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28/04/2017 | FRANCE | N°15/00692

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre b, 28 avril 2017, 15/00692


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 28 AVRIL 2017



N°2017/



Rôle N° 15/00692







Société FAILLA ROC ELERC





C/



[W] [D]















Grosse délivrée le :



à :



Me Martine PANOSSIAN, avocat au barreau de MARSEILLE



Me Antoine LOUNIS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE





Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARTIGUES - section C - en date du 18 Novembre 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 131005.





APPELANTE



Société [L] exerçant sous l'enseigne ROC ELERC, deme...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 28 AVRIL 2017

N°2017/

Rôle N° 15/00692

Société FAILLA ROC ELERC

C/

[W] [D]

Grosse délivrée le :

à :

Me Martine PANOSSIAN, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Antoine LOUNIS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARTIGUES - section C - en date du 18 Novembre 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 131005.

APPELANTE

Société [L] exerçant sous l'enseigne ROC ELERC, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Martine PANOSSIAN, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIME

Monsieur [W] [D], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Antoine LOUNIS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Marc LECOMTE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 30 Janvier 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Agnès MICHEL, Président, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Marie-Agnès MICHEL, Président

Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller

Monsieur David MACOUIN, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Guy MELLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 31 Mars 2017, prorogé au 28 Avril 2017.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Avril 2017

Signé par Madame Marie-Agnès MICHEL, Président et Monsieur Guy MELLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [W] [D] a été engagé par la SARL [L] exerçant sous l'enseigne 'Roc Eclerc' par contrat à durée indéterminée à effet du 5 avril 2006, en qualité d'assistant funéraire, moyennant un salaire mensuel de base de 1267 € et un horaire théorique de 151 heures 67.

Dans le dernier état de la relation contractuelle, il percevait un salaire mensuel de base de 1751,79 €, auquels'ajoutait divers accessoires (prime d'ancienneté, prime d'astreinte, prime sur chiffre d'affaires) pour un horaire théorique de 151 heures 67.

Les rapports contractuels étaient régis par les dispositions de la convention collective des industries carrière et métaux.

Le 22 juin 2013 il a pris acte de la rupture de son contrat de travail dans les termes suivants :

« Par courrier du 18 avril dernier je vous interrogeais sur des anomalies affectant entre autres, le calcul de ma rémunération du point de vue notamment du salaire de référence, des congés payés ainsi que des astreintes de toutes sortes qui m'incombent (week-end des semaines entières d'astreinte, soit 26 jours sur 30 par mois en 24 heures sur 24).

En l'absence de délégués du personnel, ce qui est une situation anormale, je vous ai souvent directement interrogé avant de me résoudre à vous écrire.

En l'état de votre refus persistant de me réserver une réponse précise, votre lettre du 25 avril ne pouvant être regardée comme une réponse sérieuse, j'ai alerté l'inspection du travail sur les nombreux dysfonctionnements que j'ai constatés soit en outre les questions ci-dessous rappelées

' non paiement récurrent d'une partie substantielle des heures supplémentaires accomplies,

' utilisation à des fins professionnelles de mon véhicule personnel, sans contrepartie quelconque,

' calcul erroné du complément de salaire en cas de maladie,

' application d'une convention collective (celle des industries de carrière et matériaux) qui n'a strictement rien à voir avec mon activité qui relève de la convention collective des pompes funèbres,

' privation de la prime versée avec le salaire du mois d'avril pourtant acquittée à tous les autres salariés etc.'

Je considère que la nature, l'ampleur et la durée des manquements rapportés ci-dessus, rendent impossible de votre fait la poursuite du contrat de travail à votre service, alors que vous avez clairement manifesté votre intention de ne pas considérer la moindre de mes questions.

Dans ces conditions, je me vois contraint de prendre acte de la rupture de mon contrat de travail.

Cette initiative que je suis forcé de prendre, qui n'est en aucune manière une démission est la conséquence de vos manquements et de votre refus d'y remédier.

En conséquence la rupture du contrat de travail à vos torts prend effet dès la première présentation de ce courrier.

Par ailleurs, je vous mets en demeure de me délivrer les documents de rupture à l'établissement desquels vous êtes légalement tenus et à liquider mon solde de tout compte selon ce que vous estimez devoir ».

Le 30 septembre 2013,M. [D] a saisi le conseil de prud'hommes de Martigues aux fins principalement de voir dire que la prise d'acte de rupture du contrat travail produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et en paiement des indemnités afférentes ainsi que d'heures supplémentaires.

Par jugement du 18 novembre 2014, en sa section commerce, le conseil de prud'hommes a statué comme suit :

' dit et juge Monsieur [W] [D] bien fondé à son action,

' dit et juge que Monsieur [W] [D] a réalisé de nombreuses heures supplémentaires,

' dit et juge que Monsieur [W] [D] n'a pas bénéficié des repos compensateurs,

' dit et juge avoir lieu à rappel de rémunération et accessoires au titre des heures supplémentaires accomplies et non payées,

' dit et juge que la prise d'acte de rupture s'analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

' dit et juge que la société [L] a eu recours au travail dissimulé,

' condamne en conséquence la société [L] à payer à Monsieur [W] [D] les sommes suivantes:

* 6818,84 euros au titre des contreparties obligatoires en repos des années 2009 à 2012,

*17'274,07 euros au titre des heures supplémentaires non payées période de septembre 2008 à février 2013,

*1727,41 euros à titre d'indemnité congés payée afférente,

*7912,48 euros à titre d'indemnité de préavis,

*791,24 euros à titre d'indemnité de congés payés afférente,

*5845,85 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

*300 € à titre de dommages-intérêts pour défaut de visite médicale d'embauche,

*21'720 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

*28'000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement réputé dépourvu de cause réelle et sérieuse,

*1300 € d'indemnité de frais de procédure,

' constate que l'employeur n'a pas fourni les documents relatifs au paiement de la prime de bénéfice de tous ces salariés et dits qu'il devra se conformer à son obligation produisant ces éléments,

' constate que l'employeur reconnaît ne pas avoir mis en 'uvre les élections des délégués du personnel,

' dit que l'employeur doit établir les documents sociaux à Monsieur [W] [D] pour s'inscrire à pôle emploi,

' ordonné la remise des documents rectifiés y compris un bulletin de salaire reprenant l'ensemble des rémunérations fixées dans le présent jugement,

' dit que les intérêts légaux seront comptabilisés à compter du 30 septembre 2013 en application de l'article 1153 '1 du Code civil,

' dit que la présente décision est assortie que l'exécution provisoire en application de l'article 515 du code de procédure civile,

' déboute Monsieur [W] [D] sur plus de ses demandes,

' déboute la société défenderesse de ses demandes,

' met les entiers dépens à la charge de la société [L].

Par déclaration reçue au greffe le 7 janvier 2015 la SARL [L] exerçant sous l'enseigne Roc Eclerc a régulièrement relevé appel de ce jugement.

Dans ses conclusions déposées et soutenues à l'audience par son conseil l'appelante demande à la cour de:

' réformer le jugement déféré,

y faisant droit,

' constater que les griefs reprochés à l'employeur sont, d'une part infondés et d'autre part insuffisamment graves pour justifier une prise d'acte,

' débouter Monsieur [W] [D] de ses demandes de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires,

' dire et juger que la prise d'acte de Monsieur [W] [D] s'analyse en une démission,

' le débouter de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,

' le condamner à restituer à la société appelante les sommes versées en application de l'exécution provisoire du jugement déféré soit la somme de 29'767,73 euros nets,

' condamner Monsieur [W] [D] au paiement de la somme de 3956,24 euros au titre de préavis non exécuté et de 2500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

outre les entiers dépens.

Dans ses conclusions déposées et soutenues à l'audience par son conseil, Monsieur [W] [D] demande à la cour de dire la société [L] infondée à son appel et de :

' confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

y ajoutant dans les limites de l'appel incident,

' condamner la société [L] au paiement des sommes suivantes :

*13'500 € à titre d'indemnité compensatrice de l'utilisation du véhicule personnel à des fins professionnelles,

*2000 € à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi en raison de la violation de l'obligation de sécurité de résultat,

*5000 € à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi en raison de l'absence de mise en place des des les élections des délégués du personnel,

*23'737,44 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé en application des dispositions de l'article L 8223 ' 1 du code du travail,

' condamner la société appelante aux dépens.

Conclusions auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé des faits de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties.

MOTIFS DE LA DECISION

Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.

Pour que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les faits invoqués par le salarié doivent non seulement être établis mais constituer des manquements suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail; la charge de la preuve des faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur à l'appui de sa prise d'acte pèse sur le salarié.

En l'espèce, la cour observe que le salarié n'articule devant la cour aucun argument au soutien des manquements invoqués dans la lettre de prise d'acte s'agissant des éléments de calcul du salaire de référence, congés payés et astreintes, calcul du complément de salaire en cas de maladie et sur la convention collective applicable.

Il est rappelé que le courrier par lequel le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail ne fixe pas les limites du lititige, la juridiction doit examiner les manquements invoqués par le salarié même s'ils ne sont pas mentionnés dans ledit courrier.

En l'état de ses écritures, M. [D] invoque les manquements suivants:

- non paiement des heures supplémentaires à hauteur de 17 274,07 €,

- utilisation de son véhicule personnel à des fins professionnelles,

- inégalité de traitement en ce qui concerne les primes (avril 2013),

- défaut d'organisation des élections des délégués du personnel,

- manquement à l'obligation de sécurité de résultat ( absence de visite de reprise en juillet 2011, arrêt de travail du 7 mars 2013).

Sur ce dernier manquement, l'absence d'une visite de reprise en juillet 2011 ne peut être valablement invoquée comme constitutive d'un manquement grave, alors que le contrat s'est poursuivi, jusqu'en juin 2013 et qu'il est justifié de l' aptitude médicale du salarié lors de la visite médicale de 2012. Il soutient également que l'arrêt de travail de mars 2013 prolongé jusqu'à la rupture du contrat de travail est imputable à un surmenage consécutif aux nombreuses heures supplémentaires qu'il effectuait. Ce point sera examiné plus loin.

Sur l'absence d'organisation des élections des délégués du personnel, si ce grief est établi, contrairement à ce qu'il affirme, M. [D] ne justifie pas avoir réclamé à plusieurs reprises la mise en place de ces élections, la seule réclamation sur ce point est faite dans le courrier de prise d'acte. Il ne justifie pas davantage du préjudice, au demeurant non qualifié, qu'il aurait subi de ce chef et dont il réclame réparation à hauteur de 5000 €.

Sur le non paiement de la prime d'avril 2013, les pièces du dossier établissent que par note de service l'employeur allouait chaque année à tous les salariés, hormis en 2010, une prime ' en fonction du bilan de l'année échue', d'un montant variable selon les années, versée en mars, avril ou mai de l'année suivante. Il est justifié du versement de ces primes à M. [D] pour les années 2008,2009, 2011 et 2012.

Alors que le paiement de cette prime était calculée sur le bilan de l'année précédente, que le salarié a travaillé pendant l'année 2012, qu'il n'est pas allégué que cette prime, calculée sur l'année 2012, n'ait pas été versée aux autres salariés en 2013, que le contrat n'a été rompu qu'en juin 2013, la SARL intimée ne peut soutenir que le salarié, ayant quitté l'entreprise avant son versement, n'est pas en droit d'y prétendre, alors que son droit était ouvert à la fin de l'année 2012. Cependant, à lui seul, ce manquement, s'agissant d'une prime annuelle variant de 400 à 800 euros, alors que la rémunération annuelle de M. [D] pour l'année 2012 s'est élevée à 34 522 €, n'est pas suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

Sur l'utilisation du véhicule personnel à des fins professionnelles, M. [D] fait valoir que depuis son embauche, il utilisait son véhicule dans l'intérêt de l'entreprise sans percevoir la moindre compensation.

L'employeur réplique que, par son activité d'entreprise de pompes funèbres, elle mettait à la disposition de M. [D] des véhicules spécifiques, de sorte que l'utilisation par ce dernier de son véhicule personnel était limitée. Elle admet cependant qu'il avait été convenu avec son salarié qu'en cas d'utilisation de son véhicule personnel, elle assumerait les frais de carburant, de remplacement des pneus et finalement les frais de réparation, de sorte qu'il a été indemnisé.

Aucune contestation n'existe quant à la prise en charge des frais de carburant directement par l'employeur, ce dont ce dernier justifie par la pièce 29 de son dossier pour la période de mars 2009 à mars 2013, et ce, au delà de la seule utilisation pour les besoins de la société, compte tenu du kilométrage et de la somme engagée.

Quant aux frais d'entretien et de réparation, la cour ne peut que constater que toutes les factures produites par M. [D] (pièce 15) comprenant changement de plaquettes de freins, pneus, révision, vidange, sont au nom de la SARL Roc'Eclerc ou à son nom, suivi de celui de M. [L] ou Roc'Eclerc, et qu'il ne justifie pas que ' de nombreuses factures de réparation n'ont pas donné lieu à remboursement' ni que 'son véhicule serait hors d'usage en raison des réparations nécessaires à sa mise en état'. La société appelante, qui produit les mêmes factures d'un montant total de 4221 € justifie de son coté les avoir réglées. Pour la période antérieure à 2009, M. [D] ne produit aucune pièce. En tout état de cause, ce manquement était inexistant en juin 2013.

En conséquence, il est établi que le salarié a été indemnisé des frais exposés pour l'utilisation personnel à des fins professionnelles.

Sur le non paiement d'un nombre substantiel d'heures supplémentaires, il est rappelé que selon l'article L 3171-4 du code du travail et la jurisprudence qui s'y rattache, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties, mais il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments sur les horaires effectivement réalisés.

M. [D] soutient qu'il effectuait 40 heures par semaine et produit une attestation de l'employeur établie le 22 juin 2007 selon laquelle ses horaires de travail étaient 8 à 12 heures puis 14 à 18 heures. Il ajoute qu'il effectuait de nombreuses astreintes le samedi et plus occasionnellement le dimanche et soutient qu'au vu des tableaux produits au débats, des bulletins de salaire et des fiches d'intervention, il est établi qu'il n'a pas été payé de la totalité des heures supplémentaires.

A l'appui de sa demande il produit:

- l'attestation susvisée,

- deux tableaux dactylographiés: le premier faisant apparaître le nombre d'heures supplémentaires depuis le 1er septembre 2008, sur la base de 40 heures par semaine, et pouvant aller jusqu'à 47 heures, comprenant une intervention de 7 heures le samedi, et 54 heures en incluant le dimanche, tableau récapitulatif établi par semaine puis par année, le second récapitulant les heures supplémentaires déjà payées, telles que mentionnées sur les bulletins de salaire,

- les calendriers des années en cause,

- le planning et interventions des porteurs et conseillers funéraires de permanence des années 2008,2009, 2010,2011, 2012 et 2013,

- treize attestations ( huit émanant de sa famille, son entourage ou son voisinage, quatre de clients se disant parfaitement satisfaits de son intervention, une d'un ancien salarié de l'entreprise de juillet 2010 au 4 août 2013).

Ces documents qui comportent des éléments vérifiables quant aux heures de travail et permettent à l'employeur d'apporter une réponse dans les conditions normales du débat contradictoire sont de nature à étayer les prétentions du salarié quant à l'exécution des heures supplémentaires alléguées. Il incombe, en conséquence, à l'employeur d'y répondre et d'apporter des éléments justificatifs des horaires effectués de manière à permettre à la juridiction d'apprécier la valeur probante des éléments apportés de part et d'autre, sans imposer au seul salarié la charge de la preuve.

L'employeur verse à son dossier:

- les tableaux manuscrits mensuels de janvier 2009 à mars 2013 établis pour le décompte du temps de travail des salariés, hors astreinte et interventions de week-end,

- les attestations de six salariés sur les 14 que compte l'entreprise ( sans y inclure les salariés ayant un lien de parenté avec l'employeur),

- les explications quant aux modalités d'intervention des samedis et dimanche et rémunération des temps d'astreinte.

Sur le nombre d'heures effectuées par semaine, il est rappelé que le contrat de travail de M. [D] faisait état d'une durée mensuelle de 151,67 heures, conforme à la durée légale, la seule attestation du 22 juin 2007, certes établie par l'employeur, contredite par les attestations de six salariés de l'entreprise, étant observé que de son coté le salarié ne produit qu'une seule attestation d'un ancien salarié, ne peut être suffisante à établir que la durée de travail de toutes les semaines travaillées était de 40 heures, d'autant que l'employeur fournit aux débats, les documents manuscrits de décompte du temps de travail.

Sur les samedis travaillés consistant en des permanences au magasin d'[Localité 1], la comparaison entre les mentions portées sur les tableaux établis par M. [D] et les bulletins de salaire permet d'établir soit qu'ils ont été rémunérés, soit qu'ils ont été récupérés.

A titre d'exemple au mois de février 2009, deux samedis travaillés ont été rémunérés sur la base de 14 heures supplémentaires ou en janvier 2010 trois samedis travaillés, soit 21 heures supplémentaires apparaissent sur le tableau manuscrit et le bulletin de salaire de janvier 2010. En février 2011, trois samedis ont été travaillés, 14 heures ont été payées à titre d'heures supplémentaires et une journée a été récupérée, celle du 28 février récupérée le vendredi suivant 4 mai, non travaillé.

Par ailleurs, pour répondre aux contestations de M. [D], la cour relève que:

- l'employeur ne produit pas de relevé manuscrit des heures pour l'année 2008, de sorte qu'il ne peut soutenir qu'il est noté comme absent le 7 novembre 2008, d'autant que le planning de novembre 2008 dressé par l'employeur confirme, comme il le soutient, qu'il a été affecté ce jour là à un transport d'urne funérairedans la Somme, et qu'il a été payé pour cette journée de travail, que le salarié comptabilise, de façon peu cohérente, seulement à hauteur de 8 heures dans son tableau d'heures supplémentaires,

- s'agissant des journées des 3 mars et 3 mai 2011, son absence est relevée seulement l'après-mdi et n'est donc pas incompatible avec les prises en charge des décès intervenus à ces dates,

- le samedi 2 mai 2009 n'est pas noté comme travaillé sur le relevé manuscrit de l'employeur, uniquement le 16 mai et le bulletin de salaire fait apparaître 7 heures supplémentaires payées, si M. [D] était d'astreinte le samedi 2 mai, aucune prise en charge de décès n'apparaît à cette date sur le tableau récapitulatif des interventions (pièce 21 du salarié),

- s'agissant des samedis 1er et 29 novembre 2008, l'intervention pour le décès de M. [G] a été rémunérée et le 29 novembre 2008 la fiche d'intervention ne mentionne pas de décès à cette date, le bulletin de salaire établit qu'un samedi a été rémunéré par le paiement de 7 heures supplémentaires.

Quant aux astreintes, les bulletins de salaire établissent qu'elles étaient indemnisées par une prime d'astreinte forfaitaire de 250 €, outre 31 € par semaine d'astreinte et 31 € par week end, outre par un commissionnement de 2 % net du montant HT du contrat signé à cette occasion apparaissant sous la dénomination ' prime sur chiffre d'affaire' mentionnée sur les bulletins de salaire, d'un montant plus élevé qu'une majoration d'heures supplémentaires.

En l'état des éléments produits de part et d'autre, il n'est pas démontré le non paiement d'heures supplémentaires par l'employeur qui serait de nature à établir un manquement grave de ce dernier à ses obligations et ainsi fonder le courrier de prise d'acte de rupture du salarié le 22 juin 2013.

En conséquence, le jugement sera infirmé en l'ensemble de ses dispositions et il convient de dire que ledit courrier produit les effets d'une démission et débouter M. [D] de l'ensemble de ses demandes.

L'obligation de rembourser les sommes versées en vertu d'une décision de première instance assortie de l'exécution provisoire résulte de plein droit de la réformation de cette décision même lorsque l'arrêt infirmatif n'a pas ordonné la restitution des sommes versées en application de la décision exécutoire par provision.

M. [D] sera condamné à payer à la SARL [L] un préavis de démission égal à un mois de salaire, demande sur laquelle il ne formule aucune observation ni quant au montant de la somme, ni quant à son principe, soit la somme de 3025,71 €.

Compte tenu de la décision rendue, la demande au titre du travail dissimulé est sans objet.

M. [D] qui succombe supportera les dépens de première instance et d'appel. L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement déféré en l'ensemble de ses dispositions,

Statuant à nouveau, et y ajoutant

Dit que le courrier en date du 22 juin 2013 de prise d'acte de rupture du contrat de travail de Monsieur [W] [D] produit les effets d'une démission,

Déboute Monsieur [W] [D] de l'ensemble de ses demandes,

Condamne Monsieur [W] [D] à payer à la SARL [L] la somme de 3025,71 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

Rejette le surplus des demandes plus amples contraires,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur [W] [D] aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre b
Numéro d'arrêt : 15/00692
Date de la décision : 28/04/2017

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9B, arrêt n°15/00692 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-04-28;15.00692 ?
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