COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
1re chambre C
ARRÊT
DU 12 OCTOBRE 2017
N° 2017/723
Rôle N° 16/15667
[Q] [G]
C/
[T] [O]
[S] [A]
[G] [F]
[X] [X]
[R] [U]
[N] [M]
[E] [Q]
[M] [N]
[L] [R]
[V] [P]
[Y] [L]
[C] [B]
[J] [J]
[O] [J]
[L] [Y]
[H] [D]
[W] [S]
[P] [C]
[U] [K]
[D] [H]
[Q] [W]
[B] [T]
[I] [I]
[A] [V]
[K] [Z]
[Z] [E]
[F] [WW]
[ZZ] [RR]
[RR] [BB]
[KK] [XX]
[AA] [NN]
[S] [II]
[JJ] [HH]
[XX] [OO]
[D] [MM]
[HH] [VV]
[Y] [SS]
[WW] [KK]
[CC] [LL]
[JJ] [EE]
[NN] [CC]
[LL] [CC]
[MM] [UU]
[VV] [QQ]
[EE] [DD]
[GG] [FF]
[M] [TT]
[A] [PP]
[QQ] [JJ]
[TT] [YY]
[YY] [AA]
[BB] [ZZ]
[DD] [GG]
[OO] [UUU]
[RR] [EEE]
[FF] [YYY]
[TT] [HHH]
[FF] [SSS]
[PP] [OOO]
[G] [LLL]
[SS] [QQQ]
[H] [AAA]
[II] [JJJ]
SA FERMIERE DU CASINO MUNICIPAL DE CANNES SFCMC
Grosse délivrée
le :
à :
SCP BADIE
Me FEHLMANN
Sur saisine de la cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de cassation en date du 14 avril 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 630 F-D qui a cassé et annulé partiellement l'arrêt n° 577 rendu le 2 décembre 2014 par la 1re chambre civile section A de cette cour, à l'encontre du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Grasse en date du 10 septembre 2013.
DEMANDEUR SUR RENVOI DE LA COUR DE CASSATION
Monsieur [Q] [G]
né le [Date naissance 1] 1944 à [Localité 1]
demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'Aix-en-Provence
assisté par Me Chantal GIRAUD-VAN GAVER, avocat au barreau de Paris, plaidant
DÉFENDEURS SUR RENVOI DE LA COUR DE CASSATION
Monsieur [T] [O]
demeurant [Adresse 2]
Monsieur [S] [A]
demeurant [Adresse 3]
[Localité 2]
Monsieur [G] [F]
demeurant [Adresse 4]
Monsieur [X] [X]
demeurant [Adresse 5]
Monsieur [R] [U]
demeurant [Adresse 6]
Monsieur [N] [M]
demeurant [Adresse 7]
Madame [E] [Q]
demeurant [Adresse 8]
Monsieur [M] [N]
demeurant [Adresse 9]
Madame [L] [R]
demeurant [Adresse 10]
Madame [V] [P]
demeurant [Adresse 11]
Monsieur [Y] [L]
demeurant [Adresse 12]
Monsieur [C] [B]
né le [Date naissance 2] 1970 à [Localité 3]
demeurant [Adresse 13]
Monsieur [J] [J],
demeurant [Adresse 14]
Madame [O] [J]
demeurant [Adresse 14]
Madame [L] [Y]
demeurant [Adresse 15]
Monsieur [H] [D]
demeurant [Adresse 16]
Monsieur [W] [S]
demeurant [Adresse 17]
Monsieur [P] [C]
demeurant [Adresse 18]
Madame [U] [K]
demeurant [Adresse 19]
[Localité 4]
Monsieur [D] [H]
demeurant [Adresse 20]
Madame [Q] [W]
demeurant [Adresse 21]
Monsieur [B] [T]
demeurant [Adresse 22]
Monsieur [I] [I]
demeurant [Adresse 23]
[Localité 5]
Madame [A] [V]
demeurant [Adresse 24]
Monsieur [K] [Z]
demeurant [Adresse 25]
[Localité 6]
Monsieur [Z] [E]
demeurant [Adresse 26]
[Localité 3]
Monsieur [F] [WW]
demeurant [Adresse 27]
Madame [ZZ] [RR]
demeurant [Adresse 28]
[Localité 6]
Monsieur [RR] [BB]
demeurant [Adresse 29]
Madame [KK] [XX]
demeurant [Adresse 30]
[Localité 6]
Monsieur [AA] [NN]
demeurant [Adresse 31]
Monsieur [S] [II]
demeurant [Adresse 32]
Monsieur [JJ] [HH]
demeurant [Adresse 33]
Monsieur [XX] [OO]
demeurant [Adresse 34]
Monsieur [D] [MM]
demeurant [Adresse 35]
