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01/03/2018 | FRANCE | N°16/17101

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10e chambre, 01 mars 2018, 16/17101


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

10e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 01 MARS 2018



N° 2018/ 103













Rôle N° 16/17101







[Y] [Z]

[F] [J] épouse [Z]





C/



MACIF

MAIRIE [Localité 1]

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCES MALADIE DES ALPES- MARITIMES





















Grosse délivrée

le :

à :

Me Agnès ERMENEUX-CHAMPLY



Me Thie

rry TROIN















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 05 Septembre 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 12/04374.





APPELANTS



Monsieur [Y] [Z]

né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 2] (CAMBODGE) de nationalité Françai...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

10e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 01 MARS 2018

N° 2018/ 103

Rôle N° 16/17101

[Y] [Z]

[F] [J] épouse [Z]

C/

MACIF

MAIRIE [Localité 1]

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCES MALADIE DES ALPES- MARITIMES

Grosse délivrée

le :

à :

Me Agnès ERMENEUX-CHAMPLY

Me Thierry TROIN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 05 Septembre 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 12/04374.

APPELANTS

Monsieur [Y] [Z]

né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 2] (CAMBODGE) de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Agnès ERMENEUX-CHAMPLY de la SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, Me Emeric GUILLERMOU de la SELARL PROXIMA, avocat au barreau de TOULON

Madame [F] [J] épouse [Z]

née le [Date naissance 2] 1959 à [Localité 3] (ALGERIE),

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Agnès ERMENEUX-CHAMPLY de la SCP ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, Me Emeric GUILLERMOU de la SELARL PROXIMA, avocat au barreau de TOULON

INTIMEES

MACIF,

dont le siège social est [Adresse 2]

représentée par Me Thierry TROIN de l'ASSOCIATION JEAN CLAUDE BENSA & ASSOCIES, avocat au barreau de NICE

MAIRIE [Localité 1]

dont le siège social est [Adresse 3]

défaillante

CPAM DES ALPES-MARITIMES

dont le siège social est [Adresse 4]

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 16 Janvier 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Anne VELLA, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Olivier GOURSAUD, Président

Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller

Madame Anne VELLA, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvaine MENGUY.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 01 Mars 2018

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 01 Mars 2018,

Signé par Monsieur Olivier GOURSAUD, Président et Madame Sylvaine MENGUY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 1er octobre 2004 à [Localité 4], Mme [F] [J] a été victime d'un accident de la circulation en sa qualité de passagère transportée du véhicule conduit par M. [Y] [Z], assuré auprès de la Macif.

Par ordonnance du 13 janvier 2006, le juge des référés a désigné le docteur [R], pour évaluer les conséquences médico-légales de l'accident. L'expert a déposé son rapport le 9 mars 2006.

Par actes des 16 et 17 août 2007, Mme [J] a fait assigner M. [Y] [Z], et la Macif devant le tribunal de grande instance de Nice, pour les voir condamner à l'indemniser de ses préjudices corporels et ce, en présence de la Cpam des Alpes Maritimes.

La victime a sollicité l'instauration d'une nouvelle expertise, demande à laquelle M. [Z] ne s'est pas opposé.

Selon jugement du 12 janvier 2009, le tribunal a condamné in solidum M. [Z] et la Macif à indemniser l'entier préjudice subi par Mme [J], avant de désigner le docteur [X] en qualité d'expert et d'allouer à la victime une provision supplémentaire de 2000€. L'expert a déposé son rapport le 3 juin 2010.

Par jugement du 2 mai 2011, le tribunal a :

- condamné in solidum M. [Z] et la Macif à verser à Mme [J] la somme de 2000€ à titre provisionnel à valoir sur l'indemnisation de son préjudice corporel ;

- débouté Mme [J] de sa demande de contre-expertise ;

- ordonné la réouverture des débats sur l'indemnisation du préjudice corporel de Mme [J] tel qu'il résulte du rapport du docteur [X] ;

- réservé les dépens et le surplus des demandes.

Par jugement du 21 octobre 2013 le tribunal a :

- déclaré Mme [J] irrecevable en sa demande de contre expertise et il l'a déboutée de sa demande de provision complémentaire ;

- débouté la Macif de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

- renvoyé l'affaire les parties à la mise en état pour conclure sur le fond.

Mme [J] a relevé appel de ce jugement avant de s'en désister comme cela résulte de l'ordonnance de dessaisissement de la cour d'appel selon arrêt du 3 novembre 2014.

Par actes du 11 septembre 2015, Mme [J] et M. [Z] ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Nice, la mairie [Localité 5], en sa qualité de tiers payeur, avec dénonce de l'entière procédure. Ils ont demandé à titre principal au tribunal d'ordonner une expertise médicale confiée à un expert orthopédiste et à titre subsidiaire de liquider le préjudice corporel initial de Mme [J], de lui allouer une provision à valoir sur son aggravation, et d'allouer une somme à M. [Z] en réparation de son préjudice d'affection.

Les deux instances ont été jointes selon ordonnance du 2 novembre 2015.

Par jugement du 5 septembre 2016, assorti de l'exécution provisoire, cette juridiction a :

- entériné les conclusions du rapport d'expertise du docteur [X] ;

- condamné la Macif à payer à Mme [J] la somme de 16'431€ avant déduction des provisions versées par l'assureur ;

- débouté Mme [J] de ses autres demandes plus amples contraire ;

- débouté M. [Z] de sa demande d'indemnisation de son préjudice moral ;

- débouté la Macif de sa demande reconventionnelle de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

- déclaré le jugement commun à la commune [Localité 1] [Localité 6] et à la Cpam des Alpes Maritimes ;

- condamné la Macif à payer à Mme [J] la somme de 1500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum M. [Z] et la Macif aux entiers dépens, avec distraction.

Il a jugé que Mme [J] était irrecevable en sa demande de contre-expertise en l'état de l'autorité de la chose jugée attachée aux jugements du tribunal de grande instance de Nice des 2 mai 2011 et 21 octobre 2013, le premier ayant rejeté la demande et le second l'ayant déclaré irrecevable en vertu de la chose jugée par jugement du 2 mai 2011.

