COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
2e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 11 MAI 2017
N° 2017/ 224
Rôle N° 14/12657
SA SAD AGENCE DE [Localité 1]
C/
SARL MAD EDITIONS
Grosse délivrée
le :
à :
Me BOISRAME
Me GUERINI
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 02 Juin 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 2013F01779.
APPELANTE
SA SAD AGENCE DE [Localité 1],
demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Alexandra BOISRAME, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
assistée et plaidant par Me Frédéric DEREUX, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me Julie CAMBIANICA, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
SARL MAD EDITIONS,
demeurant [Adresse 2]
représentée et plaidant par Me Martine GUERINI, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 16 Mars 2017 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, monsieur FOHLEN, conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président
Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller
Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Viviane BALLESTER.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Mai 2017
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Mai 2017,
Signé par Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président et Madame Viviane BALLESTER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
F A I T S - P R O C E D U R E - D E M A N D E S :
La S.A.R.L. M.A.D. EDITIONS ayant son siège à [Adresse 2] (37), qui édite le titre trimestriel paraissant sur 8 pages et vendu 3 € 00, a conclu le 25 juin 2003 avec la S.A. d'AGENCES et de DIFFUSION [la société SAD] ayant son siège à PARIS un pour la distribution de cette revue qui notamment règle le sort des numéros invendus.
Une ordonnance du 11 avril 2013 a enjoint à la société SAD de payer à la société MAD EDITIONS, en deniers ou quittances valables :
- la somme principale de 5 391 € 00 au titre de factures impayées [pour les invendus] avec intérêts légaux à compter du 13 mai 2013 date de la mise en demeure;
- celle de 250 € 00 au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Sur opposition de la société SAD le Tribunal de Commerce de MARSEILLE par jugement du 2 juin 2014 rectifié le 15 septembre 2014 a :
* rejeté l'opposition formée par la société SAD;
* en conséquence, condamné la société SAD à payer à la société MAD EDITIONS :
- la somme de 5 391 € 00 avec intérêts au taux légal à compter du 13 mai 2013 date de la mise en demeure,
- celle de l 000 € 00 au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile;
* sur la demande ampliative de la société MAD EDITIONS diligentée à l'encontre de la société SAD condamné la société SAD à payer à la société MAD EDITIONS la somme de 10 153 € 50 ainsi que la somme de 10 656 € 00 représentant le montant des factures impayées;
* condamné en outre la société SAD aux dépens de la présente instance, y compris les frais et accessoires de la procédure d'injonction de payer;
* rejeté pour le surplus toutes autres demandes contraires aux dispositions du présent jugement.
La S.A. SOCIETE D'AGENCES ET DE DIFFUSION a régulièrement interjeté appel le 25-26 juin 2014, et par dernières conclusions du 10 février 2017 soutient notamment que :
- la société MAD EDITIONS déposait ses publications au sein de l'établissement marseillais d'elle-même; le taux d'invendus du magazine OVE était compris entre 77 et 99 %; la restitution contractuelle par elle à cette société ne lui impose pas la réexpédition; toutes deux ont convenu suite à la distribution du premier numéro du magazine que la société MAD EDITIONS ne reprendrait pas les invendus;
- elle n'a commis aucun manquement contractuel justifiant les 8 factures pour invendus émises par la société MAD EDITIONS d'un montant total de 61 271 € 25; elle n'a pas l'obligation contractuelle de réexpédier ceux-ci à la société MAD EDITIONS; par application de l'article 1943 du Code Civil, en l'absence de désignation du lieu de restitution des invendus, ceux-ci sont réputés avoir été restitués à la société MAD EDITIONS dès lors qu'ils ont été mis à sa disposition de celle-ci à l'agence marseillaise d'elle-même;
- le contrat ne stipule pas la facturation par cette société des invendus qui ne lui sont pas restitués, tout comme les usages professionnels;
- elle a communiqué à la société MAD EDITIONS les listings de répartition et chiffres de vente des numéros du magazine;
- sa responsabilité contractuelle n'est pas établie;
- la société MAD EDITIONS refuse qu'elle procède à la destruction des invendus, tout en persistant à ne pas les reprendre; elle-même doit donc les stocker par milliers, encombrant son entrepôt, d'où un préjudice évalué à 15 € 00 par mois et parution.
L'appelante demande à la Cour, vu les articles 1101 et suivants, 1134, 1315 et 1382 du Code Civil, de :
- déclarer bien fondé son appel et :
. infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société SAD à payer à la société MAD EDITIONS la somme de 5 931 € 00 avec intérêts au taux légal à compter du 13 mai 2013;
. infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société SAD à payer à la société MAD EDITIONS la somme de 20 809 € 50;
. infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de la société SAD tendant à ce que la société MAD EDITIONS soit condamnée à lui payer la somme de 4 431 € 18 au titre des frais de stockages;
. confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de la société MAD EDITIONS tendant à la condamnation de la société SAD au paiement de la somme de 10 000 € 00 à titre de dommages et intérêts;
- statuant à nouveau :
. rejeter l'ensemble des demandes formées par la société MAD EDITIONS;
. condamner la société MAD EDITIONS à payer à la société SAD la somme de
10 155 € 18 T.T.C. [pour les invendus des numéros 23 à 55] outre intérêts légaux à compter du 30 novembre 2013;
. enjoindre à la société MAD EDITIONS de procéder au retrait des invendus de son titre OVE MAG stockés au sein de l'établissement de [Localité 1] de la société SAD sous astreinte de 15 € 00 par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir;
. dire qu'en cas de carence de la société MAD EDITIONS dans un délai d'un mois à compter de la signification de la décision, la société SAD sera autorisée à procéder à la destruction des invendus;
. condamner la société MAD EDITIONS à payer à la société SAD la somme de
4 000 € 00 au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Par dernières conclusions du 18 janvier 2017 la S.A.R.L. MAD EDITIONS répond notamment que :
- malgré les termes très clairs du contrat la société SAD se dispense de retourner les invendus, ce qui explique qu'elle-même les ait facturés; ces invendus appartiennent à elle-même éditeur, et non au dépositaire qu'est cette société; la société SAD n'a plus adressé de listing de répartition depuis le n° 45 inclus, ce qui empêche elle-même de facturer les numéros du magazine;
- le contrat impose à la société SAD l'obligation de restituer les invendus, c'est-à-dire d'agir positivement par voie postale; elle-même ne peut se rendre dans chacun des dépôts situés dans différentes villes; cette société ne l'a jamais prévenue que des exemplaires invendus étaient en instance à [Localité 1] et qu'il convenait qu'elle-même les récupère; la société SAD doit l'informer du nombre d'invendus;
- sa propriété sur ces derniers justifie qu'elle les facture à la société SAD;
- la facture de stockage de celle-ci n'est pas détaillée quant au nombre des invendus qui seraient stockés; ce coût n'est pas prévu par le contrat, lequel prévoit soit la restitution soit la destruction;
- la société SAD ne lui a pas transmis les listings, et persiste à ne pas lui restituer les invendus.
L'intimée demande à la Cour de :
- débouter la société SAD de ses demandes reconventionnelles;
- confirmer le jugement en ce qu'il a jugé la créance de la société MAD EDITIONS fondée en son principe et a fait droit à ses demandes concernant les factures impayées;
- en conséquence, condamner la société SAD à payer à la société MAD EDITIONS la somme de 5 391 € 00 en principal avec intérêts légaux à compter du 13 mars 2013 date de la mise en demeure, outre celle de 4 € 92 pour frais et accessoires, à parfaire;
- recevoir la société MAD EDITIONS en son appel incident;
- condamner la société SAD à payer à la société MAD EDITIONS :
. la somme de 10 153 50 € 00 au titre de la facture n° 21444A4732 du 22 janvier 2014,
. la somme de 10 656 € 00 au titre de la facture n° 21423A3619 du 20 janvier 2014;
- vu les articles 565 et 566 du Code de Procédure Civile, condamner la société SAD à payer à la société MAD EDITIONS les sommes suivantes :
. 10 800 € au titre de la facture n° 21448A5136,
. 3 215,25 € au titre de la facture n° 21551476,
. 9 236,25 € au titre de la facture n° 21552A5462,
. 11 819,25 € au titre de la facture n° 21755A5752,
soit une somme supplémentaire de 35 070 € 75;
- réformer le jugement en ce qu'il a débouté la société MAD EDITIONS de sa demande de dommages intérêts;
- dire et juger que l'attitude de persistante malveillance de la société SAD cause un préjudice
certain et incontestable à la société MAD EDITIONS;
- en conséquence, condamner également la société SAD à payer à la société MAD EDITIONS la somme de 25 000 € 00 à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi, outre celle de 4 000 € 00 au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 février 2017. Par la suite la société MAD EDITIONS a conclu le 3 mars 2017 et communiqué ses pièces 38 à 41, tandis que la société SAD a conclu les 9 et 15 mars 2017 et communiqué sa pièce 15.
----------------------
M O T I F S D E L ' A R R E T :
Sur la procédure :
Selon l'article 783 alinéa 1 du Code de Procédure Civile 'Après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office'.
Par suite la Cour doit écarter les conclusions et pièces postérieures à l'ordonnance de clôture rendue le 13 février 2017 soit :
- les conclusions de la société MAD EDITIONS du 3 mars, ainsi que ses pièces 38 à 41;
- les conclusions de la société SAD des 9 et 15 mars, ainsi que sa pièce 15.
Sur les demandes de la société MAD EDITIONS :
Le contrat de mise en vente conclu le 25 juin 2003 entre cette société et la société SAD stipule notamment :
- article 2 : 'Les fournitures sont mises à disposition de [la société SAD] en ses locaux (...) [à] [Localité 1] (...). Les fournitures seront reçues à titre de dépôt, c'est-à-dire avec reprise totale et inconditionnelle de tous les invendus';
- article 5 : 'Les invendus seront (...) - Restitués à l'Editeur en l'état et en nombre d'exemplaires rendus par les diffuseurs sauf demande contraire de l'Editeur';
L'obligation conventionnelle pour la société SAD de restituer ces fournitures invendues à la société MAD EDITIONS impose à la première une action positive. Mais le contrat est muet quant au lieu de ces restitutions. Par suite il faut appliquer l'article 1943 du Code Civil relatif au dépôt, aux termes duquel 'Si le contrat ne désigne point le lieu de la restitution, elle doit être faite dans le lieu même du dépôt'. Les fournitures ayant été mises à la disposition de la société MAD EDITIONS dans les locaux marseillais de la société SAD, les invendus doivent être restitués au même endroit ce qui oblige la société MAD EDITIONS à se déplacer pour les récupérer, d'autant qu'il est acquis que tous les invendus se trouvent effectivement dans lesdits locaux.
C'est donc à tort que le Tribunal a condamné la société SAD à payer les factures d'invendus de la société MAD EDITIONS.
Sur les demandes de la société SAD :
Le coût du stockage des invendus dans les locaux de cette société, bien qu'ignoré du contrat, est effectif puisque les premiers immobilisent une partie de la surface des seconds. Par suite la société MAD EDITIONS est recevable dudit coût.
Les factures de la société SAD pour les mois de juin 2015 à mars 2016, soit pendant 10 mois, mentionnent un chiffre mensuel compris entre 450 € 00 H.T. et 480 € 00 H.T., qui est excessif et par suite est réduit par la Cour à 100 € 00 H.T. par mois soit au total 1 000 € 00 H.T.
Le point de départ des intérêts au taux légal n'est pas le 30 novembre 2013 comme demandé par la société SAD, mais le jour de la mise en demeure de payer adressée à la société MAD EDITIONS soit le 19 avril 2016.
---------------------
D E C I S I O N
La Cour, statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire.
Juge irrecevables les conclusions de la S.A.R.L. MAD EDITIONS du 3 mars 2017 et ses pièces 38 à 41, ainsi que les conclusions de la S.A. SOCIETE D'AGENCES ET DE DIFFUSION des 9 et 15 mars 2017 et sa pièce 15.
Infirme en totalité le jugement du 2 juin 2014 rectifié le 15 septembre 2014.
Condamne la S.A.R.L. MAD EDITIONS à payer à la S.A. SOCIETE D'AGENCES ET DE DIFFUSION la somme de 1 000 € 00 H.T., majorée des intérêts au taux légal à compter du 19 avril 2016.
Enjoint à la S.A.R.L. MAD EDITIONS de procéder au retrait des invendus de son titre OVE MAG stockés au sein de l'établissement de [Localité 1] de la S.A. SOCIETE D'AGENCES ET DE DIFFUSION, sous astreinte provisoire de 15 € 00 par jour de retard à compter de la signification du présent arrêt et pendant une période de 3 mois.
Décide qu'en cas de carence de la S.A.R.L. MAD EDITIONS à l'issue de ce délai de 3 mois, la S.A. SOCIETE D'AGENCES ET DE DIFFUSION sera autorisée à procéder à la destruction des invendus.
Vu l'article 700 du Code de Procédure Civile condamne la S.A.R.L. MAD EDITIONS à payer à la S.A. SOCIETE D'AGENCES ET DE DIFFUSION une indemnité de 4 000 € 00 au titre des frais exposés en appel et non compris dans les dépens.
Rejette toutes autres demandes.
Condamne la S.A.R.L. MAD EDITIONS aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec application de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
Le GREFFIER. Le PRÉSIDENT.