COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-3
ARRÊT AU FOND
DU 19 SEPTEMBRE 2019
N° 2019/341
N° RG 18/02660 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BB6PS
[I] [H]
C/
Société SURAVENIR ASSURANCES
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Christelle SANTIAGO
Me Maud DAVAL-GUEDJ
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 09 Octobre 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 16/11123.
APPELANTE
Madame [I] [H]
née le [Date naissance 1] 1987 à MARSEILLE
de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Christelle SANTIAGO, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant par Me Carine DIP, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
S.A. SURAVENIR ASSURANCES poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié ès qualité au siège social sis, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
plaidant par Me Bernard MAGNALDI, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 13 Juin 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Marie-Brigitte FREMONT, Présidente, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Mme Marie-Brigitte FREMONT, Présidente rapporteur
Mme Béatrice MARS, Conseiller
Mme Florence TANGUY, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Jocelyne MOREL.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Septembre 2019.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Septembre 2019,
Signé par Mme Marie-Brigitte FREMONT, Présidente et Madame Jocelyne MOREL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Le 4 février 2014, Mme [I] [H] a souscrit un contrat Multirisques Habitation auprès de la SA Suravenir Assurances par l'intermédiaire d'un courtier d'assurances AcommeAssure.
Au mois de mai 2015, Mme [I] [H] a demandé par téléphone à son courtier AcommeAssure une augmentation de ses garanties contre le vol.
Entre le 13 et le 15 novembre 2015, Mme [H] a été victime d'un cambriolage.
La SA Suravenir Assurances a refusé d'indemniser le sinistre au motif que le contrat avait été résilié à effet du 30 août 2015 en l'absence de signature de l'avenant modifiant les garanties contractuelles.
Mme [I] [H] faisant valoir qu'elle n'avait jamais reçu l'avenant ni la lettre de résiliation, elle a par acte en date du 14 septembre 2017, assigné la SA Suravenir Assurances devant le tribunal de grande instance de Marseille aux fins qu'elle soit condamnée à lui verser :
- la somme de 56.385,00 Euros au titre de l'indemnisation du sinistre,
- la somme de 5.000,00 Euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
- la somme de 2.500,00 Euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
sous le bénéfice de l'exécution provisoire.
Par jugement en date du 9 octobre 2017, le tribunal de grande instance de Marseille a :
DECLARÉ irrégulière la résiliation du contrat d'assurance notifiée à Mme [I] [H] par la SA Suravenir Assurances,
REJETÉ la demande d'indemnisation du sinistre formée par [I] [H],
REJETÉ la demande de dommages et inérêts pour résistance abusive formée par [I] [H],
REJETÉ la demande formée par [I] [H] sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
REJETÉ toute autre demande,
CONDAMNÉ [I] [H] aux dépens,
en retenant que l'assureur n'avait pas respecté les dispositions de l'article L.113-4 du code des assurances lors de la résiliation du contrat d'assurance et que Mme [H] ne justifiait pas du préjudice qu'elle avait subi.
Mme [H] a formé appel le 15 février 2018 et la SA Suravenir Assurances le 9 mars 2018.
Dans ses dernières conclusions en date du 1er août 2018, Mme [I] [H] demande à la cour de :
CONFIRMER le Jugement n°17/484, en date du 09 octobre 2017, entrepris dans ses dispositions
concernant l'irrégularité de la résiliation
- INFIRMER le Jugement sur ses dispositions concernant le droit à indemnisation ;
STATUANT A NOUVEAU :
DIRE et JUGER que le contrat souscrit en date était bien en vigueur à la date du sinistre,
CONDAMNER la compagnie Suravenir Assurances à verser à Madame [H] la somme de 56 385 € (somme à parfaire) correspondant au montant de son préjudice,
CONDAMNER la compagnie Suravenir Assurances à verser à Madame [H] la somme de 5.000€ pour résistance abusive,
CONDAMNER la compagnie Suravenir Assurances à verser à Madame [H] la somme de 2.500€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
CONDAMNER la compagnie Suravenir Assurances aux entiers dépens,
REJETER toutes conclusions, fins et moyens autres.
Elle demande la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a conclu à l'irrégularité de la résiliation du contrat d'assurance fondé sur l'article L.113-4 du code des assurances, mais l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'indemnisation matérielle de 56.385 € à hauteur des justificatifs versés.
Dans ses dernières conclusions en date du 5 juillet 2018 (dossier n°18/04364) et 5 avril 2018 (dossier n°18/02660) la SA Suravenir Assurances demande à la cour de :
Vu les articles L 112-3 et suivants du CA
Vu l'absence de tout avenant de modification augmentant les capitaux garantis signé par Mme [H]
Vu les articles 1315 ancien et 1353 nouveau du CC
Vu les articles L 112-3 et suivants du CA et l'art R113-1 du CA
Dire et juger bien fondée la Cie SURAVENIR à opposer à Mme [H] la résiliation du contrat Multirisques Habitation souscrit par elle
En conséquence, la débouter de l'ensemble de ses prétentions fins et moyens
Très subsidiairement et sans aucune reconnaissance de garantie
Désigner tel Expert qu'il plaira à la Cour afin de vérifier la réalité du préjudice ainsi que son montant et ce à charge de l'assurée
En tout état de cause et reconventionnellement,
Condamner Mme [H] au paiement d'une indemnité de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du CPC
Condamner tous contestants aux entiers dépens ceux d'appel distraits au profit de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL-GUEDJ, sur son offre de droit.
L'assureur reproche au juge d'avoir soulevé d'office l'article L.113-4 du code des assurances sans avoir préalablement invité les parties à s'expliquer sur ce texte.
Elle soutient que la seule demande de modification du plafond de garanties entre dans le cadre de l'article L112-3 du code des assurances et non pas dans le cadre de l'article L.113-4 visant le régime de l'aggravation de risques .
Elle affirme que le courrier de résiliation du contrat a bien été adressé à Mme [H] par LRAR à son domicile le 24 août 2015.
Subsidiairement elle conteste les factures produites au nom de tiers et demande l'instauration d'une expertise.
Les procédures ont été clôturées le 23 mai 2019.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la procédure
Dans le souci d'une bonne administration de la justice, il y a lieu de joindre les deux procédures enrôlées sous les n°18/02660 et n°18/04364 et de dire que la procédure se poursuivra sous le seul n°18/02660.
Sur le fond
I. Sur la demande d'indemnisation
L'article L.112-2 du code des assurances en vigueur au jour de la signature du contrat énonce les conditions de souscription d'un contrat d'assurance.
L'article L 112-3 du même code, impératif, impose que toute addition ou modification au contrat d'assurance primitif soit constatée par un avenant signé des parties.
Enfin l'article L.113-4 du code des assurances prévoit :
« En cas d'aggravation du risque en cours de contrat, telle que, si les circonstances nouvelles avaient été déclarées lors de la conclusion ou du renouvellement du contrat, l'assureur n'aurait pas contracté ou ne l'aurait fait que moyennant une prime plus élevée, l'assureur a la faculté soit de dénoncer le contrat, soit de proposer un nouveau montant de prime.
Dans le premier cas, la résiliation ne peut prendre effet que dix jours après notification et l'assureur doit alors rembourser à l'assuré la portion de prime ou de cotisation afférente à la période pendant laquelle le risque n'a pas couru. Dans le second cas, si l'assuré ne donne pas suite à la proposition de l'assureur ou s'il refuse expressément le nouveau montant, dans le délai de trente jours à compter de la proposition, l'assureur peut résilier le contrat au terme de ce délai, à condition d'avoir informé l'assuré de cette faculté, en la faisant figurer en caractères apparents dans la lettre de proposition.
Toutefois, l'assureur ne peut plus se prévaloir de l'aggravation des risques quand, après en avoir été informé de quelque manière que ce soit, il a manifesté son consentement au maintien de l'assurance, spécialement en continuant à recevoir les primes ou en payant, après un sinistre, une indemnité.
L'assuré a droit en cas de diminution du risque en cours de contrat à une diminution du montant de la prime. Si l'assureur n'y consent pas, l'assuré peut dénoncer le contrat. La résiliation prend alors effet trente jours après la dénonciation. L'assureur doit alors rembourser à l'assuré la portion de prime ou cotisation afférente à la période pendant laquelle le risque n'a pas couru.
L'assureur doit rappeler les dispositions du présent article à l'assuré, lorsque celui-ci l'informe soit d'une aggravation, soit d'une diminution de risques.
Les dispositions du présent article ne sont applicables ni aux assurances sur la vie, ni à l'assurance maladie lorsque l'état de santé de l'assuré se trouve modifié ».
La seule demande de modification du plafond de garantie contre le vol entre dans le cadre de l'article L. 112-2 du code des assurances et non pas dans le cadre de l'article L.113-4 du même code qui traite de l'aggravation du risque au sens de l'article L.113-2 en imposant à l'assuré de « déclarer, en cours de contrat, les circonstances nouvelles qui ont pour conséquence soit d'aggraver les risques, soit d'en créer de nouveaux et rendent de ce fait inexactes ou caduques les réponses faites à l'assureur ».
Aucune obligation n'était donc faite à l'assureur d'informer l'assurée de la faculté de résilier le contrat dans le délai de trente jours à compter de la proposition refusée par l'assuré.
L'avenant modifiant le plafond de garantie a été établi par le courtier AcommeAssure le 6 mai 2015 avec effet au 1er juillet 2015 ( la trace de l'envoi du courriel à Mme [H] figure dans le listing des opérations effectuées par Acomme Assure) mais n'a pas été retourné signé par Mme [I] [H].
La société Suravenir Assurances justifie avoir mis en demeure Mme [H] de retourner les conditions particulières signées, par lettre recommandée avec accusé de réception du 25 août 2015 envoyée à son domicile, sous peine de résiliation du contrat au 30 août 2015. Ce courrier étant retourné 'non-réclamé' et faute de réponse, la cotisation du mois de septembre a été remboursée à Mme [H] le 5/09/2015 et plus aucune cotisation n'a ensuite été prélevée, le contrat d'assurance se trouvant régulièrement résilié.
Il apparaît dès lors que du fait de la résiliation du contrat, Mme [H] ne peut plus se prévaloir d'une couverture du sinistre qu'elle a subi en novembre 2015, et sera déboutée de sa demande en indemnisation.
Sur les autres demandes
L'existence d'un refus abusif n'étant pas démontré, il ne sera pas fait droit à la demande en dommages et intérêts.
Il sera fait application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la SA Suravenir Assurances à hauteur de 1 000 euros.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Ordonne la jonction des deux procédures enrôlées sous les n°18/02660 et n°18/04364 et dit que la procédure se poursuivra sous le seul n°18/02660 ;
Par substitution de motifs,
Confirme le jugement sauf en ce qu'il a déclaré irrégulière la résiliation du contrat d'assurance notifiée à Mme [H] ;
Statuant de nouveau de ce chef,
Déclare régulière la résiliation du contrat d'assurance notifiée par la SA Suravenir Assurances à Mme [I] [H] ;
Condamne Mme [I] [H] à payer à la SA Suravenir Assurances la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [I] [H] aux dépens.
LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE