COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
14e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 16 MARS 2018
N°2018/191
Rôle 17/14403 -
N° Portalis DBVB-V-B7B-BA7DH
SARL [D]
C/
Organisme URSSAF PROVENCE ALPES COTE D'AZUR
Grosse délivrée
le :
à :
Me Yann ARNOUX-POLLAK, avocat au barreau de MARSEILLE
URSSAF PROVENCE ALPES COTE D'AZUR
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal des Affaires des Sécurité Sociale des ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE en date du 04 Juillet 2017, enregistré au répertoire général sous le n° 21500170.
APPELANTE
SARL [D], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Yann ARNOUX-POLLAK de la SELARL SELARL ARNOUX-POLLAK, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Léa TALRICH, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
Organisme URSSAF PROVENCE ALPES COTE D'AZUR pris en la personne de son Directeur en exercice, demeurant [Adresse 2]
représentée par Mme [R] [M] (Inspectrice du contentieux) en vertu d'un pouvoir spécial
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Janvier 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Gérard FORET-DODELIN, Président, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
M. Gérard FORET-DODELIN, Président
Madame Florence DELORD, Conseiller
Monsieur Jean-Yves MARTORANO, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Nadège LAVIGNASSE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Mars 2018
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Mars 2018
Signé par M. Gérard FORET-DODELIN, Président et Madame Nathalie ARNAUD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Selon déclaration reçue au Greffe de la Cour le 25 juillet 2017, la SARL [D] a relevé appel des dispositions d'un jugement contradictoirement prononcé le 4 juillet 2017 par le Tribunal des affaires de sécurité sociale des Alpes de Haute Provence, qui statuant sur la contestation par la SARL [D] du redressement à elle notifié du chef de travail dissimulé, a dit que Messieurs [R], [S] et [Z] se trouvaient en situation de travail dissimulé, rejeté les demandes de la SARL [D] aux fins de voir dire que la décision pénale du 8 octobre 2015 aurait autorité de chose jugée au civil et que l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales n'était pas fondée à pratiquer le redressement forfaitaire en l'absence d'infraction de travail dissimulé et d'annulation de la mise en demeure du 20 octobre 2014, ordonné la réouverture des débats du chef de l'évaluation forfaitaire opérée par l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales, sursis à statuer sur le surplus des demandes des parties et renvoyé la cause et les parties à l'audience du 28 novembre 2017.
Lors de l'audience devant la Cour, le Conseil de la SARL [D] a déposé des conclusions oralement développées, pour solliciter l'infirmation du jugement, de voir dire que la procédure de sanction suivie à son encontre est irrégulière dès lors qu'en méconnaissance du principe général des droits de la défense, le procès-verbal du 9 août 2013 mentionnant que les services de la DIRECCTE des Alpes de Haute Provence auraient constaté l'infraction de travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié ne lui a pas été communiqué, ce qui ne lui a pas permis de vérifier la régularité du contrôle opéré et en conséquence de dire qu'elle est fondée à demander l'annulation du redressement et de la mise en demeure du 20 octobre 2014, subsidiairement de dire que les faits de travail dissimulé allégués à son encontre au soutien du redressement litigieux sont identiques à ceux portés à la connaissance du juge pénal pour lesquels elle a été relaxée par la juridiction correctionnelle de Digne le 8 octobre 2015, voir dire que l'action pénale reposait sur les mêmes constatations objet du procès-verbal du 9 aout 2013 que celles invoquées à l'appui du redressement, dire que le grief d'avoir recouru à du travail dissimulé au vu des constatations opérées le 27 juin 2013 constitue la base commune de l'action publique et de l'action civile et que l'autorité de chose jugée au pénal sur le civil commande d'annuler le redressement, en tout état de cause de se voir décharger de la sanction pécuniaire prononcée à son encontre d'un montant de 15.288 euros, voir condamner l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales PACA à lui rembourser la somme de 15.288 euros avec intérêts au taux légal, outre les frais d'inscription du privilège pris par l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales, et la somme de 2.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et voir condamner l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales aux dépens.
Le représentant de l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales PACA a développé oralement le contenu de ses conclusions pour solliciter de voir débouter la SARL [D] de ses contestations, voir dire que le travail dissimulé des Messieurs [R], [E] et [Z] est qualifié, que faute d'élément probant l'application du redressement forfaitaire est justifié, dire qu'elle dispose d'une créance d'un montant de 15.288 euros sur la SARL [D] conformément à la mise en demeure du 20 octobre 2014, constater que la dette a été réglée par la SARL [D] et voir condamner la SARL [D] au règlement de la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
ET SUR CE :
Sur la régularité de la procédure conduite à l'encontre de la SARL [D] :
La SARL [D] fait grief à l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales et à la procédure qui s'en est suivie d'avoir été conduite en méconnaissance du principe des droits de la défense, dès lors que le procès-verbal du 9 août 2013 ne lui a pas été communiqué et que la lettre d'observations s'est bornée à renvoyer à ce procès-verbal sans que cela ne lui permette de vérifier la régularité du contrôle ;
L'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales PACA s'oppose à ces prétentions ;
Il convient de rappeler que la procédure de redressement diligentée à l'encontre de la SARL [D] à la suite de l'infraction de travail dissimulé relevée à son encontre résulte de l'application des dispositions de l'article R.243-59 du Code de la sécurité sociale, lequel met en place une procédure d'instruction contradictoire au sein de laquelle la SARL [D] a pu régulièrement faire valoir ses observations dans le délai de trente jours qui lui était ouvert en suite de sa notification ;
L'article R.243-59 ne prévoit toutefois pas la communication du procès-verbal dressé du chef de travail dissimulé ;
La SARL [D] ne justifie au demeurant pas avoir sollicité de l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales la communication du procès-verbal dressé à son encontre, et encore moins que sur la demande qu'elle en aurait faite, elle se serait vu opposer un refus ;
Force est d'observer en outre qu'à la faveur de la procédure correctionnelle conduite à l'encontre de son dirigeant social, [S] [D], cité du chef d'exécution d'un travail dissimulé commis le 27 juin 2013 à [Localité 1], la SARL [D] a nécessairement eu connaissance du procès-verbal dont s'agit ;
La SARL [D] ne justifie pas d'un quelconque grief que l'absence de communication spontanée du dit procès-verbal de la part de l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales lui aurait causée ;
Le moyen de nullité développé par la SARL [D] sera rejeté ;
Sur l'autorité de chose jugée au pénal sur le civil :
La SARL [D] argue qu'à la faveur du jugement de relaxe prononcé à son profit par la juridiction correctionnelle de Digne 8 octobre 2015 elle ne peut plus être poursuivie au civil ;
Le tribunal par des motifs que la Cour adopte a parfaitement exposé le champ d'application de l'autorité de chose jugée au pénal sur le civil, en rappelant que la procédure conduite devant la juridiction de sécurité sociale par l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales avait seulement pour but d'assurer le recouvrement des cotisations éludées du chef du travail dissimulé, que l'autorité du criminel au civil ne s'applique pas en matière de sécurité sociale, que l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales peut procéder au recouvrement indépendamment des suites pénales apportées et que la décision de relaxe du 8 octobre 2015 n'était pas de nature à faire obstacle au recouvrement des cotisations afférentes à l'emploi dissimulé, la Cour relevant pour sa part que son absence de motivation ne peut conférer une quelconque autorité de chose jugée du chef de motifs inexistants ;
En outre la relaxe d'une personne au motif que l'infraction de travail dissimulé n'est pas prouvée n'a pas autorité de la chose jugée au civil dès lors que les juges répressifs n'ont pas statué sur la qualité d'employeur de l'intéressé ni sur la déclaration de rémunérations ;
Le moyen tenant à l'autorité de chose jugée au pénal sur le civil sera rejeté ;
Sur le fond, le Tribunal a à bon droit relevé que le redressement du chef de travail dissimulé était justifié dès lors que la déclaration préalable à l'embauche de Messieurs [R], [S] et [Z] dont la présence au travail avait été constatée lors du contrôle, ont été établies postérieurement au contrôle, ainsi que le reconnaissait au demeurant la SARL [D] ;
Le jugement sera confirmé sur ce point ;
Le Tribunal n'ayant pas vidé sa saisine du chef des autres demandes qui lui étaient présentées en l'état de la réouverture des débats par lui ordonnée, la Cour ne peut pas statuer sur les demandes en paiement présentées par l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales PACA à l'encontre de la SARL [D] ;
Il sera en conséquence fait retour de la présente procédure devant le Tribunal des affaires de sécurité sociale des Alpes de Haute Provence pour reprise au fond de l'instance ;
L'équité justifie l'application au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales PACA selon les modalités précisées au dispositif ci-après ;
Il convient de dispenser la SARL [D] qui succombe en sa procédure en cause d'appel du paiement du droit de l'article R.144-10 du Code de la sécurité sociale ;
Cette même disposition réglementaire rend sans objet les demandes afférentes aux dépens ;
PAR CES MOTIFS,
La Cour statuant publiquement contradictoirement en matière de sécurité sociale, par mise à disposition au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au second alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
Déclare la SARL [D] recevable mais mal fondée en son appel,
La déboute des fins de celui-ci et notamment de sa demande de nullité,
Confirme le jugement dans toutes ses dispositions déférées,
Y ajoutant,
Condamne la SARL [D] au versement au profit de l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales PACA de la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Dispense la SARL [D] du paiement du droit de l'article R.144-10 du Code de la sécurité sociale,
Renvoie la procédure devant la Tribunal des affaires de sécurité sociale des Alpes de Haute Provence du chef des demandes dont cette juridiction demeure saisie,
Et la présente décision a été signée par le Président et le Greffier.
Le Greffier,Le Président.