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11/05/2017 | FRANCE | N°15/05103

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre b, 11 mai 2017, 15/05103


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

8e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 11 MAI 2017



N° 2017/ 132













Rôle N° 15/05103







[D] [F]

SCI ELOES





C/



Société CREDIT LOGEMENT

SA SOCIETE GENERALE





















Grosse délivrée

le :

à : Me FAYOLLE

Me SIROUNIAN

Me PAYEN













Décision

déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 16 Mars 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 13/00199.





APPELANTS



Monsieur [D] [F]

né le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 1]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 1]

représenté et assisté de Me Jean FAYOLLE...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

8e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 11 MAI 2017

N° 2017/ 132

Rôle N° 15/05103

[D] [F]

SCI ELOES

C/

Société CREDIT LOGEMENT

SA SOCIETE GENERALE

Grosse délivrée

le :

à : Me FAYOLLE

Me SIROUNIAN

Me PAYEN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 16 Mars 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 13/00199.

APPELANTS

Monsieur [D] [F]

né le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 1]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 1]

représenté et assisté de Me Jean FAYOLLE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

SCI ELOES Prise en la personne de son représentant légal,

dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée et assistée de Me Jean FAYOLLE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEES

Société CREDIT LOGEMENT, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux,

dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Me Nicolas SIROUNIAN, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Elie MUSACCHIA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

SA SOCIETE GENERALE prise en la personne de son représentant légal, dont le siège social est sis [Adresse 3]

représentée et assistée de Me Caroline PAYEN de la SCP DRUJON D'ASTROS BALDO & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 07 Février 2017 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Mme DEMORY-PETEL, conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Valérie GERARD, Président de chambre

Mme Françoise DEMORY-PETEL, Conseiller

Madame Anne DUBOIS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe, après prorogation, le 11 Mai 2017

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Mai 2017

Signé par Madame Valérie GERARD, Président de chambre et Madame Lydie BERENGUIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Selon offre acceptée le 7 mai 1999, la SA Société Générale a consenti à la SCI Eloes un prêt, destiné à financer l'acquisition de divers biens et droits à usage locatif dépendant d'un ensemble immobilier sis [Adresse 4], d'un montant de 1.090.000 francs (166.169,43 euros), au taux de 4,40% l'an hors assurance-groupe, le capital étant remboursable en une seule échéance à l'issue d'un période de 144 mois.

Ce prêt était garanti par :

- une promesse d'affectation hypothécaire sur les biens objet du financement,

- le nantissement de deux contrats d'assurance-vie « yucca » et « hévéa » souscrits par M. [D] [F],

- la caution personnelle et solidaire de M. [D] [F],

- la caution personnelle et solidaire de Mme [I] [F],

- le cautionnement de la société Crédit Logement.

Des échéances du prêt étant demeurées impayées, la SA Société Générale a, le 31 mai 2012, mis en demeure l'emprunteur et chacune des cautions personnelles de lui régler les sommes dues, étant précisé que le rachat total des contrats d'assurance-vie de M. [D] [F] a été réglé le 9 mars 2012 à la SA Société Générale pour des montants de 11.337,83 euros au titre du contrat Hévéa et de 7.681,16 euros au titre du contrat Yucca.

Le 16 août 2012, la société Crédit Logement a, en sa qualité de caution, payé à la SA Société Générale la somme de 152.876,77 euros, représentant 151.181,88 euros de capital restant dû et 1.694,89 euros de pénalités de retard.

La société Crédit Logement a, par lettres recommandées du 6 août 2012, mis en demeure la SCI Eloes et les époux [F] de lui régler lesdites sommes.

Puis, par acte du 3 décembre 2012, la SA Crédit Logement a fait assigner la SCI Eloes en paiement devant le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence.

M. [D] [F] est intervenu volontairement à l'instance.

La SCI Eloes et M. [D] [F] ont, par exploit du 18 mars 2013, fait assigner la SA Société Générale en responsabilité devant le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence.

Les procédures ont été jointes par ordonnance du 9 janvier 2014.

Par jugement du 16 mars 2015, le tribunal a :

- condamné la SCI Eloes à payer à la société Crédit Logement la somme de 152.876,77 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 16 août 2012 jusqu'à parfait paiement,

- ordonné la capitalisation des intérêts,

- déclaré prescrite l'action en responsabilité contractuelle engagée par la société Eloes et M. [D] [F] à l'encontre de la SA Société Générale,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision,

- rejeté toute autre demande,

- condamné la SCI Eloes et M. [D] [F] aux dépens.

Suivant déclaration du 27 mars 2015, la SCI Eloes et M. [D] [F] ont relevé appel de cette décision à l'encontre de la SA Crédit Logement et de la SA Société Générale.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées et déposées le 15 juillet 2016, auxquelles il convient de se reporter par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la SCI Eloes et M. [D] [F] demandent à la cour de :

- les dire recevables et bien fondés en leur appel,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il déclare prescrites leurs actions,

en conséquence,

- dire que la SA Société Générale a manqué à son devoir d'obligation (sic) et de conseil à l'occasion du montage du financement de l'opération d'acquisition immobilière réalisée par la société Eloes,

- condamner la SA Société Générale à payer à M. [D] [F] la somme de 147.150,44 euros à titre de dommages et intérêts,

- assortir la condamnation d'intérêts au taux légal,

- ordonner la capitalisation des intérêts,

- dire que la SA Société Générale a causé un préjudice à la SCI Eloes,

- condamner la SA Société Générale à payer à la SCI Eloes la somme de 5.726,33 euros au titre des intérêts courus jusqu'au 16 aout 2012, outre ceux dont elle est débitrice envers le Crédit Logement,

- dire que la SA Société Générale s'acquittera de ces sommes directement entre les mains de la société Crédit Logement et qu'elles seront à valoir sur la créance de cette dernière sur la SCI Eloes,

- débouter la société Crédit Logement de sa demande de garantie formée à l'encontre de M. [D] [F], comme nouvelle en cause d'appel,

- condamner la SA Société Générale à payer à M. [D] [F] la somme de 2.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SA Société Générale à payer à la SCI Eloes la somme de 2.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SA Société Générale aux entiers dépens d'appel et de première instance,

- ordonner l'emploi des dépens en frais généraux de partage et dire que Me Jean Fayolle, avocat, pourra les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées et déposées le 17 juillet 2015, auxquelles il y a également lieu de se référer, la SA Société Générale demande à la cour de :

- rejeter l'appel de M. [D] [F] et de la SCI Eloes comme mal fondé,

à titre principal,

- dire que l'article L.110-4 du code de commerce s'applique à une action en responsabilité dirigée contre une banque sur le fondement d'un manquement à une obligation d'information et de conseil lui incombant,

- dire que le point de départ de la prescription de cette action s'établit au jour de la conclusion du contrat,

- constater que le prêt in 'ne a été souscrit par M. [D] [F] le 7 mai 1999,

- constater que l'assignation lui a été délivrée le 18 mars 2013,

- déclarer en conséquence prescrite l'action en responsabilité de M. [D] [F] et de la SCI Eloes dirigée à son encontre,

en conséquence,

- confirmer le jugement en date du 16 mars 2015 rendu par le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence en toutes ses dispositions,

à titre subsidiaire,

- dire que M. [D] [F] a été valablement informé lors de la souscription des contrats d'assurance-vie de leurs caractéristiques, ainsi que des risques inhérents au placement qui lui était proposé et qui constituaient la contrepartie des gains espérés par lui,

- dire que M. [D] [F] a été valablement informé lors de l'exécution des contrats d'assurance-vie sur le rendement effectif des dits contrats,

- dire qu'elle n'a pas manqué à son obligation d'information et de mise en garde,

- dire en conséquence que la banque n'a pas commis de faute,

- dire que le préjudice de M. [D] [F] et de la SCI Eloes ne peut être apprécié qu'en fonction de la probabilité d'un choix plus judicieux, en sorte qu'il ne peut être équivalent à l'avantage qui serait résulté de ce choix,

en tout état de cause,

- débouter M. [D] [F] et la SCI Eloes de l'intégralité de leurs prétentions, comme irrecevables, infondées et injustifiées,

y ajoutant,

-condamner M. [D] [F] et la SCI Eloes au paiement d'une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens, ceux-ci distraits au profit de Me Caroline Payen, avocat associé de la SCP Drujon d'Astros Baldo et Associés.

Par ses dernières conclusions notifiées et déposées le 17 janvier 2017, auxquelles il convient le cas échéant de se reporter, la société Crédit Logement demande à la cour de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions, à tout le moins, celles qui condamnent la SCI Eloes à lui régler la somme de 152.876,77 euros, outre les intérêts capitalisés au taux légal à compter du 16 août 2012 jusqu'à parfait paiement,

- l'infirmer en ce qu'il ne fait pas droit à son recours à l'encontre du cofidéjusseur, M. [D] [F],

et statuant à nouveau,

- dire que M. [D] [F], en sa qualité de caution personnelle, sera tenu au paiement des condamnations mises à la charge de la SCI Eloes, à concurrence d'un tiers de leur montant,

- condamner la SCI Eloes au paiement de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SCI Eloes aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de Me Nicolas Sirounian, avocat.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 31 janvier 2017.

MOTIFS

Sur l'action en responsabilité à l'encontre de la banque :

Les appelants font grief au jugement déféré d'avoir déclaré prescrite l'action par eux engagée à l'encontre de la SA Société Générale.

Ils exposent qu'en ce qui concerne la SCI Eloes, qui n'était pas partie aux contrats d'assurance-vie, la faute commise par la banque consistant en un manquement à son devoir de conseil et de mise en garde envers M. [D] [F] n'a pu lui apparaître qu'au terme du prêt in fine, soit en juin 2011, que le tribunal ne pouvait déclarer prescrite l'action en réparation d'un préjudice né en juin 2011 dès lors qu'elle a été introduite en mars 2013.

S'agissant des demandes de M. [D] [F], ils font valoir que celui-ci n'a été avisé que le 25 mars 2011 de ce que l'assurance-vie qu'il avait souscrite en vue de procéder au remboursement de l'échéance du prêt in fine qui devait intervenir en juin 2011 ne permettrait pas d'y procéder, que le point de départ de la prescription de l'action devait donc être fixé au 25 mars 2011 de sorte qu'il avait jusqu'au 25 mars 2016 pour formaliser sa contestation, qu'ainsi son action n'était nullement prescrite le 18 mars 2013.

Mais, si la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance, l'action engagée à l'encontre de la SA Société Générale par les appelants concerne, au vu de leurs conclusions, le devoir de mise en garde et de conseil qui incombe au banquier à l'occasion du montage mis en place pour le financement de l'opération d'acquisition immobilière réalisée par la société Eloes, associant souscription d'un prêt in fine et adhésion à des contrats d'assurance-vie.

Ainsi, M. [D] [F] et la SCI Eloes reprochent à l'établissement de crédit d'avoir manqué à son obligation de mise en garde.

Or, le dommage résultant d'un tel manquement consiste en une perte de chance de ne pas contracter, laquelle se manifeste dès l'octroi du prêt.

Il en est de même s'agissant du devoir de conseil qui s'apprécie à l'occasion de l'opération de banque, et dont le défaut se traduit par une perte de chance de ne pas souscrire le contrat.

En conséquence, le point de départ de la prescription se situe à la date de conclusion de la convention de prêt, en l'occurrence le 7 mai 1999.

Dès lors, étant constaté qu'il n'est pas contesté que la prescription applicable est celle, décennale désormais quinquennale, de l'article L 110-4 du code de commerce, l'action en responsabilité engagée par la SCI Eloes et M. [D] [F] à l'encontre de la SA Société Générale par acte du 18 mars 2013 est prescrite.

Le jugement est confirmé de ce chef.

Sur le recours de la SA Crédit Logement à l'encontre de M. [D] [F] :

Exposant qu'en sa qualité de caution elle a réglé au créancier la totalité des sommes dont la SCI Eloes demeurait débitrice, la SA Crédit Logement demande qu'il soit dit que M. [D] [F], son cofidéjusseur, sera tenu au paiement des condamnations mises à la charge de la débitrice principale à concurrence d'un tiers de leur montant.

Les appelants répliquent qu'à aucun moment la SA Crédit Logement n'a formé de recours à l'encontre de M. [D] [F], que cette demande, nouvelle en cause d'appel, doit être déclarée irrecevable.

Cependant, s'il apparaît que le tribunal n'a pas statué de ce chef, il résulte des conclusions récapitulatives notifiées le 15 mai 2014 par l'intimée en première instance que ladite demande avait été présentée.

Elle ne saurait donc être considérée comme nouvelle devant la cour, et, étant observé qu'aucune contestation n'est autrement formulée, notamment quant au montant des condamnations prononcées par le premier juge à l'encontre de SCI Eloes, il convient, par application des dispositions de l'article 2310 du code civil, de faire droit au recours de la SA Crédit Logement, qui, en sa qualité de caution, a acquitté la dette auprès de la SA Société Générale, formé contre le cofidéjusseur, M. [D] [F].

Sur les frais irrépétibles :

En l'espèce, les appelants seront condamnés à payer à la SA Société Générale une somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il ne fait pas droit au recours de SA Crédit Logement à l'encontre de M. [D] [F],

L'infirme de ce chef, et statuant à nouveau,

Dit que M. [D] [F], en sa qualité de caution personnelle, sera tenu au paiement des condamnations mises à la charge de la SCI Eloes, à concurrence d'un tiers de leur montant,

Condamne la SCI Eloes et M. [D] [F] à payer à la SA Société Générale la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne la SCI Eloes et M. [D] [F] aux dépens d'appel, dont distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 8e chambre b
Numéro d'arrêt : 15/05103
Date de la décision : 11/05/2017

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8B, arrêt n°15/05103 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-05-11;15.05103 ?
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