COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
17e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 28 JUIN 2018
N° 2018/
JLT/FP-D
Rôle N° N° RG 17/03032 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BABFB
X... Y...
C/
Syndicat des copropriétaires LE ROURET SON ADMINISTRATEUR PROVISOIRE ME G... Z...
Grosse délivrée
le : 28 JUIN 2018
à :
Me Elise H..., avocat au barreau de NICE
Me Nicolas A..., avocat au barreau de NICE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 31 Janvier 2017 enregistré au répertoire général sous le n° F 15/00490.
APPELANT
Monsieur X... Y...
né le [...] à Marseille (13)
de nationalité Française, demeurant [...]
représenté par Me Elise H..., avocat au barreau de NICE
INTIMEE
Syndicat des copropriétaires LE ROURET pris en la personne de son administrateur provisoire, Me G... Z..., demeurant [...]
représentée par Me Nicolas A..., avocat au barreau de NICE substitué par Me Caroline B..., avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 14 Mai 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Monsieur Jean-Luc C..., Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de:
Monsieur Jean-Luc C..., Président
Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller
Monsieur Nicolas TRUC, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Françoise I....
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Juin 2018
ARRÊT
contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Juin 2018,
Signé par Monsieur Jean-Luc C..., Président et Madame Françoise I..., greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCÉDURE
M. X... Y... a été embauché par le syndicat des copropriétaires de la résidence du ROURET, en qualité de gardien concierge, par un contrat de travail à durée indéterminée du 1er juillet 1996.
Se plaignant d'agissements de harcèlement moral et de manquements de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Nice le 20 avril 2015 afin d'obtenir la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur et la condamnation de ce dernier à lui payer diverses sommes à titre d'indemnités.
Suite à un arrêt de travail pris en charge au titre de la législation sur les accidents du travail, M. Y... a été déclaré inapte à son poste par le médecin du travail à l'occasion des visites de reprise des 29 octobre et 17 novembre 2015.
Le salarié a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 13 janvier 2016.
Par jugement du 31 janvier 2017, le Conseil de Prud'hommes a débouté le salarié de ses demandes et l'a condamné à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence du ROURET la somme de 300,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
M. Y... a relevé appel le 15 février 2017 de ce jugement notifié le 14 février 2017.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
In limine litis, M. Y... sollicite d'écarter des débats les pièces communiquées par l'intimée après l'ordonnance de clôture sous les n°10 à 16.
Par conclusions déposées le 13 mars 2017 auxquelles il convient de se référer pour de plus amples développements, concluant à la réformation du jugement, il sollicitede constater qu'il a été victime d'actes répétés de harcèlement moral sur son lieu de travail, que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité de résultat et de prononcer, en conséquence, la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, la rupture du contrat de travail devant produire les effets d'un licenciement nul.
Il demande de condamner le syndicat des copropriétaires de la résidence du ROURET, avec intérêts au taux légal et capitalisation, au paiement des sommes de :
- 10 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
- 25 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de
sécurité de résultat,
- 2 714,30 euros à titre de rappel de salaire du 17 décembre 2015 au 13 janvier 2016,
- 130 286,40 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,
- 23 122,91 euros à titre d' indemnité spéciale de licenciement.
A titre subsidiaire, il demande de dire que l'employeur a manqué à ses obligations, qu'il a subi des actes de harcèlement moral, que le licenciement est nul en raison de l'origine de l'inaptitude consécutive à des agissements de harcèlement moral. Il demande de condamner l'employeur, avec intérêts au taux légal et capitalisation, à lui payer les sommes de :
- 10 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
- 25 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de
sécurité de résultat,
- 2 714,30 euros à titre de rappel de salaire du 17 décembre 2015 au 13 janvier 2016,
- 130 286,40 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul en raisonde l'inaptitude ayant pour origine des actes de harcèlement moral,
- 23 122,91 euros à titre d' indemnité spéciale de licenciement.
A titre infiniment subsidiaire, il demande de dire que l'employeur a manqué à ses obligations, qu'il a subi des actes de harcèlement moral, que l'inaptitude a une origine professionnelle et que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison de l'absence de recherche d'un poste de reclassement. Il demande de condamner l'employeur, avec intérêts au taux légal et capitalisation, à lui payer les sommes de :
- 10 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
- 25 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de
sécurité de résultat,
- 2 714,30 euros à titre de rappel de salaire du 17 décembre 2015 au 13 janvier 2016,
- 130 286,40 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul en raison
de l'inaptitude ayant pour origine des actes de harcèlement moral,
- 23 122,91 euros à titre d' indemnité spéciale de licenciement.
En tout état de cause, il demande :
- d'ordonner au syndicat des copropriétaires de la résidence du ROURET de lui remettre, sous astreinte, l'attestation Pole Emploi rectifiée s'agissant de la cause de la rupture et les bulletins de salaire rectifiés,
- de dire qu'en cas d'exécution forcée, le montant des sommes retenues par l'huissier en application de l'article 10 du décret du 08/03/01 sera supporté par tout succombant,
- de condamner le syndicat des copropriétaires de la résidence du ROURET à lui payer la somme de 3 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le syndicat des copropriétaires de la résidence du ROURET demande que soit acceptées dans les débats les pièces communiquées sous les n°10 à 16, s'agissant de pièces déjà communiquées en première instance et citées dans les écritures d'appel.
Par conclusions déposées le 5 avril 2017 auxquelles il convient de se référer pour de plus amples développements, concluant à la confirmation du jugement, il sollicite de débouter M. Y... de ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de
3 500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 23 avril 2018.
Pour plus ample relation des faits, de la procédure et des prétentions et moyens des parties, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux conclusions déposées.
DISCUSSION
Sur la demande tendant à écarter des pièces des débats
M. Y... demande d'écarter des débats les pièces communiquées par l'intimée le 9 mai 2018 comme tardives.
Il est, en effet, justifié et non contesté que l'employeur a communiqué au salarié des pièces portant les n° 1 à 16 après l'ordonnance de clôture.
L'intimée fait valoir vainement que ces pièces avaient déjà été communiquées dans le cadre des débats devant le premier juge. Dans la mesure où ces pièces n'ont pas été communiquées dans le cadre de la procédure d'appel avant que soit rendue l'ordonnance de clôture, elles doivent être écartées des débats, la tardiveté de cette communication n'ayant manifestement pas permis à M. Y... d'en faire un examen utile afin de présenter une réponse à l'audience dans les conditions normales du débat contradictoire.
Sur le harcèlement moral
Aux termes de l'article L 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation
des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa
santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
En application de l'article L.1154-1 du même code, dans sa rédaction alors applicable, en cas de litige relatif à l'application de l'article L.1152-1, il appartient au salarié concerné d'établir des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, la partie défenderesse devant alors prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
En l'espèce, M. Y... se plaint d'une dégradation de ses conditions de travail en raison des agissements répétés d'une copropriétaire, Mme D..., suite à un contentieux qui l'a opposé à elle. Il explique qu'il avait confié la garde de sa fille, âgée de 4 ans à cette voisine et qu'alerté par les dires de sa fille, il avait mis un terme à cette garde et déposé une plainte contre Mme D... pour atteinte sexuelle sur mineur. Il dit avoir subi de la part de Mme D..., à compter de cette plainte, des pressions morales majeures, des dénigrements, des menaces, des violences répétées.
M. E..., occupant de la résidence, atteste avoir entendu dire à plusieurs reprises par Mme D... que M. Y... dépense beaucoup de produits d'entretien, que son salaire est trop élevé et qu'il faut le licencier pour le remplacer par une entreprise de nettoyage.
M. F..., qui habite également dans la résidence, rapporte que, dès l'été 2013, Mme D... lui a fait part de griefs à l'encontre de Mme Y... et qu'elle s'en est prise ensuite à M. Y... sur les plans personnel et professionnel en adressant un courrier au syndic le 20 octobre 2013. Il ajoute qu'elle lui a fait 'des réflexions désobligeantes, agressives et infondées' les 30 novembre et 3 décembre 2013.
Ce même M. F... a écrit, le 22 novembre 2013, au syndic de la copropriété pour lui transmettre une pétition signée par une cinquantaine de propriétaires et de locataires de la résidence pour exprimer leur satisfaction sur le travail de M. Y....
Selon déclaration de main courante du 27 novembre 2013, M. Y... s'est plaint de ce que Mme D... est allée voir les résidents pour contester le montant de son salaire et ses heures de travail. Mme Y... a elle-même procédé à une déclaration de main courante le 2 décembre 2013 pour se plaindre de ce que Mme D... l'insulte et la menace.
M. Y... a effectué une nouvelle déclaration de main courante le 24 janvier 2014 en expliquant que, le 22 janvier précédent, Mme D... l'avait suivi en le filmant parce qu'elle lui reproche de faire le ménage trop tôt.
M. E... atteste avoir vu, le 9 octobre 2014, à 7h15 du matin, Mme D... 'gazer' M. Y... sans aucune raison. Le salarié a porté plainte pour ces faits le même jour, avec un certificat médical constatant les blessures et prévoyant un arrêt de travail de 48 heures. Il a expliqué qu'il était en train de faire les vitres lorsque les portes de l'ascenseur se sont ouvertes et que Mme D... l'a 'gazé' au visage, à l'oeil droit, à la poitrine et au bras gauche.
Le 3 février 2015, M. Y... a déposé une nouvelle plainte auprès des services de police accompagnée de photographies en expliquant que Mme D... avait écrit devant sa porte les mots : 'A quand l'enfermement du cycliste traumatisé et dépressif '', mots qui le visaient en sa qualité de cycliste et de malade pour dépression. Ces inscriptions étaient accompagnées de 'vomi' sur la porte, le tapis et le sol. Il a ajouté que, le 27 décembre 2014, sa fille avait trouvé dans la boîte aux lettres une poupée de chiffon, dont la photographie est également versée aux débats, portant les inscriptions 'C' et 'S' pouvant correspondre aux initiales de l'épouse de M. Y..., poupée percée d'aiguilles au niveau du coeur et de la tête.
Une nouvelle plainte a été déposée le 27 août 2015 pour dégradation du véhicule du salarié (rétroviseur arraché, pot d'échappement enfoncé, etc.).
M. Y... justifie également que son épouse a fui avec leur enfant le domicile familial pour se réfugier chez ses parents en raison des agissements de Mme D....
Cette suite d'événements a eu des conséquences certaines sur la santé de M.Y... qui justifie s'être vu diagnostiquer par un psychiatre, le 30 septembre 2014, un état anxio dépressif mis en relation avec les agissements dont il a été l'objet. Le 3novembre 2014, suite à l'agression par jet de gaz lacrymogène, le psychiatre a fait état, le 13 octobre 2014, d'un syndrome d'angoisse post-traumatique donnant lieu à un traitement. Le 3 novembre 2014, il a été relevé 'un état de stress important' qui persiste et qui a donné lieu à un arrêt de travail ainsi qu'à un traitement psychotrope. Les certificats médicaux successifs montrent que l'arrêt de travail a été prolongé jusqu'au 27 octobre 2015.
Le syndicat des copropriétaires, par la personne de son administrateur judiciaire, ne conteste pas l'existence des 'problèmes' existant entre Mme D... et M. Y... mais il soutient qu'il s'agirait d'un problème de voisinage opposant le salarié à un tiers au contrat de travail.
Cependant, si les agissements de Mme D... semblent avoir eu pour origine un différend personnel, les éléments versés aux débats font apparaître que le conflit a dépassé rapidement ce cadre pour se muer en un affrontement affectant l'activité professionnelle du salarié, mené par une personne qui n'est pas un tiers au contrat de travail comme le soutient le syndicat puisqu'elle a la qualité de propriétaire au sein de la résidence et, par conséquent, de membre du syndicat des copropriétaires, employeur de M. Y.... Il résulte, qui plus est, des éléments versés aux débats, que Mme D... est membre du conseil syndical de sorte que M. Y... peut, à juste titre, faire valoir, qu'elle était susceptible de prendre des décisions affectant la relation de travail. En outre, ces agissements ont été manifestés dans le cadre ou à l'occasion du contrat de travail puisqu'ils étaient dirigés contre le gardien de la résidence, non seulement à titre personnel mais aussi à titre professionnel, ayant consisté en des actions de dénigrement de son activité professionnelle, en des actes de violences verbales et même physiques qui ont eu lieu dans le cadre et sur le lieu de cette activité et ont été portés à la connaissance des occupants de la résidence.
Le caractère répété de ces actes caractérise un comportement récurrent de nature à porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, à altérer sa santé physique ou mentale et, en tous cas, à dégrader ses conditions de travail. De tels agissements constituent des actes de harcèlement moral au sens de l'article L 1152-1 du code du travail.
Le fait, souligné par le syndicat, que Mme D... se serait elle-même plainte d'insultes de la part de Mme Y..., n'est pas de nature à remettre en cause sa responsabilité pour les faits de harcèlement moral commis sur la personne de son salarié.
Le syndicat des copropriétaires, tenu d'une obligation de sécurité de résultat envers son salarié, n'a pris aucune mesure pour préserver son salarié. Il n'est, en effet, pas justifié que le syndicat des copropriétaires, informé des difficultés de M. Y..., aurait pris la moindre mesure pour mettre fin à la situation de harcèlement moral. Selon ces propres explications, il s'est borné à le recevoir pour considérer qu'il s'agissait d'un différend de voisinage n'engageant pas sa responsabilité.
M. Y... est, en conséquence, bien fondé à solliciter de celui-ci réparation du préjudice qu'il a subi en raison du harcèlement moral dont il a souffert.
Eu égard aux éléments d'appréciation versés aux débats et compte tenu, notamment, de l'arrêt de travail pour état dépressif ainsi que des conséquences du harcèlement sur la vie familiale du salarié, le préjudice subi par M. Y... sera réparé en lui allouant la somme de 8 000,00 euros à titre de dommages-intérêts.
Le salarié se plaint en outre, à juste titre, du non-respect par l'employeur des obligations mises à sa charge par les articles L 4121-1 et L 1152-4 du code du travail desquels il résulte que l'employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs et doit, plus spécifiquement, prendre toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.
M. Y... fait, en effet, valoir sans être contesté sur ce point que l'employeur n'avait mis en place aucune politique d'évaluation des facteurs de risque, aucune action d'information et de formation, aucune méthode ni aucune planification de prévention, aucun moyen d'alerte ni aucune modalité de prise en charge des salariés victime de harcèlement.
Les obligations résultant des articles L. 1152-4 et L. 1152-1 du code du travail sont distinctes en sorte que la méconnaissance de chacune d'elles, lorsqu'elle entraîne des préjudices différents, peut ouvrir droit à des réparations spécifiques.
En l'espèce, M. Y... a subi un préjudice certain du fait de l'absence de toute mesure visant à la prévention des situations de harcèlement qui a eu pour effet de l'exposer, sans aucune protection, à des agissements d'un copropriétaire pendant près de deux ans. Ce préjudice, distinct de celui résultant du harcèlement moral lui-même, sera réparé en lui allouant la somme de 7 000,00 euros à titre de dommages-intérêts.
Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail
Lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il
reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier lelicencie ultérieurement pour d'autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat detravail, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat était justifiée. C'estseulement dans le cas contraire qu'il doit se prononcer sur le licenciement notifié parl'employeur.
En l'espèce, M. Y... a saisi le conseil de prud'hommes de sa demande de résiliation
judiciaire du contrat de travail alors que les relations contractuelles avec l'employeur n'étaient
pas rompues et que le licenciement n'est intervenu que postérieurement.
Il y a donc lieu de statuer sur la demande de résiliation et de rechercher si lesgriefs articulés à l'encontre de l'employeur sont de nature à justifier celle-ci, la résiliation ducontrat de travail ne pouvant être prononcée qu'en présence de fautes commises par l'employeursuffisamment graves pour emporter la rupture du contrat de travail.
En l'espèce, les faits de harcèlement étant établis de même que la méconnaissance par l'employeur de son obligation de sécurité de résultat à l'égard de son salarié, M.Y... apporte la preuve de manquements d'une gravité telle qu'elle justifie la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur.
Une telle résiliation justifiée par des agissements de harcèlement moral produit les effets d'un licenciement nul avec effet à la date à laquelle la relation de travail a pris fin, soit le 13 janvier 2016.
M. Y..., né [...], a vu son contrat de travail rompu après 19 ans et 6 mois d'ancienneté au service d'une entreprise employant moins de 11 salariés, à l'âge de 51 ans. Il a été pris en charge par Pôle Emploi et est toujours en recherche d'emploi.
Compte tenu de son salaire mensuel brut (2 714,30 euros), il lui sera alloué la somme de 50 000,00 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul.
Au titre de l'indemnité spéciale de licenciement, le salarié revendique, sur le fondement de l'article L 1234-9 du code du travail, la somme de 23 122,91 euros après déduction de la somme de 21 663,04 euros déjà perçue tandis que l'employeur, sur le même fondement, soutient avoir rempli le salarié de ses droits par le versement qu'il a effectué, les deux parties s'accordant sur le fait que l'indemnité due en application des dispositions légales doit être doublée.
En application des articles L 1234-9 du code du travail et de l'article R 1234-1 du même code, dans sa rédaction alors applicable, l'indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d'ancienneté, auquel s'ajoutent deux quinzièmes de mois par année au-delà de dix ans d'ancienneté.
Selon ces dispositions, l'indemnité due s'élève à 14 023,88 euros ((2714,30 x 1/5 x19,5) + 2 714,30 x 2/15 x 9,5)), soit après doublement, 28 047,77 euros. Compte de la somme déjà versée, il reste dû au salarié la somme de 6 384,73 euros.
Sur la demande de rappel de salaire
Le salarié soutient que l'employeur n'aurait pas repris le versement du salaire pendant la période du 17 décembre 2015 au 13 janvier 2016 mais le syndicat des copropriétaires produit les bulletins de salaire correspondant au mois de décembre 2015 et au mois de janvier 2016 ainsi que le solde de tout compte qui font apparaître le paiement du salaire au titre de cette période.
La demande n'est donc pas fondée et le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de cette demande.
Sur la demande de documents
L'employeur devra remettre au salarié un bulletin de salaire et une attestation destinée au POLE EMPLOI rectifiés conformément au présent arrêt.
Cette remise devra intervenir dans le délai de quinze jours suivant le présent arrêt, sous peine d'une astreinte de 50,00 euros par jour de retard.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
En application de l'article 700 du code de procédure civile, l'employeur doit payer à M. Y... la somme de 3 000,00 euros au titre des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens d'appel.
La demande au titre de l'article 10 du décret n°2001-212 du 8 mars 2001 est sans objet, le droit visé par ce texte n'étant pas dû lorsque le recouvrement est effectué sur le fondement d'un titre exécutoire constatant une créance née de l'exécution d'un contrat de travail.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile,
Ecarte des débats les pièces communiquées par le syndicat des copropriétaires de la résidence du ROURET sous les n°10 à 16,
Confirme le jugement en ce qu'il a débouté M. X... Y... de sa demande de rappel de salaire,
Infirme le jugement pour le surplus et, statuant à nouveau,
- Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur et dit que cette résiliation produit les effets d'un licenciement nul à la date du 13 janvier 2016,
- Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence du ROURET à payer à M. X... Y... les sommes de :
* 8 000,00 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral,
* 7 000,00 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat,
* 50 000,00 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul,
* 6 384,73 euros à titre de solde d'indemnité spéciale de licenciement,
- Dit que ces sommes produiront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et que les intérêts seront eux-mêmes capitalisés en application de l'article 1154 ancien du code civil (article 1343-2 nouveau),
- Dit que le syndicat des copropriétaires de la résidence du ROURET doit délivrer à M. X... Y... un bulletin de salaire et une attestation destinée au POLE EMPLOI rectifiés conformément au présent arrêt et dit que cette remise devra intervenir dans le délai de quinze jours suivant le présent arrêt, sous peine d'une astreinte de 50,00 euros par jour de retard,
- Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence du ROURET à payer à M.X... Y... la somme de 3 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Dit sans objet la demande au titre de l'article 10 du décret n°2001-212 du 8 mars 2001,
- Dit que le syndicat des copropriétaires de la résidence du ROURET doit supporter les dépens de première instance et d'appel.
Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
F. I... J.L. C...