COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
6e Chambre D
ARRÊT AU FOND
DU 03 MAI 2017
F.T.
N° 2017/107
Rôle N° 15/11345
[B] [K]
épouse [I]
C/
[N] [K]
Grosse délivrée
le :
à :
SCP COHEN - GUEDJ - MONTERO - DAVAL-GUEDJ
SCP DESOMBRE M & J
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 22 Janvier 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 13/00654.
APPELANTE
Madame [B] [K] épouse [I]
née le [Date naissance 1] 1946 à [Localité 1],
demeurant [Adresse 1] (BELGIQUE)
représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN - GUEDJ - MONTERO - DAVAL-GUEDJ, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée par Me Barbara ROSNAY-VEIL, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Aurélie GASPAR, avocat plaidant au barreau de PARIS.
INTIME
Monsieur [N] [K]
né le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 2],
demeurant [Adresse 2]
représenté et assisté par Me Martine DESOMBRE de la SCP DESOMBRE M & J, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 29 Mars 2017 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Mme Florence TESSIER, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Mme Marie-Christine AIMAR, Présidente
Mme Florence TESSIER, Conseiller
Mme Pascale POCHIC, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Mai 2017.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Mai 2017,
Signé par Mme Marie-Christine AIMAR, Présidente et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
[S] [K] est décédé le [Date décès 1] 2008 à [Localité 3], laissant pour lui succéder ses deux enfants, issus de son premier mariage avec [E] [H], prédécédée en 2001 : Monsieur [N] [K] et Madame [B] [K] épouse [I].
La déclaration de succession laisse apparaitre un actif net à partager de 229.257,43 euros et que la succession se compose essentiellement d'une créance d'un montant de 190.108,75 euros à l'encontre de Madame [B] [K] épouse [I], correspondant à un prêt personnel de 700.000 francs, qui lui a été octroyé par ses parents, aux fins d'acquisition avec son époux d'une maison sise à [Adresse 3], au prix de 1.400.000 francs, prêt constaté par acte authentique du 9 juin 1980, portant reconnaissance de dette.
Le projet de répartition de l'actif net dressé par Maître [M], notaire chargé par les héritiers des opérations de liquidation de la succession de [S] [K], mais qui inclut également les actifs dépendant de la succession de [E] [H], prévoit que la somme de 142.549,20 euros reviendrait à chacun d'entre eux.
Ce projet de répartition n'a pu être validé, les héritiers se trouvant en conflit quant au montant de la somme que Madame [B] [K] épouse [I] doit rapporter à la succession, cette dernière estimant qu'elle doit être équivalente au prêt consenti par ses parents, Monsieur [N] [K] considérant qu'elle doit être égale à 50 % de la valeur actuelle de la maison située à [Localité 4], la somme prêtée ayant permis l'acquisition de cette villa à hauteur de la moitié, l'autre moitié ayant été financée par les époux [I] à l'aide d'un crédit contracté conjointement.
Par acte d'huissier en date du 22 janvier 2013, Madame [B] [K] épouse [I] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Grasse Monsieur [N] [K] aux fins, sur le fondement des articles 815, 840 et 1257 du code civil, de voir ordonner le partage de la succession de [S] [K] et de son épouse née [I] [H].
Dans ses dernières écritures récapitulatives devant le tribunal, signifiées le 13 mars 2014,elle a sollicité en outre qu'il soit jugé que revient à chaque successible la somme de 142.549,20 euros, le défendeur étant condamné à lui payer la somme de 10.000 euros de dommages et intérêts à titre de résistance abusive, somme qui se compensera jusqu'à due concurrence de la soulte due par elle, ainsi que celle de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, le tout sous le bénéfice de l'exécution provisoire, outre les dépens.
Elle a contesté avoir bénéficié de la part de ses parents d'une donation déguisée et s'être rendue coupable de recel successoral.
Monsieur [N] [K], aux termes de ses dernières écritures notifiées le 8 octobre 2013, a demandé que l'existence d'une donation déguisée, sous forme de reconnaissance de dette, soit constatée, que la demanderesse soit déclarée coupable du délit de recel successoral et qu'il soit dit qu'elle doit rapporter à la succession des époux [K] la moitié de la valeur du bien immobilier situé à [Localité 4], à valoir en totalité à son profit au cas où le recel successoral serait retenu, ou, subsidiairement, au prorata du quart de la valeur totale du bien, une expertise étant ordonnée destinée à fixer la valeur actualisée de ce dernier, outre paiement par Madame [B] [K] épouse [I] des sommes de 10.000 euros de dommages et intérêts et de 5.000 euros en remboursement de ses frais irrépétibles, la demanderesse étant condamnée aux dépens.
Il a conclu au caractère fictif du prêt consenti à sa s'ur, jamais remboursé, et à la commission par celle-ci d'un recel successoral.
Par jugement contradictoire en date du 22 janvier 2015, le tribunal de grande instance de Grasse a principalement :
-ordonné le partage des biens dépendant de la succession de [S] [K] et de son épouse née [E] [H],
-désigné le président de la chambre des notaires des Alpes Maritimes pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision successorale, avec faculté de délégation, sous la surveillance d'un magistrat commis à cet effet,
-dit que la reconnaissance de dette en date du 9 juin 1980 constitue une donation déguisée,
-condamné Madame [B] [K] épouse [I] à rapporter à la succession la moitié de la valeur de la maison sise à [Adresse 3],
-dit que la part revenant à Monsieur [N] [K] correspond à la moitié de la valeur de la maison, soit un quart de la valeur totale,
-ordonné une mesure d'expertise et désigné à cet effet Madame [L], avec pour mission de procéder à l'estimation de la valeur du bien immobilier situé à [Localité 4] au jour du partage, d'après son état à l'époque de la donation, Madame [B] [K] épouse [I] devant consigner la somme de 1.300 euros,
-sursis à statuer sur la valeur du bien,
-débouté Monsieur [N] [K] de sa demande fondée sur le recel successoral,
-dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
-condamné Madame [B] [K] épouse [I] à payer à Monsieur [N] [K] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
-condamné Madame [B] [K] épouse [I] aux dépens.
Le tribunal a considéré pour l'essentiel que :
-l'intention libérale des prêteurs est certaine, compte tenu du fait que, malgré la reconnaissance de dette du 9 juin 1980, les époux [I] n'ont jamais remboursé les de cujus, qui n'ont pas demandé le remboursement de leur créance à l'arrivée du terme,
-il n'est pas établi par les pièces communiquées par Madame [B] [K] épouse [I] que ses parents aient bénéficié, en contrepartie de la somme prêtée, d'un droit d'usage et d'habitation du fait de leur hébergement au sein de la maison, l'acte authentique portant reconnaissance de dette n'en faisant pas mention,
-la valeur rapportable à la succession doit être déterminée en application des dispositions des articles 843 alinéa 1 et 860-1 du code civil, la désignation d'un expert étant nécessaire en l'état des estimations divergentes de l'immeuble produites par les parties.
Madame [B] [K] épouse [I] a interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe en date du 23 juin 2015.
Madame [B] [K] épouse [I], aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 9 décembre 2016, demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, sauf en ce qu'il a :
-ordonné le partage des biens dépendant de la succession de [S] [K] et de son épouse née [E] [H],
-désigné le président de la chambre des notaires des Alpes Maritimes pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision successorale, avec faculté de délégation, sous la surveillance d'un magistrat commis à cet effet,
-dit qu'il sera procédé aux opérations de compte, liquidation et partage de la succession,
-dit qu'en cas d'empêchement du notaire ou du juge commis, il sera procédé à son remplacement sur simple requête,
-débouté Monsieur [N] [K] de sa demande fondée sur le recel successoral.
Elle sollicite de la cour, statuant à nouveau, de :
-dire qu'elle a procédé au remboursement, au moins partiel, de l'emprunt consenti le 9 juin 1980 par ses parents,
-dire qu'il n'y a pas lieu à rapporter la moitié de la valeur vénale de la maison sise à [Localité 4],
-dire que la somme à rapporter le cas échéant par l'appelante devra tenir compte des versements effectués à [S] [K], du droit d'usage et d'habitation accordé à ses parents et des charges locatives assumées par elle et par son époux,
-condamner l'intimé au paiement d'une indemnité d'un euro pour résistance abusive,
-dire que les sommes auxquelles il sera condamné se compenseront de plein droit avec ses droits dans la succession,
-dire n'y avoir lieu à expertise,
-condamner Monsieur [N] [K] à lui payer la somme de 7.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
-débouter l'intimé de toutes ses prétentions,
-le condamner aux entiers dépens.
Madame [B] [K] épouse [I] fait valoir les moyens suivants :
-elle ne s'est rendue coupable d'aucun recel successoral, l'intimé ne démontrant pas l'existence d'une intention frauduleuse de sa part, ni celle d'un élément matériel,
-s'agissant du prêt, si les règles de forme ont été respectées du fait de l'établissement de la reconnaissance de dette sous forme notariée, en date du 9 juin 1980, l'intention libérale des prêteurs n'est pas établie par l'intimé, l'absence de remboursement ne suffisant pas à la caractériser,
-elle a, ainsi que son époux, remboursé pour partie le crédit consenti, en ayant fait bénéficier ses parents d'un droit d'usage et d'habitation gratuit de la maison pendant vingt-huit ans, en réglant en leurs lieu et place des charges afférentes à l'occupation de ce bien et en versant régulièrement à [S] [K] des sommes importantes à compter du décès de son épouse,
-les attestations contraires produites par l'intimé sont fausses,
-le droit d'usage et d'habitation dont bénéficiaient ses parents au sein de la villa n'a jamais été contesté, ces derniers n'étant ni locataires ni propriétaires de l'immeuble et les époux [I] ayant assumé, seuls, le remboursement de l'emprunt immobilier pour l'acquisition de la villa, qu'ils n'ont pu ni habiter, ni louer,
-elle a réglé avec son époux des charges : taxes d'habitation de 2003 à 2008, charges de liquides, d'assurance et achat d'un véhicule, soit une dépense totale de 54.581,43 euros sur sept années, outre des versements de sommes importantes entre 2001 et 2008, d'un montant total de 45.900 euros, ayant permis à [S] [K] de régler l'ensemble de ses dépenses courantes et ses dépenses exceptionnelles,
-la valeur de la villa située à [Localité 4] est de 780.000 euros dans l'état où elle se trouvait en 2008.
Monsieur [N] [K], aux termes de ses dernières écritures notifiées le 21 novembre 2016, sollicite de la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a :
-constaté l'existence d'une donation déguisée sous forme de reconnaissance de dette,
-condamné Madame [B] [K] épouse [I] à rapporter à la succession la moitié de la valeur de la maison sise à [Adresse 3],
-dit que la part revenant à Monsieur [N] [K] correspond à la moitié de la valeur de la maison, soit un quart de la valeur totale,
-ordonné une mesure d'expertise et désigné à cet effet Madame [L], avec pour mission de procéder à l'estimation de la valeur du bien immobilier situé à [Localité 4] aux frais avancés de Madame [B] [K] épouse [I],
-sursis à statuer sur la valeur du bien.
Monsieur [N] [K] sollicite de la cour d'infirmer le jugement pour le surplus de ses dispositions et, statuant à nouveau, de :
-déclarer la partie appelante coupable du délit de recel successoral,
-dire qu'elle devra rapporter à la succession la moitié de la valeur du bien immobilier sis à [Localité 4], à valoir en totalité au profit de l'intimé au cas où le recel serait retenu,
-y ajoutant, débouter l'appelante de l'ensemble de ses prétentions,
-la condamner à lui payer les sommes de 35.000 euros à titre de dommages et intérêts et de 7.000 euros en remboursement de ses frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens.
Monsieur [N] [K] soutient pour l'essentiel que :
-si la reconnaissance de dette est conforme aux dispositions de l'article 1326 du code civil, elle permet la réalisation d'une donation déguisée valable chaque fois que la cause onéreuse indiquée dans l'acte est purement fictive,
-l'intention libérale des de cujus est démontrée, dans la mesure où le prêt ne leur a jamais été payé, eux-mêmes n'en n'ayant jamais sollicité le remboursement, ce qui a contribué à leur appauvrissement,
-les attestations produites démontrent que les de cujus ne souhaitaient pas le déshériter et pensaient que, grâce à la reconnaissance de dette, il serait rempli de ses droits sur la villa en cause,
-l'existence d'un droit d'usage et d'habitation n'est pas démontrée, aucun titre ne l'établissant, un droit accordé gratuitement ne pouvant faire l'objet d'une contrepartie onéreuse,
-les justificatifs de frais réglés par l'appelante sont incomplets, établis par elle-même, et donc dépourvus de toute force probante,
-l'appelante et son époux logeaient dans la maison à l'occasion de leurs nombreux séjours dans la région,
-les transferts de sommes effectués du compte bancaire des époux [I] sur le compte bancaire du de cujus, puis retirés en espèces, se justifient par le fait que [S] [K] était très âgé et grabataire et ne pouvait se rendre à la banque, les versements étant postérieurs à l'échéance du prêt,
-sur l'évaluation de la villa, elle doit être faite conformément aux dispositions de l'article 860-1 du code civil, l'expertise étant nécessaire pour déterminer sa valeur actuelle, le bien pouvant se vendre plus de deux millions d'euros compte tenu de ses caractéristiques propres.
La procédure a été clôturée par le magistrat chargé de la mise en état selon ordonnance en date du 14 décembre 2016.
MOTIVATION DE LA DECISION
1/ Sur l'existence d'une donation déguisée :
Attendu que le déguisement de la donation entre vifs repose sur une hypothèse de simulation qui consiste à proclamer faussement la présence d'une catégorie juridique, autre que celle de la libéralité, qui puisse justifier l'enrichissement du donataire, les parties à la donation déguisée faisant croire, à l'aide d'éléments trompeurs, soit que l'appauvrissement du disposant a été compensé par un sacrifice équivalent du gratifié, soit qu'il existe une cause antérieure justifiant l'avantage consenti ;
Attendu que l'apparence trompeuse ainsi créée ne doit pas laisser percer sa nature mensongère, le déguisement devant être parfait, la donation déguisée devant observer les conditions de l'acte dont elle emprunte l'apparence ;
Attendu ainsi que le déguisement suppose, en premier lieu, le respect des formalités imposées à l'acte fictif, la reconnaissance de dette devant obéir aux prescriptions de l'article 1326 du code civil, la cohérence du déguisement devant, en second lieu, être subordonnée à la mention, dans l'écrit dressé pour l'occasion, des éléments catégoriques de l'apparence trompeuse choisie, les parties étant, en matière de vente, tenues d'indiquer un prix ;
Attendu qu'il appartient à la partie qui se prévaut du déguisement de la donation de rapporter la preuve de la simulation opérée ;
Attendu qu'en l'espèce, la première des conditions ci-dessus visées est remplie, l'acte portant reconnaissance de dette des époux [I] à l'égard de Monsieur [S] [K] et de son épouse née [E] [H] pour la somme de 700.000 francs, ayant été dressé par devant notaire le 9 juin 1980 et portant la mention, en lettres et en chiffres, de la somme à rembourser, les conditions de l'article 1326 du code civil étant respectées ;
Que cet acte authentique précise que « le présent prêt est destiné à permettre à Monsieur et Madame [I], emprunteurs, de payer à due concurrence, le prix d'une acquisition par ces derniers d'une maison à usage d'habitation située à [Adresse 3], pour 1505 mètres carrés, moyennant le prix principal de 1.400.000 francs, payable comptant, à concurrence de 580.700 francs des deniers personnels des époux [I], de 700.000 francs, montant du prêt remboursable au plus tard le 9 juin 2000, avec réindexation sur le dernier indice publié par le bulletin de la statistique, et de 119.300 francs, montant d'un crédit épargne-logement souscrit par les emprunteurs » ;
Attendu, sur la preuve de l'intention libérale, qu'il convient d'observer que l'acte authentique portant reconnaissance de dette du 9 juin 1980 ne mentionne pas l'octroi au bénéfice des créanciers d'un droit d'usage et d'habitation sur le bien immobilier acquis par les emprunteurs ;
Que les pièces versées aux débats par l'appelante ne démontrent pas que ses parents aient habité de manière continue dans la villa par elle acquise, de 1980 jusqu'à leurs décès respectifs ;
Attendu ainsi que la volonté de rétribution de l'hébergement, telle qu'alléguée par Madame [B] [K], n'est pas établie ;
Attendu, au surplus, que si Madame [B] [K] épouse [I] prouve avoir réglé, avec son mari, les taxes d'habitation concernant l'immeuble sis [Adresse 3], pour les années 2003 à 2008 inclus, ces règlements ponctuels et ciblés ne permettent pas de considérer que les sommes versées à ce titre correspondent à un remboursement partiel de l'emprunt contracté plus de vingt années auparavant et pour un montant important, constituant la moitié du prix de l'immeuble ;
Attendu que les tableaux communiqués par l'appelante, concernant les versements opérés au bénéfice de [S] [K], se trouvent dépourvus de toute force probante, pour avoir établis par Madame [B] [K] elle-même et n'être corroborés par aucune pièce bancaire ;
Attendu que les attestations concordantes produites par Monsieur [N] [K] démontrent que les prêteurs avaient manifesté auprès des témoins leur volonté que leur fils récupère une part de la maison au jour de leur décès ;
Attendu par suite que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a considéré que l'intention libérale des de cujus est certaine et que la reconnaissance de dette conclue par acte authentique du 9 juin 1980 constitue une donation déguisée ;
2/ Sur la valeur rapportable à la succession :
Attendu qu'il doit être fait application à la cause des dispositions de l'article 860-1 du code civil, aux termes duquel le rapport d'une somme d'argent est égal à son montant ; toutefois, si elle a servi à acquérir un bien, le rapport est dû de la valeur de ce bien à l'époque du partage, d'après son état à l'époque de la donation ;
Attendu qu'il est constant que les époux [K] ont prêté aux époux [I] la somme de 700.000 francs par acte authentique du 9 juin 1980 ;
Attendu par suite que Madame [B] [K] devra rapporter à la succession de ses parents la moitié de la valeur de la maison acquise grâce à la donation, au jour du partage, d'après son état à l'époque de la donation, la part revenant à la partie intimée correspondant à la moitié de la moitié de la valeur de la villa, soit un quart de sa valeur totale ;
Que la décision entreprise sera confirmée de ce chef ;
3/ Sur la demande d'expertise foncière du bien immobilier :
Attendu qu'en l'état des évaluations discordantes produites aux débats par chacune des parties, l'appelante estimant à la somme de 780.000 euros la maison sise à [Localité 4], l'intimé soutenant qu'elle peut être vendue à un prix supérieur à deux millions d'euros, compte tenu de ses caractéristiques propres, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné une mesure d'expertise, afin que la valeur du bien soit déterminée de manière certaine et objective ;
Sur le recel successoral :
Attendu que l'article 778 alinéa 1 du code civil dispose que, sans préjudice des dommages et intérêts, l'héritier qui a recelé des biens ou des droits d'une succession, ou dissimulé l'existence d'un cohéritier, est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l'actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés ;
Qu'aux termes de l'alinéa 2 du même article, lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l'héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part ;
Attendu que la simulation n'emporte pas présomption de recel à l'égard du successible gratifié par une donation déguisée, qui ne peut être frappé des peines du recel que lorsqu'est rapportée la preuve de son intention frauduleuse, élément constitutif de ce délit civil ;
Attendu que Monsieur [N] [K] ne rapporte pas la preuve qui lui incombe des man'uvres nuisibles commises par l'appelante, les époux [I] ayant rapporté spontanément à la succession le « prêt » de 700.000 francs, la reconnaissance de dette ayant été conclue par acte notarié et étant connue de tous ;
Attendu ainsi que la décision de première instance sera confirmée en ce qu'elle a dit que Madame [B] [K] ne s'est rendue coupable d'aucun recel successoral ;
Attendu, sur les demandes de dommages et intérêts formulées par les parties, que l'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue, en principe, un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de la malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol ;
Attendu qu'aucune des parties ne justifie que ces conditions sont remplies, la faute de chacune n'étant pas démontrée ;
Attendu en conséquence que Madame [B] [K] et Monsieur [N] [K] doivent être déboutés de leurs prétentions respectives présentées à ce titre ;
Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu l'article 696 du code de procédure civile ;
P A R C E S M O T I F S
La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a condamné Madame [B] [K] épouse [I] aux dépens de première instance ;
Statuant à nouveau sur ce point,
Dit que les dépens de première instance doivent être employés en frais privilégiés de partage et recouvrés dans les formes et conditions de l'article 699 du code de procédure civile ;
Y ajoutant,
Déboute Madame [B] [K] épouse [I] et Monsieur [N] [K] de leurs demandes respectives tendant à l'octroi de dommages et intérêts en cause d'appel ;
Condamne Madame [B] [K] épouse [I] à payer à Monsieur [N] [K] la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Dit n'y avoir lieu, en cause d'appel, à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de Madame [B] [K] épouse [I] ;
Dit que les dépens d'appel doivent être employés en frais privilégiés de partage et recouvrés dans les formes et conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT