COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-5
( anciennement dénommée 4e Chambre A)
ARRÊT AU FOND
DU 17 JANVIER 2019
lb
N°2018/ 29
Rôle N° RG 17/10842 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BAVJ5
Sylvia X... veuve J...
C/
N... Y...
Copie exécutoire délivrée le :
à :
Me Z... K...
SELARL LEXAVOUE A... I... IMPERATORE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 05 Mai 2017 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 12/08869.
APPELANTE
Madame Sylvia X... veuve J...
appelante et intimée
demeurant [...]
représentée par Me Z... K..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Geneviève L..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Laurent B..., avocat au barreau de DRAGUIGNAN
INTIMEE
Madame N... Y...
intimée et appelante
demeurant [...]
représentée par la SELARL LEXAVOUE A... I... IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Michel A..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Wilfried C..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Novembre 2018 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laure BOURREL, Président, et Monsieur Luc BRIAND, Conseiller, chargés du rapport.
Madame Laure BOURREL, Président, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de:
Madame Laure BOURREL, Président
Madame Sophie LEONARDI, Conseiller
Monsieur Luc BRIAND, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Janvier 2019.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Janvier 2019.
Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par acte authentique du 17 juin 1981, Madame Léa Y... veuve D... aux droits de laquelle vient Madame N... Y..., a consenti à Monsieur E... un bail emphytéotique de 26 ans sur un terrain composé de plusieurs parcelles d'une surface d'environ 46 ha, situé sur la commune de [...], presqu'île de [...]. L'acte mentionnait que le bail était conclu à usage de création et exploitation d'un camping-caravaning, village de chalets de vacances, terrains de sport et de jeux, piscine et attractions diverses, les aménagements, constructions et routes nécessaires étant à la charge du preneur.
Par acte notarié du 11 août 1982, auquel est intervenue Madame Y..., Monsieur E... a cédé ce bail pour une partie de terrain, soit 13 ha 83 a et 20 ca à Monsieur Bernard J... , la durée du bail étant prorogée à 60 ans à compter du 1er juillet 1982, et le bail pour le surplus étant résilié entre Monsieur E... et Madame Y.... L'objet du bail n'était pas modifié mais il était ajouté que Monsieur J... et ses ayants droits étaient autorisés à créer et exploiter tout commerce de leur choix.
Le loyer annuel était fixé à 17772,12 francs, révisable annuellement et indexé sur l'indice du coût de la construction.
Par exploit du 15 juin 2004, Madame N... Y... a formé une demande en révision du loyer.
Après expertise, par jugement du 14 avril 2009, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Draguignan a fixé le loyer révisé à la somme de 90 000 € à compter du 15 juin 2004 avec intérêts au taux légal depuis le 28 mars 2006, et a condamné Madame Sylvia X... veuve J... à payer à Madame Y... la somme de 3000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par arrêt du 20 janvier 2012, la 11e chambre A de la cour d'appel de céans a déclaré irrecevable l'appel en intervention forcée de la société SBDF (locataire gérant), a rejeté la demande au titre de l'article 700 du CPC de la société SBDF contre Madame Y..., a rejeté la demande en nullité du jugement du 14 avril 2009 du juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Draguignan, a confirmé ce jugement, a condamné Madame X... veuve J... à payer à Madame Y... la somme de 2500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.
Par arrêt du 19 février 2014, la troisième chambre civile de la Cour de Cassation a cassé et annulé l'arrêt rendu le 20 janvier 2012 dans toutes ses dispositions, a dit n'y avoir lieu à renvoi, a rejeté la demande de Madame Y... de révision triennale de loyer commercial pour fixation au montant annuel de 90 000 €, a condamné Madame Y... aux dépens de l'instance au fond et de l'instance en cassation, et a condamné Madame Y... à payer à Madame X... veuve J... la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les motifs de la cassation sont que les dispositions des articles L. 145-3 et L. 145 -33 du code de commerce ne s'appliquent pas au loyer du bail emphytéotique prévu à l'article L. 451-3 du code rural et de la pêche maritime aux termes duquel le preneur, titulaire de droits réels pendant sa durée, ne bénéficie d'aucun droit au renouvellement ni à indemnité d'éviction.
Sans attendre cette décision, Madame Y... a mis à exécution l'arrêt du 20 janvier 2012, par une saisie exécution et une procédure de saisie immobilière.
Sur autorisation présidentielle du 15 novembre 2012, Madame Y... a assigné à jour fixe Madame Sylvia X... veuve J... afin qu'il soit constaté que sa créance s'élevait à la somme de 832 976,13 euros, qu'il soit constaté son non-paiement, que soit prononcée la résolution du bail emphytéotique pour non paiement, que soit ordonnée l'expulsion de Madame Sylvia X... veuve J... et de tout occupant de son chef, que Madame Sylvia X... veuve J... soit condamnée au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle de 10 124,69 euros (loyer annuel 121 496,28 euros) jusqu'à son départ définitif, outre sa condamnation à lui payer la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du CPC.
Après l'arrêt de la Cour de Cassation, Madame N... Y... a maintenu sa demande de résolution du bail emphytéotique sur le fondement de l'article 451-5 du code rural et de la pêche maritime, sa demande d'expulsion, une indemnité d'occupation mensuelle de 10 124,69 euros, un article 700 de 5000 €, et a sollicité en outre la somme de 100 000 € à titre de dommages intérêts.
Eu égard à l'arrêt de la Cour de Cassation, Madame Sylvia X... veuve J... a sollicité la somme de 132 999,16 euros au titre de la répétition de l'indu, la somme de 26 073, 19 euros à titre de dommages-intérêts, la somme de 80 000 € à titre de dommages-intérêts, la somme de 150 000 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral, financier et personnel, la somme de 150 000 € de dommages intérêts pour préjudice moral, financier et personnel relatif à la procédure de saisie immobilière, outre la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance du 29 février 2016, le juge de la mise en état a condamné Madame N... Y... à verser à Madame Sylvia X... veuve J... la somme provisionnelle de 132 999,16 euros au titre des loyers versés avant l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 19 février 2014, et rejeté la demande de provision au titre des dommages et intérêts.
Par jugement du 5 mai 2017, le tribunal de grande instance de Draguignan a :
-condamné Madame N... Y... à verser à Madame Sylvia X... veuve J... la somme de 132 999,16 euros correspondant aux loyers versés antérieurement à l'arrêt de la Cour de Cassation rendu le 19 février 2014 et non dus,
-débouté les parties de leurs autres demandes,
-condamné Madame N... Y... à verser à Madame Sylvia X... veuve J... la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
-ordonné l'exécution provisoire,
-condamné Madame N... Y... aux dépens.
Madame Sylvia X... veuve J... a relevé appel de cette décision par déclaration du 8 juin 2017, procédure n° RG 17/10842, et Madame N... Y... par déclaration du 15 juin 2017, procédure n° RG 17/11378.
Les deux procédures ont été jointes par ordonnance du 27 juin 2017 et se sont poursuivies sous le numéro RG 17/10842.
Par conclusions du 9 novembre 2017, qui sont tenues pour entièrement reprises, Madame Sylvia X... veuve J... demande à la cour de :
« Vu les dispositions notamment des articles L. 451-5 et L. 491-1 du code rural,
Vu l'article L. 111-10 du code des procédures civiles d'exécution,
Vu l'arrêt de la Cour de Cassation en date du 19 février 2014,
Vu l'absence de créances et de titre exécutoire permettant de condamner Madame X... veuve J... ,
Vu le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Draguignan le 5 mai 2017, dont appel,
Par voie de conséquence,
Confirmer le jugement en litige en ce qu'il a :
-débouté Madame Y... de l'ensemble de ses demandes,
-condamné Madame N... Y... à verser à Madame M... la somme de 132 999,16 euros, correspondant aux loyers versés antérieurement à l'arrêt de la Cour de Cassation en date du 19 février 2014,
-condamné Madame Y... au paiement de la somme de 2000 € outre les dépens.
Par même voie de conséquences,
Réformer le jugement en ce qu'il a débouté Madame M... de ses demandes.
Faire droit aux demandes de Madame M... .
Condamner Mademoiselle N... Y... à payer à Madame Sylvia X... veuve J... les sommes de :
-26 073,19 euros de dommages et intérêts relatifs à l'ensemble des articles 700 réglés,
-158 097,41 euros de dommages et intérêts relatifs à l'ensemble des frais de justice, dépens, frais d'exécution et de défense de ses intérêts dans le cadre des multiples procédures,
-50 000 € de dommages et intérêts pour préjudice moral et personnel relatif à la procédure de saisie immobilière,
-20 000 € de dommages et intérêts pour préjudice moral et financier au titre des effets par ricochet auprès des sous-locataires.
Débouter Madame Y... de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
Par même voie de conséquence, prendre acte de ce que Madame Y... abandonne l'ensemble de ses demandes reconventionnelles.
Y faire droit.
Condamner Mademoiselle N... Y... à payer à Madame Sylvia X... veuve J... la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du CPC, outre les frais et dépens.