Il a rappelé la problématique du litige résidant dans la façon de prendre en compte l'état antérieur de la victime pour déterminer les différents postes de préjudice et notamment le déficit fonctionnel permanent, ainsi que les périodes de déficit fonctionnel temporaire et les interventions chirurgicales liées aux conséquence directes de l'accident, tout en soulignant que le droit de la victime à indemnisation de son préjudice corporel ne peut être réduit en raison d'une prédisposition pathologique lorsque l'affection qui en est issue n'a été provoquée ou révélée que par le fait dommageable. Il a retenu un déficit fonctionnel permanent de 4%, estimant qu'il résulte des éléments du rapport d'expertise qu'aucun déficit fonctionnel permanent concernant l'état des genoux n'a été provoqué ou révélé par l'accident du 1er octobre 2004, ce déficit correspondant à l'évolution normale de l'état antérieur sans que l'accident ait pu avoir une quelconque incidence sur cette évolution.

Il a fixé le préjudice de Mme [J] de la façon suivante :

- déficit fonctionnel temporaire total le 18 octobre 2004 et le 24 avril 2005

- déficit fonctionnel temporaire partiel à 50 % du 19 octobre 2004 au 23 mai 2005

- déficit fonctionnel temporaire partiel à 25 % du 25 mai 2005 au 27 novembre 2005

- déficit fonctionnel temporaire partiel progressivement régressif du 28 novembre au 31 mars 2006 date de la consolidation

sur une base mensuelle de 750€ : 4371€

- souffrances endurées 2,5/7 : 4400€

- préjudice esthétique permanent 1/7 pour les diverses cicatrices engendrées par les arthroscopies imputables à 50 % à la suite de l'accident : 1750€

- déficit fonctionnel permanent 4 % : 5200€

- préjudice d'agrément : rejet

- dépenses de santé actuelles : 824,17€ pris en charge par la Cpam des Alpes Maritimes, soit aucune somme revenant à la victime,

- frais d'assistance à expertise : 710€

- assistance par tierce personne : rejet

- perte de gains professionnels actuels : rejet au motif que Mme [J] était en congé longue maladie au moment de l'accident et qu'elle n'est pas fondée à invoquer un tel préjudice en rapport avec les conséquences dommageables de l'accident du 1er octobre 2004,

- perte de gains professionnels futurs : rejet, le congé de longue maladie n'ayant pas de lien avec les conséquences dommageables de l'accident du 1er octobre 2004 et étant imputable à l'évolution de son état antérieur,

- incidence professionnelle : rejet pour les mêmes motifs.

Il a rejeté la demande formulée par Mme [J] tendant au doublement du taux d'intérêt légal à compter du 9 août 2006 au motif qu'elle ne fait pas la démonstration que l'offre du 20 décembre 2006 de la Macif serait intervenue après l'expiration du délai de 5 mois à compter de la notification à l'assureur du rapport définitif de l'expert judiciaire et qu'elle serait insuffisante.

Il a débouté M. [Z] de sa demande d'indemnisation d'un préjudice d'affection et liée à la dégradation de l'état de santé thymique et physique de sa compagne Mme [J], cet état n'étant pas directement lié aux conséquences de l'accident.

Par acte du 21 septembre 2016, dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, M. [Z] et Mme [J] ont interjeté appel général de cette décision.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans leurs conclusions du 15 décembre 2016, M. [Z] et Mme [J] demandent à la cour de :

' réformer le jugement ;

à titre principal, de :

' ordonner une expertise médicale de Mme [J] en désignant un médecin orthopédiste avec mission de décrire l'état antérieur de la victime puis selon mission habituelle en matière d'évaluation du préjudice corporel ;

' condamner la Macif à payer à Mme [J] une provision de 20'000€ ;

à titre subsidiaire, de :

' condamner la Macif à payer à Mme [J] les sommes suivantes au titre de l'indemnisation de ses préjudices :

- dépenses de santé actuelle : 824,17€

- frais divers : 82'366€

- perte de gains professionnels actuels : 25'433€

- assistance de tierce personne : 77'946,24€

- perte de gains professionnels futurs : à réserver + 16'847,33€

- incidence professionnelle : 70'000€

- déficit fonctionnel temporaire : 50'370€

- souffrances endurées : 30'000€

- déficit fonctionnel permanent : 60'600€

- préjudice d'agrément : 45'000€

- préjudice esthétique permanent : 3000€

soit au total la somme de 774'447,80€ lui revenant ;

' condamner la Macif à verser à M. [Z] la somme de 20'000€ au titre de son préjudice d'affection ;

' déduire toutes les provisions déjà versées ;

' ordonner une expertise médicale confiée un orthopédiste pour évaluer l'aggravation de l'état de santé de Mme [J] en se prononçant sur l'ensemble des postes de préjudice y compris l'aménagement éventuel d'un logement ;

' condamner la Macif à verser à Mme [J] la somme de 20'000€ à titre de provision sur son aggravation ;

' dire que les sommes allouées porteront intérêt de plein droit au double du taux de l'intérêt légal à compter du 9 août 2006 avec capitalisation, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil et de l'article L. 211-13 du code des assurances et ce, jusqu'à la date de la décision à intervenir ;

' condamner la Macif à verser à Mme [J] les sommes en résultant ;

' juger que l'offre proposée par la Macif étant manifestement insuffisante, la Macif sera condamné à verser au Fonds de garantie, conformément à l'article L. 421-1 du code des assurances une somme au plus égale à 15 % de l'indemnité allouée, sans préjudice des dommages intérêts dus de ce fait à la victime ;

' condamner en conséquence la Macif à verser au Fonds de garantie une somme au plus égale à 15 % de l'indemnité allouée la victime ayant subi une atteinte à sa personne ;

' condamner la Macif à verser à Mme [Z] la somme de 3000€ HT sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de leur conseil ;

' dire que dans l'hypothèse d'un défaut de règlement spontané, les condamnations prononcées dans le jugement à intervenir, l'exécution forcée devra être réalisée par l'intermédiaire d'un huissier de justice, le montant des sommes retenues par l'huissier en application de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 devra être supporté par le débiteur, ensuite l'application de l'article 700 du code de procédure civile et le condamner au paiement de ces sommes telles qu'elles ont été établies par l'huissier dans le cadre de l'exécution forcée.

Mme [J] qui soutient qu'elle subit un état séquellaire en lien avec l'accident du 1er octobre 2004, critique les rapports des docteurs [R] et [X] qui ont écarté le lien de causalité entre l'accident et la pathologie des deux genoux et sous-évalué ses préjudices. Elle maintient qu'en dépit d'une intervention en avril 1996 pour une ostéotomie de dérotation sus-tubérositaire du tibia gauche, il était tout à fait indolore avant l'accident, tout comme le genou droit qui ne présentait aucune anomalie. Ces deux genoux étaient asymptomatiques et l'accident a entraîné une décompensation articulaire. Elle verse aux débats de très nombreux certificats médicaux émettant des avis en totale contradiction avec les conclusions des deux experts judiciaires de telle sorte qu'une nouvelle expertise s'impose.

A titre subsidiaire elle demande la liquidation de son préjudice initial.

Elle produit aux débats une expertise réalisée par le docteur [P] et demande à la cour d'évaluer ses préjudices sur la base de ses conclusions, en soulignant que le juge n'est pas lié par les constatations ou les conclusions des experts commis. Elle demande l'application du barème issue de la Gazette du palais 2016.

Elle demande au titre de l'assistance par tierce personne temporaire l'indemnisation sur la base d'une heure par jour du 1er octobre 2004 au 16 janvier 2014, puis à raison de 3h par semaine du 16 janvier 2014 à la consolidation du 16 avril 2014, moyennant un coût horaire de 20€, et en retenant pour toute année entière 412 jours, soit au total la somme de 76.300€.

Elle fait état de dépenses d'honoraires auprès de médecins conseil pour un montant total de 6.066€ acquitté auprès de treize médecins différents.

Elle estime avoir subi une perte de gains professionnels actuels et expose qu'elle était agent administratif territorial à la mairie[Localité 1] lorsqu'elle a bénéficié d'un congé de longue maladie du 27 septembre 2004 au 26 septembre 2005, avec demi-traitement, puis d'un mi-temps thérapeutique du 27 septembre 2005 au 7 août 2006 à demi-traitement, et elle est de nouveau en congé longue durée avec demi-traitement depuis le 29 janvier 2013 jusqu'à ce jour. Elle chiffre sa perte à 25.433€. Elle conteste avoir été en congé longue durée au moment de l'accident et affirme qu'elle était en arrêt pour une infection génitale depuis le 27 septembre 2004.

Elle réclame l'indemnisation d'une assistance par tierce personne permanente à raison de 240€ par mois depuis le 16 avril 2014, somme qui sera capitalisée annuellement en fonction d'un euro de rente de 23,898 pour une femme de 58 ans, soit 77.946,24€.

Au titre de la perte de gains professionnels futurs, elle fait valoir qu'elle a été reconnue travailleur handicapé le 18 mars 2014 et qu'en fonction des séquelles qu'elle présente, elle ne reprendra pas son emploi. Elle demande une indemnisation sur la base d'un salaire annuel de 16.847,33€ qu'elle percevait en 2005. Elle est en congé longue durée et percevra son plein salaire jusqu'au 29 octobre 2018, date à partir de laquelle elle ne recevra qu'un demi-traitement jusqu'en 2020, soit de manière certaine une somme de 16.847,33€, mais le montant de sa pension d'invalidité au-delà n'étant pas encore chiffrable, elle sollicite que ce poste soit réservé pour la période postérieure à 2020. En raison de la pénibilité de l'emploi et de sa dévalorisation sur le marché du travail elle réclame 70.000€ au titre de l'incidence professionnelle.

Elle chiffre son déficit fonctionnel temporaire sur une base mensuelle de 800€, et en fonction des périodes et des taux retenus par le docteur [P]. Les souffrances endurées évaluées à 5/7 justifient l'octroi d'une somme de 30.000€. Le déficit fonctionnel permanent est chiffré à 30%. Elle soutient qu'avant l'accident elle pratiquait des activités sportives comme la gymnastique, la musculation, le tir et la course pied, activités auxquelles elle ne peut plus s'adonner, ce qui justifie l'allocation de 45.000€.

A titre infiniment subsidiaire, elle sollicite une expertise sur aggravation et le versement d'une somme provisionnelle. Depuis 2010, plusieurs autres médecins consultés font état des traumatismes cervical et des deux genoux ayant entraîné une profusion discale, des lésions au niveau des genoux, mais aussi une aggravation d'un état antérieur au niveau du genou gauche ayant nécessité une arthroplastie le 9 octobre 2013 dans le cadre d'une gonarthrose mise en relation avec son accident du 1er octobre 2004. Elle a été de nouveau opérée du genou gauche le 9 janvier 2014 puis le 15 avril 2015.

M. [Z] forme une demande d'indemnisation de son préjudice d'affection au motif qu'il subit depuis plusieurs années les changements d'humeur de sa compagne mais aussi sa dégradation physique.

Enfin, elle demande la condamnation de l'assureur au paiement du double de l'intérêt au taux légal en exposant qu'elle a été destinataire le 20 décembre 2006 d'une proposition à la suite du dépôt du rapport d'expertise du 9 mars 2006 portant sur l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent de 4 % pour 3600€ et celui des souffrances endurées pour 2500€. Elle estime que cette offre est tardive pour avoir été présentée postérieurement au 9 août 2006 et manifestement insuffisante au regard du préjudice qu'elle a subi. Elle demande également la condamnation d'office de l'assureur à verser au Fonds de garantie une somme égale à 15 % de l'indemnité allouée.

Dans ses conclusions du 17 mars 2017, la Macif demande à la cour de :

' confirmer le jugement qui, en application des articles 480 et 122 du code de procédure civile, a débouté Mme [J] de sa troisième demande de contre-expertise;

' confirmer le jugement sur l'indemnisation du préjudice de Mme [J] au titre des postes suivants :

- dépenses de santé actuelles,

- préjudice esthétique permanent,

- frais d'assistance à expertise

et du rejet des postes suivants :

- assistance par tierce personne temporaire et définitive,

- préjudice d'agrément,

- perte de gains professionnels actuels,

- incidence professionnelle,

- demande de sanction par application des articles L. 211-13 et L. 211-14 du code des assurances ;

' confirmer le jugement qui a rejeté la demande d'indemnisation du préjudice d'affection de M. [Z] ;

' le réformer sur le montant de :

- l'indemnisation du déficit fonctionnel temporaire total et partiel qui sera fixé à 3846,50€,

- souffrances endurées qui sera fixé à 4000€

- déficit fonctionnel permanent qui sera fixé à la somme de 4400€,

' condamner Mme [J] à verser à la Macif la somme de 3000€ à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ainsi que celle de 2000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens distraits au profit de son conseil.

Elle demande à la cour de confirmer le jugement qui a déclaré Mme [J] irrecevable en sa nouvelle demande de contre-expertise en l'état des jugements précédemment rendus, tout en soulignant qu'elle a fait appel du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Nice 21 octobre 2013 l'ayant déclarée irrecevable, avant de se désister de cet appel.

L'indemnisation interviendra sur la base des conclusions établies par le docteur [X] qui a considéré que la période d'interruption totale des activités professionnelles a porté sur une période initiale de 45 jours puis sur une seconde période de 21 jours imputables à 50 % à l'accident. En l'absence de justification de perte de revenus sur la période considérée, Mme [J] sera déboutée de sa demande. L'expert a considéré qu'en fonction de l'imputabilité, l'état de Mme [J] ne justifiait pas de besoin en aide humaine.

En l'absence de perte de gains professionnels actuels et d'incidence professionnelle retenues par l'expert, ces demandes seront rejetées.

Mme [J] reste atteinte d'un déficit fonctionnel permanent de 4 % et il n'est pas établi en quoi cet état séquellaire entraînerait un préjudice moral ou affecterait les conditions d'existence de son compagnon M. [Z].

Elle formule un appel incident sur sa demande de paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive.

La Cpam des Alpes Maritimes, assignée par Mme [J] et M. [Z], par acte d'huissier du 23 novembre 2016 , délivré à personne habilitée et contenant dénonce de l'appel n'a pas constitué avocat.

Par courrier du 20 décembre 2016 elle a fait connaître le montant définitif de ses débours pour 824,17€, correspondant en totalité à des prestations en nature.

La Mairie[Localité 1], assignée par Mme [J] et M. [Z], par acte d'huissier du 25 novembre 2016, délivré à personne habilitée et contenant dénonce de l'appel n'a pas constitué avocat.

L'arrêt sera réputé contradictoire conformément aux dispositions de l'article 474 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de contre-expertise

Par deux fois, la demande de contre-expertise formulée par Mme [J] à la suite du rapport du docteur [X], qui a pris l'avis du docteur [C] orthopédiste a été rejetée, la première fois selon jugement du 2 mai 2011, puis la seconde fois par jugement du 21 octobre 2013, par lequel le tribunal l'a déclarée irrecevable en l'état de la décision précédemment rendue. Appelante de cette décision, Mme [J] s'en est toutefois désistée comme le prouve l'ordonnance du 3 novembre 2014 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence qui a constaté son dessaisissement, de telle sorte que ce jugement est définitif.

Elle réitère sa demande dans l'instance en liquidation de son préjudice corporel.

Cette demande, à laquelle est attachée l'autorité de la chose jugée est irrecevable sauf à Mme [J] de démontrer la survenance d'un élément nouveau depuis le 21 octobre 2013. Pour en décider, il convient de se référer à l'expertise du docteur [X] désigné par jugement du 12 janvier 2009 et qui a déposé son rapport le 3 juin 2010.

Dans son rapport, après avoir pris l'avis du docteur [C], orthopédiste, le docteur [X] a rappelé les circonstances de l'accident relatées par la victime ainsi que les constatations initiales de ses blessures, à savoir une dolorisation du rachis cervical avec irradiation au niveau des membres supérieurs, ainsi qu'au niveau du genou droit et du bassin sur la hanche droite, puis de manière différée des gonalgies gauches. Il a souligné que l'accident est survenu alors que Mme [J] se rendait à l'hôpital pour y voir pratiquer une IRM du genou gauche de contrôle en relation avec une ostéotomie tibiale de dérotation à la suite d'un accident remontant à 1989 alors qu'elle était piéton, ce genou étant symptomatique selon certificat médical du docteur [A] du 18 avril 1996.

Il a exposé que les bilans radiographiques initiaux montrent au niveau du rachis cervical, des troubles statiques en rapport avec une entorse bénigne associée à un état dégénératif modéré étagé, que l'IRM du genou gauche réalisée le 1er octobre 2004, soit le jour de l'accident permet d'éliminer une lésion traumatique récente osseuse ou ménisco-ligamentaire, sans épanchement intra-articulaire, ni hématome osseux mais la présence d'une nette chondrocalcinose affectant le compartiment interne et externe, signes dégénératifs au niveau du cartilage rotulien et osétophytose du plateau tibial externe. Un bilan radiographique du 2 octobre 2004 du genou droit montre une importante chondrocalcinose, puis une IRM du 7 octobre suivant retrouve un discret épanchement intra-articulaire compatible avec un état post-contusionnel, sans hématome osseux ou sous cutané, ni lésion ménisco-ligamentaire. Le docteur [X] a noté que les suites ont été marquées par une dolorisation pérenne des deux genoux en rapport avec un syndrome algodystrophique et par deux interventions arthroscopiques des genoux gauche et droit. Au total l'expert a écrit que l'accident a entraîné au niveau des deux genoux, une décompensation survenant sur un état antérieur patent paraissant jusque là asymptomatique.

La chondrocalcinose, dont il est plusieurs fois fait mention dans les compte-rendus médicaux, est une affection liée au vieillissement qui se caractérise par une accumulation de microcristaux de calcium dans les articulations. Dans son avis sapiteur, du 7 janvier 2010, le docteur [C] affirme que les chondrocalcinoses ne peuvent être dues à l'accident et que la luxation externe des deux rotules avec pincement de l'interligne fémoro-patellaire dans sa partie externe entre dans le cadre de l'état antérieur et sont sans rapport avec l'accident du 1er octobre 2014.

Le docteur [X] a estimé qu'à la suite des lésions initiales liées à l'accident, Mme [J] a présenté une contusion des deux genoux ayant déterminé une chondrite (inflammation des cartilages) traumatique bénigne de rotule survenant sur un état antérieur patent. Il a retenu que les deux premières arthroscopies des 18 octobre 2004 et 24 avril 2005, étaient à mettre en relation dans une proportion de 50%, avec les contusions consécutives à l'accident mais qu'en revanche, les autres arthroscopies réalisées ultérieurement entrent dans le cadre exclusif de l'évolution de l'état antérieur pour son propre compte. Il a fixé la consolidation au 31 mars 2006 et a retenu un déficit fonctionnel permanent de 4%, caractérisé par la persistance d'un syndrome cervico-céphalique, une limitation modérée de la mobilité du rachis cervical dans tous les axes, sans signes radiculaires objectifs au niveau des deux membres inférieurs en indiquant que la symptomatologie actuelle des deux genoux est à rapporter à l'évolution de l'état antérieur pour son propre compte, à rattacher à un antécédent traumatique du genou gauche avec intervention en 1989, plus une chondrocalcinose majeure, une ostéochondrite rotulienne sur sub-luxation externe au niveau du genou droit, chondrocalcinose et chondropathie rotulienne sur sub-luxation externe, tout en rappelant l'absence de lésion osseuse ou ménisco-ligamentaire post-traumatique sur les deux genoux, qui ont présenté une contusion bénigne.

Il a indiqué que dans un délai non-prévisible, une aggravation de type arthrosique demeure possible tant au niveau du rachis cervical qu'au niveau des deux genoux et que si cette complication survenait, elle serait le fait de l'évolution de l'état antérieur pour son propre compte.

Seuls les documents médicaux postérieurs à la décision rendue le 21 octobre 2013 sont de nature à constituer un élément nouveau.

Le certificat médical du docteur [E] du 25 novembre 2013, affirme que le genou gauche de Mme [J] était exempt de tout état antérieur, ce qui est en contradiction avec la chondrocalcinose majeure du genou gauche et celle du genou droit, signalées par le docteur [X], notamment à la lecture des IRM. Le docteur [E] indique que Mme [J] a bénéficié d'une arthroplastie de genou gauche le 9 octobre 2013 'dans le cadre d'une gonarthrose mise en relation avec son accident... du 1er octobre 2004". Or le docteur [X] a clairement évoqué en 2010 l'évolution possible de type arthrosique en relation avec l'état antérieur. L'intervention du 8 janvier 2014 pour 'artholyse antérieure arthroscopique pour raideur post-arthrosique à 3 mois genou gauche' réalisée par le docteur [E] n'apporte aucun élément nouveau. Il en est de même du compte rendu de tomoscintigraphie osseuse du genou gauche du 18 février 2014 réalisée par le docteur [H], du courrier de transmission du 10 mars 2015 du docteur [O] au docteur [K] qui proposait alors un changement de la prothèse du genou gauche installée en 2013. Le compte rendu opératoire du 15 avril 2015 du professeur [O] n'apporte pas plus d'élément nouveau et le certificat médical qu'il a rédigé le 28 octobre 2015, qui décrit le changement réalisé de prothèse du genou gauche qui n'a pas mis fin aux douleurs ni à la raideur, se termine sur la phrase suivante : 'elle a un handicap permanent et définitif qu'il convient de ré-évaluer dans le cadre d'un éventuel dossier' qui ne rattache pas son état à l'accident du 1er octobre 2005. Le certificat médical du 16 septembre 2015 du docteur [T], psychiatre, décrit l'état dépressif de Mme [J] qu'il dit réactionnel à l'accident de 2004, sans plus de démonstration, suivi de problèmes en cascade qu'il ne relie pas expressément à cet accident. La scintigraphie osseuse du 14 mars 2016 indique en conclusion une 'poursuite évolutive de l'atteinte algodystrophique du genou gauche' sans établir de lien avec l'accident d'octobre 2004. M. [V], kinésithérapeute atteste de la prise en charge des douleurs algo-neuro-dystrophique du genou gauche sans plus établir ce lien.

L'électro-neuro-myogramme du 12 février 2015, réalisé par le docteur [N], au centre anti-douleur de l'hôpital [Établissement 1] à [Localité 7], a conclu à des 'anomalies électrophysiologiques mises en évidence en électrostimualtion et en détection compatibles avec l'existence d'une souffrance radiculaire chronique, relativement importante intéressant les territoires de L4 à gauche.' Ce document n'apporte aucun élément nouveau, les territoires L4 étant situés en bas du dos, alors que les séquelles en relation avec l'accident correspondent à la persistance d'un syndrome cervico-céphalique et à une limitation modérée de la mobilité du rachis cervical dans tous les axes, et que le docteur [X] évoquait une possible aggravation de type arthrosique au niveau du rachis cervical.

Mme [J] produit aux débats un 'avis technique motivé' du 12 novembre 2014, de M. [G] [L], 'docteur en science des matériaux, accidentologie des véhicules terrestres à moteur, accidentologie industrielle & analyse scientifique des causes' dont les considérations médicales contenues dans ses conclusions n'ont aucune légitimité et ne sauraient constituer un élément nouveau.

Mme [J] a consulté le docteur [W], chirurgien orthopédiste qui a rédigé le 13 janvier 2014 un document, d'une part critique du rapport établi par le docteur [X] sur avis du docteur [C] et d'autre part concluant à une aggravation de son état. A ce stade seul l'aspect critique sera examiné. Ce chirurgien hospitalier explique que le genou gauche présentait au jour de l'accident un état antérieur, qui était selon lui asymptomatique ainsi qu'un genou droit asymptomatique. Ces éléments ne viennent pas contredire l'expertise du docteur [X] qui admet une contusion des deux genoux ayant déterminé une chondrite (inflammation des cartilages) traumatique bénigne de rotule survenant sur un état antérieur patent des deux genoux, présentant une chondrocalcinose majeure pour le genou gauche et moindre mais existante sur le genou droit, pathologie objectivée par les différentes imageries réalisées mais dont le professeur [W] n'évoque pas même l'existence. Cet avis médical a été porté neuf ans après le fait traumatique et quatre ans après l'expertise circonstanciée du docteur [X], sans qu'il apparaisse de manière certaine qu'il ait été posé au vu des examens réalisés, seuls les compte-rendus étant mentionnés. Il n'apporte aucun élément nouveau sur les traumatismes initiaux, qui n'auraient pas déjà été pris en compte dans la décision rendu le 21 octobre 2013 par le tribunal. En conséquence, l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 2 mai 2011, puis à celui du 21 octobre 2013, rend irrecevable la demande de contre-expertise sollicitée par Mme [J].

Sur le préjudice corporel initial

Rien n'autorise Mme [J] à voir évaluer l'indemnisation de son préjudice corporel initial sur la base du rapport ' d'expertise médicale privée' du 17 novembre 2014 du docteur [P], établi de manière non-contradictoire. C'est donc les conclusions de l'expert judiciaire, le docteur [X] qu'il convient de retenir et qui a évalué les différents postes de préjudice de la façon suivante :

- une imputabilité partielle de la symptomatologie présentée au niveau des deux genoux pendant une période de 18 mois (imputabilité à 50% des interventions arthroscopiques pratiquées le 18 octobre 2004 sur le genou gauche et le 24 mai 2005 sur le genou droit et les soins y afférents),

- un déficit fonctionnel temporaire total imputable à 50% du 18 octobre 2004 au 24 avril 2005,

- un déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 50% du 25 avril 2005 au 23 mai 2005,

- un déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 25% du 24 mai 2005 au 27 novembre 2005,

- un déficit fonctionnel temporaire partiel dégressif du 28 novembre 2005 au 31 mars 2006,

- une consolidation au 31 mars 2006,

- une interruption totale des activités professionnelles initialement de 45 jours totalement imputable aux suites de l'accident du 1er octobre 2004, puis de 21 jours à compter du 24 avril 2005, imputable à 50% aux suites de l'accident,

- un déficit fonctionnel permanent de 4%

- incidence professionnelle : inexistante

- souffrances endurées 2,5/7

- préjudice esthétique temporaire négligeable

- préjudice esthétique permanent 1/7

- pas de préjudice d'agrément après consolidation.

Son rapport constitue une base valable d'évaluation du préjudice corporel subi à déterminer au vu des diverses pièces justificatives produites, de l'âge de la victime, née le [Date naissance 2] 1959, de son activité d'employée de mairie au moment de l'accident, de la date de consolidation, afin d'assurer sa réparation intégrale et en tenant compte, conformément aux articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, de ce que le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge, à l'exclusion de ceux à caractère personnel sauf s'ils ont effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un tel chef de dommage.

Préjudices patrimoniaux

temporaires (avant consolidation)

- Dépenses de santé actuelles 824,17€

Ce poste est constitué des frais médicaux et pharmaceutiques, frais de transport, massages, appareillage pris en charge par la Cpam soit 824,17€, la victime n'invoquant aucun frais de cette nature restés à sa charge.

- Frais divers 1860€

Les honoraires d'assistance à expertise supportés par la victime, nés directement et exclusivement de l'accident sont par là même indemnisables. Devant le docteur [R], premier expert judiciaire désigné, Mme [J] a été assistée par le docteur [G], dont elle produit les deux notes d'honoraires des 4 mai 2005 et 27 juin 2005 pour un montant total de 360€. La lecture du rapport du docteur [X] démontre que la victime a été assistée pour cette expertise par le docteur [P] [M] auprès de qui elle a acquitté une note de 500€, et devant le docteur [C], sapiteur, par le docteur [F] à qui elle a versé la somme de 1.000€, soit au total la somme de 1860€.

L'ensemble des autres dépenses qu'elle a engagées auprès d'autres médecins n'entrent pas dans ces frais indemnisables, ces honoraires ayant été acquittés par elle pour étayer sa demande de contre-expertise dont elle est déboutée.

- Perte de gains professionnels actuels195€

Ce poste vise à compenser une incapacité temporaire spécifique concernant les répercussions du dommage sur la sphère professionnelle de la victime et doit être évalué au regard de la preuve d'une perte effective de revenus.

L'expert a fixé la période d'interruption totale des activités professionnelles à une première période de 45 jours totalement imputable aux suites de l'accident du 1er octobre 2004, soit jusqu'au 15 novembre 2004, puis à une seconde période de 21 jours à compter du 24 avril 2005, imputable à 50% aux suites de l'accident, soit jusqu'au 15 mai 2005.

Mme [J] démontre qu'au moment de l'accident elle n'était pas en congé maladie longue durée, puisqu'elle avait bénéficié d'un premier arrêt du 10 septembre 2004 au 14 septembre 2004 pour une angine surinfectée, puis d'un second arrêt à compter du 27 septembre jusqu'au 1er octobre 2004 en raison d'une infection vaginale. Ce n'est que plus tard, le 12 mai 2005, que la direction des ressources humaines de la mairie [Localité 1] l'a informée de l'avis favorable du comité médical départemental à l'attribution à son profit d'un congé de longue maladie du 27 septembre 2004 au 26 septembre 2005.

Il s'avère qu'au 30 septembre 2004, le bulletin de paie de Mme [J] fait état d'un revenu net imposable de 1318,77€. Au mois d'octobre 2004 elle a perçu un salaire net imposable de 1318,77€, ce qui démontre qu'elle n'y a pas de perte de salaire sur ce mois d'octobre 2004.

Au mois de novembre 2004, son revenu net fiscal intégrant une prime de fin d'année en brut de 780,95€ démontre qu'elle a conservé la totalité de son traitement et qu'elle n'a donc pas subi de perte de ce chef. Il n'y a donc aucune perte du 1er octobre 2004, soit jusqu'au 15 novembre 2004.

A compter du mois de décembre 2004 elle a été rémunérée à mi traitement. Elle a perçu au mois d'avril un revenu net imposable de 762,10€.

Sa perte s'établit à la somme de 556,67€ (1318,77€ - 762,10€) sur un mois entier et donc du 24 avril 2005 au 15 mai 2005, soit sur 21 jours à 50% de la somme de 390€ (556,67€/ 30 j x 21 j) soit 195€,

- Assistance de tierce personneRejet

L'expert judiciaire n'a pas retenu la nécessité d'une aide humaine, qu'il s'agisse de la période écoulée avant consolidation ou après consolidation, et Mme [J] n'en a pas évoqué le besoin au cours de l'expertise. Cette demande fondée sur le seul document non-contradictoire établi par le docteur [P] est rejetée tant au titre de l'assistance par tierce personne temporaire que permanente.

Préjudices patrimoniaux

permanents (après consolidation)

- Perte de gains professionnels futursRejet

Ce poste est destiné à indemniser la victime de la perte ou de la diminution directe de ses revenus à compter de la date de consolidation, consécutive à l'invalidité permanente à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du fait dommageable.

Le docteur [X] a estimé qu'il n'y avait aucune incidence professionnelle au-delà du 15 mai 2005. Au titre du préjudice initial, et compte tenu du taux de déficit fonctionnel permanent de 4% retenu par l'expert, Mme [J] ne présente aucune incapacité de travail en relation de causalité directe et certaine avec l'accident du 1er octobre 2004 et elle est déboutée de la demande qu'elle formule à ce titre.

- Incidence professionnelleRejet

Ce chef de dommage a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage, ou encore l'obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d'une autre en raison de la survenance de son handicap.

Aucune pénibilité n'a été retenue ni caractérisée par l'expert. La perte de mobilité dont Mme [J] fait état depuis l'accident ne peut être mise en relation avec le fait traumatique initial de telle sorte qu'elle est déboutée de cette demande.

Préjudices extra-patrimoniaux

temporaires (avant consolidation)

- Déficit fonctionnel temporaire4500€

Ce poste inclut la perte de la qualité de la vie et des joies usuelles de l'existence et le préjudice d'agrément et le préjudice sexuel pendant l'incapacité temporaire.

Il doit être réparé sur la base d'environ 800€ par mois, eu égard à la nature des troubles et de la gêne subie soit :

- déficit fonctionnel temporaire total de 189 jours, imputable à 50% à l'accident : 2520€

- déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 50% de 29 jours : 386,66€

- déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 25 % de 188 jours : 1253,33€

- déficit fonctionnel temporaire partiel au taux dégressif de 10% de 124 jours : 330,66€

et au total la somme de 4.490,65 € arrondie à 4500€.

- Souffrances endurées5.000€

Ce poste prend en considération les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés supportés par la victime ; évalué à 2,5/7 par l'expert, il justifie l'octroi d'une indemnité de 5.000€.

permanents (après consolidation)

- Déficit fonctionnel permanent5760€

Ce poste de dommage vise à indemniser la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant de l'atteinte anatomo-physiologique à laquelle s'ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence personnelles, familiales et sociales.

Il est caractérisé par la persistance d'un syndrome cervico-céphalique, une limitation modérée de la mobilité du rachis cervical dans tous les axes, sans signes radiculaires objectifs au niveau des deux membres inférieurs, ce qui conduit à un taux de 4% justifiant une indemnité de 5760€ pour une femme âgée de 46 ans à la consolidation.

- Préjudice esthétique2000€

Ce poste de dommage cherche à réparer les atteintes physiques et plus généralement les éléments de nature à altérer l'apparence physique

Évalué à 1/7 pour les cicatrices engendrées par les arthroscopies, il est indemnisé à 2000€

- Préjudice d'agrémentRejet

Ce poste de dommage vise exclusivement l'impossibilité ou la difficulté pour la victime à poursuivre la pratique d'une activité spécifique sportive ou de loisir.

L'expert a expressément indiqué que le préjudice d'agrément a été justifié pendant la période avant la consolidation et il est indemnisé de ce chef au titre du déficit fonctionnel temporaire. En l'absence de préjudice d'agrément documenté pour la période postérieure à la consolidation et en relation avec l'accident, Mme [J] est déboutée de ce chef de demande.

Le préjudice corporel global initial subi par Mme [J] s'établit ainsi à la somme de 20.139,17€ soit, après imputation des débours de la Cpam (824,17€ ), une somme de 19315€ lui revenant qui, en application de l'article 1153-1 du code civil, porte intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, soit le 5 septembre 2016 à hauteur de 16.431€ et du prononcé du présent arrêt soit le 1er mars 2018 à hauteur de 2884€.

Sur la demande infiniment subsidiaire d'expertise en aggravation

Pour étayer sa demande d'expertise sur aggravation, Mme [J] se fonde sur le document établi par le professeur [W] le 13 janvier 2014 qui affirme 'qu'aucun élément médical ne permet de dire que cet état antérieur du genou gauche qui était totalement asymptomatique le jour de l'accident, se serait aggravé spontanément et vu l'iconographie du jour de l'accident ; on ne peut pas imaginer que cette patiente termine avec maintenant une prothèse du genou gauche. Mon expérience clinique m'a montré qu'avec l'état antérieur que présentait la patiente, il y avait très peu de chance pour qu'elle ait un jour une prothèse du genou gauche. Dans ces conditions nous pensons que le traumatisme du 01/10/2004 a aggravé un état asyptomatique pour lequel aucune raison médicale ne permet de dire qu'il devait s'aggraver spontanément et, pour ces raisons nous pensons que les lésions actuelles du genou gauche sont en grande partie, imputables au traumatisme du 01/10/2004. Il convient en effet d'indemniser l'aggravation par l'accident du 01/10/2004 de l'état antérieur asymptomatique des deux genoux et de préciser si cet état antérieur devait sans cause extérieure évoluer inéluctablement vers l'implantation d'une prothèse totale de genou gauche.'

Toutefois, et comme cela a déjà été souligné, à aucun moment le professeur [W], qui n'est d'ailleurs pas catégorique sur l'imputabilité de l'état de santé actuelle à l'accident de 2004, n'évoque la présence d'une chondrocalcinose majeure sur ce genou gauche, tout comme la chondrocalcinose moins marquée du genou droit, pourtant décrites dans plusieurs documents médicaux, dont le docteur [X] dans son rapport a retracé la chronologie, ou encore l'éventuelle aggravation de type arthrosique, évoquée par cet expert, tant au niveau du rachis cervical qu'au niveau des deux genoux, et qui a ajouté que si cette complication survenait, elle serait le fait de l'évolution de l'état antérieur pour son propre compte. Or ces éléments de pathologies objectivées apparaissent essentiels dans l'évolution de l'état de santé de Mme [J] et le document établi par le professeur [W] ne peut suffire à laisser présumer une aggravation de cet état de santé en lien avec l'accident du 1er octobre 2010.

Mme [J] est donc déboutée de sa demande tendant à l'instauration d'une expertise médicale sur aggravation.

Sur la demande d'indemnisation de M. [Z]

M. [Z] ne démontre pas que la dégradation de l'état de santé thymique et physique de sa compagne, Mme [J] est en relation de causalité directe et certaine avec l'accident du 1er octobre 2004 et sa demande d'indemnisation d'un préjudice d'affection est rejetée.

Sur le doublement du taux d'intérêt légal

En vertu de l'article L 211-9 du Code des Assurances, l'assureur est tenu de présenter à la victime qui a subi une atteinte à sa personne une offre d'indemnité, qui comprend tous les éléments indemnisables du préjudice, dans le délai maximum de huit mois à compter de l'accident, laquelle peut avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime ; l'offre définitive doit alors être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation. La sanction de l'inobservation de ces délais, prévue par l'article L 211-13 du même code, réside dans l'octroi des intérêts au double du taux de l'intérêt légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif.

Le premier rapport d'expertise judiciaire a été établi le 9 mars 2006 par le docteur [R] et adressé aux parties le 22 mars 2006. Il conclut à :

- déficit fonctionnel temporaire total d'un mois,

- déficit fonctionnel temporaire partiel 50% de 2 mois

- souffrances endurées 2,5/7

- déficit fonctionnel permanent 4%

- consolidation au 21 juillet 2005.

La Macif se devait de formuler une offre dans le délai de cinq mois suivant l'envoi de ce rapport et donc avant le 23 aout 2006. En conséquence son offre datée du 20 décembre 2006 est tardive, mais elle est également incomplète pour ne pas porter sur l'indemnisation du déficit fonctionnel temporaire total et partiel pourtant visée par l'expert. La Macif verse à son dossier les conclusions qu'elle a fait signifier le 25 octobre 2010 à Mme [J] contenant une offre d'indemnisation du déficit fonctionnel temporaire partiel et total sur une base mensuel de 400€, 2600€ au titre des souffrances endurées, 4.000€ pour le déficit fonctionnel permanent et 1000€ pour le préjudice esthétique permanent. Ces offres complètes au regard des conclusions du docteur [X] et comparées aux sommes allouées par la cour, qui ne sont pas manifestement insuffisantes, compte tenu de la date à laquelle elles ont été formulées et de leur montant, ont arrêté le cours du doublement des intérêts au taux légal. La Macif est donc tenue au paiement du double du taux d'intérêt au taux légal à compter du 23 août 2006 et jusqu'au 25 octobre 2010 sur la somme de 9.976,70€.

Sur la sanction de l'article L. 211-14 du code des assurances

En vertu de l'article L.211-14, et non pas de l'article L.421-1 du code des assurances visé par Mme [J], si le juge qui fixe l'indemnité estime que l'offre proposée par l'assureur était manifestement insuffisante, il condamne d'office l'assureur à verser au fonds de garantie prévu par l'article L.421-1 une somme au plus égale à 15 % de l'indemnité allouée, sans préjudice des dommages et intérêts dus de ce fait à la victime.

La Macif, dont l'offre proposée était manifestement insuffisante est condamnée sur ce fondement à payer au FGAO 1% du montant de 20.139,17€ alloué par la cour, soit la somme de 201,39€.

Sur la demande de dommages-intérêts

L'exercice d'une action en justice ne dégénère en faute pouvant donner lieu à des dommages et intérêts que si le demandeur a agi avec intention de nuire, légèreté blâmable ou a commis une erreur équivalente au dol, tous faits insuffisamment caractérisés en l'espèce ; il apparaît plutôt que Mme [J] se méprend sur l'étendue de ses droits ; la demande de la Macif en dommages et intérêts pour procédure abusive doit, dès lors, être rejeté.

Sur l'article 10

Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande tendant à mettre à la charge du débiteur le montant des sommes prévues par l'article 10 du décret du 12 décembre 1996 n° 96/1080, cet article du décret ayant été abrogé par le décret n° 2016-230 du 26 février 2016.

Sur les demandes annexes

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles alloués à la victime doivent être confirmées.

La Macif qui succombe partiellement dans ses prétentions et qui est tenue à indemnisation supportera la charge des entiers dépens d'appel. L'équité ne commande pas de lui allouer une somme au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité justifie d'allouer à Mme [J] une indemnité de 1000€ au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

- Confirme le jugement,

hormis sur le montant de l'indemnisation de la victime et les sommes lui revenant, sur le doublement de l'intérêt au taux légal ;

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

- Fixe le préjudice corporel global de Mme [J] à la somme de 20.139,17€ ;

- Dit que l'indemnité revenant à cette victime s'établit à 19315€ ;

- Condamne la Macif à payer à Mme [J] les sommes de

* 19315€, sauf à déduire les provisions versées, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, soit le 5 septembre 2016 à hauteur de 16.431€ et du prononcé du présent arrêt soit le 1er mars 2018 à hauteur de 2884€ ;

* 1000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel ;

- Déboute Mme [J] de sa demande d'expertise sur aggravation ;

- Condamne la Macif à payer à Mme [J] le double des intérêts au taux légal sur la somme de 9.976,70€ à compter du 23 août 2006 et jusqu'au 25 octobre 2010 ;

- Condamne la Macif à payer au FGAO la somme de 201,39€ ;

- Déboute la Macif de sa demande au titre de ses propres frais irrépétibles exposés en appel ;

- Déboute Mme [J] et M. [Z] de leur demande au titre des droits d'encaissement et de recouvrement prévus à l'article 10 du décret du 12 décembre 1996 dans sa rédaction du 8 mars 2001 ;

- Condamne la Macif aux entiers dépens d'appel et accorde aux avocats qui en ont fait la demande, le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 10e chambre
Numéro d'arrêt : 16/17101
Date de la décision : 01/03/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 10, arrêt n°16/17101 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-03-01;16.17101 ?
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