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25/11/2016 | FRANCE | N°14/20002

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre a, 25 novembre 2016, 14/20002


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 25 NOVEMBRE 2016



N°2016/692















Rôle N° 14/20002







[O] [Y]





C/



SAS ALQUIER































Grosse délivrée le :

à :

Me Sebastien SALLES, avocat au barreau de MARSEILLE



Me Laure SEMPE-FILIPPI, avocat au barreau de MARSEILLE





Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE - section - en date du 30 Septembre 2014, enregistré au répertoire général sous le n° F 13/04025.





APPELANT



Monsieur [O] [Y], demeurant [Adresse ...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 25 NOVEMBRE 2016

N°2016/692

Rôle N° 14/20002

[O] [Y]

C/

SAS ALQUIER

Grosse délivrée le :

à :

Me Sebastien SALLES, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Laure SEMPE-FILIPPI, avocat au barreau de MARSEILLE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE - section - en date du 30 Septembre 2014, enregistré au répertoire général sous le n° F 13/04025.

APPELANT

Monsieur [O] [Y], demeurant [Adresse 1]

Comparant en personne, assisté de Me Sebastien SALLES, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SAS ALQUIER, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Laure SEMPE-FILIPPI, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 03 Octobre 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Nathalie FRENOY, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur David MACOUIN, Conseiller faisant fonction de Président

Mme Nathalie FRENOY, Conseiller

Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Nadège LAVIGNASSE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Novembre 2016

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Novembre 2016

Signé par Monsieur David MACOUIN, Conseiller faisant fonction de Président et Mme Nadège LAVIGNASSE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Monsieur [O] [Y] a été engagé par la société ALQUIER, par contrat de travail à durée indéterminée en date du 29 avril 1991, en qualité d'aide métallier.

Son contrat de travail a été suspendu à compter du 29 janvier 2010, date d'un grave accident de la circulation dont il a été victime. Il a été reconnu travailleur handicapé en septembre 2011.

Un contrat de rééducation professionnelle ( CRE) a été conclu entre les parties et la CPAM le 6 juin 2012, sur un poste de magasinier, opérateur sur machine à commandes numériques. Le contrat a été rompu par la société ALQUIER le 18 avril 2013.

Lors de la visite médicale périodique du 27 mai 2013, Monsieur [Y] a été déclaré 'inapte définitif serrurier métallier poseur et à tous travaux de force et de manutention, dans le cadre du contrat de rééducation professionnelle signé avec la CPAM du 01/09/2012 pour sa réadaptation professionnelle avec formation, apte au poste de magasinier ( gestion de stocks, de matériels) et opérateur sur machines numériques (plieuse) sans manutention des tôles".

Le 30 mai 2013, la société ALQUIER lui a proposé deux postes de reclassement, qu'il a refusés.

Il a été convoqué à un entretien préalable et licencié par lettre recommandée avec accusé de réception du 2 juillet 2013 pour impossibilité de reclassement consécutive à une inaptitude constatée par la médecine du travail du fait du refus des postes de reclassement proposés.

Contestant son licenciement, Monsieur [Y] a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille qui, par jugement du 30 septembre 2014, a

- constaté que l'employeur tout en appliquant l'article 7 du CRE, n'avait pas répondu aux divers courriers et demandes d'explication de l'inspection du travail (17110/2012 - 10/12/2012- 17/0112013),

- constaté que l'employeur n'avait pas respecté son obligation de former Monsieur [Y] [O] par CRE signé le 06/0612012 entre les parties, contrat auquel il a mis fin le 18/0412013,

- dit que le licenciement pour inaptitude, consécutif à ces manquements, prononcé à l'encontre de Monsieur [Y] [O] est sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la SAS ALQUIER à payer à Monsieur [Y] [O], les sommes suivantes:

*13000 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*4 146 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

*414,60 € bruts à titre de congés payés afférents,

*900 € nets au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné à la SAS ALQUIER de remettre à Monsieur [Y] [O], les documents sociaux en concordance avec le présent jugement,

- rappelé qu'en application de l'article R 1454-28 du Code du travail, l'exécution provisoire est de droit pour les sommes accordées par application de l'article R 1454-14 du Code du travail à hauteur maximale de 9 mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire, cette moyenne étant de 2073,00 €,

- condamné la société ALQUIER aux dépens.

Le 17 octobre 2014, Monsieur [O] [Y] a interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance du 2 avril 2015, l'instance ouverte sur cette déclaration d'appel a été jointe à celle ouverte sur la déclaration d'appel formée pour le compte de [O] [Y] en date du 6 janvier 2015.

Dans ses conclusions soutenues à l'audience, l'appelant demande à la Cour de:

-infirmer le jugement déféré en condamnant la société ALQUIER à lui verser 84168 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit le licenciement pour inaptitude dépourvu de cause réelle et sérieuse, en ce qu'il a condamné la société ALQUIER à lui verser 4 676 € à titre d' indemnité compensatrice de préavis et 476,60 € au titre des congés payés sur préavis,

-condamner l'intimée à lui verser 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à prendre en charge les dépens.

Aux termes de ses écritures soutenues oralement, la société ALQUIER, intimée, conclut, étant reçue en son appel incident:

- à l'infirmation du jugement déféré,

- au débouté des demandes de Monsieur [Y],

- à la condamnation de ce dernier aux dépens.

Pour plus ample exposé, il est renvoyé aux écritures déposées par les parties et réitérées oralement à l'audience.

MOTIFS DE L'ARRET

Il convient tout d'abord de recevoir la société ALQUIER en son appel incident.

Sur le reclassement :

Monsieur [Y] soutient que son reclassement a été envisagé par son employeur dès la visite médicale de pré-reprise du 28 novembre 2011 et critique le sérieux et la loyauté des recherches de reclassement de son employeur qui, d'une part dans le cadre du Contrat de Rééducation Professionnelle, n'a pas aménagé son poste, ni pourvu à sa formation pour qu'il occupe le poste de magasinier et devienne ensuite responsable logistique et qui, d'autre part après avoir mis fin au CRE, ne lui a proposé que deux postes à temps partiel.

La société ALQUIER fait valoir que le CRE a été signé sur deux postes qui, même à temps partiel, nécessitaient en réalité de la manutention et qu'elle a été contrainte d'alléger les horaires du salarié et de rompre le contrat. Relativement à ses recherches de reclassement, elle rappelle avoir proposé deux postes mais non le poste de responsable logistique, complètement différent du poste de magasinier et pour lequel l'appelant n'aurait pu recevoir de formation puisqu'il n'avait pas les compétences de base nécessaires.

L'article R. 4624-31 du code du travail n'impose pas que la constatation de l'inaptitude soit faite lors d'un examen médical de reprise consécutif à une suspension du contrat de travail, le médecin du travail pouvant la constater après tout examen médical qu'il pratique au cours de l'exécution du contrat de travail et notamment lors d'une visite médicale périodique prévue par l' article R4624-16 du Code du travail. Le médecin du travail est alors habilité par l'article L4624-1 du Code du travail dans sa version applicable au litige, [...]' à proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé physique et mentale des travailleurs.

L'employeur est tenu de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite.

En cas de difficulté ou de désaccord, l'employeur ou le salarié peut exercer un recours devant l'inspecteur du travail. Ce dernier prend sa décision après avis du médecin inspecteur du travail.'

La recherche de reclassement du salarié doit s'apprécier à l'intérieur du groupe auquel appartient l'employeur concerné, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettent la permutation de tout ou partie du personnel.

Il appartient à l'employeur d'apporter la preuve de la réalité de ses recherches de reclassement et de son impossibilité à reclasser le salarié.

L'employeur ne peut restreindre ses recherches en fonction de la mobilité géographique déclarée par le salarié.

Pour justifier de ses efforts sérieux et loyaux de reclassement, la société intimée produit le CRE qu'elle a accepté de signer avec le salarié et la CPAM, sa lettre du 30 mai 2013 proposant au salarié deux postes de reclassement (au sein de la société ALQUIER à [Localité 1]: opérateur sur machine à commande numérique sans manipulation de tôles à raison d'un quart de temps au taux horaire de 10€ et au sein de la société AM Rhône Alpes à [Localité 2] dans le Rhône ( même Groupe):poste de magasinier à mi-temps au taux horaire de 10 €). Elle verse aussi au débat le refus écrit du salarié en date du 5 mai suivant, la fiche de poste de responsable logistique et le curriculum vitae de Monsieur [M], recruté sur ce poste.

Il est établi, au vu des pièces produites, que les deux propositions de reclassement faites à [O] [Y] l'ont été trois jours seulement après l'avis définitif d'inaptitude, et sans qu'il soit démontré que l'employeur ait sollicité le médecin du travail pour étudier des solutions de reclassement compatibles avec ses préconisations, ait sollicité toutes les sociétés du Groupe auquel elle appartient, ait analysé la faisabilité d'un reclassement par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. En effet, aucune pièce, hormis le courrier de proposition du 30 mai 2013 n'est produite sur les efforts de recherches allégués.

Par conséquent, sans même analyser la bonne exécution du CRE et ses éventuelles incidences, il y a lieu de dire le licenciement de G. [Y] dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Soulignant son ancienneté et la perte de revenus induite par ce licenciement, sa situation de demandeur d'emploi d'août 2013 à juillet 2015 ( date d'un emploi à GSF), puis de septembre à mars 2016 (date de signature d'un contrat de travail à durée déterminée ) et ses répercussions familiales, G. [Y] réclame réparation à hauteur de 84 168 €.

Par application de l'article L 1235-3 du code du travail, au regard de l'âge, de la qualification, de la rémunération moyenne (2 073€), de l'ancienneté de [O] [Y], des circonstances de la rupture et des justificatifs produits de sa situation de demandeur d'emploi, il convient d'évaluer à la somme de 40 000 euros la juste indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse, et d'infirmer ainsi la décision du conseil de prud'hommes de Marseille.

En revanche, les dispositions du jugement relatives à l'indemnité compensatrice de préavis due nonobstant l'inaptitude en raison de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, et aux congés payés y afférents doivent être confirmées en ce que les sommes allouées sont conformes à ses droits.

Sur les autres dispositions du jugement:

Les autres dispositions du jugement du conseil de prud'hommes de Marseille en date du 30 septembre 2014, qui ne sont pas discutées par les parties, doivent être confirmées, sauf celles relatives à l'exécution provisoire, inopérante en cause d'appel.

Sur les frais irrépétibles et les dépens:

Le jugement de première instance doit être confirmé relativement aux frais irrépétibles et aux dépens.

L'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel et d'allouer à ce titre la somme de 1 500 € à [O] [Y].

L'employeur, qui succombe, doit être tenu aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Confirme le jugement déféré sauf sur le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Statuant à nouveau sur ce point, et y ajoutant

Condamne la société ALQUIER à payer à [O] [Y] les sommes de

- 40 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les autres demandes des parties,

Condamne la société ALQUIER aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

David MACOUIN faisant fonction


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre a
Numéro d'arrêt : 14/20002
Date de la décision : 25/11/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9A, arrêt n°14/20002 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-11-25;14.20002 ?
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