Par conclusions du 23 octobre 2018, qui sont tenues pour entièrement reprises, Madame N... Y... demande à la cour de :
« Vu l'article L. 111 -11 du code des procédures civiles d'exécution,
Vu l'article 32 -1 du code de procédure civile,
Vu l'article 1240 du Code civil,
Débouter Madame Sylvia X... veuve J... de toutes ses demandes, fins et conclusions.
Infirmer la décision du tribunal de grande instance de Draguignan du 5 mai 2017 en ce qu'elle a jugé que Mademoiselle Y... ne faisait état d'aucun manquement de Madame X... veuve J... à ses obligations pouvant justifier que soit prononcée la résiliation du bail.
Infirmer la décision du tribunal de grande instance de Draguignan du 5 mai 2017 en ce qu'elle a jugé que Mademoiselle Y... était condamnée à payer la somme de 132 999,16 euros.
Infirmer la décision du tribunal de grande instance de Draguignan du 5 mai 2017 en ce qu'elle a jugé que la demande de dommages et intérêts formulée par Mademoiselle Y... devait être rejetée car Madame X... aurait finalement payé une somme excédant les loyers dus.
En conséquence,
Dire et juger que Mademoiselle Y... a réglé la somme de 138 700 € conformément à l'ordonnance d'incident du 29 février 2016, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Draguignan qui l'y obligeait.
Prononcer la résolution du bail emphytéotique au visa de l'article L. 451 -5 du code rural et de la pêche maritime.
Ordonner l'expulsion de Madame X... veuve J... ou tout occupant de son chef.
Dire que faute pour Madame X... veuve J... de rendre libre les lieux sis à [...] (83), [...], lieux-dits [...], il sera procédé à son expulsion et celle de tout occupant de son chef avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier, si besoin est, et à la séquestration du mobilier sur place ou au garde-meuble à ses frais et risques.
Condamner Mademoiselle (sic) X... veuve J... à une indemnité d'occupation mensuelle de 6941,06 euros jusqu'à son départ définitif.
Condamner Madame Sylvia X... veuve J... à payer à Madame Y... la somme de 100 000 € de dommages et intérêts au titre de son préjudice moral.
Confirmer le surplus de la décision du tribunal de grande instance de Draguignan du 5 mai 2017.
Condamner Madame Sylvia X... veuve J... à 5000 € d'article 700 du CPC et aux dépens , ceux d'appel distraits au profit de Maître Pierre-Yves G..., membre de la Selarl Lexavoué Aix-en-Provence, avocats associés, aux offres de droit. »
L'instruction de l'affaire a été close le 6 novembre 2018.
MOTIFS
Sur la résiliation du bail emphytéotique
Madame N... Y... a abandonné sa demande de résiliation du bail emphytéotique pour non paiement de deux loyers consécutifs, mais sollicite ladite résiliation pour manquement de l'emphytéote à ses obligations.
L'article L. 451-5 alinéa 2 du code rural et de la pêche maritime énonce que « La résolution peut également être demandée par le bailleur en cas d'inexécution des conditions du contrat ou si le preneur a commis sur le fonds des détériorations graves. »
Il résulte du bail emphytéotique du 11 août 1982 reprenant les termes du bail du 17 juin 1981, qu'il était conclu en vue de la création et l'exploitation d'un camping-caravaning et d'un village de chalets de vacances, terrains de sport et de jeux, piscine et attractions diverses à charge d'y faire à ses frais les routes, aménagements et constructions nécessaires.
Dans cet acte, il était précisé que Monsieur J... avait obligation de :
'faire les travaux d'alimentation en eau et en électricité de la partie louée,
'entretenir en bon état les infrastructures existantes et celles qui seraient réalisées,
'jouir des biens loués en bon père de famille, ne rien faire qui puisse troubler le voisinage, et exercer son activité en conformité avec les prescriptions légales et administratives pouvant s'y apporter.
Il n'a été installé qu'un village de chalets, avec piscine et restaurant, qui s'appelle « [...] ». Ne sont loués que les emplacements sur lesquels les sous-locataires installent des chalets en principe démontables qui leur appartiennent.
La lecture du pré-rapport du 26 septembre 2008 de Madame N... H..., expert, qui avait été commise par ordonnance du 7 mars 2007 pour évaluer le loyer à réviser, révèle que les baux des 17 juin 1981 et 11 août 1982 avaient été précédés d'un premier bail signé en 1964 pour 23 ans, et qu'à cette occasion, le permis de construire sollicité par Monsieur E... avait été obtenu en 1959 pour l'installation de 100 chalets de vacances démontables.
Cette autorisation pour 100 chalets démontables est confirmée par le jugement du tribunal administratif de Nice du 22 février 1963, et par l'extrait du rapport de présentation du PLU de la commune de [...] de février 2013 qui fait référence à une autorisation d'implantation de 100 mobil-homes, proposant le classement des parcelles sur lesquelles est installé [...] en zone Np3 (Parc résidentiel de loisirs), et la rectification du PLU approuvé le 18 juin 2009 qui les avait classés en Nc (camping caravaning). La motivation de la ratification du PLU est la possibilité de contraindre l'exploitant à se mettre en conformité.
Madame H... note dans son pré-rapport du 26 septembre 2008, qu'elle a dénombré 116 chalets dont 107 bungalows en location, dont 13 non démontables ou avec une extension non démontable, que sur deux parcelles sont installés deux bungalows, que certains locataires sont installés à l'année sur le parc, soit 44 d'après les lignes téléphoniques fixes répertoriées, qu'il y a même 5 entreprises qui y sont domiciliées, que les locataires à l'année sous-louent leur chalet, que certains chalets dépassent les 35 m² habitables autorisés, que le débroussaillage n'est pas fait sur tout le domaine, qu'il y a absence de mise aux normes et qu'il y a un manque d'entretien général.
Surtout, Mme H... souligne que Le Roche Parc n'est pas répertorié ni auprès des services préfectoraux, ni auprès des services de la DDE, ni comme camping, ni comme village de vacances. A la date de la clôture de ce rapport, il n'existait pas d'autorisation administrative d'exploiter un camping ou un village de vacances.
Madame X... veuve J... ne discute pas la demande de résiliation du bail, se contentant d'affirmer en page 15 de ses écritures qu'« Il ressort clairement de la situation juridique et judiciaire depuis l'arrêt de la Cour de cassation que Madame Y... ne peut justifier de réel manquement contractuel justifiant la résiliation du bail. Il conviendra de l'en débouter. »
A fortiori, elle ne produit aucune pièce permettant de remettre en cause les constatations et investigations de Mme H....
En dépassant les autorisations de construire du permis qui avait été obtenu quant aux nombre de chalets, à défaut d'autorisation d'exploiter pour un terrain de camping caravaning ou village de vacances et d'accueillir du public, en laissant les sous-locataires, soit les locataires des emplacements, réaliser des aménagements non-conformes aux prescriptions d'urbanisme, l'emphytéote n'a pas respecté son obligation contractuelle de respecter les prescriptions légales et administratives se rapportant à son activité.
En ne procédant pas au débroussaillage sur tout le domaine, alors que les risques d'incendie sont très importants dans cette région, et en l'absence de mise aux normes des équipements et installations techniques, Mme X... veuve J... a aussi failli à son obligation d'entretien.
En conséquence, le bail emphytéotique du 11 août 1982 sera résilié, et le jugement déféré sera infirmé sur ce point.
Madame X... veuve J... sera expulsée des lieux loués ainsi que tous occupants de son chef selon les dispositions développées dans le dispositif du présent arrêt.
Eu égard aux éléments produits par les parties, l'indemnité d'occupation due à compter de la signification de la présente décision, sera fixée à la somme de 5000 € mensuels jusqu'au départ définitif de Mme X... veuve J... .
Sur la demande de restitution des loyers
En exécution de l'arrêt du 20 janvier 2012, pour les loyers du 1er juillet 2004 au 1er juillet 2014 compris, Madame X... veuve J... a payé la somme de 116517€ et par saisie-attribution, a versé la somme de 83296,67 euros, soit un total de 199813,67 € alors qu'après l'arrêt de la Cour de cassation du 19 février 2014, il était dû pour cette période la somme de 66814,51 euros. Elle sollicite donc la condamnation de Madame Y... à lui payer la somme de 132999,16 euros.
Le quantum des sommes dues et de celles versées par Madame X... veuve J... n'est pas discuté par Madame Y....
Madame Y... justifie qu'en exécution de l'ordonnance du 29 février 2016 du juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Draguignan, elle a payé par chèque de banque à la SCP Charlier Angot Thomas, huissiers de justice associés, la somme de 138700 €.
Dans le dispositif de ses écritures, Madame X... veuve J... sollicite la somme trop payée de 132999,16 €, sur le fondement de l'article L. 111-10 du code des procédures civiles d'exécution, sans invoquer qu'il s'agirait d'une répétition de l'indu, même si dans ses motifs sont invoquées les dispositions des articles 1376 et 1377 anciens du Code civil.
Pour sa part Madame Y... explique que la demande de Madame X... veuve J... ne peut prospérer sur le fondement de ces deux articles, mais uniquement sur celui de l'article L. 111-11 du code des procédures civiles d'exécution, et qu'il n'y a pas eu de mise en demeure.
Or, par application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, la cour n'est tenue que par le dispositif des écritures des parties, et n'est donc tenu de répondre en l'espèce qu'à une demande de condamnation à paiement ensuite de l'arrêt de la cour de gestion du 19 février 2014.
L'arrêt de la cour d'appel qui infirme, ou de la Cour de cassation qui anéantit une décision est le titre qui vaut remise en état des parties sans qu'il y ait lieu ni à mise en demeure de restituer les sommes versées en exécution de la décision infirmée ou anéantie, ni à condamnation à restitution desdites sommes.
Dès lors, la cour constatera qu'ensuite de l'arrêt de la Cour de cassation du 19 février 2014 devait être restituée à Madame X... veuve J... la somme de 132999,16 euros et que Madame Y... à procéder à cette restitution.
Le jugement déféré sera aussi infirmé sur ce point.
Sur les demandes de dommages et intérêts de Madame X... veuve J...
Madame X... veuve J... sollicite la somme de 26 073,19 euros au titre des diverses condamnations prononcées au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et la somme de 158097,41 euros au titre des frais de justice, dépens, frais d'exécution et de défense.
Cependant elle ne justifie pas du paiement de ses diverses sommes.
Elle sera déboutée de ses deux demandes.
Madame X... veuve J... sollicite ensuite la somme de 50000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral relatif à la procédure de saisie immobilière.
Cependant, l'article L 111-10 du code des procédures civiles d'exécution dispose que l'exécution forcée peut être poursuivie jusqu'à son terme en vertu d'un titre exécutoire à titre provisoire ; que l'exécution est poursuivie aux risques du créancier qui rétablit le débiteur dans ses droits en nature ou par équivalent si le titre est ultérieurement modifié.
L'article L. 111-11 du même code énonce que sauf dispositions contraires, le pourvoi en cassation en matière civile n'empêche pas l'exécution de la décision attaquée ; que cette exécution ne peut donner lieu qu'à restitution ; quelle ne peut en aucun cas être imputée à faute.
Lorsque Madame Y... a mis à exécution l'arrêt du 20 janvier 2012, elle l'a donc fait en vertu d'un titre exécutoire qui a été anéanti ensuite par l'arrêt de la Cour de cassation du 19 février 2014.
Au regard des dispositions ci-dessus rappelées, Madame X... veuve J... ne peut prétendre à aucune indemnisation au titre d'un préjudice moral en sus de la restitution des sommes payées en trop.
Enfin Madame X... veuve J... sollicite la somme de 20000 € au titre des effets par ricochet auprès des sous-locataires.
Les décisions qu'elle produit à l'appui de cette demande ne démontrent pas l'existence d'un quelconque lien avec la présente instance.
Madame X... veuve J... sera déboutée de toutes ses demandes de dommages et intérêts et le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
Sur la demande de dommages et intérêts de Madame Y...
Madame Y... sollicite la somme de 100000 € au titre de son préjudice moral pour l'intention malveillante manifestée par Madame X... veuve J... tout au long des 10 années de procédure.
Cependant elle ne développe aucun fait précis caractérisant cette dite malveillance.
Madame Y... sera déboutée de cette demande et le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
Sur les autres demandes
L'équité commande de faire bénéficier Madame Y... des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Madame X... veuve J... qui succombe, sera condamnée aux entiers dépens, et sera déboutée de sa demande d'indemnisation au titre de l'article 700 du code de procédure civile .
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté Madame Sylvia X... veuve J... et Madame N... Y... de leurs demandes de dommages et intérêts,
L'infirme pour le surplus, et statuant à nouveau,
Prononce la résiliation du bail emphytéotique du 11 août 1982,
Ordonne l'expulsion de Madame Sylvia X... veuve J... des lieux loués sis à [...] (Var), [...], lieux-dits [...], et de tous occupants de son chef, avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier, si besoin est, avec séquestration du mobilier sur place ou en garde-meuble, à ses frais et risques,
Fixe l'indemnité d'occupation mensuelle due à compter de la notification du présent arrêt jusqu'à la libération effective des lieux, à la somme de 5000 €,
Constate qu'ensuite de l'arrêt de la Cour de cassation du 19 février 2014 devait être restituée à Madame Sylvia X... veuve J... la somme de 132999,16€ et que Madame N... Y... à procéder à cette restitution,
Déboute les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires,
Condamne Madame Sylvia X... veuve J... à payer à Madame N... Y... la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Madame Sylvia X... veuve J... aux entiers dépens, ceux d'appel pouvant être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT