immeuble qui ne respectaient pas les dispositions contractuelles du cahier des charges du lotissement [Établissement 1], conformément aux conclusions de l'expert Monsieur [W] [F], lequel avait limitativement énuméré les zones concernées, à savoir :
tout le niveau R-1 sauf 3 caves, l'escalier, l'ascenseur,
tout l'appartement du rez-de-chaussée (83 m²) plus une partie du hall et du palier
au niveau R+1 tout l'appartement numéro 3 (86 m²) et une partie du palier
au niveau R+1 pour le surplus de l'étage (appartement numéro 2 de 181 m² plus le reste du palier et de l'ascenseur) les murs au-dessus du niveau des linteaux (à partir des 2,50 m de hauteur environ) et tout le plafond
tout le niveau R+2 (comprenant essentiellement un appartement de 215 m² outre les terrasses) sauf la partie de l'escalier d'accès située au-dessous de la côte 61,20 m NGF
la terrasse est du niveau R+1 an sa plus grande partie
- confirmé également le jugement du 26 novembre 2002 en ce qu'il avait condamné solidairement la compagnie Mutuelle du Mans Assurances, Me [L] , la SCPI dont il est un des associés, Me [O] et la SCPI dont il est un des associés à garantir la SCA LA FAVORITE des conséquences de cette décision..
- y ajoutant, ordonné à la SCA LA FAVORITE de déposer un dossier de permis lui permettant de procéder à la transformation de son bâtiment pour le mettre en conformité avec les dispositions de l'arrêt, et ce, dans les 4 mois de sa signification, sous astreinte provisoire de 1000 € par jour de retard au profit du syndicat des copropriétaires [Établissement 1]
- désigné Monsieur [F], expert, avec mission de vérifier le dépôt par la SCA LA FAVORITE d'un permis de construire aux fins de modification de sa construction et vérifier que le dossier de permis correspondait à la mise en conformité fixée selon les termes de l'arrêt, et suivre l'instruction du dossier de permis de construire.
Statuant également sur appel d'une ordonnance de référé du 7 novembre 2004, la cour a, dans le même arrêt, ordonné la démolition par la SCA LA FAVORITE du mur de soutènement et de la pergola construits sur la zone non aedificandi de son lot du lotissement [Établissement 1] , dans les six mois de la signification de l'arrêt sous astreinte de 100 € par jour de retard au profit du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Établissement 1].
Le 11 juillet 2007 la Cour de Cassation a rejeté le pourvoi formé contre cet arrêt.
***
Le litige a ensuite porté sur la liquidation des astreintes assortissant les condamnations prononcées à l'encontre de la SCA LA FAVORITE .
Par arrêt du 18 décembre 2009, la cour d'appel d'Aix en Provence a infirmé le jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Grasse le 16 septembre 2008 en ce qu'il avait fixé l'astreinte à la somme de 5000 €par jour de retard et,
- a déclaré recevable et fondée l'intervention volontaire de Monsieur [K] [N], en sa qualité de co-loti du lotissement [Établissement 1]
- a fixé respectivement à 1000 € et 100 € les taux de l'astreinte assortissant les injonctions résultant de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix en Provence du 19 janvier 2006 au profit du syndicat des copropriétaires [Adresse 3]
- a jugé que les injonctions de l'arrêt du 9 janvier 2006 prononcées au profit du syndicat des copropriétaires [Adresse 3] étaient assorties au profit de M [N] d'une astreinte journalière courant à compter de la signification de l'arrêt à hauteur de 1000 € et 100€
- a condamné la SCA LA FAVORITE à payer au syndicat des copropriétaires [Adresse 3] et à Monsieur [K] [N] la somme de 1000 € chacun en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Cet arrêt a été signifié à la SCA La Favorite le 9 février 2010.
