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30/03/2017 | FRANCE | N°14/24280

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre c, 30 mars 2017, 14/24280


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

8e Chambre C



ARRÊT AU FOND

DU 30 MARS 2017



N° 2017/178













Rôle N° 14/24280







SA BANQUE CHAIX





C/



[A] [L]





















Grosse délivrée

le :

à :ALLIO



GIGUET

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribuna

l de Commerce de TARASCON en date du 17 Novembre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 2014 00374.





APPELANTE



SA Banque [F], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Michel ALLIO, avocat au barreau de TARASCON et assistée de Me Rémi CHAMPRU, avocat au barreau de TA...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

8e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 30 MARS 2017

N° 2017/178

Rôle N° 14/24280

SA BANQUE CHAIX

C/

[A] [L]

Grosse délivrée

le :

à :ALLIO

GIGUET

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de TARASCON en date du 17 Novembre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 2014 00374.

APPELANTE

SA Banque [F], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Michel ALLIO, avocat au barreau de TARASCON et assistée de Me Rémi CHAMPRU, avocat au barreau de TARASCON

INTIME

M. [A] [L] mandataire à la liquidation judiciaire de M. [S] [N], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Gilles GIGUET de la SELARL BURAVAN DESMETTRE GIGUET FAUPIN, avocat au barreau de TARASCON et assisté de Me Lila LACIDI, avocat au barreau de TARASCON de la Selarl BURAVAN

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 14 Février 2017 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Dominique PONSOT, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Dominique PONSOT, Président

Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Conseiller

Madame Claudine PHILIPPE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Mars 2017

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Mars 2017,

Signé par Monsieur Dominique PONSOT, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu le jugement du tribunal de commerce de Tarascon du 17 novembre 2014 ayant, notamment :

- condamné la banque [F] à payer à M. [S] [N] :

- la somme de 88.420,13 euros outre intérêts au taux légal à compter du jour de la mise en demeure du 26 novembre 2008,

- la somme de 4.550,58 euros outre intérêts au taux légal à compter du jour de la demande,

- débouté les parties de leurs conclusion plus amples ou contraires,

- condamné la banque [F] aux dépens ;

Vu la déclaration du 24 décembre 2014, par laquelle la SA Banque [F] a relevé appel de cette décision ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 14 décembre 2015, aux termes desquelles la SA Banque [F] demande à la cour de :

- réformer le jugement entrepris,

Au principal,

- déclarer l'action de Me [L] prescrite par application de l'article 2224 du code civil,

Subsidiairement,

- débouter Me [L], ès qualités, de l'ensemble de ses demandes comme non fondées,

- le condamner, ès qualités à la somme de 5.000 euros pour frais irrépétibles ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 30 novembre 2015, aux termes desquelles Me [L], ès qualités de liquidateur de M. [S] [N], demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la Banque [F] à lui rembourser :

- la somme de 88.420,43 euros déposée auprès de la banque

- la somme de 4.550,58 euros indûment prélevée

- la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles

- et l'a condamnée aux dépens,

- le réformer pour le surplus et, statuant à nouveau,

- dire et juger que la condamnation au versement de la somme de 88.420,43 euros portera intérêts au taux contractuel de 6 % à compter du 24 mars 1995,

- dire et juger que les intérêts contractuels se capitaliseront conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil,

- dire et juger que la condamnation au versement de la somme de 4.550,58 euros portera intérêts au taux légal à compter du 6 juillet 2007 date du prélèvement indu,

- condamner la Banque [F] à lui payer la somme de 15.000 euros à titre de dommages-intérêts,

- condamner la Banque [F] à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens dont distraction ;

SUR CE, LA COUR,

Attendu que M. [S] [N], exerçant la profession de pharmacien à [Localité 1], était titulaire d'un compte de particulier, d'un compte courant professionnel, et d'un compte de dépôt à terme, ouverts sur les livres de la banque [F] ;

Que le 24 mars 1995, il a déposé sur le compte à terme la somme de 580.000 francs, soit 88.420 euros ; que le même jour, la banque [F] a nanti à son profit le compte de dépôt à terme pour garantie de toutes sommes dues par M. [N] ;

Que par jugement du tribunal de commerce de Tarascon du 23 janvier 1998, M. [S] [N] a été placé en redressement judiciaire ; que le 12 février 1998, la banque [F] a déclaré sa créance à hauteur de 458.486 francs ;

Que par jugement du 1er octobre 1999, le tribunal de commerce de Tarascon a adopté un plan de continuation ; qu'au cours des mois qui ont suivi, des pourparlers se sont engagés entre M. [N] et la banque [F] en vue de substituer au nantissement du compte à terme une garantie hypothécaire prise sur les murs d'une pharmacie dont il était par ailleurs propriétaire ; que cependant ces pourparlers n'ont pas connu de suite, ainsi qu'il résulte d'une lettre de la banque du 26 novembre 2000 ;

Que par jugement du 20 décembre 2002, le tribunal de commerce de Tarascon a prononcé la liquidation de M. [S] [N] ;

Que le 22 janvier 2003, la Banque [F] a déclaré sa créance à titre privilégié, en l'état du nantissement dont elle disposait sur le compte à terme, pour un montant de 63.824,86 euros au titre des soldes débiteurs du compte de particulier et du compte courant professionnel ;

Que par ordonnance du 17 juin 2004, le juge commissaire a rejeté en sa totalité la créance de la Banque [F], laquelle a toutefois été admise à titre chirographaire à hauteur de 7.908,27 euros par arrêt de la cour du 6 octobre 2005 ;

Qu'il apparaît que la banque [F] a adressé au liquidateur le solde du compte de particulier (21.008,05 euros) et du compte courant professionnel (14.844,62 euros), mais a, en revanche, conservé les avoirs déposés sur le compte à terme ;

Que par jugement du 17 octobre 2008 le tribunal de commerce de Tarascon a ordonné la clôture de la procédure pour insuffisance d'actif ;

Que, postérieurement, M. [N] a saisi le tribunal de commerce de Tarascon d'une demande visant à la restitution de la somme déposée sur le compte à terme ; que cette demande a été accueillie par jugement du 5 juillet 2010 ; que, toutefois, sur appel de la banque [F], la cour a, par arrêt du 28 juin 2013, déclaré irrecevables les demandes présentées par M. [N], ce dernier n'ayant pas qualité pour agir en recouvrement de sommes qui existaient antérieurement à la clôture de la liquidation et qui constituent toujours le gage des créanciers impayés, dont les droits peuvent s'exercer par la voie d'une réouverture de la procédure collective ;

Que par jugement du 6 décembre 2013, le tribunal de commerce de Tarascon a ordonné la réouverture des opérations de liquidation judiciaire, désignant M. [L] en qualité de liquidateur ; que dans le cadre de cette procédure, ce dernier a saisi à nouveau le tribunal de commerce de Tarascon par acte du 26 juin 2014 d'une demande de restitution de la somme de 88.420,13 euros au titre du compte à terme, outre la condamnation de la banque à lui verser la somme de 4.550,58 euros au titre d'un prélèvement prétendument injustifié ; que par le jugement entrepris, le tribunal a fait droit à ces demandes, après avoir écarté l'exception de prescription opposée par la Banque [F] ;

Sur la prescription

Attendu que la banque [F], appelante, fait valoir que Me [S], prédécesseur de Me [L] a été informé dès le 11 septembre 2002 par un courrier qu'elle lui a adressé de la possibilité d'exercer à son encontre une procédure ; que, pourtant, aucune action ne sera entreprise jusqu'à la clôture de la procédure de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, prononcée le 17 octobre 2008 ;

Qu'elle estime que, contrairement à ce qu'on retenu les premiers juges, l'action entreprise par M. [N] en 2009 n'a pas interrompu la prescription ;

Que, selon elle, la prescription ne peut être interrompue que par quelqu'un ayant un intérêt protégé à agir, ce qui n'était pas le cas de M. [N] comme la cour l'a rappelé dans son arrêt du 28 juin 2013 ; que, d'autre part, la reprise de la procédure de liquidation judiciaire à compter du 6 décembre 2013 n'a pas pu faire renaître une possibilité d'action, dès lors que celle-ci était prescrite, plus de dix ans s'étant écoulés entre le 11 septembre 2002, date à laquelle Me [S], titulaire du droit d'agir, a été informé de l'existence de la créance et l'assignation délivrée ;

Qu'en réponse, Me [L] fait valoir que, postérieurement au rejet partiel de la créance de la banque [F], de nombreuses relances ont été adressées à la banque [F] pour qu'elle restitue les fonds, ce qu'elle s'est toujours refusée à faire ;

Qu'il considère que les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine étant exercées pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur, selon l'article L 641-9 du code de commerce, il en résulte que le débiteur a recouvré ses droits à l'issue de la période de dessaisissement, en l'occurrence, au moment de la clôture pour insuffisance d'actif ;

Qu'ainsi, l'action diligentée par M. [N] après la clôture de la liquidation est venue interrompre le cours de la prescription ;

Que Me [L] rappelle que selon l'article 2241 du code civil, la demande en justice, même en référé, interrompt la prescription ainsi que le délai de forclusion ; qu'il en est de même lorsqu'elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l'acte de saisine de la juridiction est annulé par l'effet d'un vice de la procédure ;

Qu'il ajoute que le dépositaire doit rendre au déposant la chose ou les sommes déposées, ainsi que les fruits produits ; que s'agissant des établissement bancaires, cette obligation de restitution ne cesse que, lorsque dans un délai de dix ans à compter de la clôture du compte, aucune réclamation n'a été faite ; qu'il constate que la banque [F] elle-même prétend avoir procédé à des opérations de compte au cours de l'année 2007 ; que juger que l'action engagée à l'encontre de la banque [F] est prescrite reviendrait à valider l'attitude d'une banque qui s'oppose à la restitution des fonds déposés pour invoquer à terme le bénéfice d'une prescription acquisitive illégitime ;

Mais attendu que le droit du déposant de réclamer au banquier dépositaire la restitution des sommes déposées ne peut se heurter à la prescription de l'article L 110-4 du code de commerce, le banquier disposant seulement de la faculté de clôturer le compte lorsque les dépôts et avoirs qui y sont inscrits n'ont fait l'objet, de la part des ayants droit, d'aucune opération ou réclamation depuis dix années, et de déposer lesdits dépôts et avoirs à la Caisse des dépôts et consignations, ainsi qu'il résulte des articles 2 de la loi n° 77-4 du 3 janvier 1977 et 1er du décret n° 79-894 du 15 octobre 1979, pris pour son application ;

Que la banque [F] ne prétendant pas avoir clôturé le compte, et des réclamations ayant au demeurant été émises tant par le liquidateur que par M. [N], il en résulte que le moyen tiré de la prescription de l'action en restitution est inopérant ;

Sur le fond

Attendu que la banque [F] soutient qu'elle avait déclaré sa créance à hauteur de 63.895,74 euros mais n'a reçu que 13.979,15 euros de dividendes, de sorte que la somme de 55.916,59 euros lui restait due ;

Qu'à la suite de la résolution du plan de continuation, elle a adressé au liquidateur un chèque de 24.595,57 euros, correspondant à la différence entre le montant du compte à terme et le montant de ce qu'elle estimait être sa créance, soit 88.420,43 - 63.824,86 = 24.595,57 euros ;

Que, par la suite, elle a adressé au liquidateur le règlement des soldes des deux autres comptes, à savoir le compte de particulier et le compte courant professionnel ;

Qu'elle souligne que, dans son arrêt du 28 juin 2013, la cour relevait que, après avoir demandé la restitution des fonds placés sur le compte à terme, le liquidateur n'a pas contesté la compensation invoquée par la banque ;

Qu'en réponse, Me [L] fait observer que la banque fait un amalgame entre sa créance, déclarée à hauteur de 63.824,86 euros, mais admise à hauteur de 7.908,27 euros seulement, et sa propre dette envers M. [N], de 88.420,13 euros ;

Que, certes, la banque a restitué le solde créditeur du compte de particulier soit 21.008,05 euros et le solde créditeur du compte courant professionnel, soit 14.844,62 euros, mais ceci n'a rien à voir avec le remboursement des sommes déposées sur le compte à terme ;

Qu'en outre, avant de reverser le solde créditeur du compte, la banque a prélevé la somme de 4.550,58 euros à titre de 'mise à jour du dossier' ;

Attendu que la Banque [F], qui était tenue de restituer les sommes déposées sur les différents comptes de M. [N], et qui n'était pas fondée à opérer une compensation entre la créance qu'elle a déclaré à titre privilégié à hauteur de 63.824,86 euros, qui n'a été admis à titre chirographaire qu'à hauteur de 7.908,27 euros, demeure tenue de restituer la somme de 88.420,13 euros qu'elle a retenue indûment et dont il appartiendra au liquidateur de procéder à la répartition entre les créanciers de la liquidation de M. [N], rouverte après avoir été clôturée pour insuffisance d'actif ; que c'est en vain que la banque [F] invoque à son bénéfice les motifs de l'arrêt du 28 juin 2013 qui, ayant retenu la fin de non-recevoir opposée à l'action engagée par M. [N], n'a pu se prononcer sur le fond de la demande et notamment sur l'exception de compensation ;

Que le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la banque [F] à payer à M. [S] [N] la somme de 88.420,13 euros avec intérêts au taux légal à compter du jour de la mise en demeure du 26 novembre 2008 ; que c'est en vain que Me [L] demande que ces condamnations soient assorties des intérêts au taux contractuel de 6 % à compter du 24 mars 1995, faute produire aux débats la convention comportant la stipulation d'intérêts sur laquelle il se fonde ;

Que le jugement sera enfin confirmé en ce qu'il a ordonné, avec intérêts au taux légal à compter du jour de la demande, la restitution d'une somme de 4.550,58 euros, retenue par la banque [F] le 6 juillet 2007 au titre de la 'mise à jour du dossier', sans que celle-ci soit en mesure de justifier, y compris devant la cour, du fondement de cette retenue ;

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Attendu que la Banque [F], succombant dans ses prétentions, doit supporter les dépens de la procédure d'appel ;

Attendu que l'équité commande d'allouer en cause d'appel à Me [L], ès qualités, une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

CONDAMNE la SA Banque [F] à payer à Me [L], ès qualités de liquidateur de M. [S] [N], la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE toute autre demande des parties,

CONDAMNE la SA Banque [F] aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 8e chambre c
Numéro d'arrêt : 14/24280
Date de la décision : 30/03/2017

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8C, arrêt n°14/24280 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-03-30;14.24280 ?
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