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04/07/2019 | FRANCE | N°17/00586

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 04 juillet 2019, 17/00586


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 04 JUILLET 2019

hg

N° 2019/ 458













Rôle N° RG 17/00586 - N° Portalis DBVB-V-B7B-723N







[H] [I]





C/



[Q] [U]

[D] [Q] épouse [U]

Syndicat des copropriétaires [Adresse 1]

SAS FONCIA PAYS D'AIX (ANCIENNEMENT FONCIA ROBACHE)

SA MUTUELLES DU MANS ASSURANCES VENANT AUX DROITS DE COVEA RISKS

Société MUTUELLE DES ETUDIANTS LMDE


>Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SCP BUVAT-TEBIEL



SCP PASCAL CHAMPDOIZEAU



Me Isabelle GARNIER-SANTI



SCP FRANCOIS DUFLOT COURT MENIGOZ







Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 04 JUILLET 2019

hg

N° 2019/ 458

Rôle N° RG 17/00586 - N° Portalis DBVB-V-B7B-723N

[H] [I]

C/

[Q] [U]

[D] [Q] épouse [U]

Syndicat des copropriétaires [Adresse 1]

SAS FONCIA PAYS D'AIX (ANCIENNEMENT FONCIA ROBACHE)

SA MUTUELLES DU MANS ASSURANCES VENANT AUX DROITS DE COVEA RISKS

Société MUTUELLE DES ETUDIANTS LMDE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP BUVAT-TEBIEL

SCP PASCAL CHAMPDOIZEAU

Me Isabelle GARNIER-SANTI

SCP FRANCOIS DUFLOT COURT MENIGOZ

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 08 Décembre 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 14/4604.

APPELANT

Monsieur [H] [I]

demeurant Domicilié chez Monsieur [O] [I] - [Adresse 2]

représenté par Me Layla TEBIEL de la SCP BUVAT-TEBIEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

Monsieur [Q] [U]

demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Michelle CHAMPDOIZEAU PASCAL de la SCP PASCAL CHAMPDOIZEAU, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Michel BRUNET, avocat au barreau d'ALPES DE HAUTE-PROVENCE

Madame [D] [Q] épouse [U]

demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Michelle CHAMPDOIZEAU PASCAL de la SCP PASCAL CHAMPDOIZEAU, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Michel BRUNET, avocat au barreau d'ALPES DE HAUTE-PROVENCE

Syndicat des copropriétaires [Adresse 1], pris en la personne de son SYNDIC la Société ALTER GESTION dont le siège social est sis [Adresse 4], pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es-qualités audit siège,,

représenté par Me Isabelle GARNIER-SANTI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE , plaidant

SAS FONCIA PAYS D'AIX (ANCIENNEMENT FONCIA ROBACHE) SAS, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés es qualité audit siège, [Adresse 5]

représentée par Me Olivia DUFLOT CAMPAGNOLI de la SCP FRANCOIS DUFLOT COURT MENIGOZ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Audrey OLLIVRY LECA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

SA MUTUELLES DU MANS ASSURANCES venant aux droits de COVEA RISKS SA, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés es qualité audit siège, [Adresse 6]

représentée par Me Olivia DUFLOT CAMPAGNOLI de la SCP FRANCOIS DUFLOT COURT MENIGOZ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Audrey OLLIVRY LECA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Organisme Social MUTUELLE DES ETUDIANTS LMDE

assignation à personne morale le 13.04.2017

demeurant [Adresse 7]

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 14 Mai 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Hélène GIAMI, Conseiller, faisant fonction de Président de chambre , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Hélène GIAMI, Conseiller, faisant fonction de Président de chambre

Madame Sophie LEONARDI, Conseiller

Monsieur Luc BRIAND, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2019.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2019,

Signé par Madame Hélène GIAMI, Conseiller, faisant fonction de Président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCÉDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

[H] [I] a signé le 4 septembre 2007 un bail pour un studio meublé avec monsieur et madame [Q] [U], lesquels avaient pour mandataire la société Foncia pays d'Aix anciennement Foncia Robache ;

l'appartement est situé dans la copropriété dénommée [Adresse 1].

Le 23 mars 2008, monsieur [H] [I] a été hospitalisé pendant un mois, après avoir été retrouvé inconscient par les pompiers.