Après qu'ait été rendu par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Grasse un jugement du 11 juillet 2011 liquidant l' astreinte prononcée au bénéfice du syndicat des copropriétaires [Adresse 3] dont le montant a été réduit par la cour d'appel de ce siège, Monsieur [K] [N] a fait délivrer le 3 avril 2014 à la SCA LA FAVORITE une assignation à comparaître devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Grasse pour obtenir la liquidation de l'astreinte prononcée à son bénéfice, réclamant à cet égard pour la période comprise entre le 10 février 2010, lendemain du jour de la signification de l'arrêt du 18 décembre 2009 et le 1er avril 2014 :
- une somme de 1'509'900 € au titre du dépôt du permis de construire
- somme de 150'900 € au titre de la démolition du mur de soutènement,
ainsi que le prononcé d'une nouvelle astreinte de 1500 € par jour de retard pour le dépôt du permis de construire et de 150 € par jour de retards pour la démolition du mur de soutènement.
Dans le jugement déféré rendu le 7 avril 2015, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Grasse a accueilli partiellement sa réclamation, et a
- débouté la société la SCA LA FAVORITE de sa demande de sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure qu'elle avait engagée le 18 mars 2014 à l'encontre des co-lotis dont Monsieur [K] [N], tendant à la désignation d'un expert judiciaire ayant pour mission de déterminer si leur propre construction était conforme au cahier des charges du lotissement, estimant cette réclamation sans incidence sur les obligations pesant sur la SCA LA FAVORITE depuis neuf ans
- écarté le moyen présenté par la SCA LA FAVORITE en ce que le retard d'exécution de ses obligations résultait de l'incompétence technique de l'expert Monsieur [F], et de l'existence de procédures administratives engagées en contestation du permis de construire par les co-lotis
- jugé que la désignation d'un expert réclamée par l'assureur des notaires, qui avaient été condamnés à la garantir du coût des travaux de mise en conformité, en vue de mesurer l'étendue de leurs propres obligations, était étrangère à la présente instance
- rejeté en conséquence les moyens tenant à l'existence d'une cause étrangère
- retenu en revanche que les obligations mises à la charge de la SCA LA FAVORITE par l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 9 janvier 2006 se heurtaient à des difficultés techniques certaines dans la mesure où elle nécessitaient la restructuration de l'immeuble après démolition partielle,
- écarté le moyen relatif aux coûts prohibitifs des travaux à mettre en 'uvre estimant que la démolition n'était pas impossible même si des précautions étaient à prendre afin de ne pas ébranler la structure
- admis que la suspension des travaux de démolition du mur de soutènement était justifié par les explications données par l'architecte, Monsieur [T] qui préconisait de procéder à une étude préalable confiée à un géo technicien afin de ne pas déstabiliser le terrain
- liquidé en conséquence à la somme de 50'000 € le montant de l'astreinte due au profit de Monsieur [K] [N] pour la période comprise entre le 10 février 2010 et le 3 février 2015, assortissant la condamnation de la SCA LA FAVORITE à déposer une demande de permis permettant la transformation du bâtiment afin de le mettre en conformité avec le cahier des charges du lotissement [Établissement 1]
- liquidé à 5000 € au profit de Monsieur [K] [N] pour la période comprise entre le 10 février 2010 et le 3 février 2015, le montant de l'astreinte assortissant la condamnation de la SCA LA FAVORITE à démolir le mur de soutènement
- condamné la SCA LA FAVORITE au paiement de ces sommes
- débouté Monsieur [K] [N] de sa demande d'augmentation du montant de l'astreinte
- débouté la SCA LA FAVORITE de sa réclamation tendant à la condamnation de celui-ci au paiement d'une amende civile et d'une indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile
- condamné la SCA LA FAVORITE à payer à Monsieur [K] [N] la somme de 1200 €sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
- condamné la SCA LA FAVORITE aux dépens
- rappelé l'exécution de plein droit s'attachant au jugement par application de l'article R 131 ' 4 du code des procédures civiles d'exécution.
Le 13 avril 2015 la SCA LA FAVORITE a interjeté un appel total de ce jugement.