Madame [HH] [VV]
demeurant [Adresse 36]
[Localité 7]
Monsieur [Y] [SS]
demeurant [Adresse 37]
Monsieur [WW] [KK]
demeurant [Adresse 38]
Monsieur [CC] [LL]
demeurant [Adresse 39]
[Localité 8]
Monsieur [JJ] [EE]
demeurant [Adresse 40]
[Localité 3]
Monsieur [NN] [CC]
demeurant [Adresse 41]
Madame [LL] [CC]
demeurant [Adresse 41]
Madame [MM] [UU]
demeurant [Adresse 42]
Monsieur [VV] [QQ]
demeurant [Adresse 43]
Madame [EE] [DD],
demeurant [Adresse 44]
Madame [GG] [FF]
demeurant [Adresse 45]
Monsieur [M] [TT]
demeurant [Adresse 46]
Madame [A] [PP]
demeurant [Adresse 47]
Monsieur [QQ] [JJ]
demeurant [Adresse 48]
Monsieur [TT] [YY]
demeurant [Adresse 49] (Italie)
Madame [YY] [AA]
demeurant [Adresse 50]
Madame [BB] [ZZ]
demeurant [Adresse 51]
Monsieur [DD] [GG]
demeurant [Adresse 52]
Madame [OO] [UUU]
demeurant [Adresse 53]
Monsieur [RR] [EEE]
demeurant [Adresse 54]
Monsieur [FF] [YYY]
demeurant [Adresse 55]
Monsieur [TT] [HHH]
demeurant [Adresse 15]
Monsieur [FF] [SSS]
demeurant [Adresse 56]
Madame [PP] [OOO]
demeurant [Adresse 57]
Monsieur [G] [LLL]
demeurant [Adresse 58]
Monsieur [SS] [QQQ]
demeurant [Adresse 59]
Monsieur [H] [AAA]
demeurant [Adresse 60]
[Localité 3]
Monsieur [II] [JJJ]
demeurant [Adresse 61]
représentés par Me Julie FEHLMANN substituée par Me JEMALI, avocats au barreau de Grasse, plaidant
LA SA FERMIÈRE DU CASINO MUNICIPAL DE CANNES SFCMC
dont le siège est [Adresse 62]
non comparante
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 12 septembre 2017 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Geneviève Touvier, présidente, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La cour était composée de :
Mme Geneviève TOUVIER, présidente
Mme Annie RENOU, conseillère
Madame Lise LEROY-GISSINGER, conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Sylvie MASSOT.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 octobre 2017
ARRÊT
Rendu par défaut,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 octobre 2017,
Signé par Mme Geneviève TOUVIER, présidente, et Madame Sylvie MASSOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
En mars 1991, [UU] [GGG] épouse [G], décédée depuis, a cédé à la Compagnie Immobilière PHOENIX (CIP), dirigée par [HHH] [KKK], une partie des actions qu'elle détenait dans trois sociétés, dont la Société Fermière du Casino Municipal de Cannes (SFCMC) et en contrepartie, la société CIP a revendu à la SFCMC la totalité des actions de la société GRAY D'ALBION. Estimant que cette cession était surévaluée au préjudice de la SFCMC et au bénéfice de [UU] [GGG], certains actionnaires de la SFCMC ont déposé plainte avec constitution de partie civile le 26 octobre 1994. Par arrêt définitif du 6 décembre 2007, statuant sur la seule action civile, considérant que la complicité d'abus de biens sociaux et de pouvoirs était constituée à l'encontre de [Q] [G], et celle de recel de ce délit à l'encontre de [HHH] [KKK], la cour d'appel de Paris les a condamnés solidairement à payer à la SFCMC la somme de 67 millions d'euros à titre de dommages-intérêts.
71 salariés de la SFCMC ont saisi le conseil de prud'hommes de Cannes à l'encontre de cette dernière en estimant que leurs droits à participation et à intéressement avaient été dénaturés par l'effet de l'abus de bien social. Par arrêt du 29 novembre 2011, la cour d'appel d'Aix-en-Provence, statuant sur contredit, a renvoyé l'affaire devant le tribunal de grande instance de Grasse. Messieurs [G] et [KKK] ont été appelés en intervention forcée le 26 février 2013. Par jugement en date du 10 septembre 2013, le tribunal a donné acte des désistements intervenus et sur le fond a :
- débouté les salariés de leurs demandes contre la SFCMC ;
- débouté monsieur [G] de ses moyens tirés de la prescription de l'action civile, du défaut d'intérêt à agir et du défaut de faute contractuelle de l'employeur ;
- constaté que les salariés justifiaient d'un principe de préjudice personnel et actuel par ricochet constitutif d'une perte de chance ;
- avant dire droit sur l'évaluation de ce préjudice, ordonné une expertise financière.
Par arrêt du 2 décembre 2014, la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1ère chambre A, a :
- annulé la signification de l'assignation initiale à l'encontre de Monsieur [KKK] en date du 26 février 2013 et mis hors de cause celui-ci, le tribunal étant irrégulièrement saisi en ce qui le concerne ;
- déclaré prescrite l'action à l'encontre de monsieur [G] et dit n'y avoir lieu à expertise.
Sur pourvois de 27 salariés, la Cour de cassation a, par arrêt du 14 avril 2016, cassé et annulé l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, mais seulement en ce qu'il déclare prescrite l'action engagée à l'encontre de monsieur [G], et renvoyé sur ce point la cause et les parties devant le même cour d'appel autrement composée. La Cour de cassation retient que l'arrêt querellé n'a pas caractérisé, à la date qu'il retenait, la connaissance qu'avaient les salariés du dommage dont la réparation était poursuivie.
Par déclaration du 25 août 2016, [Q] [G] a saisi la cour d'appel d'Aix-en-Provence à l'encontre de 64 intimés. Mais, par conclusions du 24 mars 2017 il s'est désisté de sa saisine à l'encontre de 37 parties non demanderesses au pourvoi, maintenant sa saisine à l'encontre des 27 intimés suivants :
[G] [F], [N] [M], [E] [Q], [Y] [L], [L] [Y], [H] [D], [D] [H], [Q] [W], [I] [I], [A] [V], [K] [Z], [ZZ] [RR], [KK] [XX], [G] [TTT] [NN], [HH] [VV], [CC] [LL], [LL] [CC], [NN] [CC], [M] [TT], [TT] [YY], [A] [PP], [YY] [AA], [RR] [EEE], [TT] [HHH], [PP] [OOO], [SS] [QQQ] et [FF] [YYY].
Par conclusions du 8 septembre 2017, [Q] [G] demande à la cour :
- de constater l'irrecevabilité de toute demande de messieurs [YYY], [O] et [A] pour défaut d'intérêt à agir du fait de leur absence de qualité de demandeurs au pourvoi ayant amené la Cour de cassation à saisir la cour d'appel ;
- de prononcer l'irrecevabilité de la demande d'expertise formulée par les intimés pour défaut de détermination de la demande du fait de l'absence de tout chiffre de demande de chacun des 26 intimés, en application des articles 4 et 954 du code de procédure civile ;
- d'infirmer le jugement déféré ;
- de dire irrecevable l'action des intimés en raison de la prescription et pour défaut d'intérêt à agir ;
- subsidiairement, de débouter les intimés de leur demande à défaut d'établir l'existence d'un préjudice personnel, direct et certain ;
- en tout état de cause, de condamner chacun des intimés au paiement de la somme de 300 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et de les condamner aux dépens conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Par conclusions du 11 août 2017, [G] [F], [N] [M], [E] [Q], [Y] [L], [L] [Y], [H] [D], [D] [H], [Q] [W], [I] [I], [A] [V], [K] [Z], [ZZ] [RR], [KK] [XX], [G] [TTT] [NN], [HH] [VV], [CC] [LL], [LL] [CC], [NN] [CC], [M] [TT], [TT] [YY], [A] [PP], [YY] [AA], [RR] [EEE], [TT] [HHH], [PP] [OOO], [SS] [QQQ], [FF] [YYY], [T] [O] et [S] [A] demandent à la cour :
- de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
' débouté monsieur [G] de ses moyens tirés de la prescription de l'action civile et du défaut d'intérêt à agir et du défaut de faute contractuelle de l'employeur ;
' constaté que les salariés justifient d'un principe de préjudice personnel et actuel;
' ordonné une expertise pour déterminer ce préjudice ;
- de dire que les frais de consignation seront mis à la charge de l'appelant ;
- de condamner monsieur [G] à leur payer à chacun la somme de 200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et de le condamner aux entiers dépens conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
34 intimés ont constitué avocat mais n'ont pas conclu à savoir : [X] [X], [R] [U], [M] [N], [L] [R], [V] [P], [C] [B], [J] [J], [O] [J], [W] [S], [P] [C], [U] [K], [B] [T], [Z] [E], [XX] [WW], [RR] [BB], [S] [II], [JJ] [HH], [XX] [OO], [D] [MM], [Y] [SS], [WW] [KK], [JJ] [EE], [OOO] [UU], [VV] [QQ], [EE] [DD], [GG] [FF], [QQ] [JJ], [BB] [ZZ], [DD] [GG], [OO] [UUU], [FF] [SSS], [G] [LLL], [H] [AAA] et [II] [JJJ].
La SA FERMIERE DU CASINO MUNICIPAL, assignée devant la cour d'appel par acte d'huissier du 28 mars 2017 déposé à l'étude, n'a pas constitué avocat.
MOTIFS DE LA DECISION
1- sur le désistement partiel d'instance
Monsieur [G] s'est désisté de sa saisine de la cour d'appel après renvoi de cassation à l'égard de 37 parties dont messieurs [O] et [A]. À la date de ce désistement, aucune des parties concernées n'avait formé de demande en cause d'appel. Le désistement de monsieur [G] est dès lors parfait sans qu'il ait besoin d'être accepté, en application de l'article 401 du code de procédure civile. Ce désistement entraîne extinction de l'instance à l'égard des 37 parties, monsieur [G] supportant les dépens relatifs à la mise en cause de ces parties, conformément à l'article 399 du code de procédure civile.
2- sur la recevabilité des demandes des intimés
2-1- sur le défaut d'intérêt à agir de certains intimés
Non seulement Messieurs [O] et [A] n'ont effectivement pas formé de pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 2 décembre 2014, mais le désistement de monsieur [G] à leur égard est parfait, de sorte qu'ils sont irrecevables à présenter des demandes dans le cadre de la présente instance. En revanche, monsieur [YYY] a bien formé un pourvoi contre l'arrêt précité. Il est dès lors recevable à solliciter une expertise à l'encontre de monsieur [G].
2-2- sur l'indétermination de la demande
La demande des 27 intimés tend à l'organisation d'une expertise financière, sur le fondement de l'article 143 du code civil, afin de déterminer le préjudice qu'ils ont subis du fait de la vente frauduleuse des actions de la société GRAY D'ALBION à la SFCMC, opération pour laquelle la responsabilité civile de monsieur [G] a été judiciairement reconnue.
Cette demande est suffisamment précise et répond aux exigences des articles 4 et 954 du code de procédure civile qui ne conditionnent nullement la recevabilité d'une demande à un chiffrage, lequel en l'espèce serait difficile puisque la mesure d'instruction sollicitée a justement pour but de chiffrer le préjudice invoqué. La fin de non recevoir soulevée par monsieur [G] sera là encore rejetée.
2-3- sur la prescription
En application de l'article 2270-1 ancien du code civil, applicable avant la loi du 17 juin 2008 ayant modifié les délais de prescription, la prescription d'une action en responsabilité ne court qu'à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance.
En l'espèce, la question de l'incidence de l'acquisition des parts sociales de la société GRAY D'ALBION sur le droit à intéressement des salariés de la SFCMC a été évoquée lors de la réunion du comité d'entreprise de la société du 14 avril 1992 puis lors de celle du 25 avril 2002, étant précisé qu'entre temps de nombreux articles de presse s'étaient fait l'écho du caractère anormal de cette opération. Mais cela ne signifie pas pour autant que les salariés de la société SFCMC savaient que l'opération était frauduleuse et qu'elle était imputable à monsieur [G]. Ces éléments n'ont finalement été établis qu'à la suite de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris en date du 6 décembre 2007 qui a retenu l'infraction de complicité d'abus de biens sociaux et de pouvoirs à l'encontre de monsieur [G] et qui l'a condamné à payer à la société SFCMC la somme de 67 millions d'euros à titre de dommages-intérêts. Avant cet arrêt, aucune décision judiciaire n'avait consacré la responsabilité personnelle de monsieur [G] dans l'opération du rachat des actions de la société GRAY D'ALBION de sorte que les salariés de la SFCMC n'ont pu avoir conscience d'un dommage causé par monsieur [G] au plus tôt qu'à compter de l'arrêt du 6 décembre 2007, étant observé que cet arrêt n'est devenu définitif qu'après l'arrêt de la Cour de cassation en date du 14 janvier 2009 ayant rejeté le pourvoi formé contre lui, et qu'aucune pièce du dossier ne permet de préciser la date à laquelle ces décisions ont été portées à la connaissance des intimés qui n'étaient pas parties à la procédure pénale. Les intimés estiment de leur côté que le point de départ du délai de prescription doit être fixé au 10 juillet 2008, date à laquelle monsieur [G] a exécuté l'arrêt du 6 décembre 2007 en versant à la SFCMC la somme de 68.543.179 €.
Depuis la loi du 17 juin 2008, entrée en vigueur le 19 juin 2008, le délai de prescription des actions personnelles et mobilières a été ramené à 5 ans, conformément aux dispositions de l'article 2224 du code civil. Selon que le délai de prescription a commencé à courir avant l'entrée en vigueur de la nouvelle loi ou après, la prescription est acquise 5 ans après le 19 juin 2008 ou après le point de départ du délai posétérieur à cette date.
Dans la présente affaire, quelque soit le point de départ du délai retenu, soit le 6 décembre 2007 soit le 10 juillet 2008, le délai expirait soit le 19 juin 2013 soit le 10 juillet 20013. Monsieur [G] ayant été assigné par le 26 février 2013, l'action des intimés à son encontre n'est pas prescrite.
2-4- sur le défaut d'intérêt à agir des intimés
L'appelant fait valoir que dès lors qu'aucune faute, négligence ou quelconque fondement ne saurait affecter les relations contractuelles sources du droit à l'intéressement et à la participation, les intimés n'ont plus d'intérêt à agir à l'encontre de quiconque sur le fondement délictuel ayant pour objet la réparation d'un préjudice trouvant sa source dans l'inexécution d'un contrat.
Il s'agit là d'un moyen de fond sur l'existence d'un lien de causalité entre la faute et le préjudice allégué et non d'une fin de non recevoir. Les salariés ont en effet intérêt à agir contre monsieur [G], qui a été reconnu responsable d'une opération frauduleuse au préjudice de leur entreprise, opération qui était susceptible d'avoir des conséquences sur leur droit à intéressement.
3- sur la demande d'expertise
En application des articles 143 et 144 du code de procédure civile, le juge qui ne dispose pas d'éléments suffisants pour statuer peut ordonner toute mesure d'instruction légalement admissible.
L'existence d'une faute imputable à monsieur [G] n'est pas contestable au regard de l'arrêt du 6 décembre 2007 qui a retenu sa responsabilité pour avoir permis que la société SFCMC achète à un prix surévalué les actions de la société GRAY D'ALBION.
Le comité d'entreprise de la SFCMC a diligenté une expertise comptable confiée à [S] [CCC], du réseau CONTRASTES, qui dans un rapport du mois d'octobre 2010 à chiffré à 8,6 millions d'euros l'incidence totale de l'opération GRAY D'ALBION sur l'intéressement et la participation des salariés de la SFCMC depuis 1991. A la lecture de ce rapport, il semble que l'expert n'ait pas pris en compte le règlement par monsieur [G] de la somme de 68.543.179 € à la SFCMC le 10 juillet 2008, cette somme ayant été à l'époque pour partie mise en compte d'attente et pour le reste neutralisée sous forme de provisions. Il n'en demeure pas moins que l'opération fautive relative au rachat des actions de la société GRAY d'ALBION est susceptible d'avoir eu une incidence sur le droit à intéressement et participation des salariés de la SFCMC. Et compte tenu de la complexité des éléments à analyser, seule une expertise comptable permettra de déterminer si le paiement de la somme de 68.543.179€ a rempli ou non de leurs droits les salariés en compensant la perte de chance d'avoir touché des participations et intéressement entre 1991 et 2009. Le jugement déféré sera en conséquence confirmé sur l'organisation d' une expertise confiée à madame [KKK] [PPP], expert comptable, sur la mission donnée à l'expert et sur les modalités du déroulement des opérations d'expertise sauf à modifier le nom des personnes qui devront avancer les frais d'expertise et à supprimer les dispositions relatives au rappel de l'affaire devant le juge chargé des opérations d'expertise en raison du délai écoulé.
Les intimés, qui sont demandeurs à l'expertise et dont l'action est recevable, avanceront les frais d'expertise.
4- sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
La demande d'expertise étant fondée, c'est à juste titre que les premiers juges ont alloué aux intimés demandeurs dans la présente instance, dont l'action est recevable une somme de 50 € à chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Monsieur [G] qui succombe en son appel sera débouté de sa demande sur ce même fondement. Il serait en revanche inéquitable de laisser à la charge des intimés les frais, non compris dans les dépens qu'ils ont exposés dans la présente instance. Il convient de leur allouer à ce titre la somme de 120 € à chacun.
Monsieur [G] supportera également les dépens de première instance et d'appel à l'égard des intimés qui ont conclu en appel, les dépens pouvant être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Donne acte à [Q] [G] de son désistement de la saisine de la cour sur l'arrêt de la Cour de cassation en date du 14 avril 2016 à l'égard des parties suivantes :
[T] [O], [S] [A], [X] [X], [R] [U], [M] [N], [L] [R], [V] [P], [C] [B], [J] [J], [O] [J], [W] [S], [P] [C], [U] [K], la SA FERMIERE DU CASINO MUNICIPAL DE CANNES, [B] [T], [Z] [E], [XX] [WW], [RR] [BB], [S] [II], [JJ] [HH], [XX] [OO], [D] [MM], [Y] [SS], [WW] [KK], [JJ] [EE], [OOO] [UU], [VV] [QQ], [EE] [DD], [GG] [FF], [QQ] [JJ], [BB] [ZZ], [DD] [GG], [OO] [UUU], [FF] [SSS], [G] [LLL], [H] [AAA] et [II] [JJJ] ;
Constate l'extinction de l'instance et le dessaisissement de la cour à l'égard des personnes susvisées ;
Dit que [Q] [G] supportera les dépens résultant de la mise en cause des ces personnes dans le cadre de la présente instance ;
Déclare irrecevables les demandes de messieurs [O] et [A] ;
Déclare recevable l'action de [G] [F], [N] [M], [E] [Q], [Y] [L], [L] [Y], [H] [D], [D] [H], [Q] [W], [I] [I], [A] [V], [K] [Z], [ZZ] [RR], [KK] [XX], [G] [TTT] [NN], [HH] [VV], [CC] [LL], [LL] [CC], [NN] [CC], [M] [TT], [TT] [YY], [A] [PP], [YY] [AA], [RR] [EEE], [TT] [HHH], [PP] [OOO], [SS] [QQQ] et [FF] [YYY] à l'encontre de [Q] [G] ;
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a ordonné une expertise comptable confiée à madame [KKK] [PPP], sur la mission donnée à l'expert et sur les modalités du déroulement de l'expertise sauf en ce qui concerne les personnes devant consigner les frais d'expertise et sur le rappel d'office de l'affaire le 13 mai 2014 et les obligations découlant de ce rappel ;
Confirme également le jugement déféré sur les dispositions relatives à la condamnation de monsieur [G] à payer à [G] [F], [N] [M], [E] [Q], [Y] [L], [L] [Y], [H] [D], [D] [H], [Q] [W], [I] [I], [A] [V], [K] [Z], [ZZ] [RR], [KK] [XX], [G] [TTT] [NN], [HH] [VV], [CC] [LL], [LL] [CC], [NN] [CC], [M] [TT], [TT] [YY], [A] [PP], [YY] [AA], [RR] [EEE], [TT] [HHH], [PP] [OOO], [SS] [QQQ] et [FF] [YYY] la somme de 50 € à chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à sa condamnation aux dépens à l'égard des mêmes personnes ;
Statuant à nouveau,
Dit que [G] [F], [N] [M], [E] [Q], [Y] [L], [L] [Y], [H] [D], [D] [H], [Q] [W], [I] [I], [A] [V], [K] [Z], [ZZ] [RR], [KK] [XX], [G] [TTT] [NN], [HH] [VV], [CC] [LL], [LL] [CC], [NN] [CC], [M] [TT], [TT] [YY], [A] [PP], [YY] [AA], [RR] [EEE], [TT] [HHH], [PP] [OOO], [SS] [QQQ] et [FF] [YYY] devront consigner ensemble auprès du régisseur du tribunal de grande instance de Grasse, dans les trois mois suivant l'invitation qui leur en sera faite conformément à l'article 270 du code de procédure civile, la somme de 8.000 € destinée à garantir le paiement des frais et honoraires de l'expert ;
Dit n'y avoir lieu à fixer une date de rappel de l'affaire devant le juge en charge du contrôle de l'expertise ;
Déboute [Q] [G] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne [Q] [G] à payer à [G] [F], [N] [M], [E] [Q], [Y] [L], [L] [Y], [H] [D], [D] [H], [Q] [W], [I] [I], [A] [V], [K] [Z], [ZZ] [RR], [KK] [XX], [G] [TTT] [NN], [HH] [VV], [CC] [LL], [LL] [CC], [NN] [CC], [M] [TT], [TT] [YY], [A] [PP], [YY] [AA], [RR] [EEE], [TT] [HHH], [PP] [OOO], [SS] [QQQ] et [FF] [YYY] la somme de 120 € à chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne [Q] [G] aux dépens de première instance et d'appel à l'égard de [G] [F], [N] [M], [E] [Q], [Y] [L], [L] [Y], [H] [D], [D] [H], [Q] [W], [I] [I], [A] [V], [K] [Z], [ZZ] [RR], [KK] [XX], [G] [TTT] [NN], [HH] [VV], [CC] [LL], [LL] [CC], [NN] [CC], [M] [TT], [TT] [YY], [A] [PP], [YY] [AA], [RR] [EEE], [TT] [HHH], [PP] [OOO], [SS] [QQQ] et [FF] [YYY], dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le greffier, La présidente,