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16/03/2018 | FRANCE | N°17/00465

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 14e chambre, 16 mars 2018, 17/00465


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

14e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 16 MARS 2018



N°2018/203













N° RG 17/00465





URSSAF PROVENCE ALPES COTE-D'AZUR





C/



SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE

MNC - MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE





























Grosse délivrée

le :

à :

URSSAF PROVENCE

ALPES COTE-D'AZUR



Me Bruno AIZAC, avocat au barreau de TOULON













Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du VAR en date du 18 Novembre 2016,enregistré au répertoire général sous...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

14e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 16 MARS 2018

N°2018/203

N° RG 17/00465

URSSAF PROVENCE ALPES COTE-D'AZUR

C/

SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE

MNC - MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE

Grosse délivrée

le :

à :

URSSAF PROVENCE ALPES COTE-D'AZUR

Me Bruno AIZAC, avocat au barreau de TOULON

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du VAR en date du 18 Novembre 2016,enregistré au répertoire général sous le n° 21401451 B.

APPELANTE

URSSAF PROVENCE ALPES COTE-D'AZUR, demeurant [Adresse 1]

représenté par Mme [K] [W] (Inspectrice du contentieux) en vertu d'un pouvoir spécial

INTIMEES

SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Bruno AIZAC, avocat au barreau de TOULON

MNC - MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE, demeurant [Adresse 3]

non comparant

PARTIE(S) INTERVENANTE(S)

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Octobre 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Pierre SAINTE, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

M. Gérard FORET-DODELIN, Président

Madame Florence DELORD, Conseiller

Monsieur Jean-Yves MARTORANO, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Nathalie ARNAUD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Mars 2018

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Mars 2018

Signé par M. Gérard FORET-DODELIN, Président et Madame Nathalie ARNAUD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Selon déclaration reçue au Greffe de la Cour le 4 janvier 2017, le représentant de l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales PACA a relevé appel des dispositions d'un jugement contradictoirement prononcé le 18 novembre 2016 par le Tribunal des affaires de sécurité sociale du Var, qui a annulé le redressement de l'organisme social portant sur le point 4 de la lettre d'observations.

Lors de l'audience devant la Cour, le représentant de l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales PACA a développé oralement le contenu de ses conclusions écrites pour solliciter l'infirmation du jugement en ce qu'il a accueilli favorablement la contestation de la société ROUGE ET NOIRE IMAGE portant sur le point « sportifs professionnels : droit à l'image individuelle » point n°4 de la lettre d'observations du 5 novembre 2013, voir dire que conformément à la mise en demeure du 18 décembre 2013 elle dispose d'une créance de 875.939 euros à l'encontre de la société et la voir condamner au paiement à son profit de la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Conseil de la SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE a développé oralement ses conclusions écrites pour solliciter la confirmation du jugement, voir dire que les sommes versées dans le cadre de contrat de droit à l'image individuelle ont la nature de redevances et doivent pour cette raison être exclues de l'assiette des cotisations de sécurité sociale, dire que le redressement doit être annulé du chef du point 4 de la lettre d'observations, constater que les majorations de retard ne sont pas conformes aux dispositions de l'article R.243-18 du Code de la sécurité sociale et voir condamner l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales PACA au versement à son profit de la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et subsidiairement pour le cas où l'argumentation de l'appelante serait retenue, de constater que l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales a compris dans ses bases des sommes versées à l'administration fiscale pour 123.495 euros en 2011 et 5.625 euros en 2012 à titre de retenue à la source et déduire ces sommes des bases soumises à cotisation sociale.

ET SUR CE :

L'article L.242-1 du Code de la sécurité sociale dispose que « pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail » ;

Le droit à l'image d'un joueur professionnel peut être commercialisée directement par le sportif lui-même soit via une société tierce à laquelle le sportif professionnel concède le droit d'exploiter son image moyennant rémunération versée directement par le partenaire commercial au joueur ;

Pour des raisons qui ont généré le présent litige, il est procédé à des montages juridiques plus ou moins complexes, dont l'économie générale a pour objet d'exploiter indirectement l'image individuelle par le club sportif auquel il appartient, via une ou plusieurs société écran, la dernière domiciliée hors de France, qui échappe de fait aux cotisations et contributions sociales assises sur les sommes liées à l'activité sportive du joueur en ce y compris la rémunération du droit à l'image individuelle ;

S'agissant d'un joueur professionnel, la jurisprudence considère que lorsqu'il reçoit de la part du club qui l'emploie, une somme d'argent en vertu d'un contrat de publicité, alors que son image et sa notoriété avaient été acquises par le joueur dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail, la somme payée par le club pour leur exploitation présente le caractère d'une rémunération versée à l'occasion d'un travail accompli dans un lien de subordination, ce qui permet de considérer que lorsque la notoriété d'un sportif a été acquise dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail, les sommes versées par le club qui l'emploie pour leur exploitation revêtent le caractère de salaire et doivent être réintégrées dans l'assiette des cotisations sociales ;

Lors du contrôle, les inspecteurs en charge de celui-ci, ont constaté que la SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE avait versé des sommes d'argent en contrepartie de l'exploitation du droit à l'image de certains joueurs évoluant dans le cadre professionnel du Rugby Club Toulonnais dit RCT ;

Or la SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE et la SASP RCT qui emploie les joueurs ont toutes les deux la même société mère l'EURL MOURAD FINANCES, la SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE de manière directe et la SASP RCT via la Société HOLDING ROUGE ET NOIR ;

Ils en ont déduit que ces sommes étaient versées à l'occasion du contrat de travail exécuté par les sportifs professionnels concernés et devaient être soumises à cotisations sociales et ont donc réintégré ces sommes dans l'assiette des cotisations ;

De son propre aveu, l'activité de la SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE est exclusivement consacrée depuis sa création au développement d'une activité qu'elle considère comme indépendante de celle de la SASP RCT, même si elle consiste dans la régie publicitaire de la SASP RCT, et également dans la création et le développement de plusieurs fonds de commerces de ventes de vêtements et de produits dérivés du sport en général et du Rugby en particulier ;

Elle ne disconvient au demeurant pas que c'est à raison de l'exploitation du droit à l'image des sportifs qui sont employés par le RCT qu'elle a vu son chiffre d'affaires croître de 835.447 euros en 2008 à 3.735.311 euros en 2013 ;

Pour procéder à l'annulation du redressement, le Tribunal a considéré que l'employeur des joueurs était la SASP RCT et non la SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE, que la présence de la HOLDING MOURAD ne modifiait pas la relation salariale existant entre les joueurs et le Club RCT et que l'organisme social ne démontrait pas que les joueurs aient personnellement perçu une rémunération au titre de leur droit à l'image à partir des sommes versées par la SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE ;

Au soutien de sa demande d'infirmation du jugement, l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales PACA expose qu'en contrepartie de l'exploitation de leur droit à l'image, la SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE, partie associée au club à raison de l'identité commune de leur dirigeant social et de l'existence des contrats de joueurs professionnels, verse à ceux-ci des honoraires via des sociétés de droit étranger dont ils sont parfois l'associé unique ou le seul ayant droit économique ;

Pour s'opposer à ces prétentions, la SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE argue que l'image et la notoriété des joueurs en cause n'a pas été acquise par le joueur dans le cadre de l'exécution du contrat de travail, que ceux-ci sont sous contrat avec une partie tierce du chef de laquelle elle ne dispose d'aucune information sur les reversements qu'elle réalise au profit du joueur, que les sommes qu'elle verse à cette société tierce qui ne sont pas des parties associées aux joueurs, sont déjà soumises à prélèvement fiscal, que les droits d'image déclarés par le RC Toulonnais au cours de cette période n'étaient pas inclus dans le périmètre du Salary Cap, que pour Jonny WILKINSON elle est titulaire et exploite la marque commerciale pour l'avoir enregistrée à l'INPI, ce qui démontre qu'elle a acquis un droit qui constitue un actif social lui appartenant et dont elle va assurer l'exploitation au-delà de la durée de son contrat auprès du RCT, que les contrat de droits d'image individuels et les contrats de travail des joueurs sont indépendants puisque le contrat d'image peut se poursuivre alors même que le joueur joue pour un autre club, ou être arrêté alors que le contrat de jeu se poursuit, ou se maintenir alors que le contrat de jeu est suspendu, et que la Société propriétaire des droits n'effectue aucun travail pour le compte de la SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE ni de la SASP RCT ;

L'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales établit qu'au cours de la saison sportive 2011/2012, des parties associées aux joueurs au sens de l'annexe 3 du règlement de la Direction Nationale d'Aide et de Contrôle de Gestion, s'étaient vues attribuer des indemnités en contrepartie du droit à l'image qui leur avait été concédé par un certain nombre de joueurs sous contrat avec le RCT, dans des conditions qui mettaient nécessairement le joueurs en position de percevoir tout ou partie du montant de ces sommes ;

Il est dès lors indifférent que la SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE argue ne pas connaître l'étendue des relations existant entre le sportif et la société qui lui est associée et à laquelle elle verse des sommes en contrepartie de la concession du droit à l'image du joueur ;

D'autre part contrairement aux prétentions de l'intimée, les contrats de concession exclusive du droit à l'image du sportif (pièce 8) sont en lien nécessaire et direct avec le contrat le liant à son employeur la SASP RCT ;

C'est ainsi qu'ils stipulent expressément que les droits à l'image individuelle du sportif sont concédés dans la mesure où ils se rapportent au sportif en tant que joueur du RCT dans toute matière ayant trait à la Société et à ses partenaires commerciaux ;

De la même manière le contrat de concession du droit à l'image du sportif est exclusif de tout autre engagement de celui-ci auprès de tiers ;

Sa résiliation peut intervenir en cas de résiliation du contrat de jeu du sportif avec le club de rugby en raison du bouleversement que cette résiliation entraînerait dans l'économie du contrat, ce dont il s'induit que nonobstant la renommée antérieure du sportif, c'est nécessairement à raison de la poursuite de cette notoriété maintenue, développée ou acquise pendant le cours de son contrat, que la SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE décide ou non de la poursuite du contrat ;

Tout en attirant l'attention de la Cour sur la portée qu'il conviendrait de retenir de l'article 7.2 des contrats, la SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE ne se justifie pas sur le caractère contradictoire de ces dispositions à l'égard des autres dispositions contractuelles relevées ci-dessus, sauf à démontrer implicitement que la résiliation du contrat de concession de l'image relève de sa faculté ad nutum et conséquemment de l'existence d'un lien de subordination à l'égard du joueur vis la SAS RCTP qui l'emploie ;

L'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales PACA est dès lors fondée à soutenir que l'exploitation de l'image et de la notoriété des sportifs via les contrats de concession du droit à l'image ne peut qu'être appréciée au regard d'une notoriété acquise par eux sous les couleurs « Rouge et Noire » du RCT et donc via l'exécution du contrat de travail les liant au Club sportif ;

L'appelante argue enfin sans être autrement contredite que le pouvoir de direction et de contrôle exercé par le Rugby Club Toulonnais sur l'activité du joueur se retrouve transposé dans le cadre du versement des indemnités correspondant aux concessions exclusives du droit à l'image, puisque le lien entre les deux contrats résulte de l'identité unique de l'ayant droit économique de la totalité des structures en cause, [O] [D] Président de la SASP RCT et gérant de la SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE ;

L'appelante est en conséquence fondée à soutenir que les sommes versées aux sociétés associées des sportifs évoluant au Rugby Club Toulonnais pour l'exploitation de leur image et de leur notoriété sous la présidence de [O] [D] ont le caractère de rémunération et doivent être assujetties à cotisations sociales ;

Le jugement sera en conséquence infirmé en toutes ses dispositions ;

La SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE démontre d'autre part qu'au titre de la période considérée les sommes dues aux sociétés propriétaires des droits à l'image des joueurs leur ont été versées après déduction d'une retenue à la source de 73.500 euros au titre des redevances versées au mois d'août 2011, de 46.995 euros au titre des redevances versées au mois d'octobre 2011 et de 5.625 euros au titre des redevances versées au cours du mois de septembre 2012, soit un total s'élevant à 129.120 euros, lequel doit dès lors être exclu de l'assiette des cotisations sociales ;

Les bases de régularisation s'établissent dès lors à 1.016.735 euros en 2010, 615.614 euros en 2011 (736.109 - 73.500 - 46.995) et 707.433 euros en 2012 (713.058 ' 5.625) du chef desquelles l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales PACA devra reprendre le calcul du montant de son redressement ;

L'équité ne justifie pas l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales PACA ainsi qu'elle le sollicite, tandis que la SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE qui succombe en ses prétentions en cause d'appel sera déboutée de sa demande sur ce point ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour statuant publiquement contradictoirement en matière de sécurité sociale, par mise à disposition au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au second alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

Déclare l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales PACA recevable et fondée en son appel,

Infirme le jugement du Tribunal des affaires de sécurité sociale du Var du 18 novembre 2016 en ce qu'il a accueilli favorablement la contestation de la SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE portant sur le point n°4 de la lettre d'observations du 5 novembre 2013,

Statuant à nouveau,

Valide le redressement notifié par l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales PACA du chef du point n°4 de la lettre d'observations,

Dit que l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales PACA doit toutefois recalculer sa créance en tenant compte du montant des retenues à la sources d'ores et déjà effectuées par la SARL ROUGE ET NOIRE IMAGE du chef des sommes versées par elle au titre des concessions exclusives de droit à l'image,

Et la présente décision a été signée par le Président et le Greffier.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 14e chambre
Numéro d'arrêt : 17/00465
Date de la décision : 16/03/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 14, arrêt n°17/00465 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-03-16;17.00465 ?
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