Au terme de ses dernières écritures la SCA LA FAVORITE demande à la cour
d' INFIRMER le jugement entrepris en toutes ses dispositions notamment en ce qu'il a liquidé les astreintes découlant de l'arrêt de la Cour d'appel d'Aix en Provence du 9 janvier 2006 a
hauteur de 55.000 euros pour la période du 10 février 2010 au 3 février 2015 ;
et statuant à nouveau de
CONSTATER que la SCA LA FAVORITE s'est conformée à l'arrêt du 9 janvier 2006 en ayant déposé le 2 juillet 2015 et obtenu le 29 janvier 2016 un permis de construire conforme à l'injonction judiciaire sous astreinte du 9 janvier 2006, selon attestation de l'architecte DPLG [A] [Z] et de l'avis technique de l'Expert près la Cour Mme [D] (Pieces n°101, 103) ;
CONSTATER la caducité du cahier des charges de copropriété du [Établissement 1]
[Établissement 1] du 8 décembre 1952 du fait de la nouvelle loi ALUR du 24 mars 2014, et partant, l'absence de fondement légal de la demande de liquidation d'astreinte présentée par M. [N] ;
DIRE ET JUGER que le retard dans l'inexécution par la SCA LA FAVORITE de1'injonction du 9 janvier 2006 est lié aux inexécutions et violations graves et répétées du cahier des charges par les SDC adverses . dont le [Adresse 3] et M. [N], lesquelles ont été révélées en cours de procédure, ainsi qu'aux comportements inadéquats de ces derniers au sens de l'article L131-4 du Code des procédures civiles d'exécution ;
DIRE ET JUGER que le comportement inadéquat de M. [N] est constitutif d'une
cause étrangère au sens de l'article L131-4 du Code des procédures civiles d'exécution
DIRE ET JUGER, s'agissant de l'opération de démolition partielle définie par l'arrêt du
9 janvier 2006, que la SCA LA FAVORITE a rencontré des difficultés techniques majeures cxtérieures ct totalement imprévues par le titre exécutoire ;
CONSTATER la mauvaise foi de M. [N] sollicitant les astreintes litigieuses pour
la période du 10 février 2010 au 3 février 2015 ;
CONSTATER que l'effet comminatoire des astreintes prononcées aux termes des arrêts de la Cour d'appel d'Aix en Provence du 9 janvier 2006 et du 18 décembre 2009 est
atteint, les liquidations d'astreintes s'élevant à cette date à 3.036.350 euros minimum et une
procédure de saisie de la Villa Marion étant en cours devant le Tribunal de grande instance de Grasse ;
DEBOUTER M. [N], de l'ensemble de ses demandes en supprimant les astreintes
sollicitées par ce dernier, en particulier pour la période du 10 février 2010 au 3 février 2015 ;
DEBOUTER M. [N] de ses nouvelles demandes d'augmentation du montant et de
prolongation de la période de liquidation des astreintes jusqu'au 15 février 2016 ;
A TITRE SUBSIDIAIRE,
SURSEOIR A STATUER dans l'attente de l'expertise judiciaire menée par l'Expert
M. [S] et de la remise de sa ' note sur l'analyse du Permis de Construire' obtenue par
la SCA LA FAVORITE le 29 janvier 2016 dans le cadre de la procédure pendante en démolition des constructions illicites du [Adresse 3] et de M. [N] et de l'issue des procédures en cassation en cours sur les trois arrêts du 23 octobre 2015 rendus par la Cour ; ainsi que du jugement au fond sur l'assignation en caducité délivrée par ses soins ;
REDUIRE le montant de l'astreinte sollicitée à la somme de 1 euro en raison de la disproportion des condamnations prononcées a l'encontre de la SCA LA FAVORITE et de la
mauvaise foi de M. [N] qui oeuvre pour s'enrichir à son détriment alors qu'il viole lui-même, de façon plus grave encore, le cahier des charges du lotissement ;
EN TOUTE HYPOTHESE,
CONDAMNER M. [N] a payer a la SCA LA FAVORITE une somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du CPC et aux dépens.
Au terme de ses dernières écritures signifiées le 31 août 2016, M [K] [N] demande à la cour
Vu les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, et des articles 131-1 et 131-4
du Code des procédures civiles d'exécution,
de :
CONSTATER qu'au soutien de sa demande, la SCA a renoncé à solliciter un sursis a
statuer;
CONSTATER que, dans son arrêt du 9 janvier 2006, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a définitivement jugé que le cahier des charges du lotissement n'était pas caduc ;
CONSTATER que la SCA La Favorite n'a toujours pas exécuté l'arrêt rendu par la Cour d'appel d'Aix-en-Provence du 9 janvier 2006 et a employé ses efforts à ne pas le faire ;
CONSTATER que des astreintes respectives de 1.000 euros pour le depôt du permis et de 100 euros pour la démolition du mur de soutènement par jour de retard ont été prononcées au profit de Monsieur [K] [N] aux termes dc l'arrêt rendu par la Cour d'appel d'Aix-en-Provence le 18 décembre 2009 et signifié le 9 février 2010 ;
CONSTATER que par jugement en date du 7 avril 2015, le Juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance dc Grasse a constaté l'inexécution partielle de ses obligations par la SCA La Favorite et jugé qu'il convenait de liquider une astreinte de 50.000 euros pour le dépot d'une demande de permis de construire et de 5.000 euros pour l'obligation de démolition du mur de soutènement ;
Dans ces conditions,
DONNER ACTE à Monsieur [N] de ce que la SCA La Favorite a renoncé a solliciter un sursis a statuer dans ce dossier ;
CONFIRMER le jugement rendu en ce qu'il a constaté que la SCA La Favorite n'avait pas exécuté ses obligations tirées de l'arrêt de la Cour d'appe1 d'Aix-en-Provence du 9 janvier 2006 ;
CONFIRMER le jugement rendu en ce qu'il a retenu un principe de liquidation des astreintes au bénéfice de Monsieur [N] ;
INFIRMER le jugement sur le montant de liquidation des deux astreintes et l'augmenter
dans la limite du montant ' mécanique' (nombre de jours x astreinte prononcée) de la liquidation, soit la somme de :
-2.395.000 euros pour le depôt du permis, sauf à parfaire à la date de la décision à intervenir
- 239.500 euros pour la démolition du mur de soutènement, pour la période comprise entre la signification de l'arrêt du 9 février 2010 et 31 août 2016 sauf à parfaire à la date de la décision à intervenir ;
A titre subsidiaire ,
ARRETER le cours de l'astreinte au 29 janvier 2016, portant ces sommes a 2.180.000 euros (pour le depôt du permis, sauf à parfaire) et 218.000 euros (pour la démolition, sauf à parfaire)
CONDAMNER la SCA La Favorite a lui verser le montant de la liquidation des astreintes retenu par la Cour à son profit ;
Enfin et en tout état de cause,
- condamner la SCA La Favorite à lui verser a une somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamner la SCA La Favorite aux entiers dépens d'appel, distraits au profit de Ia SELARL LEXAVOUE à AIX EN PROVENCE.
L'ordonnance clôturant l'instruction de la procédure a été rendue le 14 septembre 2016.
SUR CE
Attendu qu'il convient de se reporter pour l'exposé des moyens des parties à leurs écritures respectives visées supra.
SUR LA RECEVABILITÉ DE LA DEMANDE DE LIQUIDATION D'ASTREINTE:
Attendu que la demande présentée par Monsieur [K] [N] est en relation directe avec l'arrêt du 11 décembre 2009 qui a jugé qu'il disposait d'un intérêt et d'une qualité à agir afin de voir assortir les obligations pesant sur la SCA LA FAVORITE d'une astreinte de nature à la convaincre de faire preuve de célérité dans l'exécution de l'obligation lui incombant, et a dit et jugé que l'astreinte assortissant les injonctions de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 3 janvier 2006 au profit du syndicat des copropriétaires [Adresse 3] fixées à 1000 € et 100 € étaient également applicables à Monsieur [K] [N] à compter de la signification du présent arrêt: que les astreints liquidées au profit de la copropriété étaient bien que conséquentes largement inférieures au ' montant mécanique' fixé par l'arrêt précité et que M [N] n'a pas fait procéder par le passé à la liquidation de l'astreinte prononcée à son profit
SUR LES DEMANDES PRINCIPALES DE LA SCA LA FAVORITE
Sur la caducité du cahier des charges :
Attendu que la SCA LA FAVORITE conteste le fondement juridique de la liquidation de l'astreinte du fait de la caducité du cahier des charges depuis l'entrée en vigueur de la loi ALUR du 24 mars 2014. Or le champ d'application de cette loi n'inclut pas les dispositions contractuelles alors même que l'injonction assortie d'une astreinte prononcée contre la SCA LA FAVORITE s'attachait à la mise en conformité de la construction aux obligation résultant du cahier des charges établi en janvier 1954 et modifiées en décembre 1954, qui ont trait aux zones non aedificandi et non altius tollendi de la résidence, sans lien de droit avec les règles d'urbanisme ou le plan d'occupation des sols.
Sur l'exécution des obligations assorties d'une astreinte et les difficultés techniques rencontrées
Attendu que la SCA LA FAVORITE met en avant son exécution des obligations assorties de l'astreinte, pour s'être conformée à l'arrêt du 9 janvier 2006 en ayant déposé le 2 juillet 2015 et obtenu le 29 janvier 2016 un permis de construire conforme à l'injonction délivrée à son encontre, se prévalant à cet égard, des pièces figurant à son bordereau les numéros 101 et 103; que la première pièce consiste en une attestation établie le 13 juillet 2016 par l'architecte Monsieur [A] [Z], qui, reprenant la liste des défauts de conformité dressée par l'arrêt de 2006 sur la base des préconisations de l'expertise judiciaire, M [W] [F], affirme avoir élaboré le dossier de demande de permis de construire en veillant « avoir présenté les circonstances judiciaires dans lequel elle s'inscrit et surtout respecté scrupuleusement les injonctions de démolition partielle auxquelles la SCA LA FAVORITE était soumise en ayant pour cette raison indexé son rapport de présentation à sa demande de permis de construire et joint les plans du bâtiment illustrant les constructions existantes et celle que la SCA LA FAVORITE se trouve obligée de démolir dans l'exécution des décisions de 2002 et de 2006 »; que le permis de construire accordé par la mairie de [Localité 1] le de 9 janvier 2016 ( pièce n° 89) ne permettant pas de procéder à la vérification de l'effectivité de cette mise en conformité même si s'y trouve effectivement annexé le rapport de présentation auquel faisait référence M [Z], la SCA LA FAVORITE, a pour cette raison et devant l'objection soulevée à cet égard par l'arrêt du 27 mai 2016, produit un « avis technique » ( pièce N°103) donné le 29 juillet 2016 par l'architecte DPLG [Q] [D] qui conclut de la façon suivante :
« l'étude des plans du permis de construire permet de confirmer que la démolition des ouvrages
- construit en zone non aedificandi
- situé au-dessus de la côte NCF 61. 10
est bien prévu. La construction ainsi modifiée s'intègre dans la zone aedificandi et dans le volume de hauteur réglementaire.
La demande de permis de construire et le permis accordé le 29 janvier 2016 par la ville de Cannes sont ainsi conformes en tous points aux demandes formulées dans l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 9 janvier 2006.
Toutefois il y a lieu de préciser que la démolition d'une importante partie de l'immeuble est susceptible d'affecter la structure de la partie du bâtiment conservée. De plus, la démolition, l'écrêtement des murs ainsi que la reconstruction de la dalle et des murs porteurs auront des conséquences sur les aménagements intérieurs et les équipements qui devront être reconstruits (cloisons intérieures, électricité, sanitaire, chauffage, VMC, mobilier intégré, revêtements de murs et de sols etc.). De même les menuiseries extérieures du niveau+1 devront être remplacées.
Enfin la hauteur du plafond du premier étage risque d'être , sérieusement réduite suite à l'écrêtement des murs. »
Attendu toutefois que ces deux documents n'ont aucun caractère contradictoire ,alors même qu'ils ont été établis pendant le cours de l'instance engagée par M [K] [N] le 3 avril 2014 et que les trois précédents dépôts de permis de construire effectués les 29 janvier 2007( permis de démolir) , 22 mai 2008 ( permis de construire) et 31 décembre 2009 ( permis de construire modifié) avaient fait l'objet d'un rapport de constat de l'expert [F] dénonçant le 25 avril 2010 la non conformité des deux premiers à ses préconisations reprises par l'arrêt de 2006, et s'impossibilité de se prononcer sur le troisième ; que le permis du 29 janvier 2016 n'a pas été soumis à sa sagacité, contrairement à la préconisation de l'arrêt du 9 janvier 2006 ; que l'attestation établie à posteriori par l'architecte ayant participé à la demande du nouveau permis de construire et l'avis technique produits par la SCA LA FAVORITE , même illustrés par les plans modifiés figurant en annexe, sont insuffisants à constituer la démonstration par la SCA LA FAVORITE de l'exécution des obligations ayant présidé aux prononcé des injonctions à son encontre, mais permettent toutefois de mesurer les efforts fournis pour se mettre en conformité avec ce qui constituait sa première obligation, assortie d'une astreinte de 1000 € par jour de retard , étant rappelé qui lui incombait également de procéder dans le cadre de sa seconde astreinte à la suppression de la pergola, ce qui a été fait, et du mur de soutènement construit sur la zone non aedificandi de son lot du lotissement [Établissement 1]., dont les travaux ont été arrêtés sur la préconisation de l'étude du géotechnicien sous le motif d'un risque de porter atteinte à la stabilité des constructions avoisinantes, mais qui commande cependant de prendre en considération les difficultés auxquelles se heurtent la démolition de cet ouvrage.
Attendu que sans qu'il ne soit nécessaire de rappeler une nouvelle fois les difficultés liées à la nécessite de prévoir des travaux d'envergure, soulignés notamment par les avis techniques suscités par la SCA LA FAVORITE dont celui de Mme [D] T, du fait de la démolition d'une importante partie de l'immeuble qui est susceptible d'affecter la structure de la partie du bâtiment conservée et des conséquences prévisibles sur les aménagements intérieurs, la SCA LA FAVORITE n'a jamais apporté la preuve de ce que les travaux étaient irréalisables , d'autant qu'elle invoque maintenant sans en apporter néanmoins une démonstration suffisante à ce jour, avoir obtenu un permis de construire permettant une mise en conformité;
Sur l'effet comminatoire de l'astreinte
Attendu que l'évocation du coût important des travaux à réaliser est étranger à la liquidation de l'astreinte, ce même que que le montant important des astreintes liquidées ( 2 307 000 € selon ses calculs incluant les condamnations prononcées par le jugement déféré), la violation de son obligation de faire s'étant poursuivie depuis plus de dix ans et la persistance de son absence d'exécution en constituant la preuve contraire, ainsi que l'a rappelé la cour d'appel de ce siège dans son arrêt du 27 mai 2016.
Sur le principe de proportionnalité et de personnalisation de la sanction financière
Attendu que ces considérations ne viennent pas en contradiction avec le respect du principe de proportionnalité et de la personnalisation de la sanction financière dès lors l'astreinte ne constitue pas une sanction, et que sa liquidation doit tenir compte, selon l'exigence posée par l'article L 131-4 du code des procédures civiles d'exécution « du comportement de celui à qui l' injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter » , et qu'elle peut être supprimée , en tout ou partie en cas de survenance d'une cause étrangère. », alors même la fixation du montant des astreintes liquidées a déjà intégré les difficultés des études techniques opérationnelles nécessairement rencontrées et le comportement de la SCA LA FAVORITE étant à l'origine du retard pris par la procédure
Sur la cause étrangère et le comportement du débiteur et du créancier de l'astreinte:
Attendu que le juge de l'exécution a considéré avec justesse par des motifs que la cour adopte que la SCA LA FAVORITE ne rapporte pas la preuve de l'existence d'une cause étrangère l'exonérant de l'exécution de ses propres obligations d'autant qu'elle était elle même à l'origine du retard pris pour avoir contribué à l'allongement des délais en suspendant l'accès aux lieux concernés à l'expert judiciaire jusqu'à la fin du mois de juin 2012 alors que celui-ci en avait demandé un relevé détaillé ainsi que de leurs abords lors de son accedit le 18 février 2010 ; qu'elle ne rapporte pas non plus la preuve de ce que M [K] [N] ait mis obstacle à l'exécution de la mesure, personnellement ou en qualité de membre de la copropriété [Adresse 3], laquelle a été autorisée par arrêt du 11 septembre 2014 à faire exécuter des travaux de démolition dans la villa Marion; et que celui-ci ne peut être considéré comme bénéficiant d'un enrichissement sans cause puisque il agit en vertu de décisions de justice lui ayant reconnu intérêt et qualité pour agir, et que sa propre violations des règles du lotissement alléguée tardivement par la SCA LA FAVORITE dans le cadre d'une procédure judiciaire distincte est sans effet sur l'obligation de cette société à se conformer au cahier des charges; qu'il en est de même de l'instance engagée contre les notaires et études notariales condamnés à la garantir par le jugement du 9 janvier 2006, cette nouvelle procédure impliquant ' d'autres rapports de droit insusceptibles de justifier l'inexécution d'une décision de justice', non opposables à M [K] [N]
SUR LES DEMANDES SUBSIDIAIRES PRESENTEES PAR LA SCA LA FAVORITE :
Attendu que contrairement à ce que soutient M [K] [N] , la SCA LA FAVORITE n'a pas renoncé à sa demande de sursis à statuer, qu'elle présente toutefois à titre subsidiaire dans l'attente de l'expertise judiciaire confiée à M. [S] et de la remise de sa ' note sur l'analyse du Permis de Construire' obtenu le 29 janvier 2016 dans le cadre de la procédure pendante en démolition des constructions illicites du [Adresse 3] et de M. [K] [N] et de l'issue des procédures en cassation en cours sur les trois arrêts du 23 octobre 2015 rendus par la Cour, mais que d'une part, les arrêts rendus par la cour d'appel de ce siège portant liquidation de l'astreinte sont exécutoires, et que, d'autre part la liquidation de l'astreinte au bénéfice de M [K] [N] sera fixée pour une période allant jusqu'au 29 janvier 2016, la créance de M [K] [N] étant certaine jusqu'à cette date, sans préjudice de ses droits éventuels pour la période suivante.
Attendu qu'il résulte de ces éléments que la demande de réduction du montant de l'astreinte liquidée sera accueillie favorablement, la situation analysée au regard des l'article L 131-4 du code des procédures d'exécution et son évolution dans le sens d'une exécution de l'obligation assortie de l'astreinte commandent de la réduire dans de très larges proportions par rapport à son montant théorique , et même à celui retenu par le premier juge et à fixer à 40 000 € celui de l'astreinte assortissant la condamnation de la SCA LA FAVORITE à déposer une demande de permis permettant la transformation du bâtiment afin de le mettre en conformité avec le cahier des charges du lotissement [Établissement 1] et à 4000 € pour celui assortissant sa condamnation à démolir le mur de soutènement, mais à modifier toutefois cette décision en ce que l'astreinte sera liquidée sur une période plus longue, comprise entre le 10 février 2010, jour suivant la signification de l'arrêt du 18 décembre 2009 et le 29 janvier 2016.
Sur les dépens et l'application de l'application de l'article 700 du code de procédure civile
Attendu que la SCA LA FAVORITE qui succombe principalement en ses demandes supportera la charge des dépens et devra indemniser M [K] [N] de l'engagement de ses frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, après avoir délibéré conformément à la loi,
Déclare recevable l'appel engagé par la SCA LA FAVORITE
Dit n'y avoir lieu de surseoir à statuer
Rejette l'exception portant sur la caducité du cahier des charges de la copropriété du [Établissement 1] du 8 décembre 1952 du fait de la nouvelle loi ALUR du 24 mars 2014, et de l'absence de fondement légal de la demande de liquidation d'astreinte présentée par M. [K] [N]
Confirme le jugement déféré sur le montant de l'astreinte, et sur la période sur laquelle porte la liquidation
Fixe à la somme de 40'000 € le montant de l'astreinte due au profit de Monsieur [K] [N] assortissant la condamnation de la SCA LA FAVORITE à déposer une demande de permis permettant la transformation du bâtiment afin de le mettre en conformité avec le cahier des charges du lotissement [Établissement 1], pour la période comprise entre le 10 février 2010 et le 29 janvier 2016
Fixe à la somme de 4000 € au profit de Monsieur [K] [N] le montant de l'astreinte assortissant la condamnation de la SCA LA FAVORITE à démolir le mur de soutènement pour la période comprise entre le 10 février 2010 et le 29 janvier 2016
Condamne en conséquence la SCA LA FAVORITE à payer à M [K] [N] les sommes de 40 000 € et de 4 000 €
Confirme le jugement pour le surplus
Rejette toutes autres demandes des parties
Condamne la SCA LA FAVORITE à payer à M [K] [N] une indemnité de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, venant en complément de celle fixée par le juge de l'exécution
Condamne la SCA LA FAVORITE aux dépens.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,