COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
10e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 13 DECEMBRE 2018
N° 2018/ 496
Rôle N° 17/14330
J... Z...
C/
AVIVA PROTECTION JURIDIQUE ET FISCALE
CPAM DES BOUCHES DU RHÔNE
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Elsa X...
Me Y... françois ABEILLE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 13 Juillet 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 12/13554.
APPELANT
Monsieur J... Z... és-qualités de tuteur de Mohamed Ali Z..., en vertu d'un jugement du JT de Marseille en date du 01/08/2013 (10 ans)
né le [...] à Tunis-Tunisie de nationalité Française,
demeurant [...]
représenté par Me Jacques-antoine A... de l'ASSOCIATION A... B... I..., avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Laurence C..., avocat au barreau de MARSEILLE, Me Elsa X..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMEES
AVIVA PROTECTION JURIDIQUE ET FISCALE,
dont le siège social est [...] - [...]
représentée par Me Y... françois ABEILLE de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE
CPAM DES BOUCHES DU RHONE,
dont le siège social est [...]
défaillante
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 30 Octobre 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de:
Monsieur Olivier GOURSAUD, Président
Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller
Madame Anne VELLA, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Sylvaine MENGUY.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Décembre 2018.
ARRÊT
Réputé contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Décembre 2018,
Signé par Monsieur Olivier GOURSAUD, Président et Madame Sylvaine MENGUY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCÉDURE
Le 30 janvier 2004 Mohamed Ali Z... alors âgé de 16 ans qui traversait à pied la bretelle de sortie de l'autoroute A 557 à Marseille a été renversé par un véhicule automobile conduit par Mme Maria K... D... assurée auprès de la SA Aviva assurances.
Par jugement du 2 mai 2006 le tribunal de grande instance de Marseille a dit que Mme D... et la SA Aviva assurances étaient tenues de réparer les conséquences dommageables de cet accident, ordonné une expertise médicale de la victime confiée au docteur B..., ultérieurement remplacé par le docteur E..., et a condamné solidairement Mme D... et la SA Aviva assurances notamment à verser M. J... Z... agissant en qualité de représentant légal de son fils mineur Mohamed Z... une provision de 200'000 € à valoir sur la réparation du préjudice corporel de celui-ci.
Le 29 mai 2006 M. Mohamed Ali Z... a été placé sous la tutelle de son père.
Le docteur E... a établi son rapport le 8 septembre 2008.
Sur la base de ce rapport une transaction a été signée entre les parties le 9 décembre 2008 prévoyant le versement d'un capital de 1'074'598,42 € ainsi que de rentes trimestrielles l'une de 18'618,46 € pour le placement au centre des Alcides, l'autre de 2 548 € pour la tierce personne à domicile.
Par ordonnance du 5 janvier 2010 le juge de la mise en état a ordonné un complément d'expertise afin de préciser les besoins en tierce personne.
Par un nouveau rapport du 15 novembre 2010 l'expert a estimé que le retour de la victime au domicile de son père était possible compte tenu des aménagements réalisés et qu'en raison de son état de dépendance totale il devait bénéficier d'une tierce personne 24 heures sur 24, pour substitution le tiers du temps et pour surveillance et stimulation les deux tiers du temps et d'un fauteuil roulant électrique avec contrôle de l'environnement à domicile, d'une voiture aménagée pour permettre les déplacements et d'un accueil de jour ponctuel et temporaire à la journée de 9 heures à 17 heures dans l'établissement les Alcides.
Une étude architecturale réalisée à la demande de la SA Aviva assurances a donné lieu au dépôt d'un rapport d'expertise le 26 avril 2011 concluant à un coût estimatif d'adaptation architecturale de l'ordre de 107'500,52 €, un coût en besoins matériels et techniques restant à charge de l'ordre de 31'241,01 € avec un amortissement annuel de 6131,03 €, un coût d'adaptation de véhicule de l'ordre de 27'921,20 € avec un amortissement annuel de 3 988,74€, un différentiel d'acquisition de l'ordre de 21'963,35 € et de renouvellement annuel de l'ordre de 3 137,62 €.
Par actes délivrés les 15 et 30 octobre 2012 M. J... Z... agissant ès-qualités a assigné la SA Aviva assurances et la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône (CPAM) devant le tribunal de grande instance de Marseille pour obtenir la réparation des préjudices correspondant au frais d'aménagement du véhicule, aux frais d'aménagement du domicile, au coût en besoins matériels et techniques, aux frais divers et aux arrérages échus et à échoir de la tierce personne.
Par conclusions ultérieures M. J... Z... agissant ès*qualités a sollicité du tribunal qu'il constate l'aggravation situationnelle de l'état de son fils et qu'il condamne la SA Aviva assurances d'une part, à prendre en charge le surcoût lié au placement à compter du 1er janvier 2009 date d'apparition de l'aggravation jusqu'au 23 décembre 2015 à hauteur de la somme de 85'158,05 € et le surcoût de l'aide humaine lors des retours à domicile pour la période du 4 avril 2009 au 23 décembre 2015 d'un montant de 204'996 €, d'autre part, à lui verser 9 443,08 € au titre des frais de VSL à charge, 143'376,69 € au titre des frais d'aménagement du véhicule, 107'500,52 € au titre des frais d'aménagement du domicile, 268'488,50 € au titre du coût en besoins matériels et techniques, 3.365,05 € au titre des frais divers, enfin, à lui verser une indemnité au titre des frais irrépétibles.
Par jugement du 13 juillet 2017 le tribunal de grande instance Marseille a, au visa des articles 1 à 6 de la loi du 5 juillet 1985 :
- déclaré la décision commune et opposable à la CPAM,
- rejeté les demandes d'expertise formulées par la SA Aviva assurances et sa demande formulée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure,
- rejeté la demande indemnitaire de M. J... Z... agissant ès-qualités au titre des frais de coaching du projet de réadaptation,
- dit n'y avoir lieu à versement d'une somme quotidienne au titre des arrérages échus de la tierce personne du 16 septembre 2016 jusqu'au jour du jugement à intervenir,
- condamné la SA Aviva assurances à payer à M. J... Z... agissant ès qualités en deniers ou quittance compte tenu des provisions d'ores et déjà perçues avec intérêts au taux légal à compter du 30 octobre 2012 date de la demande en justice et anatocisme pour les intérêts dus pour au moins une année entière en application de l'article 1154 du code civil, les sommes de :
° 244'314 € au titre des arrérages échus de la tierce personne
° 3'969'396,90 € au titre des arrérages à échoir de l'assistance par tierce personne
° 85'158,05 € au titre du surcoût lié au placement aux Alcides
° 11'739,93 € au titre des autres frais divers permanents
° 138'023,91 € au titre des frais de véhicule adapté
° 107'500,52 € au titre des frais de logement adapté
° 258'027,80 € au titre des besoins matériels et techniques,
- condamné la SA Aviva assurances à verser à M. J... Z... agissant ès-qualités la somme de 1 500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté la demande formulée au titre de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 en matière d'exécution forcée,
- condamné la SA Aviva assurances aux dépens avec distraction,
- ordonné l'exécution provisoire,
- ordonné la communication du jugement aux juges des tutelles près les tribunaux d'instance de Marseille et de Martigues.
Par déclaration du 24 juillet 2017, M. J... Z... agissant ès qualités a interjeté appel général de cette décision.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
M. J... Z... agissant ès-qualités demande à la cour, en application de la loi du 5 juillet 1985, de :
' réformer le jugement,
statuant à nouveau
' condamner la SA Aviva assurances à lui verser les sommes suivantes
- au titre des arrérages échus de la tierce personne :
° du 23 décembre 2015 au 30 septembre 2017 : 357'144 €
° à parfaire par l'allocation d'une somme de 552 € par jour jusqu'à la décision à intervenir,
- au titre des arrérages à échoir de la tierce personne
° une rente annuelle de 201'480 € ce qui équivaut à un capital de 7'568'596,20 €,
' constater l'aggravation situationnelle et condamner la SA Aviva assurances à prendre en charge° le surcoût lié au placement à compter du 1er janvier 2009 date d'apparition de l'aggravation jusqu'au 23 décembre 2015 soit une somme de 85'158,05 €
° le surcoût de l'aide humaine lors des retours à domicile pour la période du 4 avril 2009 au 23 décembre 2015 d'un montant de 204'996 €,
' condamner la SA Aviva assurances à lui payer ès-qualités :
° 9 443,08 € au titre des frais de VSL à charge
° 143'376,69 € au titre des frais d'aménagement du véhicule
° 107'500,52 € au titre des frais d'aménagement du domicile
° 268'488,50 €au titre du coût en besoins matériels et techniques
° 3 365,05 € au titre des frais divers
° 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
' juger que les sommes allouées en principal seront assorties des intérêts au taux légal à compter de la demande en justice et que les intérêts seront capitalisés par année entière à compter de cette même date en application de l'article 1343-2 du code civil
' juger que dans l'hypothèse où à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées dans la décision à intervenir l'exécution forcée devra être réalisé par l'intermédiaire d'un huissier le montant des sommes par lui retenue en application de l'article A 444-32 de l'arrêté du 26 février 2016 fixant les tarifs réglementés des huissiers de justice devra être supporté par le débiteur en sus de l'application de l'article 700 du code de procédure civile
' condamner la SA Aviva assurances aux dépens avec distraction.
Il soutient que :
' sur la tierce personne depuis le retour à domicile
- depuis le 23 décembre 2015 M. Mohamed Ali Z... a quitté définitivement les Alcides et est rentré à domicile,
- dans son rapport du 15 novembre 2010 le docteur E... a précisé que le retour à domicile de M. Mohamed Ali Z... est possible dans la maison aménagée et adaptée à son handicap, qu'il est en état de dépendance totale et qu'il doit bénéficier d'une tierce personne 24 heures sur 24 ; en outre il est envisagé dans l'intérêt de la victime qu'un accueil de jour dans l'établissement les Alcides, ponctuel et temporaire à la journée de neuf heures à 17 heures dont la fréquence reste à déterminer, soit mis en place,
- les conditions prévues par la transaction du 9 décembre 2008 sont réunies ; en effet il est mentionné dans cet acte qu'en cas de retour à domicile définitif la rente liée au placement au centre les Alcides cessera d'être versée et les postes relatifs aux besoins en aide humaine à domicile ainsi qu'à l'aménagement du domicile seront réexaminés par voie d'expertise,
- M. Mohamed Ali Z... doit être indemnisé au titre la tierce personne à hauteur de 24 heures sur 24 à compter du retour à domicile,
- l'indemnisation doit être faite sur la base d'un coût horaire de 23 € sans qu'il y ait lieu de distinguer entre une aide humaine active et une aide humaine de surveillance ni à distinguer aide médicalisée ou aide non médicalisée ou aide de surveillance ; en effet les auxiliaires de vie devront tous avoir le même niveau de compétence car ils seront tous amenés durant leur temps d'intervention à effectuer tour à tour des actes de substitution , des actes de stimulation et des actes de surveillance et les différents services prestataires pratiquent un tarif unique pour les différents types d'interventions proposées en n'opérant de distinction qu'en fonction du moment de l'intervention en majorant les heures de nuit et des dimanches et jours fériés,
- le coût à échoir doit être capitalisé sur 365 jours en fonction du barème publié par la Gazette du palais le 26 avril 2016 au taux de 1,04 % soit 38,133 pour un jeune homme âgé de 29 ans à la date prévisible de liquidation en 2017,
- cette indemnisation devra être versée sous la forme d'un capital et ce dans la mesure où il n'y a aucun risque car la victime est sous la tutelle de son père qui ne peut réaliser seul que des actes d'administration ou des actes conservatoires,
' la rente trimestrielle pour la tierce personne échue lors des retours à domicile
- la transaction prévoit le règlement d'une rente lors des retours de la victime au domicile sur la base de retours effectués les fins de semaine du samedi neuf heures au dimanche 17 heures tous les 15 jours ce qui représente 832 heures par an avec un coût horaire de 12,25 €,
- M. Mohamed Ali Z... est rentré à son domicile plus régulièrement que prévu par le procès-verbal soit selon le décompte produit par le centre des Alcides durant 11'904 heures ; les versements par la SA Aviva assurances ont représenté 68'796 € sur la base d'un tarif horaire de 12,25 € retenu en 2008 qui ne correspond plus aux tarifs pratiqués à ce jour et rend impossible le recours à une aide humaine extérieure ; sur la base d'un tarif horaire de 23 € la somme due pour 11'904 heures est de 273'792 € dont à déduire la somme de 68'796 € ce qui représente un différentiel de 204'996 €,
' sur le remboursement des frais de placement au centre les Alcides
- aux termes de la transaction du 9 décembre 2008 la SA Aviva assurances s'est engagée à régler une rente trimestrielle d'un montant de 18'618,46 € au titre du placement au centre des Alcides; or depuis cette date les tarifs de ce centre ont augmenté ce qui réalise une aggravation situationnelle devant être indemnisée,
- la dépense engagée à ce titre est justifiée par factures,
' sur le coût du transport en VSL
- à compter du 14 février 2012 la sécurité sociale n'a plus pris en charge le coût des déplacements en VSL qui sont justifiés par les factures communiquées,
' sur les frais de véhicule adapté
- ces frais ont été déterminés par M. F... architecte spécialisé ; le différentiel d'acquisition de 21'963,35 € avec un renouvellement annuel de 3 137,62 € doit être capitalisé en fonction d'un euro de rente de 38,696 pour une victime âgée de 27 ans lors du premier renouvellement,
' Sur les frais d'aménagement du domicile
- ils doivent être alloués sur la base du rapport de M. F... qui a chiffré la dépense à 107'500,52€,
' sur les besoins matériels et aide technique
- ils ont été chiffrés par M. F... et doivent être capitalisés en fonction d'un euro de rente de 38,696 pour une victime âgée de 27 ans lors du premier renouvellement,
' Sur les frais divers
- il s'agit des honoraires des médecins conseil et autres techniciens qui ont assisté M. Mohamed Ali Z... au cours des diverses aux opérations d'expertise et des frais de coaching du projet de réadaptation.
La SA Aviva assurances demande à la cour dans ses conclusions du 16 novembre 2017, en application de la loi du 5 juillet 1985 et des articles 2044 et 2052 du code civil, de :
' constater les modalités du règlement transactionnel intervenu entre les parties selon protocole régularisé le 9 décembre 2008
' confirmer le jugement et allouer à M. J... Z... agissant ès-qualités d'administrateur légal de son fils majeur sous tutelle M. Mohamed Ali Z... les sommes suivantes
- 77'028 € au titre des surcoûts de l'aide humaine lors des retours à domicile pour la période du 4 avril 2009 au 23 décembre 2015
- 9 443,08 € s'agissant du poste frais de transport en VSL
- 138'023,91 € au titre des frais de véhicule adapté
- 107'500,52 € au titre des frais de logement adapté
- 258'027,80 € au titre des besoins matériels et techniques
- 2 296,85 € au titre du poste frais divers,
' infirmer le jugement et allouer
- s'agissant des besoins en aide humaine
° au titre des arrérages échus de la tierce personne à compter du retour à domicile 23 décembre 2015 et jusqu'au 31 décembre 2017 la somme de 196'687,54 €
° au titre des arrérages à échoir de la tierce personne une rente trimestrielle de 26'827,50€ qui sera servie à compter du 1er janvier 2018 avec revalorisation selon les modalités définies par la loi n° 74-1118 du 27 décembre 1974 modifiée par l'article 43 de la loi du 5 juillet 1985 et selon les coefficients de revalorisation prévus à l'article L. 455 du code de la sécurité sociale (devenu article L. 434-17) et suspension en cas d'hospitalisation ou de placement dans toute structure d'hébergement médicalisée ou non supérieure à une durée de 45 jours en continu et seulement à compter du 46e jour de cette hospitalisation ou de ce placement,
' réformer le jugement et juger que les indemnités allouées porteront intérêts à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir,
' liquider les préjudices de M. Mohamed Ali Z... en deniers ou quittance compte tenu des multiples règlements qu'elle a réalisés en capital et sous la forme de rentes,
' statuer ce que de droit sur les dépens.
Elle soutient que :
' sur les demandes formées au titre du poste d'assistance par tierce personne
- il résulte des articles 480 du code de procédure civile et 1351, 2044 et 2052 du code civil, que la demande d'indemnisation de l'assistance par tierce personne selon un coût horaire de 23 € porte atteinte à l'autorité de la chose jugée attachée à la transaction du 9 décembre 2008 et qu'en conséquence un règlement sous la forme d'une rente des arrérages à échoir de la rente s'impose,
- en effet les parties ont retenu à la fois un taux horaire de 12,25 € pour indemniser la tierce personne future sur un nombre d'heures correspondant la vie durant de la victime au retour à domicile durant les week-ends et tous les 15 jours et une révision de ce poste de préjudice en cas de retour à domicile définitif subordonnée à une nouvelle expertise,
- il s'agissait donc d'une révision du nombre d'heures et en aucun cas d'une révision du taux horaire puisque le recours à une nouvelle expertise ne pouvait être destiné qu'à quantifier le nombre d'heures,
- le coût horaire de 12,25 € a été accepté par les parties comme servant de base à l'indemnisation de ce poste de préjudice futur et viager et ainsi depuis le 31 mars 2009 c'est ce taux horaire qui a été retenu pour le versement de la rente trimestrielle qui a été allouée à la victime au titre de la tierce personne future,
- en retenant ce taux horaire et sur la base de retours à domicile intervenant le week-end du samedi 9 heures au dimanche 17 heures tous les 15 jours ce qui représente pour la période échue jusqu'au 22 décembre 2015 la somme de 145'824 € dont à déduire les sommes versées sous forme de rente durant la même période à hauteur de 68'796 € ; le solde dû est donc de 77'028€,
- pour la période à échoir à compter du 23 décembre 2015 il est dû sur la base de 24 heures durant 741 jours et d'un tarif horaire de 12,25 € une somme de 217'854 € dont à déduire les rentes qu'elle a versées de 21'166,46 € ce qui représente un solde de 196'687,54 €,
- le versement sous forme de rente s'impose car l'accueil de jour à instaurer dans l'intérêt de la victime est de nature à modifier les temps de présence au domicile et donc les besoins en aide humaine, en outre il n'est pas démontré que M. J... Z... aujourd'hui âgé de 68 ans a la capacité de gérer les sommes colossales qui pourraient être versées en capital et une indemnisation sous forme de rente permet une meilleure adaptation aux besoins de la personne handicapée qui sont toujours évolutifs et permet de la protéger,
' sur les frais d'aménagement du véhicule
- aucune facture justificative de l'achat d'un véhicule et de son aménagement n'a été produite cependant il est établi par le listing des permissions de sortie du centre d'hébergement que dès avril 2009 M. J... Z... est venu chercher son fils sans avoir recours à un VSL ; au rythme du renouvellement tous les sept ans il doit être appliqué un euro de rente viagère pour un homme de 29 ans en 2017 qui est l année prévisible du renouvellement fixée à dire d'expert,
' sur les besoins en matériels et techniques
- aucune facture justificative de l'achat des matériels et techniques envisagés n'est produite permettant de calculer le capital constitutif au titre du renouvellement ; il y a donc lieu de retenir un euro de rente viagère pour un homme âgé de 30 ans en 2017,
' sur les frais divers
- la somme demandée au titre des honoraires de M. G... ergothérapeute comprend des frais de repas pour un montant de 35 € qui sont sans relation directe avec la mission d'expertise et il n'est pas justifié du contenu du coaching réalisé en mars et avril 2014 par M. G... sous couvert de la société Réadapt' experts conseils,
' sur les intérêts des sommes allouées
- en application de l'article 1231-7 alinéa 2 nouveau du code civil et en l'état de la réformation partielle du jugement déféré les indemnités allouées porteront intérêts à compter du jour de l'arrêt à intervenir.
La CPAM assignée par acte d'huissier du 27 septembre 2017 délivré à personne habilitée et contenant dénonce de l'appel n'a pas constitué avocat.
Par courrier du 27 octobre 2017 elle a indiqué que compte tenu de la date des faits les prestations étant trop anciennes elle ne pouvait chiffrer sa créance.
L'arrêt sera réputé contradictoire conformément aux dispositions de l'article 474 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Le docteur E... a indiqué dans son rapport du 15 novembre 2010 que :
- une maison a été achetée par M. J... Z... au nom de son fils ; elle est aménagée et adaptée au handicap de M. Mohamed Ali Z... (les aménagements ont été réalisés grâce aux conseils d'un architecte et d'un ergothérapeute)
- le retour de M. Mohamed Ali Z... paraît possible au domicile compte tenu de son état neurologique et des aménagements réalisés dans la maison où il doit habiter
- M. Mohamed Ali Z... est en état de dépendance totale ; il doit bénéficier d'une tierce personne 24 heures sur 24 qui pourra être répartie de la façon suivante :
- tierce personne de substitution : 8 heures par 24 heures
- tierce personne de surveillance et de stimulation : 16 heures par 24 heures
- M. Mohamed Ali Z... aura besoin lorsqu'il sera à son domicile d'un fauteuil roulant électrique adapté avec contrôle de l'environnement (devis joint)
- il est nécessaire également qu'il puisse bénéficier d'une voiture aménagée adaptée à son handicap pour permettre les déplacements,
- il est envisagé pour l'intérêt de la victime qu'un accueil de jour dans l'établissement les Alcides ponctuel et temporaire à la journée « de neuf heures à 17 heures » dont la fréquence reste à déterminer soit mise en place.
Il est acquis aux débats que depuis le 23 décembre 2015 M. Mohamed Ali Z... est venu vivre à son domicile.
Par acte du 9 décembre 2008 les parties ont signé un «procès-verbal de transaction loi numéro 85/677 du 5 juillet 1985» par lesquelles elles ont précisé que sur les bases des conclusions du rapport médical du 8 septembre 2008 établi contradictoirement entre le docteur E... et le docteur H... l'indemnité revenant à M. Mohamed Ali Z... est fixée d'un commun accord à la somme de 1'074'598,42 € et que cette indemnité est convenue de gré à gré pour solde de tout compte à titre de transaction dans les conditions prévues tant par les articles 2044 et suivants du code civil que par la loi numéro 85-677 du 5 juillet 1985.
Cet accord détaille l'indemnité dans un tableau qui comporte notamment les indications suivantes :
- assistance tierce personne : placement aux Alcides du 31 août 2006 au 31 décembre 2008 186'026,42 € (28 mois × 500 €)
- assistance tierce personne placement aux Alcides (frais futurs) versée sous forme de rente à compter du 31 mars 2009 : 6 206,15 € ×3 mois = 18'618,46 € soit une rente trimestrielle de 18'618,46 €
- assistance tierce personne à domicile du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008 : 32 heures × 12,25 € × 26/an
- assistance tierce personne à domicile (frais futurs) versée sous forme de rente à compter du 31 mars 2009 : 32 heures × 12,25 € × 26/an = 10'192 € d'annuités soit une rente trimestrielle de 2 548 €.
La convention précise en outre :
- sous le paragraphe intitulé «Assistance tierce personne : modalités d'exécution des engagements» que la compagnie Aviva s'engage à régler sous forme de rente versée trimestriellement à terme échu à compter de la réception d'un certificat de vie établi par le médecin traitant au nom de M. Mohamed Ali Z... :
- une rente trimestrielle pour le placement au centre des Alcides de 18'618,46 € dont le montant est égal au quart du montant de la rente annuelle (74'473,84 €) indexée suivant les dispositions de la loi du 27 décembre 1974 modifiée par l'article 43 de la loi du 5 juillet 1985
- et une rente trimestrielle pour la tierce personne à domicile de 2 548 € dont le montant est égal au quart du montant annuel de la rente (10'192 €) indexée suivant les dispositions de la loi du 27 décembre 1974 modifiée par l'article 43 de la loi du 5 juillet 1985
- sous le paragraphe « En cas de retour à domicile définitif » que la rente liée au placement au centre des Alcides cessera d'être versée et que les postes relatifs aux besoins en aide humaine à domicile ainsi qu'à l'aménagement du domicile seront réexaminés par voie d'expertise.
Sur l'assistance par tierce personne
Sur le coût de la tierce personne
Il ressort des termes de la transaction que les parties ont envisagé une modification possible des modalités de prise en charge de M. Mohamed Ali Z... avec un retour à domicile et une redéfinition consécutive de ses besoins d'aide à domicile sur la base d'une nouvelle expertise, mais n'ont pas entendu modifier le coût horaire d'indemnisation de la tierce personne étant précisé qu'il ne peut être utilement soutenu que le terme 'besoin' implique une réévaluation du tarif horaire.
La demande de M. Mohamed Ali Z... tendant à ce que l'indemnisation de l'assistance par tierce personne soit faite sur la base d'un tarif horaire de 23 € doit en conséquence être rejetée conformément aux articles 2044 et 1103 du code civil.
En revanche compte tenu d'une part, de la clause d'indexation mentionnée dans la transaction qui correspond à l'indexation prévue aux articles L. 434-15, L. 434-17 et L.161-25 du code de la sécurité sociale (revalorisation annuelle sur la base d'un coefficient égal à l'évolution de la moyenne annuelle des prix à la consommation, hors tabac, calculée sur les douze derniers indices mensuels de ces prix publiés par l'Institut national de la statistique et des études économiques l'avant-dernier mois qui précède la date de revalorisation des prestations concernées) et, d'autre part, du principe d'évaluation du préjudice au jour où la cour statue, le décompte des sommes dues au titre de la tierce personne doit être recalculé sur la base du taux horaire actualisé qui est de 14 €.
Sur la tierce personne échue lors des retours à domicile du 4 avril 2009 au 23 décembre 2015
Eu égard aux éléments qui précèdent l'indemnité est de 166 656 € (11 904 heures x 14€).
Il y a lieu de déduire les sommes versées par la SA Aviva assurances soit un total de 68.796 € admis par les deux parties.
Le solde dû à ce titre est de 97 860 € (166 656 € - 68 796 €).
Sur la tierce personne depuis le retour complet à domicile
Les deux parties s'accordent pour calculer l'indemnité sur 365 jours.
- Tierce personne échue
- du 23 décembre au 31 décembre 2015
3 024 € (14 € x 24 heures x 9 jours)
- année 2016
122 640 € (14 € x 24 heures x 365 jours)
- année 2017
122 640 €
- du 1er janvier 2018 à ce jour 13 décembre 2018
116 592 € (14 € x 24 heures x 347 jours).
- total 364 896 € (3 024 € + 122 640 € + 122 640 € + 116 592 €).
Il y a lieu de déduire la somme non contestée de 21 166,46 € versée par la SA Aviva assurances sur la période du 1er janvier 2016 au 31 mars 2016 ; le solde dû est donc de 343 729,54 € (364 896 € - 21 166,46 €)
- Tierce personne à échoir
L'indemnité doit être calculée par capitalisation annuelle en fonction d'un euro de rente viagère pour un homme âgé de 31 ans à la liquidation selon le barème publié par la Gazette du Palais le 26 avril 2016 soit 36,408 soit 4 465 077,12 € (24 heures x 14 € x 365 jours x 36,408).
Sur les modalités de versement de l'indemnité de tierce personne
Le versement de l'indemnité se fera sous la forme d'un capital pour la période passée ce qui représente une indemnité de 441 589,54 € (97 860 € + 343 729,54 €).
En revanche pour la période à échoir, le versement sous la forme d'une rente est plus protecteur des intérêts de la victime car il garantit qu'elle disposera sa vie durant des fonds lui permettant de faire face à une dépense s'échelonnant dans le temps et permet d'adapter l'indemnisation à l'évolution de ses besoins.
Le capital représentatif de la rente à échoir d'un montant de 4 465 0077,12 € correspond à une rente trimestrielle de 30 660 € (4 465 077,12 € / 36,408 / 12 mois x 3 mois) à indexer conformément à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale et dont le versement sera suspendu en cas d'hospitalisation prise en charge par un organisme de sécurité sociale d'une durée supérieure à 45 jours.
Sur les frais de placement aux Alcides
Eu égard aux termes de la transaction précitée selon laquelle la SA Aviva assurances versera une rente trimestrielle pour le placement au centre des Alcides de 18'618,46 € dont le montant est égal au quart du montant de la rente annuelle (74'473,84 €) indexée suivant les dispositions de la loi du 27 décembre 1974 modifiée par l'article 43 de la loi du 5 juillet 1985, le montant annuel actualisé à ce jour est de 81 999 €.
Le décompte pour les années 2009 à 2015 est ainsi de :
- coût du placement : 81 999 € x 7 ans = 573 993 €
- versé par la SA Aviva assurances : 521 316,88 €
- solde dû à la victime : 52 676,12 €.
Sur le coût du transport en VSL
L'indemnité de 9 443,08 € allouée par le tribunal n'est critiquée par aucune partie en cause d'appel, cette disposition du jugement est confirmée.
Sur les frais d'aménagement du véhicule
Les parties s'accordent sur le chiffrage donné par M. F... soit un surcoût d'acquisition de 21.963,35 € et un coût de renouvellement annuel de 3 137,62 € pour un renouvellement tous les sept ans.
La date à laquelle le véhicule adapté a été acheté n'est pas connue faute de remise d'une facture ; la SA Aviva assurances observe toutefois que dès avril 2009 M. J... Z... venait chercher son fils aux Alcides sans avoir recours à un VSL et accepte de fixer la date du premier renouvellement lorsque la victime a atteint l'âge de 30 ans soit en 2017 ; le prochain renouvellement interviendra en 2024 date à partir de laquelle la dépense annuelle doit être capitalisée ; compte tenu de ces éléments l'indemnité est de :
- coût initial : 21 963,35 €
- période à échoir : par capitalisation annuelle en fonction d'un euro de rente viagère pour un homme âgé de 37 ans au jour de la liquidation soit 32,828 ce qui représente une somme de 103.001,79 € (3 137,62 € x 32,828).
- total : 124 965,14 € (21 963,35 € + 103 001,79 €) augmenté à 138 023,91 € compte tenu de l'offre de la SA Aviva assurances.
Le jugement est donc confirmé.
Sur les frais de logement adapté
L'indemnité de 107 500,52 € allouée par le tribunal n'est critiquée par aucune partie en cause d'appel ; le jugement est confirmé sur ce point.
Sur les aides et matériels techniques
M. F... a fixé le coût total de ces aides et matériels à 31 241,01 € avec un amortissement annuel de 6 131,03 € ce qui est accepté par les deux parties ; en admettant que le premier renouvellement intervienne à la date de la liquidation ainsi qu'offert par la SA Aviva assurances l'indemnité est de :
- coût initial : 31 241,01 €
- période à échoir : par capitalisation annuelle en fonction d'un euro de rente viagère pour un homme âgé de 32 ans au jour de la liquidation soit 35,822 ce qui représente une somme de 219 625,76 € (6.131,03 € x 35,822).
- total : 250 866,77 € (31 241,01 € + 219 625,76 €) augmenté à 258 027,80 € compte tenu de l'offre de la SA Aviva assurances.
Le jugement est donc confirmé.
Sur les frais divers
M. J... Z... agissant ès-qualités sollicite le remboursement de trois factures émises par M. Pascal G... le 19 janvier 2011 d'un montant de 491,96 € le 17 janvier 2014 d'un montant de 1 839,89 € incluant des frais de repas de 35 € et du 30 avril 2014 d'un montant de 432 € correspondant à des frais de coaching de projet de réadaptation ; les sommes de 35 € et de 432 € dont il n'est pas établi qu'elles correspondent à des dépenses en lien direct et certain avec l'accident ne donneront pas lieu à indemnisation.
La somme due par la SA Aviva assurances au titre des frais divers est donc de 2.296,85€, le jugement est confirmé sur ce point.
Sur le point de départ des intérêts
En application de l'article 1231-7 du code civil les indemnités allouées par le premier juge au titre des frais de transport en VSL, frais divers, frais de véhicule adapté, frais de logement adapté et frais d'aides et matériels techniques porteront intérêts à compter du prononcé du jugement, M. J... Z... agissant ès qualités ne rapportant pas la preuve d'un préjudice supplémentaire non réparé ; l'indemnité allouée au titre de la tierce personne échue portera intérêts à compter du jugement du 13 juillet 2017 sur 244 314 € et à compter de l'arrêt sur 197.275,54 € et l'indemnité allouée au titre du placement aux Alcides portera intérêts légaux à compter du présent arrêt.
Il y a lieu de faire droit à la demande fondée sur l'article 1343-2 du code civil à compter des mêmes dates sur les mêmes montants.
Sur les demandes annexes
Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles doivent être confirmées.
La SA Aviva assurances qui succombe partiellement dans ses prétentions et qui est tenue à indemnisation supportera la charge des dépens d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile.
L'équité commande d'allouer à M. J... Z... agissant ès-qualités une indemnité de 1 500 € au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.
M. J... Z... agissant ès-qualités ne peut exiger, en cas de recours à l'exécution forcée pour obtenir paiement des sommes allouées, que les frais de recouvrement et d'encaissement visés à l'article A 444-32 de l'arrêté du 26 février 2016 fixant les tarifs réglementés des huissiers de justice en matière civile et commerciale soient supportés par les débiteurs, ce texte les mettant à la charge du créancier.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
- Confirme le jugement
Sauf sur l'indemnité allouée au titre du surcoût lié au placement aux Alcides, sur le montant des indemnités allouées au titre de la tierce personne et sur le point de départ des intérêts,
Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,
- Condamne la SA Aviva assurances à verser à M. J... Z... agissant ès-qualités de tuteur de son fils M. Mohamed Ali Z... au titre des frais d'assistance par tierce personne :
* un capital de 441 589,54 € outre les intérêts légaux sur la somme de 244 314 € à compter du 13 juillet 2017 et sur la somme de 197.275,54 € à compter du présent arrêt, avec application de l'article 1343-2 du code civil à compter des mêmes dates et sur les mêmes montants,
* une rente trimestrielle de 30 660 € à indexer conformément à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale et dont le versement sera suspendu en cas d'hospitalisation prise en charge par un organisme de sécurité sociale d'une durée supérieure à 45 jours,
- Condamne la SA Aviva assurances à verser à M. J... Z... agissant ès-qualités de tuteur de son fils M. Mohamed Ali Z... au titre du placement aux Alcides la somme de 52.676,12 € outre les intérêts au taux légal à compter de ce jour et capitalisation dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,
- Dit que les indemnités allouées par le jugement du 13 juillet 2017 et confirmées par le présent arrêt produiront intérêts légaux à compter du jugement et capitalisation dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,
- Condamne la SA Aviva assurances à verser à M. J... Z... agissant ès qualités de tuteur de son fils M. Mohamed Ali Z... la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
- Déboute M. J... Z... agissant ès qualités de tuteur de son fils M. Mohamed Ali Z... sa demande au titre des droits d'encaissement et de recouvrement prévus à l'article A 444-32 de l'arrêté du 26 février 2016,
- Condamne la SA Aviva assurances aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT