COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-5
( anciennement dénommée 4e Chambre A)
ARRÊT AU FOND
DU 17 JANVIER 2019
lb
N° 2019/ 27
Rôle N° RG 17/11169 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BAWIH
[D] [J]
[Q] [S] épouse [J]
C/
[Z], [U] [X]
[B] [B] épouse [X]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
SELAS LLC ET ASSOCIES
SELARL MASSABIAU ALAIN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 11 Mai 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 16/03335.
APPELANTS
Monsieur [D] [J]
demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Philippe CAMPOLO de la SELAS LLC ET ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant
Madame [Q] [S] épouse [J]
demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Philippe CAMPOLO de la SELAS LLC ET ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant
INTIMES
Monsieur [Z], [U] [X]
demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Alain MASSABIAU de la SELARL MASSABIAU ALAIN, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
Madame [B] [B] épouse [X]
demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Alain MASSABIAU de la SELARL MASSABIAU ALAIN, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 20 Novembre 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Monsieur Luc BRIAND, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Laure BOURREL, Président
Madame Bernadette MALGRAS, Conseiller
Monsieur Luc BRIAND, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Janvier 2019.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Janvier 2019,
Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE :
Par acte authentique du 12 août 2011, M. [Z] [X] et Mme [B] [B] épouse [X] ont acquis de la société Territoire Promotion une maison d'habitation située lieudit [Adresse 4], cadastrée section AN numéro [Cadastre 1].
Cet acte prévoyait la création d'une servitude de passage au profit des acquéreurs sur la parcelle cadastrée section AN numéro [Cadastre 2].
Par acte authentique du 2 octobre 2012, la société Territoire Promotion a vendu cette parcelle AN [Cadastre 2] à des tiers, qui l'ont revendue à M. [D] [J] et Mme [Q] [S] épouse [J] par acte authentique du 14 mai 2014.
Exposant que les époux [J] avaient entrepris des travaux sur leur parcelle, qui ont modifié l'assiette de la servitude de passage dont ils bénéficient, M. et Mme [X] les ont assignés devant le tribunal de grande instance de Draguignan, par acte d'huissier du 25 avril 2016, afin d'obtenir, avec le bénéfice de l'exécution provisoire :
- l'enlèvement et la destruction de tout obstacle édifié sur l'assiette de cette servitude de passage, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, passé le délai de huit jours à compter du jugement à intervenir,
- le paiement d'une indemnité de 200 euros par jour, en réparation du préjudice subi du fait de l'entrave à leur droit de passage,
- le paiement d'une indemnité de 50 000 euros en réparation de la perte de valeur de leur bien,
- le paiement de la somme de 5 000 euros, à titre de dommages et intérêts, en réparation de leur préjudice moral,
- la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
-la condamnation des défendeurs aux dépens, en ce compris les frais de constat du 19 octobre 2015, avec distraction au profit de leur avocat.
Par jugement du 11 mai 2017, le tribunal de grande instance a, pour l'essentiel :
-condamné M. et Mme [J], in solidum, à enlever ou détruire tout obstacle édifié sur l'assiette de la servitude de passage dont bénéficie le fonds AN [Cadastre 1] sur le fonds AN [Cadastre 2], sous astreinte de 100 euros par jour de retard, passé le délai d'un mois à compter du jugement,
-ordonné la remise en état de la place de parking qui a été attribuée aux époux [X] sur le fonds AN [Cadastre 2], la démolition des escaliers permettant l'accès à la propriété de ces derniers depuis le fonds AN [Cadastre 2], et la démolition de l'accès au sous-sol de la propriété des époux [X] par le fonds AN [Cadastre 2].
Le tribunal a relevé, en premier lieu, que si les époux [J] se prévalaient d'un accord intervenu avec leurs auteurs le 12 juin 2013 aux termes duquel ces derniers acceptaient une modification de l'assiette de la servitude de passage dont bénéficie le fonds AN [Cadastre 1] sur la parcelle AN [Cadastre 2], cet accord n'avait été ni repris dans l'acte de vente par lequel les époux [X] ont acquis le fonds AN [Cadastre 1] ni publié au service de la publicité foncière.
En second lieu, les premiers juges ont estimé que les époux [J] n'étaient pas fondés à invoquer les dispositions de l'article 701 alinéa 3 du code civil permettant le déplacement des servitudes conventionnelles devenues onéreuses dès lors d'une part que cette servitude était devenue plus onéreuse du fait des époux [J] qui avaient résolu d'y construire un ouvrage et, d'autre part, que le déplacement d'une servitude ne peut être ordonné lorsque cette servitude a été supprimée sans l'accord préalable des propriétaires du fond dominant.
Par acte du 13 juin 2017, M. et Mme [J] ont régulièrement relevé appel de ce jugement.
Dans leurs dernières conclusions, signifiées par voie électronique le 17 juillet 2017, ils demandent à la cour, pour l'essentiel, de :
-à titre principal, infirmer le jugement et débouter les époux [X] de leurs demandes,
-à titre subsidiaire :
*condamner M. [Z] [X] et Mme [B] [B] épouse [X] à procéder à la remise en état de la place de parking qui leur a été attribuée sur la propriété des époux [J], à la démolition des escaliers permettant l'accès à leur propriété depuis la propriété des époux [J] ainsi qu'à la démolition de l'accès à leur sous-sol situé sur la propriété [J] et,
*condamner Monsieur [Z] [X] et Madame [B] [B] épouse [X] à indemniser les époux [J] à hauteur du coût financier de la démolition de tout obstacle édifié sur l'assiette de la servitude de passage mentionnée dans l'acte notarié en date du 12 août 2011,
-en tout état de cause, condamner les époux [X] à leur verser une somme de 6 000 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, distraits au profit de Me Philippe CAMPOLO, avocat.
Les conclusions présentées le 3 octobre 2017 par les époux [X] ont été déclarées irrecevables car présentées au-delà du délai de 2 mois prévu par les articles 909, 910 et 911-1 du code de procédure civile.
Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
C'est en l'état que l'instruction a été close, par ordonnance du 9 octobre 2018.
SUR CE :
Sur les demandes principales :
Aux termes de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction alors en vigueur : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. / Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. / Elles doivent être exécutées de bonne foi. »
Il résulte des pièces du dossier, en particulier de l'accord écrit intervenu le 12 juin 2013 et signé par l'un des époux [X], lesquels sont mariés sous le régime de la communauté, que la servitude établie au profit du fonds AN [Cadastre 1] sur la parcelle AN [Cadastre 2] a été modifiée avec l'accord des époux [X], sans que ces derniers ne soient fondés à soutenir que l'opposabilité à eux-mêmes de cet accord aurait été conditionnée par la publication de l'acte au service de la publicité foncière ou sa formalisation dans un acte authentique. Enfin, les circonstances que cette servitude ancienne n'aurait jamais reçu exécution ou que la nouvelle serait moins commode sont inopérantes.
Par suite, les époux [X] n'étaient pas fondés à demander au premier juge l'enlèvement et la destruction de tout obstacle sur l'assiette initiale de la servitude ni l'indemnisation des préjudices qu'ils disaient avoir subi du fait de l'entrave à un droit de passage, de la perte de valeur de leur bien ou de leur préjudice moral.
Le jugement sera donc infirmé et les époux [X] déboutés de leurs demandes.
Sur les demandes accessoires :
M. et Mme [X], qui succombent en leur demandes, assumeront la charge des dépens, avec application de l'article 699 du code de procédure civile, et ils verseront aux appelants une somme de 2 500 euros aux appelants au titre des dispositions de l'article 700 du même code.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement déféré et, statuant de nouveau,
Déboute M. [Z] [X] et Mme [B] [B] épouse [X] de leurs demandes,
Condamne M. [Z] [X] et Mme [B] [B] épouse [X] 0 VERSER à M. [D] [J] et Mme [Q] [S] épouse [J] une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [Z] [X] et Mme [B] [B] épouse [X] aux dépens de première instance et d'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT