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15/11/2018 | FRANCE | N°17/13903

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 15e chambre a, 15 novembre 2018, 17/13903


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

15e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 15 NOVEMBRE 2018



N° 2018/597













N° RG 17/13903 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BA5X5







[A] [Y] [N]

[S] [B] [V] épouse [Y] [N]





C/



SA LUXORINVEST





















Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Philippe SCHRECK



Me Agnès ERMENEUX- CHAMPLY



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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 30 Juin 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 16/07502.





APPELANTS



Monsieur [A] [Y] [N]

né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 1] ( Portugal), de nationalité Française, ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

15e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 15 NOVEMBRE 2018

N° 2018/597

N° RG 17/13903 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BA5X5

[A] [Y] [N]

[S] [B] [V] épouse [Y] [N]

C/

SA LUXORINVEST

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Philippe SCHRECK

Me Agnès ERMENEUX- CHAMPLY

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 30 Juin 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 16/07502.

APPELANTS

Monsieur [A] [Y] [N]

né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 1] ( Portugal), de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Philippe SCHRECK de l'AARPI MSC AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant

Madame [S] [B] [V] épouse [Y] [N]

née le [Date naissance 2] 1960 à LISBONNE, de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Philippe SCHRECK de l'AARPI MSC AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant

INTIMEE

SA LUXORINVEST société anonyme de droit luxembourgeois, immatriculée au R.C.S. du LUXEMBOURG sous le numéro B 85399, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social sis [Adresse 2]

représentée par Me Agnès ERMENEUX-CHAMPLY de la SCP ERMENEUX- ARNAUD- CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée par Me Cataldo CAMMARATA, avocat au barreau de PARIS, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 10 Octobre 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Evelyne THOMASSIN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Evelyne THOMASSIN, Président

Madame Pascale POCHIC, Conseiller

Madame Sandrine LEFEBVRE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Novembre 2018.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Novembre 2018,

Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par acte authentique dressé en l'étude de Me [Z], notaire à [Localité 2] (83) en date du 25 juillet 2006, monsieur et madame [Y] [N] se sont rendus acquéreurs d'un bien immobilier, situé commune de [Localité 3] lieudit '[Localité 4]' pour le prix de 230 000 € avec une reconnaissance de dette envers la société Luxorinvest, à hauteur de 725 000 €, remboursable dans le délai de deux ans à compter de l'acte, soit au plus tard le 25 juillet 2008. Il était stipulé que le prêt ne porterait pas intérêt, mais serait un prêt participatif, c'est à dire que le bénéfice sur la vente des deux villas à construire par les débiteurs serait partagé à raison de 50/50% entre le prêteur et les débiteurs.

Il doit être à ce point précisé, que la société Luxorinvest avait assigné le 21 février 2012 les époux [Y] [N] devant le tribunal de grande instance de Draguignan, lequel dans la décision du 25 février 2014 a notamment :

- écarté la notion de prêt participatif,

- condamné les consorts [N] à payer à la société Luxorinvest la somme de 725 000 € due au 25 juillet 2008 au titre du prêt notarié du 25 juillet 2006,

- celle de 625 994.74 € au titre d'autres sommes versées et 16 421.95 € avec intérêt au taux légal à compter du 24 novembre 2009 avec capitalisation des intérêts,

- celle de 3 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté une demande en paiement de la société Luxorinvest, au titre d'un emprunt de 300 000€ dont l'exigibilité était liée à la vente, non réalisée, du bien édifié.

Le tribunal indiquait dans sa motivation, que monsieur et madame [N] étaient porteurs de parts dans la SARL JFA Luck Construction, et que monsieur [N] ne pouvait être considéré comme profane après avoir réalisé plusieurs opérations immobilières.

La société Luxorinvest, a entrepris selon commandement de payer valant saisie immobilière, délivré le 29 juin 2016, le recouvrement de sa créance.

Dans une décision en date du 30 juin 2017, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Draguignan (RG 16-7502) a notamment :

- déclaré irrecevable le moyen tiré de l'acquisition d'une prescription biennale en application de l'article 218-2 du code de la consommation,

- débouté monsieur et madame [Y] [N] de l'ensemble de leurs demandes,

- constaté la créance de la société Luxorinvest à hauteur de 1 638 498.48 € arrêtée au 1er avril 2016 avec interêt au taux légal majoré à compter de cette date,

- taxé les frais à la somme de 11 409.75 €,

- ordonné la vente forcée des biens situés à [Localité 3], lieudit '[Localité 4]' section A n°[Cadastre 1] et [Cadastre 1].

Il retenait que les débiteurs n'avaient pas soulevé la prescription lors de l'instance ayant conduit au jugement du tribunal de grande instance de Draguignan du 25 février 2014 qui les avaient condamnés à payer alors que les dispositions de l'article R121-1 du code des procédures civiles d'exécution ne permet pas au juge de l'exécution de remettre en cause le dispositif d'une décision servant de fondement aux poursuites.

Monsieur et madame [Y] [N] ont fait appel de la décision du juge de l'exécution en date du 30 juin 2017 par déclaration au greffe en date du 19 juillet 2017 et ils ont été autorisés à assigner à jour fixe, par ordonnance en date du 25 juillet 2017.

Leurs moyens et prétentions étant exposés dans des conclusions en date du 25 septembre 2018, ils demandent à la cour de :

- Réformer le jugement du 30 juin 2017,

- Dire que la créance de la Société Luxorinvest à l'égard des époux [Y] [N] née de l'acte authentique du 25 juillet 2006 est prescrite,

En conséquence,

- Prononcer la nullité de la saisie immobilière et ordonner la radiation du commandement de saisie immobilière et de l'hypothèque inscrite sur le bien,

- Ordonner le remboursement de loyer perçu par la Société Luxorinvest en suite de l'opposition du paiement des loyers qu'elle a formalisé,

- Condamner la Société Luxorinvest au paiement de la somme de 8.000 € de dommages et intérêts ainsi que la somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- La condamner aux entiers dépens distraits au profit de Mr le Bâtonnier Philippe Schreck, représentant l'A.A.R.P.I. MSC avocats associés.

Ils soutiennent qu'ils sont encore recevables à opposer la prescription de l'action en paiement, malgré les termes du jugement prononcé le 25 février 2014 car ils ne l'avaient pas évoqué à l'époque et l'ensemble des moyens concernaient la nature des prêts, leur qualification, la notion de société de fait ou d'un prêt participatif. Ils affirment que l'article L213-6 du code de procédure civile d'execution leur permet à présent d'aborder la prescription, fin de non recevoir tirée de l'article 122 du code de procédure civile qui peut être opposée en tout état de cause. Ils invoquent l' article L 218-2 du Code de la Consommation qui dispose « L'action des professionnels, pour des biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs se prescrit par deux ans. » Selon eux, « Ne perd pas la qualité de consommateur la personne physique qui, agissant à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale, souscrit un prêt de nature spéculatif de sorte que le prêt souscrit à des fins étrangères à l'activité professionnelle des emprunteurs est soumis au délai de prescription de l'article L.137-2 du Code de la Consommation (nouvel article L.218-2 du Code de Commerce). »

En raison de la date fixée pour le remboursement du prêt, le 3 juillet 2008, l'action en paiement devait être intentée avant le 3 juillet 2010, ce qui n'a pas été le cas. Celles qui ont pu être entreprises à l'encontre de la société JFA Luck Construction ne pouvant leur être opposées car ils n'y étaient pas parties.

Ses moyens et prétentions étant exposés dans des conclusions en date du 28 septembre 2018, la société Luxorinvest demande à la cour de :

- confirmer le jugement en particulier sur l'irrecevabilité du moyen tiré de la prescription de l'action,

Subsidiairement,

- dire que l'article L218-2 du code de la consommation ne peut bénéficier aux époux [N] qui agissaient à l'époque pour des raisons professionnelles alors qu'elle n'est pas un professionnel du crédit,

- A défaut, dire que la prescription a été interrompue par une assignation du 24 novembre 2009 devant le tribunal de commerce de Marseille,

- infirmer le jugement et condamner in solidum les consorts [Y] [N] à payer les intérêts compensatoires de la somme de 1 439 916.69 € au taux BCE plus 10 points à compter du 25 février 2014 avec capitalisation, outre en raison de l'abus d'ester en justice, la somme de

20 000 € de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1240 du code civil, 15 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance et de l'appel,

En conséquence,

- débouter les consorts [Y] [N] de toutes leurs demandes,

- ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de vente avec distraction au profit de la SCP Ermeneux-Arnaud-Cauchi-associés.

Elle base son argumentation sur l'autorité de chose jugée, la concentration des moyens, alors que la prescription est un moyen de défense à soulever avant toute défense au fond. De plus les époux [N] ne peuvent se contredire aux dépens d'autrui après avoir affirmé devant le tribunal de grande instance de Draguignan, que les sommes n'étaient pas exigibles avant la vente des immeubles.

MOTIVATION DE LA DECISION

L'article R121-1 du code des procédures civiles d'exécution, dispose en son 2ème alinéa que le juge de l'exécution ne peut ni modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, ni en suspendre l'exécution. Toutefois, après signification du commandement ou de l'acte de saisie, selon le cas, il a compétence pour accorder un délai de grâce.

En l'espèce, il convient de souligner qu'après l'acte notarié du 25 juillet 2006, ayant les caractères d'un titre exécutoire, un débat judiciaire a eu lieu entre les parties, dont l'issue s'est trouvée dans un jugement du tribunal de grande instance de Draguignan, le 25 février 2014.

Tandis que les articles 122 et 123 du code de procédure civile, permettent aux parties en tout état de cause d'opposer une fin de non recevoir éventuellement tirée de la prescription, l'autorité de chose jugée et la nécessité de concentrer les moyens de droit qui soutiennent leurs prétentions s'imposent aux parties, afin de proscrire le renouvellement de procés à l'infini, lorsqu'ils sont basés sur les mêmes faits.

Une discussion juridique a eu lieu entre les époux [N] et la société Luxorinvest, devant le tribunal de grande instance de Draguignan, précisément concernant le remboursement des mêmes sommes, et s'il est exact que la prescription n'avait pas été opposée par les débiteurs à l'époque, il est aujourd'hui trop tard pour la soutenir, en présence d'un jugement définitif ayant pour objet les mêmes contrats. Il leur appartenait de rassembler à l'époque et de faire juger tous les moyens juridiques y compris la prescription, pour s'opposer efficacement s'ils l'estimaient utile, aux demandes en paiement de leur adversaire. Les causes de la prescription invoquée, sont antérieures à la décision du 25 février 2014 et dès lors ne pourront prospérer en raison de l'autorité de chose jugée.

Pour des motifs similaires, il n'y a pas à revenir sur le montant de la condamnation prononcée par le tribunal de grande instance de Draguignan et d'appliquer a postériori les dispositions de l'article L441-6 du code de commerce avec majoration des intérêts, qu'il appartenait à la société Luxorinvest d'invoquer lors du précédent débat judiciaire ayant conduit au jugement du 25 février 2014.

Il n'est pas justifié du caractére abusif, et guidé par l'intention de nuire de la procédure intentée par les époux [N], il ne sera pas fait droit à la demande de dommages et intérêts présentée par l'établissement prêteur qui ne démontre d'ailleurs pas l'existence de son préjudice.

Il serait par contre inéquitable de laisser à sa charge les frais irrépétibles engagés dans l'instance et à ce titre une somme de 3 000 € lui sera allouée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La partie perdante supporte les dépens, ils seront à la charge des époux [N] qui succombent en leurs prétentions.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la Loi, statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement déféré, prononcé par le juge de l'exécution de Draguignan le 30 juin 2017, sous le numéro RG 16-7502,

Y ajoutant,

DIT n'y avoir lieu à dommages et intérêts,

REJETTE les autres demandes des parties,

CONDAMNE in solidum monsieur et madame [N] à payer la somme de 3 000 € à la société Luxorinvest sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de l'instance d'appel,

CONDAMNE in solidum monsieur et madame [N] aux entiers dépens d'appel avec droit de recouvrement direct des frais dont elle aura fait l'avance sans avoir reçu provision préalable, au profit de la SCP Ermeneux-Arnaud-Cauchi-associés, en application de l'article 659 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 15e chambre a
Numéro d'arrêt : 17/13903
Date de la décision : 15/11/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 5A, arrêt n°17/13903 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-11-15;17.13903 ?
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