COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
3e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 25 JANVIER 2018
N° 2018/0024
Rôle N° 16/08468
[V] [I]
SARL DECO BAT SUD
C/
SARL LMLA
Grosse délivrée
le :
à :
Me Maud DAVAL-GUEDJ
Me Frédéric MORISSET
Me Christophe NANI
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 26 Novembre 2012 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 10/916.
APPELANTS
Monsieur [V] [I]
APPELANT ET INTIME
né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 1], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Maud DAVAL-GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
ayant Me Laure TERESI de la SCP CARRION-TAMIOTTI - TERESI, avocat au barreau de GRASSE
SARL DECO BAT SUD
APPELANTE ET INTIMEE, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Frédéric MORISSET, avocat au barreau de NICE substitué par Me Monique CASTELNAU, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMEE
SARL LMLA, demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Christophe NANI, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 22 Novembre 2017 en audience publique devant la Cour composée de :
Madame Sylvie CASTANIE, Présidente
Mme Béatrice MARS, Conseiller
Mme Florence TANGUY, Conseiller (rapporteur)
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Jocelyne MOREL.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Janvier 2018
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Janvier 2018,
Signé par Madame Sylvie CASTANIE, Présidente et Madame Jocelyne MOREL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Par acte sous seing privé du 30 juin 2005, la société LMLA qui exploite à [Localité 2] un fonds de commerce de discothèque sous l'enseigne L'Evénement a confié à M. [I] la maîtrise d'oeuvre de travaux d'aménagement de son local commercial, les honoraires de l'architecte étant fixés à 15 % HT du montant total des travaux réalisés.
Invoquant des désordres affectant le revêtement en résine des sols, elle a obtenu une expertise, par ordonnance de référé du 20 novembre 2007.
Reprochant à M. [I] d'avoir dépassé l'enveloppe financière de 400 000 € qu'elle lui avait indiquée, d'avoir fait procéder à des travaux supplémentaires par rapport aux devis sans son accord, de ne pas s'être assuré de la compétence et de ne pas avoir vérifié les assurances des entreprises, elle a assigné celui-ci en paiement de dommages et intérêts de 400 000 €.
Sur la base du rapport d'expertise déposé le 31 mai 2010, elle a également assigné la SARL Déco Bat Sud en charge des lots Résine-sol et Electricité et Travaux supplémentaires en paiement de la somme de 59 800 € au titre d'une facture indue pour des travaux d'électricité non réalisés et de la somme de 100 722,34 € au titre des travaux de réfection de la résine du sol.
Par jugement du 26 novembre 2012, le tribunal de grande instance de Nice a :
- débouté M. [I] de sa fin de non-recevoir fondée sur l'autorité de la chose jugée d'un arrêt de la cour de ce siège du 10 avril 2009 en relevant que, dans cette affaire, les conclusions par lesquelles la société LMLA a opposé à la demande en paiement du solde de ses honoraires pour non-respect par M. [I] de ses obligations contractuelles ont été déclarées irrecevables et que par conséquent le litige concernant les obligations contractuelles de l'architecte n'avait pas été tranché ;
- dit que M. [I] a manqué à ses obligations contractuelles de maître d'oeuvre ce qui a causé un préjudice à la SARL LMLA ;
- condamné en conséquence M. [I] à payer à la SARL LMLA la somme de 200 000 € à titre de dommages intérêts ;
- condamné la SARL Déco Bat Sud à payer à la SARL LMLA la somme de 160 522, 34 € ;
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision ;
- condamné in solidum M. [I] et la SARL Déco Bat Sud aux dépens et à payer à la SARL LMLA la somme de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 20 décembre 2012, M. [V] [I] a relevé appel de cette décision et la SARL Bati Déco Sud a fait de même par déclaration du 31 décembre.
Dans ses dernières conclusions remises au greffe le 27 juin 2013, M. [I] demande à la cour :
- vu les articles 122 et 480 du code de procédure civile,
- vu l'article 16 du code de procédure civile,
- vu l'article 455 du code de procédure civile,
- vu l'article 1147du code civil,
- vu l'article 1315 du code civil,
- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,
- de dire et juger que les prétentions de la SARL LMLA se heurtent à la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt rendu le 10 avril 2009 par la cour d'appel d'Aix-en-provence,
- en conséquence, de dire et juger les prétentions de la SARL LMLA purement et simplement irrecevables,
- en tout état de cause, de débouter la SARL LMLA de l'intégralité de ses prétentions,
- de dire et juger irrecevables les demandes formées par la SARL Déco Bat Sud à l'encontre de M. [I], conformément à l'article 564 du code de procédure civile,
- en tout état de cause, de débouter la SARL Déco Bat Sud de l'intégralité de ses prétentions dirigées à l'encontre de M. [I],
- de condamner in solidum la SARL LMLA et la SARL Déco Bat Sud à payer à M. [I] la somme de 5000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Il fait valoir que :
- la cour de ce siège, dans son arrêt du 10 avril 2009, la cour a écarté les contestations de la SARL LMLA sur la qualité des prestations accomplies par M. [I] en exécution de la convention de maîtrise d'oeuvre,
- que la SARL LMLA a remis des chèques en paiement aux entreprises et à l'architecte, qu'elle n'a pas contesté l'étendue, la qualité ni le montant des travaux exécutés lors de la réception des travaux, le procès-verbal de réception précisant que les travaux exécutés sont conformes aux spécifications du marché, qu'elle n'a contesté ni les créances de l'architecte et de l'entreprise, n'a élevé aucune contestation tant au stade des mesures conservatoires que des voies d'exécution entreprises contre elle,
- que les associés de la SARL LMLA ont souscrit des engagements de caution solidaire,
- que la SARL LMLA qui s'est abstenue de payer pour partie les travaux de revêtement de sol, est mal fondée à invoquer des désordres afférents à un lot qu'elle n'a payé qu'à hauteur de 30 %,
- que le rapport d'expertise lui est inopposable,
- que la qualité des travaux ne peut être contestée dans la mesure où la SARL LMLA a obtenu les autorisations administratives,
- que les demandes formées par la SARL Déco Bat sud sont des prétentions nouvelles en appel, les conclusions de celle-ci en première instance ayant été rejetées comme tardives,
- que la SARL Déco Bat Sud et la société FSE intervenaient fréquemment de concert sur les chantiers et avaient des accords les amenant à se rétrocéder des sommes, et que la société Déco Bat Sud tente de tirer profit des accords entre ces deux sociétés.
Dans ses conclusions remises au greffe le 4 mars 2013, la SARL Déco Bat Sud demande à la cour de :
- réformer la décision dont appel en toutes ses dispositions,
- condamner la société LMLA à lui payer la somme de 27 687,40 € pour la construction du podium,
- condamner solidairement la société LMLA et M. [I] à lui payer la somme de 71 014,63 € au titre des fournitures de matériaux,
- débouter purement et simplement la société LMLA et M. [I] de l'ensemble de leurs demandes dirigées contre elle,
- dire et juger que la société Déco Bat Sud sera relevée et garantie par M. [I] de toute condamnation prononcée à son encontre,
- condamner la société LMLA et M. [I] à verser, chacun, à la SARL Déco Bat Sud la somme de 5000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
-condamner la société LMLA et M. [I] aux entiers dépens.
Elle soutient :
- que la société FSE a été seule attributaire du lot Traitement des sols par résine, lot que celle-ci a sous-traité à M. [Z] (entreprise Sol Interface),
- qu'elle n'a d'ailleurs émis aucune facture de solde relative aux travaux de revêtement de sols,
- qu'elle n'est pas plus attributaire du lot électricité, dont la société FSE avait la charge mais qu'elle a effectué, de manière ponctuelle, de travaux d'électricité à la demande de M. [I] et que sa facture est donc fondée.
Elle forme une demande reconventionnelle en paiement des travaux de construction du podium et en remboursement des matériaux qu'elle a payés.
Elle agit en responsabilité délictuelle contre M. [I] en lui reprochant de ne pas avoir réparti les lots entre les entreprises et réclame donc la condamnation in solidum de celui-ci avec la SARL LMLA à lui payer les matériaux qu'elle a fournis et la condamnation de M. [I] à le relever et garantir de toutes condamnations.
Par conclusions remises au greffe le 29 avril 2013, la société LMLA demande à la cour :
- vu les articles 1134, 1154 et 1147 du code civil,
- de constater que M. [I] a manqué ses obligations contractuelles visées dans la convention signée le 30 juin 2005,
- de constater que ces manquements ont causé à 1a société LMLA un important préjudice,
- d'homologuer le rapport de M. [J] en date du 31 mai 2010,
- en conséquence,
- de condamner M. [I] au paiement d'une somme de 360 522,34 € (soit 200.000 € +100 722,34 € + 59 800 €) à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices causés à la société LMLA,
- de condamner la société Déco Bat Sud au paiement de la somme de 100 722,34 € au titre des
travaux de réfection de la résine sol,
- de dire que cette condamnation sera in solidum avec M. [I],
- de condamner la société Déco Bat Sud au paiement de la somme de 59 800 € au titre du remboursement de la facture N° 05.09.03 manifestement indue,
- de dire que cette condamnation sera in solidum avec M. [I],
- de condamner in solidum M. [I] et la société Déco Bat Sud au paiement d'une somme de 8000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner in solidum M. [I] et la société Déco Bat Sud aux entiers dépens en ceux compris les dépens de l'ordonnance de référé du 20 novembre 2007 et des frais d'expertise.
Elle fait valoir que :
- que M. [I] a été défaillant dans l'exécution de sa mission (absence de plans techniques des travaux à réaliser lot par lot, absence d'un planning de phasage, absence de dossiers de consultation des entreprises, absence de descriptif quantitatif-estimatif des travaux, absence de compte rendu de chantiers, absence de suivi des situations de travaux, absence de diligences pour la levée des réserves),
- que ni les devis initiaux ni les travaux supplémentaires n'ont été approuvés par le maître d'ouvrage,
- que les devis présentent des anomalies et des doublons,
- que la société LMLA a été contrainte d'émettre des chèques et de fournir des cautions sous la pression des entreprises qui menaçaient de quitter le chantier,
- que la société Déco Bat Sud ne disposait pas des compétences pour réaliser le revêtement de sol, qu'elle n'a pas choisi le matériau adapté au type de local, et n'était pas couvert par un contrat d'assurance garantissant ce type d'intervention,
- que la facture de travaux d'électricité de la SARL Déco Bat Sud ne correspond à aucune prestation,
- qu'elle a subi des préjudices du fait des procédures et des voies d'exécution entreprises par la société FSE.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 novembre 2017.
MOTIFS :
M. [I] conclut à l'irrecevabilité des demandes formées par la société LMLA qui auraient été tranchées par un arrêt du tribunal de commerce de Nice en date du 10 avril 2009 dans le cadre d'un litige portant sur le paiement du solde des honoraires d'architecte. Cependant les conclusions par lesquelles la société LMLA a opposé à la demande de M. [I] les manquements de celui-ci à sa mission de maîtrise d'oeuvre, ont été écartées des débats en ce qu'elles étaient postérieures à l'ordonnance de clôture. M. [I] est donc infondé à soulever l'autorité de la chose jugée sur des points qui n'ont pas été débattus contradictoirement et qui n'ont pas été tranchés par la cour dans son arrêt précité.
L'expert a constaté que le sol en résine présentait des phénomènes de micro bullage et de décollement ainsi qu'une finition de surface, d'aspect brillant, passée au mat aux endroits de forts passages, avec des traces blanches. Il a relevé que l'information fournie par le fabricant du produit de revêtement de sol résine montrait que ce produit n'était pas adapté à la destination des lieux en discothèque impliquant des passages répétés, les finitions brillantes nécessitant un entretien quotidien sinon elles finissent par se matifier. En outre il a conclu que les désordres résultaient également d'une mise en oeuvre défectueuse du revêtement.
Si aucun document ne permet de savoir quel rendu de surface a été commandé par le maître d'ouvrage, il n'en reste pas moins que l'utilisation du produit n'était pas adaptée au type du local, s'agissant d'une discothèque avec une forte fréquentation.
L'expert chiffre à 100 722,34 € TTC le montant des travaux de reprise des sols correspondant à la surface traitée par la société Sols Interface de 735,15 m².
Dans le procès-verbal de réception du 23 février 2006, la SARL LMLA a refusé de recevoir les travaux concernant le lot Résine de sol en raison de nombreuses traces de coulures sur les plinthes et faïences, de la présence de bulles et bosses à divers endroits et en notant que le vernis se peluche malgré une attention particulière de l'entreprise de nettoyage.
La SARL Deco Bat Sud prétend qu'elle n'était pas attributaire du lot Traitement de sol par résine en faisant valoir que la société SFE, qui aurait sous-traité ces travaux à la société Sols Interface aurait émis une facture le 31 janvier 2006 pour ces travaux. Cependant lors du deuxième accédit du 4 juillet 2008, M. [N], représentant la société Déco Bat Sud au cours des opérations d'expertise, a confirmé avoir sous-traité à Sols Interface la totalité des travaux de résine en précisant avoir payé directement à celle-ci la facture du 24 août 2005 d'un montant de 45 983,20 € TTC, les autres factures ayant été envoyées (par la société Sols Interface) au maître d'ouvrage. Il a indiqué ne plus posséder la facture définitive des travaux. En page 11 du rapport d'expertise, lors du troisième accédit, M. [N] a confirmé que son entreprise était intervenue (') pour les travaux de sol par l'intermédiaire de son sous-traitant, M. [Z] (pour la société Sols Interface). Le tableau «' compte travaux' » établi le 12 décembre 2005 par le maître d'oeuvre fait apparaître une prestation de travaux de résine de sols par la SARL Déco Bat Sud pour un montant de 102 667,78 € TTC. Et l'expert a noté qu'aucune pièce ne lui permettait d'affirmer que la société FSE détenait une commande du maître d'ouvrage ou de son représentant portant sur le traitement de la résine de sol.
La SARL Déco Bat Sud qui, en considération de ces éléments, est bien intervenue pour le lot Revêtement de sol en résine, qui a commis des malfaçons dans la mise en oeuvre du produit et ne s'est pas assurée que celui-ci était adapté à l'usage auquel il était destiné, ne peut donc échapper à sa responsabilité, étant tenue d'une obligation de résultat en tant que professionnel.
M. [I] invoque l'inopposabilité du rapport d'expertise à son égard, n'ayant pas été appelé en déclaration d'ordonnance commune et n'ayant par conséquent pas assisté aux opérations d'expertise. Les désordres relevés par l'expert ont cependant été constatés par les parties dans les deux procès-verbaux de réception du 14 décembre 2005 et du 23 février 2006, à telle enseigne qu'ils ont été refusés par le maître d'ouvrage. M. [I] ne peut donc affirmer que les travaux étaient exempt de vices.
M. [I] qui avait reçu une mission complète de maîtrise d'oeuvre ne s'est pas assuré de la compétence technique de la SARL Déco Bat Sud ni de celle de la SARL Sols Interface ; il a choisi une entreprise qui n'était pas couverte par une police d'assurance pour les travaux de chapes coulées à liant résine et il ne justifie d'aucune diligence pour la levée des réserves. Il a donc également commis une faute à l'origine du préjudice subi par la société LMLA du fait des désordres affectant le revêtement de sol en résine.
Toutefois la SARL LMLA qui réclame des dommages et intérêts correspondant au coût de réfection des sols ne peut obtenir à la fois le remboursement du montant des travaux réalisés et atteints de malfaçons et la reprise des désordres. La société Déco Bat Sud et M. [I] seront donc condamnés in solidum à payer à la société LMLA la somme de 102 722,34 € TTC au titre des travaux de reprise des revêtements de sol.
Par ailleurs la société LMLA conteste le montant des travaux facturés. Elle sollicite le paiement de dommages et intérêts par M. [I] en raison des manquements de celui-ci à ses obligations contractuelles. Elle fait valoir que le paiement de travaux supplémentaires lui a été réclamé alors qu'elle n'a jamais consenti à de tels travaux, qu'elle n'a jamais demandé de modifications par rapport aux travaux qu'elle avait commandés, qu'elle a payé des travaux qui ne correspondaient à aucune prestation ou qu'elle a payé deux fois les mêmes travaux, et qu'elle a dû subir des procédures et voies d'exécution de la part de la société SFE sur la base de factures erronées approuvées par le maître d'oeuvre.
Elle expose ainsi :
- qu'une facture de fourniture de garde-corps métalliques de 12 830 € a été émise par la société SFE alors que le devis initial prévoyait la dépose et la remise des anciens garde-corps dans la zone Bar Lounge,
- que des travaux de peinture lui ont été facturés par la société SFE d'un montant de 50 596,58 € pour une superficie de 1706 m² alors que les plafonds acoustiques d'une surface de 504,53 m² n'étaient pas inclus dans le marché,
- que le montant initial des travaux arrêté à 400 000 € a été largement dépassé,
- qu'elle n'a pas commandé de travaux supplémentaires par rapport aux devis initiaux, et n'a pas approuvé les devis de travaux supplémentaires,
- que les travaux supplémentaires d'un montant d'environ 160 000 € ne peuvent donc résulter que de carences du maître d'oeuvre dans ses prévisions initiales,
- que ces devis de travaux supplémentaires reprennent certaines prestations figurant déjà dans les devis initiaux.
Il est certain que l'absence de marché initial, l'absence de répartition des lots entre les différentes entreprises qui sont intervenues, l'absence d'approbation par le maître d'ouvrage de travaux supplémentaires, l'absence de situation de chantier rendent le déroulement du chantier particulièrement opaque et ne permettent pas de déterminer si les travaux facturés ont été commandés par le maître d'ouvrage et s'ils ont été réalisés alors que cette preuve incombe à l'entreprise qui prétend les avoir effectués et au maître d'oeuvre. En outre l'absence de plans techniques des travaux et d'un descriptif quantitatif et estimatif a généré des imprévisions et un dépassement important du montant initial des travaux. Il convient enfin de constater que M. [I] a perçu des honoraires fixés à 15 % du montant total des travaux, en ce compris les travaux supplémentaires contestés par la société LMLA d'un montant d'environ 160 000 €, le montant global de l'opération de rénovation en étant encore alourdie pour la société LMLA.
Les manquements ci-dessus énumérés sont imputables à M. [I] qui avait reçu, suivant convention du 30 juin 2005, une mission complète de maîtrise d'oeuvre incluant :
- Avant Projet Définitif (APD),
- Plans techniques des travaux à réaliser, lots par lots.
- Etablissement des contrats de marchés avec les entreprises,
- Direction des travaux,
- Coordination et pilotage des travaux,
- Rédaction des comptes rendus et diffusion aux intervenants,
- Suivi des situations,
- Décomptes définitifs.
Les carences du maître d'oeuvre ont conduit le maître d'ouvrage à se voir facturer des travaux dont ni la commande ni la réalisation ne sont justifiées.
M. [I] invoque, comme preuve de l'acceptation par le maître d'ouvrage de la totalité des travaux et des factures, et comme preuve de la parfaite exécution de sa mission :
- les paiements faits par la société LMLA et les engagements de caution des associés,
- la constatation par la société LMLA, dans le procès-verbal de réception du 23 février 2006, de la conformité des travaux aux spécifications du marché,
- l'absence de contestations de la SARL LMLA lors des mesures d'exécution entreprises par la société FSE,
- l'accord des autorités administratives sur les questions sécurité incendie et accessibilité aux personnes handicapées et à mobilité réduite, ces autorisations étant totalement étrangères au litige concernant le coût des travaux et les désordres affectant les sols, en oubliant que les travaux du lot Résine de sol ont été refusés par le maître d'ouvrage en raison des malfaçons et qu'ils ont fait l'objet d'une retenue de 50 % du montant du marché, que les factures ont été établies sur la base de devis non approuvés par le maître d'ouvrage, et qu'en l'absence de marché initial, de répartition des lots entre les différentes entreprises, de situations de chantier et d'approbation par le maître d'ouvrage des devis de travaux supplémentaires, la société LMLA ne pouvait qu'ignorer à quels travaux les factures se rapportaient, les travaux d'électricité supplémentaires n'étant pas détaillés et la superficie des surfaces de sols traitées n'ayant pas été mesurée par le maître d'oeuvre.
La SARL Déco Bat Sud soulève enfin, de manière inappropriée, l'exception d'inexécution pour non-paiement des travaux de revêtement de sol alors que les travaux ont été effectivement réalisés mais qu'ils présentent des malfaçons.
C'est donc à juste titre que le premier juge a condamné M. [I], en raison de ses manquements à l'exécution de sa mission, à payer à la société LMLA des dommages et intérêts de 200 000 € en réparation de son préjudice.
La SARL LMLA sollicite le remboursement de la facture n° 05.09.03 en date du 15 septembre 2005 de 59 800 € établie par la SARL Déco Bat Sud pour des travaux d'électricité.
Cette facture a été émise sur la base d'un devis n°08.09.05/1 du 8 septembre 2005 d'un montant de 74.080,24 € TTC. L'expert a noté que cette facture figure dans le décompte du maître d'oeuvre du 12 décembre 2005, une somme de 14 280,24 € TTC étant inscrite dans la colonne solde, ce qui correspond au devis. La société LMLA ne conteste pas que les prestations figurant au devis de travaux supplémentaires d'électricité ont été effectuées. Elle ne prétend pas que ces prestations étaient incluses dans les devis initiaux ni dans les devis de la société FSE et qu'elle aurait ainsi payé deux fois les mêmes travaux. Elle n'est donc pas fondée à réclamer le remboursement de la somme de 59 800 € qu'elle a payée, au seul motif que les travaux réalisés et facturés par la SARL Déco Bat Sud ne peuvent être déterminés au vu de la facture du 15 septembre 2005.
La SARL Déco Bat Sud demande la condamnation in solidum de la société LMLA et de M. [I] à lui payer la somme de 27 687,40 € pour la construction du podium et la somme de 71 014,63 € au titre des fournitures de matériaux, et à être relevée et garantie par M. [I] des condamnations prononcées contre elle.
M. [I] fait valoir à juste titre qu'il s'agit de demandes nouvelles, les conclusions de la SARL Déco Bat Sud en première instance ayant été déclarées irrecevables comme tardives.
La société LMLA ne soulève pas l'irrecevabilité des demandes formées contre elle.
L'expert a relevé que plusieurs factures de matériaux et de matériels divers ont été réglées à hauteur de 71 014,63 € TTC par la SARL Déco Bat Sud qui en demande le remboursement au motif qu'elle aurait alimenté la totalité du chantier en matériaux. Le décompte du maître d'oeuvre ne fait cependant aucune référence à un poste "fourniture de matériaux", le coût de ceux-ci ayant nécessairement été intégré au montant des travaux facturés à la société LMLA, de sorte que SARL Déco Bat Sud n'est pas fondée à réclamer à la société LMLA le coût de fournitures que celle-ci a déjà payées.
L'expert a constaté l'existence d'un devis de la SARL Déco Bat Sud du 7 septembre 2005, non signé, portant sur la création d'un podium danse pour un montant de 27 687,40 €. Il a observé que ce devis figurait sur le décompte du maître d'oeuvre du 12 décembre 2006 où il a été noté comme totalement impayé. Bien que la commande de ces travaux n'ait pas été établie par écrit, la société LMLA ne conteste pas que ces travaux ont été réalisés puisque, dans le procès-verbal de réception du 23 février 2006, elle a constaté la conformité des travaux aux spécifications du marché. Elle ne prétend pas non plus que ces travaux étaient inclus dans un autre devis de la SARL Déco Bat Sud ou d'une autre entreprise. Elle ne prouve pas qu'elle se soit acquittée de cette somme, de sorte qu'il sera fait droit à la demande en paiement de la SARL Déco Bat Sud.
M. [I] n'ayant pas été attrait à l'instance en référé ni aux opérations d'expertise, les frais de l'expertise et les dépens de l'instance en référé seront mis à la charge de la SARL Déco Bat Sud.
Dès lors qu'elles succombent dans leurs prétentions respectives devant la cour, les parties conserveront la charge des dépens et des frais irrépétibles qu'elles ont exposés.
PAR CES MOTIFS :
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré,
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a :
* débouté M. [I] de sa fin de non-recevoir fondée sur l'autorité de la chose jugée d'un arrêt de la cour de ce siège du 10 avril 2009 ;
* dit que M. [I] a manqué à ses obligations contractuelles de maître d'oeuvre ce qui a causé un préjudice à la SARL LMLA ;
* condamné en conséquence M. [I] à payer à la SARL LMLA la somme de 200 000 € à titre de dommages intérêts ;
* et en ce qui concerne les condamnations au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;
L'INFIRME pour le surplus ;
Statuant à nouveau et y ajoutant ;
CONDAMNE la SARL Déco Bat Sud à payer à la SARL LMLA la somme de 100 722,34 € in solidum avec M. [I] ;
DEBOUTE la société LMLA de sa demande en paiement de la somme de 59 800 € au titre du remboursement de la facture N° 05.09.03 ;
DECLARE irrecevables les demandes formées par la SARL Déco Bat Sud contre M. [I] ;
DEBOUTE la SARL Déco Bat Sud de sa demande en paiement de la somme de 71 014,63 € au titre des fournitures de matériaux ;
CONDAMNE la société LMLA à payer à la SARL Déco Bat Sud la somme de 27 687,40 € au titre de la construction d'un podium ;
DIT que les frais de l'expertise et les dépens de l'instance en référé seront mis à la charge de la SARL Déco Bat Sud ;
DIT que les parties conserveront la charge des dépens et des frais irrépétibles qu'elles ont exposés en appel.
LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE