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31/05/2018 | FRANCE | N°16/17436

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre b, 31 mai 2018, 16/17436


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE


17e Chambre B





ARRÊT AU FOND


DU 31 MAI 2018





N° 2018/302


GP

















N° RG 16/17436 - N° Portalis DBVB-V-B7A-7JTG











Francesco X...








C/





SA INDIGO PARK









































Grosse

délivrée


le :31 MAI 2018


à :


Me Robin Y... de la SELARL BOSIO-Y... ET ASSOCIES, avocat au barreau de NICE





Me Catherine Z..., avocat au barreau de MARSEILLE









































Décision déférée à la Cour :





Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE section C en date du 05 Septembre 2016 enregistré(e) au répertoi...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

17e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 31 MAI 2018

N° 2018/302

GP

N° RG 16/17436 - N° Portalis DBVB-V-B7A-7JTG

Francesco X...

C/

SA INDIGO PARK

Grosse délivrée

le :31 MAI 2018

à :

Me Robin Y... de la SELARL BOSIO-Y... ET ASSOCIES, avocat au barreau de NICE

Me Catherine Z..., avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE section C en date du 05 Septembre 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F15/00153.

APPELANT

Monsieur Francesco X...

né le [...] à Voiron (38500), demeurant [...]

représenté par Me Robin Y... de la SELARL BOSIO-Y... ET ASSOCIES, avocat au barreau de NICE substituée par Me Brigitte A..., avocat au barreau de NICE

INTIMEE

SA INDIGO PARK SA au capital de 2.100.784 euros, inscrite au RCS de Nanterre, venant aux droits et obligations de la société VINCI PARK SERVICES, prise en la personne de son représentant légal, y domicilié ès qualités, demeurant [...]

représentée par Me Catherine Z..., avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785,786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Mars 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de:

Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller

Madame Sophie PISTRE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Caroline LOGIEST.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 31 Mai 2018

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 31 Mai 2018

Signé par Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre et Madame Pascale ROCK, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Monsieur Francesco X... a été embauché en qualité d'agent d'exploitation le 1er août 2001 par la société VINCI PARK SERVICES.

Il a été promu assistant d'exploitation, agent de maîtrise, en poste aux parkings du Cours Saleya à Nice. Il a été promu responsable de site le 23 août 2010, puis a été affecté aux parkings Libération et Belle Époque de Beausoleil en septembre 2013 ; il n'a pris ses fonctions qu'à compter de janvier 2014 suite à une blessure lors d'un stage.

Son salaire mensuel brut était fixé en dernier lieu à 2360 €.

Monsieur Francesco X... s'est vu signifier une mise à pied disciplinaire en date du 22 juillet 2014 pour le non respect de ses obligations relatives à l'astreinte.

Par courrier recommandé du 24 novembre 2014, Monsieur Francesco X... a été convoqué à un entretien préalable pour le 9 décembre avec mise à pied à titre conservatoire, puis il a été licencié pour faute grave le 19 décembre 2014 en ces termes, exactement reproduits :

« [...] En préambule, il convient de signaler que les 18 et 19 novembre 2014, un audit des parkings de la Ville de Beausoleil a été réalisé par K... L... auditeur interne.

Compte tenu de votre absence sur le parc il a été dans l'impossibilité de contrôler le contenu du coffre. Il a toutefois relevé que la fréquence des remises en banque tous les 15 jours, constatée dans le logiciel REBAN, n'était pas conforme aux procédures en vigueur dans l'entreprise qui prévoient un dépôt en banque toutes les semaines afin d'avoir le moins d'espèces possibles dans les coffres-forts. M. L... a également constaté que certains éléments étaient absents des feuilles de vacation rendant le contrôle et la traçabilité des opérations partiels.

Le 20 novembre 2014 lorsque vous êtes arrivé dans le bureau que nous louons à la Société SAGESTAB, vous avez trouvé le coffre-fort ouvert. Vous avez constaté que les recettes des parcs Libération et Belle Époque d'un montant de 11268,70 € (recettes semaine 45 et 46 du parc Belle époque pour un montant de 4781,00 € et pour le parc Libération d'un montant de 6487,70 €) avaient disparu, ainsi qu'une partie du fonds de roulement pour un montant de 240,50 €. Aucune effraction de ce coffre n'a été constatée par vous ou par la Police. La porte du local était également ouverte sans effraction.

Compte tenu de la gravité de la situation et de la somme importante ayant ainsi disparu, nous avons prononcé votre mise à pied à titre conservatoire.

Les investigations que nous avons menées afin d'éclaircir la situation et le déroulement des faits ont mis en évidence de graves manquements de votre part dans la gestion de vos exploitations, ce dont nous vous avons fait part en entretien.

Concernant les faits de disparition d'argent relevés le 20 novembre 2014, vous n'avez pas été dans la capacité de nous fournir des explications.

Le constat que nous faisons aujourd'hui est que la porte du local était ouverte et que le coffre-fort contenant les recettes dérobées s'ouvre avec une combinaison que vous êtes le seul à connaître. Vous êtes vous-même convenu qu'en aucun cas une personne ne possédant pas la combinaison du coffre n'aurait été en capacité de l'ouvrir.

Ces faits nous amènent donc à nous interroger sur le respect des procédures et de la sécurisation des fonds placés sous votre responsabilité.

Par ailleurs, comme évoqué plus haut, nos recherches menées sur la disparition de cette somme importante d'argent nous a permis de constater de nombreux manquements de votre part, manquements sur lesquels nous vous avons demandé des explications :

Remise en banque

Vous procédez à la remise en banque des fonds tous les 15 jours. Les règles en vigueur chez VINCI Park prévoient une remise en banque hebdomadaire, ce qui permet de ne pas conserver sur un délai trop long une somme d'argent importante.

D'ailleurs, au regard des faits évoqués plus haut, il y a lieu de considérer que les recettes ayant disparu auraient été d'un montant moindre si vous aviez respecté les procédures (4870,70 € et non pas de 11268,70 €).

États de rapprochement

Depuis la semaine 37 et jusqu'à votre mise à pied à titre conservatoire, vous n'avez adressé aucun état de versement aux services comptables situés à Nanterre, notre siège social.

Cette situation les met dans l'impossibilité de pointer les comptes et les versements d'espèces depuis le mois de septembre. Nous avons découvert à cette occasion que depuis le début de l'année les comptables ont été dans l'obligation de vous relancer très régulièrement pour vous demander les justificatifs des écarts constatés sur les comptes des parkings placés sous votre responsabilité, pour vous demander de mettre à jour des opérations dans le logiciel de gestion clients GARI et pour que vous traitiez les prélèvements clients.

Par exemple le 29 octobre le comptable du siège a dû vous relancer à plusieurs reprises pour que vous traitiez le fichier prélèvements non saisi pour un montant de 10712,50 €. Cette opération aurait dû être créditée sur nos comptes depuis le 9 octobre 2014. Il vous a écrit de nouveau le 13 novembre car cette opération n'avait toujours pas été réalisée.

Vos manquements et la difficulté des comptables du siège pour vous joindre les mettent dans l'impossibilité de justifier les comptes des parkings de Beausoleil. Il est de votre totale responsabilité de transmettre les éléments comptables aux échéances fixées par les règles de l'entreprise et dont vous avez parfaitement connaissance.

Cartes abonnés

Sur le parking Libération nous avons comptabilisé 348 cartes dans le péage. 107 cartes sont périmées (identifiées dans le matériel de péage mais non utilisées). Sur ce parking nous avons environ 30 propriétaires mais ceci est impossible à confirmer à ce jour compte tenu du fait que les cartes ne sont pas traçables dans GARI. Il reste environ 190 cartes dans le péage. Pour ces 190 nous avons trouvé une corrélation pour 148 cartes abonnés dans le logiciel de gestion client.

Nous sommes dans l'incapacité de comprendre pourquoi les autres cartes inscrites dans le péage et présentant des mouvements ne sont pas saisies dans le logiciel GARI. Il est anormal que les cartes "propriétaires" ne soient pas identifiées dans le logiciel GARI, circulant ainsi sans contrainte ni contrôle.

Le constat est identique pour le parking Belle Epoque. Un écart important est existant entre les cartes figurant dans le péage et celles saisies dans le logiciel GARI.

Facturation

Nous nous sommes aperçus que vous n'aviez pas procédé à la facturation de clients, pour certains depuis plusieurs mois voire depuis le début de l'année 2014. Ainsi, depuis votre mise à pied, nous avons procédé à la facturation de plusieurs clients pour les montants suivants :

-pour le parking Libération, la régularisation s'élève à 3874,20 €,

-pour le parking Belle Époque la régularisation s'élève à 6475,20 €.

Bons de commandes Espace Culturel

L'espace Culturel de la Ville de Beausoleil vous a fait parvenir depuis le mois de janvier 2014 16 bons de commande pour acheter des titres de stationnement sur le parking Libération. Sur ces 16 bons de commande, un seul a fait l'objet d'une facturation. Les autres bons de commande n'ont fait l'objet d'aucun traitement.

Outre la négligence manifeste de ce non traitement, de la mauvaise image VINCI Park véhiculée aux services de la Ville, cette non facturation représente un manque à gagner de 536,10 € pour notre entreprise.

Petite caisse

Madame B... vous a demandé, après que nous ayons prononcé votre mise à pied, de lui restituer la carte de retrait Crédit Mutuel nominative que nous vous avons confiée pour alimenter les petites caisses de Beausoleil. Vous lui avez répondu avoir égaré cette carte. Nous avons donc fait opposition sur cette carte le 1er décembre 2014.

Nous avons toutefois constaté un retrait de 200 € le 27 novembre soit plusieurs jours après que nous ayons prononcé votre mise à pied conservatoire. Lors de notre entretien, vous nous avez indiqué finalement avoir cette carte en votre possession et avoir en effet retiré cette somme pour vous rembourser d'achats réalisés pour le compte de VINCI Park. Nous vous avons demandé où était la petite caisse que nous n'avons pas retrouvée. Vous nous avez répondu qu'elle avait probablement été volée le 18 novembre.

Nous vous avons demandé où étaient les justificatifs des dépenses réalisées sur cette petite caisse depuis le 23 septembre date à laquelle vous avez justifié pour la dernière fois de son utilisation et qui présentait un solde positif de 189,71 €. Vous nous avez répondu que tout était dans un classeur dans votre bureau. Après vérification, ce classeur contient 2 justificatifs.

Vous nous avez également adressé le 12 décembre des justificatifs de repas qui ne peuvent en aucun cas être payés par ce moyen mais seulement par note de frais. Un justificatif d'achat d'un agenda Exatime pour un montant de 34,90 € qui, de même, ne peut pas être réglé par ce moyen, tout achat de fourniture devant être réalisé auprès de notre fournisseur LYRECO. Un justificatif de transport datant de 3 mars 2014 et un justificatif d'achat de café.

Depuis le 8 août 2014, date du dernier retrait d'espèces justifié, vous avez réalisé 4 retraits pour un montant de 800 €. Compte tenu du solde positif de la petite caisse et des justificatifs recevables que vous nous avez adressés ces derniers jours, il reste encore 700 € pour lesquels nous ne disposons d'aucun justificatif.

Par ailleurs, il est pour le moins hasardeux de réaliser un retrait d'argent avec une carte de service alors que vous étiez en mise à pied. Vous auriez dû contacter votre responsable de district qui aurait fait le nécessaire pour vous rembourser les dépenses à la charge de VINCI Park.

Voiture de service

Le 20 novembre 2014 vous avez égaré les clés du véhicule de service qui vous est affecté. Le 21 novembre au soir vous avez "suggéré" comme vous me l'avez confirmé lors de notre entretien, à Monsieur C... de casser la vitre du véhicule afin de récupérer vos affaires personnelles restées dans le véhicule dont notamment vos clés d'appartement et votre sacoche.

Cette attitude est très surprenante. En effet vous auriez pu dès que vous avez constaté la disparition de vos clés faire intervenir d'urgence un garagiste qui aurait pu réaliser cette opération sans que votre véhicule se trouve dégradé. Le montant de la réparation s'élève à 811,30 € pour le remplacement des clés et le bris de glace.

Vous avez mis délibérément Monsieur C... dans une situation délicate vis-à-vis de nous.

Lorsque nous avons interrogé ce dernier sur les raisons l'ayant conduit à casser le véhicule, il nous a indiqué que vous aviez besoin d'un carton contenant un chauffe-biberon, de votre blouson et de vos clés de voiture. Il n'a aucunement mentionné vos clés d'appartement ou votre sacoche. Compte tenu des éléments communiqués par Monsieur C... nous considérons qu'il n'y avait aucun caractère d'urgence nécessitant de casser une vitre.

Aux négligences de gestion et de suivi révélant une mauvaise exécution de vos missions notamment administratives, s'ajoutent des faits mettant en évidence la disparition successive de plusieurs sommes d'argent sur les parcs dont vous avez la responsabilité et des coûts générés par votre comportement :

- 11579,40 € au titre des vols réalisés dans le coffre de votre bureau,

- 240,50 € de fonds de roulement volés dans le coffre de votre bureau,

- 881 € de réparation de votre véhicule de service,

- 700 € non justifié de la petite caisse.

En votre qualité de responsable de site il est de votre responsabilité notamment de réaliser, ou coordonner et contrôler l'ensemble des activités administratives et comptables (encaissements, abonnements, facturation, collecte des fonds, suivi des recettes et remise des fonds, établissement et transmission des documents en interne et ou en externe) en appliquant les règles administratives, de gestion et de sécurisation des fonds.

Les éléments supra montrent que vous n'avez pas respecté ces règles et principes.

En considération des faits reprochés révélant de graves manquements dans l'accomplissement de votre travail et du préjudice financier qui en découle pour la société VINCI Park, de votre négligence conduisant au non respect de vos obligations contractuelles, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave' ».

Contestant le bien fondé de la mesure ainsi prise à son encontre, Monsieur Francesco X... a saisi la juridiction prud'homale.

Par jugement du 5 septembre 2016, le conseil de prud'hommes de Nice a débouté Monsieur Francesco X... de la totalité de ses demandes et l'a condamné aux entiers dépens de l'instance.

Ayant relevé appel, Monsieur Francesco X... conclut, aux termes de ses conclusions récapitulatives signifiées par voie électronique le 26 février 2018, à la réformation du jugement en toutes ses dispositions, à ce que le licenciement litigieux soit déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse, à la condamnation de la SA INDIGO PARK venant aux droits de la SA VINCI Park Services à lui payer les sommes suivantes :

-50000 € à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-3207,30 € au titre du préavis,

-320,73 € à titre de congés payés sur préavis,

-4116,03 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

au débouté de la SA INDIGO PARK de toutes ses demandes et à la condamnation de la SA INDIGO PARK à payer la somme de 2500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Monsieur Francesco X... fait valoir que la lettre de convocation à entretien préalable ne comporte mention d'aucun grief qui eût pu lui permettre de préparer sa défense, qu'il s'ensuit que son licenciement est nul pour violation des droits de la défense, que ses comptes étaient régulièrement vérifiés et validés, qu'il avait alerté sa direction sur l'insuffisance des systèmes de sécurité concernant les caisses, que la société la SA VINCI Park Services a été défaillante et négligente quant à la protection des fonds dans un coffre placé dans un bureau occupé par du personnel extérieur à l'entreprise, que les clés de ce bureau étaient détenues par des gens ne faisant pas partie du personnel de la société VINCI Park Services, que ce coffre était visible tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du bureau, que le concluant n'a jamais demandé à Monsieur C... de casser la vitre du véhicule de service, que si le responsable de la flotte-auto avait remis le double des clés de ce véhicule, il aurait pu récupérer ses affaires sans dommage, qu'il n'y a pas eu de prélèvements indus par carte bancaire, que s'il avait été sur place pour accéder à son ordinateur et à ses classeurs, il aurait naturellement été en mesure de justifier de ses dépenses, que la préconisation d'une remise d'espèces une fois par semaine ne pouvait être appliquée compte tenu des multiples travaux, des pannes de matériel, du manque de formation du personnel et de l'absence de remplaçant qualifié, que la SA VINCI Park Services a été défaillante quant à la formation en matière de logiciel GARI, que les écarts évoqués ont toujours été justifiés, que la plupart de ces écarts proviennent d'erreurs de saisie des agents d'exploitation non formés, que tout au long de l'année 2014, ses responsables n'ont relevé aucune anomalie sur les cartes en circulation, qu'en décembre 2013 il a dû régulariser des encaissements et des factures laissés en souffrance depuis le début de l'année 2013, période antérieure à sa prise de fonction, qu'il a dû pallier à l'absence de personnel, que l'employeur a manqué à son obligation de formation, que depuis le début de l'année 2014 il a sans cesse été sollicité pour le suivi des travaux avec les prestataires et que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La SA INDIGO PARK venant aux droits de la SA VINCI Park Services conclut, aux termes de ses conclusions récapitulatives signifiées par voie électronique le 16 février 2018, à la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, au débouté en conséquence de Monsieur Francesco X... de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et à la condamnation de Monsieur Francesco X... aux entiers dépens.

La SA INDIGO PARK fait valoir que l'article L.1232-2 du code du travail ne prescrit nullement l'obligation d'informer le salarié des motifs du licenciement envisagé au stade de la convocation à entretien préalable, que le moyen de nullité n'est pas fondé, que les pièces versées aux débats par la société concluante démontrent les défaillances du responsable de site dans la surveillance et la gestion des fonds et des biens, sa responsabilité dans le dommage porté au véhicule de service, les prélèvements indus par carte bancaire, l'absence de remise hebdomadaire des fonds en banque, l'absence de suivi des comptes, la gestion défaillante des cartes d'abonnés, les manquements en matière de facturation et de traitement des commandes et que le licenciement du salarié est fondé sur une faute grave.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 1er mars 2018.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, il y a lieu de se référer au jugement du conseil de prud'hommes et aux écritures régulièrement signifiées.

SUR CE :

Sur le licenciement :

En application des articles L.1232-2 et L.1232-4 du code du travail, la lettre de convocation du salarié à un entretien préalable à une mesure de licenciement doit énoncer l'objet de cet entretien et la faculté pour l'intéressé de se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, mais n'a pas à mentionner les griefs qui lui sont reprochés.

Monsieur Francesco X..., qui ne conteste pas que l'employeur lui a indiqué, au cours de l'entretien préalable du 9 décembre 2014, les motifs de la mesure de licenciement envisagée et qu'il a pu se défendre en fournissant toutes les explications sur les griefs formulés par son employeur, a pu exercer ses droits de défense.

En conséquence, il convient de rejeter le moyen soulevé par Monsieur Francesco X... au titre de la nullité de son licenciement pour violation des droits de la défense.

L'examen des pièces versées par les parties au soutien des griefs cités dans la lettre de licenciement permet de constater que :

-les procédures internes à l'entreprise « Bonnes pratiques. Manipulation des fonds » et « Bonnes pratiques. Suivi de la trésorerie et des remises de recettes » n'imposent pas explicitement une obligation de remise hebdomadaire des fonds en banque (il est simplement évoqué le respect du "principe fonds remis= recettes constatées si possible pour chaque période hebdomadaire, obligatoirement à la fin de chaque mois" et le rendu compte "chaque semaine des recettes et des remises de fonds de tous types par les états GARI...") ;

-le rapport d'audit du 18 novembre 2014 observe que « sur le parc Belle Époque de la semaine 35 à la semaine 47, 6 versements ESPÈCES ont été effectués » et recommande d' « effectuer une remise de fonds par semaine au minimum » ;

-la SA VINCI Park Services, dont le service comptable réceptionnait les bordereaux de remises de chèques et versements d'espèces, n'a jamais formulé d'observation au salarié quant à la remise des fonds à la banque par quinzaine ;

-alors que Monsieur Francesco X... n'était pas le seul à disposer d'une clé de la porte du local dans lequel se trouvait le coffre fort contenant les recettes dérobées, que l'accès à ce local n'était pas sécurisé et que le coffre fort était visible de l'extérieur (même si des stores occultaient en partie la vitrine, ce qui n'était pas le cas de la porte principale vitrée), le fait que le responsable de site était le seul à connaître la combinaison du coffre ne permet pas pour autant de conclure qu'il serait impliqué dans la disparition des recettes volées ; la SA VINCI Park Services ne produit pas le résultat de l'enquête de police qui a fait suite au dépôt de plainte par Monsieur Francesco X... en date du 20 novembre 2014 au nom de son employeur ; la société intimée ne fournit aucune explication et ne verse aucun élément probant sur un vol identique commis à Nice dans un autre coffre fort de l'entreprise, ni sur le courriel du 24 novembre 2014 d'un employé signalant que le coffre du parking "Libération" était ouvert avec une somme importante d'espèces, constat effectué après le départ de Madame B..., responsable de district (M. X... était alors mis à pied et son dernier jour travaillé est le 21.11.2014 tel que mentionné sur l'attestation Pôle emploi) ;

-si le comptable du siège a effectivement relancé à plusieurs reprises Monsieur Francesco X... pour mettre à jour certaines opérations dans le logiciel de gestion GARI et pour lui demander des justificatifs des écarts constatés sur les comptes des parkings placés sous sa responsabilité, le salarié a cependant toujours fini par répondre, justifié des écarts et obtenu la validation des écarts (notamment validation des rapports 45 et 46 par courriel de Catherine D... du 20 novembre 2014 ) ;

-si Monsieur Francesco X... ne discute pas le défaut de transmission des états de versements depuis la semaine 37 (le 8 septembre 2014), il n'a pas pour autant été relancé à ce sujet par le service comptabilité ; l'employeur n'a fait un tel constat que postérieurement à la mise à pied du salarié, par courriel de Mireille E... du 4 décembre 2014 adressé àM... B... ; le seul témoignage de Monsieur Philippe F... qui rapporte avoir « relancé régulièrement Monsieur X... afin qu'il lui envoie les justificatifs comptables pour analyser les éventuels écarts entre les versements et les recettes des parcs Belle Époque et libération », est insuffisant à déterminer à quelle date le responsable de site aurait été « relancé » ; si le comptable précise par ailleurs dans son attestation qu'il a « cherché à joindre par téléphone et par écrit à plusieurs reprises sans succès Monsieur X... », il ne ressort pas des échanges de courriels que les relances du comptable soient restées sans suite ;

-les difficultés de Monsieur Francesco X... à assumer l'ensemble de ses fonctions de gestion s'inscrivent dans un contexte de nécessité de régularisation des écarts de comptes déjà existants en 2013, d'un manque de formation du personnel au logiciel GARI (selon témoignage de Mme G...), d'une carence en personnel (2 mutations fin 2013 et début 2014, 1021 heures d'intérim de janvier à avril 2014) de l'absence d'assistant de responsable du site lors des congés de Monsieur X... et de réalisation de travaux importants dans les parkings, le responsable de site assurant seul le suivi de ces travaux selon le témoignage de Madame Françoise G... ; le témoignage de Monsieur Robert H..., assistant technique, certifiant avoir « piloté les travaux' durant le premier semestre 2013' » est insuffisant à contredire celui de Madame Françoise G..., qui est par ailleurs corroboré par de nombreux courriels justifiant de la participation de Monsieur Francesco X... à des réunions de travaux et du suivi que ce dernier effectuait quant au bon déroulement des travaux ;

-Monsieur Francesco X... a informé sa hiérarchie, par courriel du 16 septembre 2014, qu'il avait effectué plus de 40 heures sur la semaine et qu'il avait beaucoup de problèmes sur l'exploitation après son retour de vacances et il sollicitait un entretien auprès de sa direction ;

-si l'employeur verse une attestation du 22 novembre 2014 de Monsieur Richard C... déclarant « avoir cassé la vitre de la Clio à la demande de Mr X... les affaires se trouvant dans la Clio ont été remis à l'intermédiaire N... le 21.11.2014 entre 16h30 à 17h00 », ce témoin est cependant revenu sur son témoignage dans une attestation du 26 juin 2015 en ces termes : « le samedi 22.11.14 j'ai fait une attestation à la charge de Mr X... elle a été faite à la demande de Mme B... dictée par Mme B... qui m'a fait comprendre que si je ne faisais pas ce courrier, je risquais d'être licencié. J'ai fait ce témoignage sous la pression de perdre ma place. Mr X... était bouleversé suite au vol du 20.11.14, il devait récupérer principalement objet personnel et des clés. Le 21.11.2014 il a été appelé par Mme B... pour quitter son poste immédiatement, devant récupérer ses enfants à Nice j'ai voulu aider Mr X... et ai pris par ma propre initiative l'extincteur qui se trouvait à ma porte pour casser la vitre du véhicule de service vu l'urgence du moment » ; il n'est donc pas démontré que Monsieur Francesco X... ait « suggéré » à Monsieur C... de casser la vitre du véhicule de service ; au surplus, il résulte d'un courriel du 24 novembre 2014 de Francesco X... adressé à Madame M... B... qu'il avait informé cette dernière de la perte des clés du véhicule de service le jeudi 20 novembre 2014, un double étant présent sur le parking Masséna, sans qu'une proposition soit faite au salarié pour qu'il puisse récupérer ses effets personnels au plus vite (notamment en récupérant le double des clés) ; en tout état de cause, la responsabilité de Monsieur Francesco X... dans la dégradation du véhicule de service n'est pas démontrée ;

-l'employeur procède par voie d'affirmation et non de démonstration lorsqu'il affirme que seuls deux justificatifs des dépenses réalisées sur la petite caisse ont été retrouvés dans le bureau ; Monsieur Francesco X... verse l'attestation du 26 juin 2015 de Madame Françoise G..., qui rapporte que « Mr X... lui a remis 80 € en espèces de son coffre afin de faire des doubles des 2 clés du bureau Sagestab vers la fin octobre 2014 pour Mme J... I...' Le reçu a été déposé sur le bureau de Mr X...' » qui démontre qu'il existait au moins un autre justificatif des dépenses réalisées sur la petite caisse ; Monsieur Francesco X... verse d'autres justificatifs de dépenses (agenda, café, raid vincipark, repas), et si l'employeur affirme que ces justificatifs ne permettent pas de justifier de l'ensemble des sommes retirées, il convient cependant de relever que le contrôle effectué par l'employeur n'a pas été fait au contradictoire du salarié, qui a été mis à pied et n'a pu rechercher dans son bureau et présenter des justificatifs.

Si, postérieurement à la mise à pied de Monsieur Francesco X..., un état des lieux a été effectué par l'employeur permettant de constater des écarts importants entre les cartes abonnés recensées dans le péage (348 sur le parking Libération) et celles saisies dans le logiciel GARI ainsi que le défaut de facturation depuis plusieurs mois de certains clients (pièces 47 à 78 versés par l'employeur), ces griefs relèvent cependant d'une insuffisance professionnelle et non d'une faute grave, étant observé qu'aucune observation n'avait été précédemment adressée par la SA VINCI Park Services à Monsieur Francesco X... quant à des manquements dans sa gestion.

Dans ces conditions, la Cour infirme le jugement et dit que le licenciement pour faute grave de Monsieur Francesco X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Il convient d'accorder à Monsieur Francesco X... la somme brute de 3207,30€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis et la somme nette de 4116,03 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, dont le calcul des montants n'est pas discuté, ainsi que la somme brute de 320,73 € au titre des congés payés sur préavis.

Monsieur Francesco X... produit l'avis du Pôle emploi du 17 janvier 2016 certifiant que, par notification du 20 janvier 2015, il a été admis au bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi consécutive à à la fin de son contrat de travail du 19 décembre 2014 et qu'il a bénéficié de 323 allocations journalières au 31 décembre 2015, une attestation des périodes indemnisées du 1er février 2017 au 31 janvier 2018 et une attestation fiscale des indemnités de chômage perçues au titre de l'année 2017.

Il ne verse pas un élément sur l'évolution de sa situation professionnelle sur 2016 et janvier 2017, ni sur ses recherches d'emploi.

En considération des éléments versés sur le préjudice, de l'ancienneté du salarié de 13 ans dans l'entreprise occupant plus de 10 salariés et du montant de son salaire mensuel brut, la Cour accorde à Monsieur Francesco X... la somme brute de 27000 € à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur le remboursement des indemnités de chômage :

Il convient d'ordonner d'office, en application des dispositions de l'article L.1235-4 du code du travail, le remboursement par l'employeur fautif au Pôle emploi PACA des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du présent arrêt, dans la limité de six mois d'indemnités.

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de Monsieur Francesco X..., tel que précisé au dispositif.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par décision prononcée par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en matière prud'homale,

Reçoit l'appel en la forme,

Infirme le jugement,

Dit que le licenciement de Monsieur Francesco X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la SA INDIGO PARK venant aux droits de la SA VINCI Park Services à payer à Monsieur Francesco X... :

-3207,30 € brut d'indemnité compensatrice de préavis,

-320,73 € brut de congés payés sur préavis,

-4116,03 € d'indemnité conventionnelle de licenciement,

-27000 € brut de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Ordonne le remboursement par la SA INDIGO PARK venant aux droits de la SA VINCI Park Services au Pôle emploi PACA des indemnités de chômage versées au salarié licencié du jour de son licenciement au jour du présent arrêt, dans la limite de 6 mois d'indemnités de chômage, en vertu de l'article L.1235-4 du code du travail,

Condamne la SA INDIGO PARK aux dépens de première instance et d'appel et à payer à Monsieur Francesco X... 2500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre b
Numéro d'arrêt : 16/17436
Date de la décision : 31/05/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 7B, arrêt n°16/17436 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-05-31;16.17436 ?
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