Faisant valoir qu'il a contracté la légionellose dans son appartement, [H] [I] a saisi le président du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence d'une demande d'expertise judiciaire et de provision, le 24 janvier 2013 ;

l'affaire a fait l'objet d'une radiation puis d'une ordonnance de rejet du 25 mars 2014.

Par exploit des 23 et 24 juin 2014, il a fait assigner devant le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, la société Foncia Robache, monsieur [U], le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] et la mutuelle des étudiants, pour obtenir notamment réparation de son entier préjudice, désignation d'un expert et allocation d'une provision de 10 000 euros.

Le tribunal, par jugement du 8 décembre 2016, a notamment :

- déclaré recevables les interventions volontaires de MMA venant aux droits de Covea Risks et de madame [U]

- rejeté les exceptions de prescription,

- dit n'y avoir lieu d'ordonner d'expertise technique,

- dit que [H] [I] ne produit aucun élément permettant d'imputer la contamination qu'il a subie dans le logement qu'il occupait il y a plus de huit ans,

- débouté [H] [I] de ses demandes,

- condamné [H] [I] à verser à monsieur et madame [U], au syndicat des copropriétaires Le Latin et à la société Foncia Robache la somme de 8 000 euros chacun au titre de l'article 700 de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire,

- condamné [H] [I] aux dépens.

[H] [I] a relevé appel du jugement le 10 janvier 2017.

Par arrêt mixte de cette cour en date du 14 juin 2018,

- le jugement a été réformé mais seulement en ce qu'il a :

- dit que [H] [I] ne produit aucun élément permettant d'imputer la contamination qu'il a subie dans le logement qu'il occupait il y a plus de huit ans,

- débouté [H] [I] de ses demandes,

- condamné [H] [I] à verser au syndicat des copropriétaires Le Latin la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 de procédure civile,

- condamné [H] [I] aux dépens,

Statuant à nouveau de ces chefs, il a été :

-dit que le syndicat des copropriétaires Le Latin est seul responsable du préjudice subi par [H] [I],

- le syndicat des copropriétaires a été condamné à réparer l'entier préjudice de [H] [I],

- le syndicat des copropriétaires a été condamné à verser à [H] [I] une provision à valoir sur son préjudice de 5 000 euros,

- [H] [I] a été débouté de ses demandes formées à l'encontre de monsieur et madame [Q] [U], de la société Foncia Pays d'Aix et de la compagnie MMA venant aux droits de Covea Risks,

- le syndicat des copropriétaires Le Latin a été débouté de ses demandes,

- une expertise médicale a été confiée au Docteur [T] [H]

- il a été dit que l'affaire serait rappelée à l'audience du 14 mai 2019 à 14hl5 et que

l'ordonnance de clôture interviendrait le jour même,

- il a été constaté que la LMDE prise en sa qualité d'organisme social de [H] [I] avait été régulièrement appelée en cause,

- il a été sursis à statuer sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et dépens du syndicat des copropriétaires et de monsieur [I], dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise médicale et des conclusions à venir des parties,

-le jugement a été confirmé pour le surplus,

-les demandes de monsieur et madame [U], de la société Foncia Pays D'Aix et de la société MMA en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile ont été rejetées,

-[H] [I] a été condamné aux dépens de première instance et d'appel à l'égard de monsieur et madame [U], de la société Foncia Pays d'Aix et de MMA.

L'expertise du docteur [T] [H] a été déposée au greffe de la cour le 29 novembre 2018.

Par ordonnance de la première présidence de la Cour de Cassation du 21 février 2019, le syndicat des copropriétaires a été déchu de son pourvoi en cassation contre l'arrêt mixte, ainsi devenu définitif.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 7 mai 2019, auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des moyens et prétentions, [H] [I] entend voir :

-infirmer le jugement sauf en ce qui concerne le rejet des exceptions de prescription,

-débouter le syndicat des copropriétaires, monsieur [Q] [U], madame [D] [Q] épouse [U], la SAS Foncia pays d'Aix ainsi que la SA Mutuelles du Mans Assurances venant aux droits de la compagnie Covea Risks de l'ensemble de leurs demandes fins et conclusions,

-dire et juger que le syndicat des copropriétaires est seul responsable des préjudices subis par lui,

-condamner le syndicat des copropriétaires à l'indemniser de son entier préjudice,

en conséquence :

à titre principal :

-condamner le syndicat des copropriétaires à lui verser les sommes suivantes :

-736,95 € au titre des dépenses de santé actuelles,

-576 € au titre des frais divers restés à la charge de la victime,

-129 241,53 € au titre du préjudice scolaire, universitaire ou de formation,

-853,32 € au titre du déficit fonctionnel temporaire total,

-200 € au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel de classe 2,

-10 000 € au titre des souffrances endurées,

-2 000 € au titre des dépenses de santé futures,

-30 000 € au titre de l'incidence professionnelle,

-120 000 € au titre de la perte de chance,

-8 000 € au titre du préjudice d'agrément.

à titre subsidiaire :

-ordonner un complément d'expertise,

en toute hypothèse :

-condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le latin représenté par son syndic à lui verser 8 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et le condamner aux dépens, y compris les frais d'expertise à hauteur de 2 000 €, avec distraction dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 13 mai 2019, auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des moyens et prétentions, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble, représenté par son syndic en exercice, la société Alter Gestion entend voir :

Vu l'arrêt mixte de la cour d'appel du 14 juin 2018 :

Vu le rapport d'expertise déposé par Monsieur [H] le 22 novembre 2018 :

- fixer la date de consolidation de [H] [I] au 23 mai 2008,

Vu l'article 202 du code civil,

-déclarer irrecevables les attestations de Monsieur [E] (pièce adverse n°59) et [X] (pièce n°64) comme non conformes,

Vu le rapport d'expertise qui ne retient que les préjudices temporaires avant consolidation

-débouter [H] [I] au titre de ses demandes fondées sur :

- les dépenses de santé futures,

- l'incidence professionnelle,

- la perte de chance,

- le déficit fonctionnel permanent,

- le préjudice d'agrément,

- le préjudice esthétique permanent,

Vu l'article 1353 du code civil :

-débouter [H] [I] de ses demandes tendant à l'octroi des demandes suivantes :

-736,95 € au titre des dépenses de santé actuelles

-576 € au titre des frais divers restés à la charge de la victime

-129 241,53 € au titre du préjudice scolaire universitaire ou de formation

-853,32 € au titre du déficit fonctionnel temporaire total

-200 € au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel de classe 2

-10 000 € au titre des souffrances endurées

-2 000 € au titre des dépenses de santé futures

-30 000 € au titre de l'incidence professionnelle

-120 000 € au titre de la perte de chance

-8 000 € au titre du préjudice d'agrément

-indemnisation non chiffrée au titre du déficit fonctionnel permanent et du préjudice esthétique permanent non chiffré

-débouter [H] [I] du surplus de ses demandes.

-déclarer les offres du syndicat des copropriétaires satisfactoires, à savoir :

-5 000 € au titre du préjudice scolaire,

- 640 € au titre du déficit fonctionnel temporaire total,

-150 € au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel de classe 2,

-4 000 € au titre des souffrances endurées,

Vu l'article 246 du code de procédure civile :

-débouter [H] [I] de sa demande d'expertise complémentaire,

Vu le rapport d'expertise,

-débouter [H] [I] de sa demande de désignation d'un sapiteur psychologique et psychiatrique

-débouter [H] [I] de sa demande d'article 700 du code de procédure civile,

-condamner [H] [I] aux entiers dépens.

Aux termes de dernières dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 28 février 2018, auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des moyens et prétentions, monsieur [Q] [U] et madame [D] [Q] épouse [U] entendaient voir :

- confirmer le jugement,

à défaut

- constater qu'il n'a pas été satisfait à la sommation de communiquer par la copropriété

lui faire injonction de produire les pièces demandées comme les documents techniques du circuit de production et de distribution d'eau chaude collective ainsi que les plans

- constater que monsieur [I] ne démontre pas leur responsabilité dans la survenance de son affection,

- dire et juger qu'ils ne sont pas responsables des faits reprochés,

- constater la force majeure et l'impossibilité pour les époux [U] d'intervenir sur le circuit d'eau chaude sanitaire collectif et écarter toute responsabilité de leur part,

- les mettre hors de cause en l'absence de toute responsabilité de leur part sur le réseau collectif d'eau chaude sanitaire, à tout le moins les en exonérer

- dire et juger que seule la responsabilité de la copropriété peut être engagée en raison de l'installation uniquement collective,

- ordonner une mesure d'instruction à caractère technique concernant le circuit d'eau chaude sanitaire collectif au moment des faits et le problème de l'apparition de la Legionella et son élimination, à dire d'expert ou par la désignation d'un huissier, selon mission de l'expert décrite dans les écritures,

à défaut,

- dire et juger qu'ils devront être relevés et garantis de toutes condamnations par le syndicat des copropriétaires en raison de l'existence d'un circuit d'eau chaude collectif,

- débouter monsieur [I] de sa demande d'expertise médicale,

- débouter monsieur [I] de sa demande de condamnation au titre de la provision à valoir sur son préjudice qui n'est ni fondée, ni justifiée,

- condamner monsieur [I] à leur payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le syndicat des copropriétaires à leur payer la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner monsieur [I] aux entiers dépens et à défaut le syndicat des copropriétaires.

Aux termes de leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 14 mai 2019, auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des moyens et prétentions, la SAS Foncia pays d'Aix ainsi que la SA Mutuelles du Mans Assurances venant aux droits de la compagnie Covea Risks entendent voir :

-dire et juger que les demandes, fins et conclusions dirigées à leur encontre sont irrecevables et en tout état de cause infondées,

-débouter monsieur [I] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

-condamner monsieur [I] à leur payer la somme de 3 000 € au visa des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel.

-le condamner aux dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 mai 2019.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Par l'arrêt mixte de cette cour en date du 14 juin 2018, il a été définitivement statué sur :

- les responsabilités, seul le syndicat des copropriétaires Le Latin étant condamné à réparer l'entier préjudice de [H] [I], et à lui verser une provision de 5 000 euros,

-les demandes de monsieur et madame [U], de la société Foncia Pays D'Aix et de la société MMA en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile qui ont été rejetées,

-les dépens de première instance et d'appel à l'égard de monsieur et madame [U], de la société Foncia Pays d'Aix et de MMA auxquels [H] [I] a été condamné.

À ce stade du litige, plus aucune demande n'est dirigée contre monsieur [Q] [U], madame [D] [Q] épouse [U], la SAS Foncia pays d'Aix ou la SA Mutuelles du Mans Assurances venant aux droits de la compagnie Covea Risks

Leurs demandes relatives aux dépens ou à l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

Sur le montant des réparations dues à [H] [I] par le syndicat des copropriétaires :

Le rapport d'expertise du docteur [T] [H] répond aux questions posées par la cour après examen de l'intéressé et des pièces produites par les parties en sorte qu'il n'y a pas lieu d'ordonner une nouvelle expertise, les différents chefs de demandes de [H] [I] pouvant être étayés par des éléments autres que ceux de l'expertise qui donneront lieu à une appréciation au cas par cas.

Sur la demande en paiement de 736,95 € au titre des dépenses de santé actuelles :

[H] [I] produit :

.des avis de sommes à payer qui lui ont été adressés par le Centre Hospitalier d'[Localité 1] en Provence suivant titres émis et rendus exécutoires les 24 et 26 juin 2008 pour des montants de 7,80 €, 530 € et 58,73 € mentionnant leur règlement en date du 9 septembre 2008,

.des attestations de paiement établies par le laboratoire d'analyses médicales du docteur [B] [Y] les 30 avril, 10 mai et 4 août 2008 pour des montants de 14,76 €, 33,66 € et 32,04 €, après déduction de la part réglée par la Sécurité Sociale et par la Mutuelle (0 € pour elle) réglés par le patient,

Contrairement à ce que soutient le syndicat des copropriétaires, il ressort de ces pièces que les montants susvisés sont restés à la charge de l'intéressé, alors qu'ils doivent être supportés par le syndicat des copropriétaires tenu d'indemniser l'intégralité du préjudice consécutif à la maladie contractée du fait de la légionellose.

En revanche, les autres documents produits en pièce 8 par [H] [I] y compris l'attestation du docteur [P] déclarant avoir reçu 60 € de l'intéressé pour un avis médical suite à sa légionellose, ne permettent pas d'établir que les autres frais réclamés soient restés à la charge de [H] [I].

Il sera donc accueilli en sa demande en paiement au titre des dépenses de santé restées à sa charge dans la limite de 676,99 €. (7,80 € + 530 € + 58,73 € + 14,76 € + 33,66 € + 32,04 €)

Sur la demande en paiement de 576 € au titre des frais divers restés à la charge de la victime :

Pour [H] [I], il doit être indemnisé de cette somme correspondant à 32 forfaits journaliers pour son hospitalisation restés à sa charge.

Or, sa première demande en paiement de 530 € suivant les avis de sommes à payer qui lui ont été adressés par le Centre Hospitalier d'[Localité 1] en Provence englobent des forfaits journaliers sans qu'il soit justifié par [H] [I] qu'il a du en régler d'autres.

Cette demande en paiement de 576 € sera donc rejetée.

Sur la demande en paiement de 129 241,53 € au titre du préjudice scolaire, universitaire ou de formation :

L'expert, [T] [H] a considéré que :

« Monsieur [H] [I] âgé actuellement de 34 ans, alors qu'il vivait dans un studio situé dans la copropriété dénommé [Adresse 1], a été hospitalisé du 23 mars au 24 avril 2008 (32 jours), au CH du Pays d'Aix en service de Réanimation (7 jours), de Soins Continus (17 jours) puis de néphrologie et dialyse (8 jours) pour une légionellose pulmonaire sévère avec insuffisance rénale et rhabdomyolyse (désigne une situation dans laquelle des cellules des muscles squelettiques, se dégradant rapidement, libèrent leur contenu dans la circulation sanguine). L'évolution a été favorable comme l'attestent le bilan biologique sanguin du 10 mai et la radio du thorax du 20 mai 2018.

L'hospitalisation d'un mois et la convalescence d'un mois, avec absence scolaire de 2 mois, sont imputables à la légionellose.

Le redoublement de l'année de BTS peut être considéré comme une conséquence de cette maladie.

Les doléances actuelles concernant les conséquences psychologiques, la fatigue chronique, et sur les échecs dans sa scolarité ne sont pas retenues comme imputables à la légionellose

La prise en charge et la guérison de l'infection autorise une CONSOLIDATION au 23 mai 2008 ».

S'il est exact que le juge n'est pas tenu par les conclusions de l'expert, encore faut-il que des arguments pertinents lui soient opposés.

En l'espèce, [H] [I] soutient qu'en réalité, les conséquences de la légionellose lui ont fait perdre cinq années de formation et la chance de développer une carrière en comptabilité.

A l'époque des faits, [H] [I], âgé de 23 ans pour être né le [Date naissance 1] 1984, suivait une formation de « BTS comptabilité et gestion des organisations » prévue sur les années 2007/2009.

Il ressort de l'attestation de scolarité qu'ayant souvent été absent pour raisons médicales, il a redoublé en 2009/2010 et n'a pas obtenu son diplôme à l'examen de juin 2011.

Pour le surplus, ses échecs scolaires et réorientations postérieures qui duraient encore au jour de l'expertise ne peuvent être imputées à la maladie subie en 2008 alors que :

- [H] [I] a été associé dans une SARL Ingénierie de formation immatriculée au Maroc entre 2011 et 2013,

il a suivi, ensuite, au Canada :

- une formation de techniques juridiques en 2013-2015,

- puis en 2014-2015, a réussi une formation en mécanique automobile,

- une formation en comptabilité en 2017-2019.

En effet, les difficultés qu'il impute aux conséquences de la légionellose ne peuvent être rattachées à cette maladie sur la base des certificats du docteur [A], médecin de poste auprès du consulat général de France à Rabat, en dates des :

- 2 juillet 2015 indiquant avoir suivi [H] [I] en 2011 et 2012 pour une fragilité respiratoire et rénale alors qu'il avait été victime d'une légionellose en 2008,

- 14 juin 2017, mentionnant que [H] [I] « souffre d'une fatigue chronique et d'un ralentissement psychomoteur très important depuis l'épisode de la légionellose contracté en 2008, avec une répercussion très négative sur sa scolarité, son état de santé très fragile ne lui permettant pas d'exercer un travail à temps complet ».

- 26 septembre 2018 disant suivre en consultation Monsieur [I] depuis 2011 et précisant : « Ce patient souffre d'une fatigue chronique et d'un ralentissement psychomoteur très important depuis cette épisode de légionellose avec notamment une répercussion très négative sur sa scolarité. D'échec en échec, il a perdu confiance en ses capacités intellectuelles et une dépression profonde s'est installée depuis des années handicapant de plus en plus dans sa vie quotidienne... Cette légionellose a été aussi la cause un drame familial puisque ses parents ont du se saigner matériellement et moralement pour assurer les frais médicaux et de justice qui en ont découlé ».

Or l'expert a relevé qu'en dehors d'une surcharge pondérale, l'examen clinique ne relevait aucune anomalie, qu'il n'existait aucune séquelle physique, et concernant les aspects et les séquelles psychologiques voire psychiatrique :

que [H] [I] ne présentait aucun trouble cognitif, aucun ralentissement psychomoteur ou physique aucun trouble de l'humeur ; qu'il n'avait jamais été confié à un psychiatre par le médecin qui le suivait au Maroc et ne s'était jamais vu prescrire aucun traitement antidépresseur, anxyolitique ou psychotrope, qu'il n'en prenait actuellement aucun... qu'en résumé, il n'existait pas de séquelle.

Les conséquences décrites par le docteur [A] ne pourront être retenues comme établies en l'absence de justificatif d'un traitement ou d'une prise en charge psychothérapique de l'intéressé dans les années ayant suivi son hospitalisation en 2008.

Il sera ajouté que les capacités scolaires de l'intéressé avant qu'il subisse la légionellose ne sont pas établies alors qu'âgé de 23 ans, il se trouvait seulement en BTS et que rien n'établit qu'il suivait cette formation avec succès.

La somme de 5 000 € sera retenue au titre de l'indemnisation de la perte d'une année scolaire en partie liée à la maladie qui l'a affecté et l'a contraint à une hospitalisation d'un mois et une convalescence d'un mois, l'absence scolaire imputable étant limitée à 2 mois.

La somme de 69 241,53 € demandée à ce titre et en plus pour les sommes dépensées par sa famille afin qu'il poursuive ses études en France puis au Canada sera rejetée, la preuve d'un lien causal avec la légionellose n'étant pas rapportée.

Sur la demande en paiement de 853,32 € au titre du déficit fonctionnel temporaire total :

Alors que [H] [I], qui a été hospitalisé pendant 32 jours, dont 7 jours en réanimation entend être indemnisé de ce chef à hauteur de 853,32 € sur la base de 800 € pour trente jours, le syndicat des copropriétaires entend voir fixer à 640 € la somme indemnitaire de ce chef sur la base de 600 € pour trente jours.

Cette indemnisation est destinée à réparer la gêne dans les actes de la vie courante et la perte temporaire de qualité de vie résultant de l'immobilisation, en tenant compte de la composition de la cellule familiale, qui en l'espèce se réduisait à [H] [I], étudiant dont les parents se trouvaient au Maroc, sa mère s'étant alors déplacée pour venir à son chevet.

Il sera alloué à ce titre à [H] [I] la somme de 746,66 €.

Sur la demande en paiement de 200 € au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel de classe 2 :

Sur la même base de calcul que pour l'indemnisation du déficit fonctionnel temporaire total, [H] [I] se verra allouer la somme de 175 €.

Sur la demande en paiement de 10 000 € au titre des souffrances endurées :

L'expert a évalué à 3/7 les souffrances endurées en tenant compte de l'hospitalisation d'un mois, dont 7 jours en réanimation avec hémofiltration et hémodialyse, et angoisse sur le pronostic rénal et le devenir pendant le mois de convalescence.

Il ressort du rapport d'expertise que [H] [I] s'est retrouvé inconscient puis a été transporté en urgence au centre hospitalier où il a été placé en réanimation pendant sept jours, affecté d'une pneumopathie droite avec rhabdomyolyse sévère et insuffisance rénale oligo-anurique sévère et agitation, la légionellose étant diagnostiquée.

Il a subi :

-une épuration extrarénale par hémofiltration,

-une oxygénothérapie,

-une antibiothérapie par [L] et [C],

-un traitement neuroleptique, introduit devant une agitation initiale a été rapidement arrêté.

-un scanner cérébral et une ponction lombaire,

-8 jours d'hémofiltration,

-6 jours d'hémodialyse,

-une transfusion de 2 culots de concentrés globulaires le 1er avril 2008 devant une anémie à 5,9 g/dl d'hémoglobine,

- une créatininémie à 226 micromol/L (clairance à 48ml/mn) le 23/04, jour de sa sortie, au service de néphrologie pour poursuivre la prise en charge de l'insuffisance rénale en cours de normalisation,

- une infection urinaire traitée par ciflox

- un rendez-vous avec le néphrologue le 14 mai (Dr [F]

- un rendez-vous avec une infectiologue, le docteur [G] le 22 mai,

-un mois de convalescence à domicile.

Eu égard à la violence de l'apparition de la maladie subie, au jeune âge de l'intéressé étudiant éloigné de sa famille et à la crainte qu'a légitimement pu lui inspirer la série de traitements subis en milieu hospitalier, il convient de fixer à 8 000 € le montant de l'indemnisation à ce titre.

Sur la demande en paiement de 2 000 € au titre des dépenses de santé futures :

Alors que l'expert a écarté l'existence d'un tel préjudice, [H] [I] prétend continuer à être suivi de séquelles de la légionellose et notamment d'une dépression sur la base des certificats du docteur [A], exerçant à Rabat, qui ont été décrits plus haut et qui n'ont pas permis de retenir l'existence des séquelles invoquées.

La demande de [H] [I] au titre de ce préjudice sera écartée.

Sur la demande en paiement de 30 000 € au titre de l'incidence professionnelle :

Cette demande ne peut être accueillie dès lors que seule a été admise la perte d'une année scolaire et l'absence de séquelles liée à la légionellose l'ayant entravé dans la poursuite de ses études.

Sur la demande en paiement de 120 000 € au titre de la perte de chance :

Cette demande ne peut être accueillie dès lors que seule a été admise la perte d'une année scolaire et l'absence de séquelles liée à la légionellose l'ayant entravé dans la poursuite de ses études.

Sur la demande en paiement de 8 000 € au titre du préjudice d'agrément :

Alors que l'expert a conclu à l'absence de séquelles et que les certificats du docteur [A] sont insuffisants à établir l'inverse et la réalité d'un préjudice d'agrément en lien avec la légionellose, cette demande sera rejetée.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

Le syndicat des copropriétaires sera condamné à payer à [H] [I] la somme de 2 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens, y compris les frais d'expertise, avec distraction pour ceux d'appel dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile, le jugement étant infirmé en ses dispositions relatives aux dépens de première instance et à l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Vu l'arrêt mixte de cette chambre de la cour d'appel du 14 juin 2018,

Vu le rapport d'expertise déposé par Monsieur [H] le 22 novembre 2018,

Fixe le préjudice subi par [H] [I] du fait de la légionellose imputable au syndicat des copropriétaires Le Latin aux sommes suivantes :

- 676,99 € au titre des dépenses de santé actuelles,

- 5 000 € au titre du préjudice scolaire, universitaire ou de formation,

- 746,66 € au titre du déficit fonctionnel temporaire total,

- 175 € au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel de classe 2,

- 8 000 € au titre des souffrances endurées,

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble, représenté par son syndic en exercice, la société Alter Gestion à payer ces sommes à [H] [I] sous déduction de la provision accordée,

Rejette les demandes en paiement de [H] [I] au titre :

- des frais divers restés à la charge de la victime pour 576 €,

- des sommes dépensées par sa famille pour 69 241,53 €,

- des dépenses de santé futures pur 2 000 €,

- de l'incidence professionnelle pour 30 000 €,

- de la perte de chance pour 120 000 €,

- du préjudice d'agrément pour 8 000 €,

Rejette les demandes relatives aux dépens ou à l'article 700 du code de procédure civile de [Q] [U],[D] [Q] épouse [U], la SAS Foncia pays d'Aix et de la SA Mutuelles du Mans Assurances venant aux droits de la compagnie Covea Risks,

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble, représenté par son syndic en exercice, la société Alter Gestion à payer la somme de 2 000 € à [H] [I] au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens, y compris les frais d'expertise, avec distraction pour ceux d'appel dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 17/00586
Date de la décision : 04/07/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4A, arrêt n°17/00586 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-07-04;17.00586 ?
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