COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-3
ARRÊT AU FOND
DU 24 OCTOBRE 2019
N° 2019/442
Rôle N° RG 18/01944 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BB4PQ
[R], [Y], [O] [F]
[V], [D], [T] [U] épouse [F]
SARL MARSYL
SARL SYLMAR
C/
[M] [P]
[S] [E]
SAMCV CGPA CE (CGPA)
Société CAGEFI
Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL CENTRE LOIRE
Société NORFI (CAISSE REGIONALE NORMANDE DE FINANCEMENT)
SA CAFPI
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me MANENT
Me GUEDJ
Me DANIEL
Me TERRANCLE
Me VIRY
Me TRUPHEME
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX EN PROVENCE en date du 25 Janvier 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 11/07568.
APPELANTS
Monsieur [R], [Y], [O] [F]
né le [Date naissance 2] 1952 à [Localité 14] (BELGIQUE)
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 13]
représenté par Me Muriel MANENT de la SCP MONIER MANENT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assisté de Me Jean BARET, avocat au barreau de PARIS, substituant Me Gerard BINET de la SELARL GERARD BINET ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS
Madame [V], [D], [T] [U] épouse [F]
née le [Date naissance 5] 1953 à [Localité 19] (REPUBLIQUE DU ZAIRE)
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 13]
représentée par Me Muriel MANENT de la SCP MONIER MANENT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, Me Gerard BINET de la SELARL GERARD BINET ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Jean BARET, avocat au barreau de PARIS
SARL MARSYL Prise en la personne de ses représentants légaux, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Muriel MANENT de la SCP MONIER MANENT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me Jean BARET, avocat au barreau de PARIS, substituant Me Gerard BINET de la SELARL GERARD BINET ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS
SARL SYLMAR Prise en la personne de ses représentants légaux,
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Muriel MANENT de la SCP MONIER MANENT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me Jean BARET, avocat au barreau de PARIS, substituant Me Gerard BINET de la SELARL GERARD BINET ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS
INTIMES
Maître Jean-Jacques EYROLLES,
demeurant [Adresse 9]
représenté par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assisté de Me Philippe KLEIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
Monsieur [S] [E]
né le [Date naissance 3] 1948 à [Localité 17] (ISRAEL),
demeurant [Adresse 6]
représenté par Me Dominique DANIEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assisté de Me Jean Claude BOUHENIC, avocat au barreau de PARIS
SAMCV CGPA agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux,
dont le siège social est sis [Adresse 8]
représentée par Me Isabelle TERRANCLE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me Meurphée BECHRAOUI, avocat au barreau de PARIS, substituant Me Jean-François SALPHATI, avocat au barreau de PARIS
Société CAGEFI, prise en la personne de ses représentants légaux,
dont le siège social est sis [Adresse 7]
représentée par Me Martial VIRY de la SCP PLANTARD ROCHAS VIRY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me Nicolas FOUASSIER, avocat au barreau de LAVAL
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL CENTRE LOIRE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux,
dont le siège social est sis [Adresse 10]
représentée par Me Lise TRUPHEME de la SELARL CADJI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
assistée de Me Marion MASSONG, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituant Me Lise TRUPHEME
CAISSE REGIONALE NORMANDE DE FINANCEMENT NORFI, prise en la personne de ses représentants légaux,
dont le siège social est sis [Adresse 4]
représentée par Me Martial VIRY de la SCP PLANTARD ROCHAS VIRY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
SA CAFPI, venant aux droits de Mr [S] [E], représentée par son représentant légal,
dont le siège social est sis [Adresse 6]
représentée par Me Dominique DANIEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me Jean Claude BOUHENIC, avocat au barreau de PARIS
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 02 Juillet 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Mme GERARD, président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Valérie GERARD, Président de chambre
Madame Françoise PETEL, Conseiller
Madame Anne DUBOIS, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe, après prorogation, le 24 Octobre 2019.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Octobre 2019,
Signé par Madame Valérie GERARD, Président de chambre et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
La SA Mona Lisa proposait à ses clients, désireux d'investir dans l'immobilier aux fins notamment de se constituer un complément retraite, d'investir dans des résidences hôtelières en optant pour le statut de loueur en meublé professionnel.
Elle remettait à ses clients un livre blanc présentant son activité et celles de ses filiales, les avantages des investissements proposés, des simulations garantissant notamment que la défiscalisation promise serait appliquée, que les loyers seraient réglés et un rachat du bien au bout de quinze années à un prix plancher.
Courant 2002, [V] [U] et [R] [F] ont été démarchés par un représentant de la SA Mona Lisa qui leur a remis le livre blanc et un dossier de réservation concernant l'hôtel Royal Hôtel à [Localité 11] et l'hôtel Assinie à [Localité 18].
Ils ont constitué la SARL Sylmar le 21 novembre 2002 et désigné [V] [U] en qualité de gérante. La société a été immatriculée le 5 décembre 2002.
Par acte de Me [P], notaire à [Localité 12], du 21 novembre 2002, la CAGEFI a consenti à la SARL Sylmar en cours de formation, un prêt amortissable d'un montant en capital de 442 000 euros d'une durée de 228 mois pour financer l'acquisition des lots 10 et 19 de l'hôtel Royal Hôtel constatée par acte de Me [W], notaire à [Localité 15] du 22 novembre 2002 moyennant le prix de 234 000 euros. Le prêt était garanti par une hypothèque, le cautionnement solidaire des époux [U]-[F] et un nantissement de 2944 actions détenues par [R] [F] sur un compte titre. Le surplus du financement était destiné à régler les honoraires des différentes sociétés du groupe Mona Lisa intervenues dans l'opération, ainsi que les honoraires de la CAFPI, courtier
Par acte de Me Eyrolles du 17 décembre 2002, la SARL Sylmar a également acquis les lots 1 et 2 de l'hôtel situé à [Localité 18], pour un prix de 234 000 euros financé par un emprunt consenti par la Caisse régionale normande de financement (NORFI) d'un montant de 442 000 euros remboursable in fine et devant être remboursé le 30 novembre 2019. Le prêt était notamment garanti par une hypothèque, le cautionnement solidaire des époux [U]-[F] et le nantissement d'un plan « Assur retraite » devant être abondé à hauteur de 150 000 euros.
Courant 2004, ils ont à nouveau été démarchés par la SA Mona Lisa qui leur a proposé d'investir, dans les mêmes conditions, dans un hôtel Aurélia situé à [Localité 16].
Ils ont constitué la SARL Marsyl le 28 décembre 2004, désigné [V] [U] en qualité de gérante et la société a été immatriculée le 30 décembre 2004.
Par acte de Me Eyrolles du 31 décembre 2004, la SARL SMBG a vendu à la SARL Marsyl le lot 8 de l'hôtel Aurélia à [Localité 16], moyennant le prix de 261 000 euros devant être payé sans intérêts au plus tard le 28 février 2005.
Par acte de Me Eyrolles du 8 juillet 2005, la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire a consenti à la SARL Marsyl un prêt d'un montant en capital de 455 225 euros destiné à financer cette opération, remboursable in fine et d'une durée de 180 mois, garanti notamment par une hypothèque et le cautionnement solidaire des associés.
Les sociétés du groupe Mona Lisa ont été successivement placées en redressement judiciaire puis en liquidation judiciaire par jugements du tribunal de commerce de Paris des 9 juin et 22 juin 2009, 28 janvier et 4 février 2010, la SCP BTSG², prise en la personne de Me [N], étant désignée en qualité de liquidateur. Le tribunal de commerce de Paris a arrêté le plan de cession concernant divers hôtels, par jugement du 6 mai 2010.
[V] [U], [R] [F], la SARL Sylmar et la SARL Marsyl ont fait assigner Me [P], la CAGEFI, la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire, la Caisse régionale normande de financement, la SA CAFPI et [S] [E] devant le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence pour voir dire et juger qu'ils avaient failli à leurs obligations de conseil et d'information et au devoir de mise en garde et voir réparer leur préjudice. M. [S] [E] et la SA CAFPI ont fait appeler en cause leur assureur, la CGPA.
Par jugement du 25 janvier 2018, ce tribunal a :
- rejeté l'exception de prescription soulevée par Me [P],
vu l'article 1147 ancien du code civil,
- déclaré irrecevable l'action engagée en paiement de dommages et intérêts par [R] [F] et [V] [U] à l'encontre de la Caisse régionale normande de financement (NORFI),
- déclaré irrecevable l'action engagée en paiement de dommages et intérêts par [R] [F] et [V] [U] à l'encontre de la société coopérative de crédit Caisse générale de financement (CAGEFI),
- déclaré irrecevable l'action engagée en paiement de dommages et intérêts par [R] [F] et [V] [U] à l'encontre de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire,
- débouté la SARL Sylmar de toutes les demandes en paiement de dommages et intérêts dirigées contre la Caisse régionale normande de financement (NORFI),
- débouté la SARL Sylmar de toutes les demandes en paiement de dommages et intérêts dirigées contre la Caisse générale de financement (CAGEFI),
- débouté la SARL Marsyl de toutes les demandes en paiement de dommages et intérêts dirigées contre la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire,
- débouté la SARL Marsyl de toutes les demandes en paiement de dommages et intérêts dirigées contre la Caisse régionale normande de financement (NORFI)(sic)
- débouté [V] [U] et [R] [F] de toutes leurs demandes formées contre [S] [E] et la CAFPI,
vu l'article 1382 du code civil,
- débouté la SARL Marsyl, la SARL Sylmar, [V] [U] et [R] [F] de toutes les demandes en paiement de dommages et intérêts dirigées contre Me [P],
vu les articles L312-1 et suivants du code de la consommation,
- rejeté les demandes tendant à voir dire et juger que les contrats de prêt signés avec la NORFI, la CAGEFI et la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire sont soumis aux dispositions du code de la consommation ;
- débouté en conséquence la SARL Marsyl, la SARL Sylmar, [R] [F] et [V] [U] de leurs demandes en remboursement des intérêts perçus à l'occasion du remboursement de ces trois prêts,
- débouté [R] [F] et [V] [U] de leurs demandes tendant à voir annuler les engagements de caution et le nantissement sur les parts sociales de la SARL Sylmar et de la SARL Marsyl dont ils sont propriétaires,
- débouté la CRCAM Centre Loire de sa demande en paiement de dommages et intérêts,
- constaté que l'appel en garantie formé par [S] [E] et la CAFPI à l'encontre de la CGPA est sans objet,
- condamné in solidum la SARL Sylmar, la SARL Marsyl, [V] [U] et [R] [F] à payer à Maître [P] la somme de trois mille euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum la SARL Sylmar, la SARL Marsyl, [V] [U] et [R] [F] à payer à la Caisse régionale normande de financement (NORFI) la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum la SARL Sylmar, la SARL Marsyl, [V] [U] et [R] [F] à payer à la Caisse générale de financement (CAGEFI) la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- condamné in solidum la SARL Sylmar, la SARL Marsyl, [V] [U] et [R] [F] à payer à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné in solidum la SARL Sylmar, la SARL Marsyl, [V] [U] et [R] [F] à payer à la SA CAFPI et à [S] [E], ensemble, la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné in solidum la SARL Sylmar, la SARL Marsyl, [V] [U] et [R] [F] à payer à la CGPA la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- rejette toute autre demande,
- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire,
- condamné in solidum la SARL Sylmar, la SARL Marsyl, [V] [U] et [R] [F] aux dépens dont distraction au pro't des avocats de la cause.
La SARL Sylmar, la SARL Marsyl, [V] [U] et [R] [F] ont interjeté appel le 2 février 2018.
Par conclusions du 3 juin 2019, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, la SARL Sylmar, la SARL Marsyl, [V] [U] et [R] [F] demandent à la cour de :
- infirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il a :
*rejeté l'exception de prescription soulevée par Me [P],
*débouté [S] [E], la CAFPI, la Caisse régionale normande de financement NORFI de leurs demandes de dommages et intérêts,
et, statuant à nouveau :
à titre principal :
- dire que les époux [F] sont recevables dans leur action à l'encontre de la NORFI du Crédit foncier (sic), et de la CAGEFI,
- dire que les époux [F] sont recevables dans leur action à l'encontre de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire,
- juger que Maître [P], NORFI, CAGEFI la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire et la CAFPI ont failli à leurs obligations respectives de conseil, d'information et de mise en garde vis-à-vis des sociétés Sylmar et Marsyl et des époux [F] et n'ont pas agi de bonne foi vis-à-vis d'eux ;
- juger que le non-respect de leurs obligations, leur négligence, et la seule prise en compte de leurs propres intérêts a fait perdre une chance aux sociétés Sylmar et Marsyl et aux époux [F] de ne pas s'engager dans l'investissement proposé par la société Mona Lisa investissements,
- fixer le préjudice de la société Sylmar et époux [F] en ce qui concerne l'opération [Localité 11] à la somme de 401 365 euros, sauf à parfaire,
- condamner in solidum Me [P], CAFPI et CAGEFI à leur verser la somme de 401 365 euros à titre de dommages et intérêts et dire que cette somme portera intérêts à compter de la demande,
- fixer le préjudice de la société Sylmar et des époux [F] en ce qui concerne l'opération [Localité 18] à la somme de 470 849 euros, sauf à parfaire,
- condamner in solidum Me [P], CAFPI et NORFI à leur payer la somme de 470 849 euros à titre de dommages et intérêts et dire que cette somme portera intérêts à compter de la demande,
- fixer le préjudice de la société Marsyl et des époux [F] en ce qui concerne l'opération Aurélia à la somme de 309 193 euros sauf à parfaire,
- condamner in solidum Me [P], CAFPI et la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire à leur payer la somme de 309 193 euros et dire que cette somme portera intérêts à compter de la demande,
à titre subsidiaire,
- juger que le contrat de prêt conclu entre la société Sylmar et CAGEFI, qualifié de prêt professionnel ordinaire portant sur une somme de 442 000 euros est un crédit immobilier consenti aux époux [F] et soumis aux dispositions de l'article L312-1 et suivants du code de la consommation,
- prononcer en conséquence, conformément aux dispositions de l'article L312-33 dudit code, la déchéance des intérêts courus sur ce prêt,
- dire que les intérêts déjà réglés devront s'imputer à due concurrence sur le montant en capital de ces prêts,
- juger que l'engagement de caution des époux [F] est nul et de nul effet et en conséquence, juger que les nantissements donnés par ces derniers sont également nuls,
- juger que le contrat de prêt conclu entre la société Sylmar et NORFI, qualifié de crédit d'investissement, portant sur une somme de 442 000 euros est un crédit immobilier consenti aux époux [F] et soumis aux dispositions de l'article L312-1 et suivants du code de la consommation,
- prononcer en conséquence, conformément aux dispositions de l'article L312-33 dudit code, la déchéance des intérêts courus sur ce prêt,
- dire que les intérêts déjà réglés devront s'imputer à due concurrence sur le montant en capital de ces prêts,
- juger que l'engagement de caution des époux [F] est nul et de nul effet et en conséquence, juger que les nantissements donnés par ces derniers sont également nuls,
- ordonner le remboursement des sommes versées par les cautions à leur valeur de capitalisation à la date de l'arrêt à intervenir,
- juger que le contrat de prêt conclu entre la société Marsyl et la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire, qualifié de crédit d'investissement, portant sur une somme de 455 525 euros est un crédit immobilier consenti aux époux [F] et soumis aux dispositions de l'article L312-1 et suivants du code de la consommation,
- prononcer en conséquence, conformément aux dispositions de l'article L312-33 dudit code, la déchéance des intérêts courus sur ce prêt,
- dire que les intérêts déjà réglés devront s'imputer à due concurrence sur le montant en capital de ces prêts,
- juger que l'engagement de caution des époux [F] est nul et de nul effet et en conséquence, juger que les nantissements donnés par ces derniers sont également nuls,
en tout état de cause,
- débouter les intimés de l'ensemble de leurs demandes,
- condamner Maître [P], CAGEFI, NORFI, la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire, et la CAFPI au paiement chacun d'une somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner les mêmes aux dépens que la SCP Monier-Manent pourra recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par conclusions du 24 juin 2019, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, Maître [M] [P] demande à la cour de :
- confirmer la décision dont appel,
- dire et juger irrecevables les demandes formulées par les personnes physiques qui ne sont ni emprunteurs, ni acquéreurs,
- dire et juger inapplicables aux sociétés Sylmar et Marsyl, inscrites au RCS, les dispositions de l'article L 312-l du code de la consommation par application des dispositions de l'article L 312-2 du même code ;
- dire et juger prescrite la demande fondée à ce titre par application de l'article 1304 du code civil ;
- dire et juger en toute hypothèse qu'il y a eu ratification au sens de l'article 1338 du code civil ;
- dire et juger que la déchéance du droit aux intérêts qui résulterait d'une mauvaise mise en 'uvre des conditions préparatoires du prêt par la banque, ne peut entraîner de condamnation solidaire du notaire ;
- dire et juger que le défaut de mise en garde ne peut être reproché qu'aux banques à l'exception du notaire ;
- dire et juger par conséquent que le notaire ne peut répondre d'une indemnisation qui résulterait d'un défaut de mise en garde par la banque ;
- dire et juger que le notaire n'a pas failli à son obligation de conseil ;
- dire et juger que les actes préparatoires démontrent que tous les conseils ont été prodigués aux requérants par de multiples professionnels intervenus en amont et rémunérés pour cette fonction ;
- dire et juger que les requérants ne rapportent pas la preuve de l'existence d'un préjudice actuel et certain en l'absence des bilans jusqu'à ce jour et de la situation fiscale des associés ;
- dire et juger qu'ils ne rapportent pas la démonstration d'un lien de causalité entre une faute personnelle du notaire distincte de celle des autres intervenants et le préjudice qu'ils réclament ;
- dire et juger que la perte de chance est contredite par le contenu des statuts antérieurs à l'acte notarié et qu'elle n'est donc pas démontrée :
- débouter par conséquent les requérants et la banque purement et simplement de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;
- dire et juger n'y avoir lieu à solidarité ;
- les condamner reconventionnellement au paiement d'une somme de 5.000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
- les condamner aux entiers dépens de la présente instance dont distraction au profit de Maître Paul Guedj sur son affirmation de droit.
Par conclusions du 24 juillet 2018, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, la CAGEFI demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence du 25 janvier 2018 en toutes ses dispositions,
y ajoutant,
- débouter la SARL Sylmar, la SARL Marsyl et les époux [F] de l'intégralité de leurs demandes, fins, moyens et conclusions,
- condamner solidairement les époux [F] et la SARL Sylmar à payer à la CAGEFI la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- condamner solidairement les époux [F] et la SARL Sylmar aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Viry, avocat, aux offres et affirmations de droit.
Par conclusions du 25 juillet 2018, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, la Caisse régionale normande de financement (NORFI) demande à la cour de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence du 25 janvier 2018,
- subsidiairement, condamner in solidum Me [P], la CAFPI et [S] [E] à garantir la NORFI de toutes condamnations en principal, intérêts, frais et accessoires qui pourraient être prononcées contre elle,
en toute hypothèse,
- débouter les époux [F], la société Sylmar et la société Marsyl de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions,
- condamner in solidum toutes parties succombantes au paiement d'une somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et, sous la même solidarité aux entiers dépens qui seront recouvrés par Me Liberas, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par conclusions du 5 juillet 2018, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire (le Crédit agricole) demande à la cour de :
- rejeter l'intégralité des demandes présentées à l'encontre de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;
- condamner tous succombants à payer à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par conclusions du 29 mai 2019, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, [S] [E] et la SA CAFPI demandent à la cour de :
in limine litis,
- déclarer irrecevable toute demande formulée à l'encontre de M. [S] [E] au droit duquel vient la S.A. CAFPI ;
- prendre acte que les époux [F] ainsi que les sociétés Sylmar et Marsyl n'ont formulé aucune demande à l'encontre de M. [S] [E] ;
- confirmer le jugement du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence en date du 25 janvier 2018 en ce qu'il a prononcé la mise hors de cause de M. [S] [E] ;
à titre principal :
- déclarer la SA. CAFPI et M. [S] [E] recevables et bien fondés en toutes leurs demandes, fins et conclusions ;
- dire et juger que la S.A. CAFPI n'était pas tenue d'un devoir de conseil et de mise en garde quant à la viabilité de l'opération immobilière projetée par les époux [F] ainsi que les sociétés Sylmar et Marsyl ;
- dire et juger que la NORFI ne démonter aucune faute de la CAFPI ou d'[S] [E] en sa qualité de courtier en prêt immobilier,
- confirmer le jugement du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence en date du 25 janvier 2018 en ce qu'il a constaté que les époux [F] ainsi que les sociétés Sylmar et Marsyl ne démontrent aucune faute de la SA. CAFPI ou de M. [S] [E] ;
par conséquent,
- confirmer le jugement du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence en date du 25 janvier 2018 en ce qu'il a débouté les époux [F] ainsi que les sociétés Sylmar et Marsyl de l'ensemble de leurs demandes fins et conclusions formées à l'encontre de la SA CAFPI et de M. [S] [E] ;
à titre subsidiaire :
- dire et juger que la CAFPI ne saurait être tenue au paiement de quelque somme que ce soit du fait de l'existence d'une cause étrangère ;
par conséquent,
- débouter les époux [F] ainsi que les sociétés Sylmar et Marsyl de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
à titre très subsidiaire :
- dire et juger que le préjudice des demandeurs n'est ni justifié, ni déterminé, ni identifié, les sommes sollicitées n'étant pas réparties entre les demandeurs pourtant distincts ;
par conséquent,
- débouter les époux [F] ainsi que les sociétés Sylmar et Marsyl de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
à titre extrêmement subsidiaire :
- constater que la SA CAFPI a souscrit une police d'assurance responsabilité civile professionnelle avec la société d'assurance CGPA qui garantit les risques liés à l'activité d'intermédiaire en opération de banque ;
- dire et juger que la responsabilité de la S.A. CAFPI (venant aux droits de M. [E]) est recherchée au titre de son activité d'intermédiaire en opération de banque ;
- constater l'absence d'un sinistre sériel ;
- dire et juger que la Caisse de garantie des professionnels de 1'assurance sera condamnée à relever et garantir la S.A. CAFPI et M. [S] [E] de toute condamnation en principal, intérêts, dommages et intérêts, frais de l'article 700 du code de procédure civile et dépens, qui viendraient à être prononcés contre eux,
en tout état de cause :
- débouter les époux [F] ainsi que les sociétés Sylmar et Marsyl de toutes leurs demandes et conclusions à l'encontre de la S.A. CAFPI et de M. [S] [E] ;
- in'rmer le jugement du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence en date du 25 janvier 2018 en ce qu'il a débouté la SA. CAFPI et M. [S] [E] de leur demande pour procédure abusive et, statuant à nouveau sur ce point :
- condamner les époux [F] ainsi que les sociétés Sylmar et Marsyl à payer à la S.A. CAFPI et à M. [S] [E] la somme de 5.000 € pour procédure abusive ;
- confirmer le jugement du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence en date du 25 janvier 2018 en ce qu'il a condamné les époux [F] ainsi que les sociétés Sylmar et Marsyl à payer à la S.A. CAFPI et à M. [S] [E] la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- confirmer le jugement du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence en date du 25 janvier 2018 en ce qu'il a condamné les époux [F] ainsi que les sociétés Sylmar et Marsyl aux dépens,
y ajoutant :
- condamner les époux [F] ainsi que les sociétés Sylmar et Marsyl à payer à la S.A. CAFPI et à M. [S] [E] la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens au profit de Maître Dominique Daniel, avocat à la cour d'appel d'Aix-en-Provence, sur son offre de droit.
Par conclusions du 10 juillet 2018, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, la société CGPA demande à la cour de :
à titre principal :
- confirmer le jugement dans toutes ses dispositions et déclarer sans objet l'appel en garantie formé par la société CAFPI à l'encontre de la CGPA,
à titre subsidiaire et si la cour devait infirmer le jugement :
- dire et juger que CAFPI et M. [E] ne rapportent pas la preuve que les fautes qui leur sont reprochées rentrent dans le cadre du contrat souscrit auprès de CGPA,
en conséquence,
- débouter la société CAFPI, M. [E] ou tout autre demandeur de toutes leurs demandes, fins et prétentions dirigées à l'encontre de CGPA,
à titre plus subsidiaire :
- dire et juger que la garantie de la CGPA pour l'ensemble des dossiers concernant l'affaire Mona Lisa et qui constituent un sinistre sériel ne saurait excéder la somme de 150 000 €, de laquelle doit être déduite la franchise de 20% avec un minimum de 2 000 € et un maximum de 4 500 €,
à titre extrêmement subsidiaire, si la cour devait estimer ne pas être en présence d'un sinistre sériel :
- limiter la condamnation de la CGPA au plafond contractuel de 150 000 € par sinistre et 2 500 000 € par année d'assurance et déduire par sinistre la franchise de 20% avec un minimum de 2 000 € et un maximum de 4 500 €,
en tout état de cause :
- désigner tel séquestre qu'il plaira à la cour avec pour mission de conserver les fonds dans l'attente des décisions définitives tranchant les différentes réclamations formées à l'encontre de la société CAFPI concernant les diverses mises en cause dans les dossiers Mona Lisa, pour, le cas échéant, procéder à une répartition au marc l'euro des fonds séquestrés ;
- condamner les succombants à payer à la CGPA la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Terrancle, avocat, dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il n'est rien sollicité à l'encontre d'[S] [E], il doit être mis hors de cause.
-1- Sur la recevabilité de l'action de [V] [U] et [R] [F] :
Si le prêt n'a pas été consenti aux époux [F], mais aux SARL Sylmar et Marsyl, ceux-ci, qui recherchent la responsabilité du notaire, notamment en sa qualité de rédacteur d'acte, et celle des banques, sont intervenus aux actes pour se porter cautions solidaires des engagements des SARL Symar et Marsyl au titre des prêts consentis par le Crédit agricole, la CAGEFI et la NORFI. À ce titre, leur action est recevable.
-2- Sur la responsabilité des intervenants :
Les époux [F] se sont vus remettre, préalablement aux actes de vente et de prêts des 21 novembre, 22 novembre, 17 décembre 2002, 31 décembre 2004 et 8 juillet 2005 :
- un « livre blanc du concept : loueur en meublé professionnel » (pièce 1 des appelants) commençant par « nous nous devons d'éclairer votre engagement », décrivant, sur 29 pages, la société Mona Lisa, les intervenants, dont les différentes sociétés du groupe Mona Lisa, le déroulement financier de l'investissement, la présentation du loueur en meublé professionnel,
- un dossier de réservation pour chacun des hôtels comprenant un contrat préliminaire de réservation avec le prix de l'acquisition et les honoraires dus aux sociétés du groupe, un projet de bail commercial et les garanties offertes à l'investisseur,
- une étude personnalisée (pièce 2) présentant les avantages et économies fiscales attendues.
Les statuts de la SARL Sylmar ont été établis par Me Gobert, avocat et ceux de la SARL Marsyl par le cabinet Dosseto-Maillet, avocats. Ils comportaient pour chacun (pièces 2 et 7 de Me [P]) l'autorisation donnée au gérant d'acquérir les lots de copropriété des hôtels Royal Hôtel, Assinie et Aurélia moyennant les prix respectifs de 234 000 euros (Royal Hôtel et Assinie) et de 261 000 euros (Aurélia) ainsi que le montant des prêts à souscrire pour chacune des opérations soit 884 000 euros (Royal Hôtel et Assinie) et 454 000 euros (Aurélia).
Pour chacun des investissements, [V] [U], en sa qualité de gérante des SARL Sylmar et Marsyl en cours de formation, a confié une convention d'assistance et d'expertise comptable à la SARL Moncey Audit, un contrat de domiciliation à la SA Mona Lisa gestion immobilière, des mandats de recherche de locataire. Les époux [U]-[F] ont également confié à la SA Mona Lisa Investissements une mission d'assistance de conseil et de prestations de services pour les assister dans ces opérations.
Les baux commerciaux ont été conclus avec les SA Mona Lisa Hôtels et Résidences et SARL Assinie.
Postérieurement à l'acquisition, les appelants ont obtenu une attestation de garantie financière de rachat émanant de la société de droit italien Boston SPA au profit du vendeur la SARL SMBG pour un montant de 221 000 euros (opération hôtel Assinie) et une attestation de cette même société au profit de la SA Mona Lisa Holding pour un montant de 23 010 euros correspondant à une année de loyers (hôtel Assinie).
- Sur la responsabilité du notaire :
Les appelants soutiennent que le notaire, qui avait nécessairement connaissance de la motivation fiscale des acquéreurs, devait avoir conscience que le montant des loyers promis, éléments essentiels à la réalisation du but poursuivi, était surévalué par rapport à la valeur réelle du bien. Ils soutiennent également que le notaire aurait dû attirer leur attention sur le fait que la garantie de loyer reposait uniquement sur la holding du groupe Mona Lisa.
Le notaire doit, avant de dresser les actes, procéder à la vérification des faits et conditions nécessaires pour assurer l'utilité et l'efficacité de ses actes et, s'il n'est pas tenu d'une obligation de conseil ou de mise en garde quant à l'opportunité économique d'une opération en l'absence d'éléments d'information qu'il n'a pas à rechercher, il est néanmoins tenu d'une telle obligation s'il a connaissance de la finalité de l'engagement des parties.
Me [P], notaire habituel de la SA Mona Lisa Investissement, désigné comme notaire instrumentaire dans les promesses unilatérales de vente, était donc nécessairement informé de la finalité de l'opération de défiscalisation à laquelle il prêtait son concours.
Il a d'ailleurs, à ce titre, par lettre du 31 octobre 2002 (pièce 12 des appelants), rappelé les dispositions fiscales applicables à l'opération et ces derniers ne contestent pas le caractère pertinent de l'information qui leur a été donnée.
En l'absence de toute démonstration de ce qu'il bénéficiait d'informations qu'il n'aurait pas délivrées aux acquéreurs et cautions, il n'avait pas à rechercher la rentabilité du projet d'acquisition au regard du marché local, les appelants ne démontrant même pas que les loyers envisagés dans le projet qui leur a été présenté étaient surévalués.
En effet, les difficultés du groupe Mona Lisa ne sont apparues qu'en 2006, les loyers étant réglés jusqu'à cette date et les appelants ne justifient par aucune pièce de l'absence de viabilité du projet tel que présenté par la SA Mona Lisa Investissement, étant rappelé qu'aucune poursuite n'a jamais été engagée à son encontre ou à l'encontre des sociétés du groupe au titre d'une quelconque fraude.
Ils ne produisent aucune pièce montrant une quelconque inadéquation du loyer fixé et prévu au regard du marché au jour des acquisitions.
La supériorité du prix de vente par lots au prix d'acquisition de l'immeuble entier par le vendeur, tel qu'il figure clairement dans l'acte authentique et le projet d'acte communiqué aux appelants, ne signifie pas que les prix des loyers promis dans un bail commercial distinct, que le notaire n'a pas établi, étaient surévalués et celui-ci n'avait pas à en rechercher l'opportunité économique dans le cadre de l'acte de vente qu'il était chargé d'authentifier.
Enfin, le notaire chargé d'authentifier une vente, même dans le cadre d'une opération de défiscalisation dont il a connaissance, n'a pas à avertir les acquéreurs du risque attaché à une garantie de paiement de loyers concernant un bail commercial qu'il n'était pas chargé de régulariser, une telle garantie ne relevant d'aucune obligation légale.
- Sur la responsabilité des banques :
Les appelants soutiennent que les banques ont failli à leur devoir de mise en garde alors que l'investissement constituait un endettement risqué dans l'hypothèse où les opérations pouvaient ne pas être menées à terme par la SA Mona Lisa et qu'ils n'ont eu aucun contact avec les prêteurs. Ils ajoutent que les délais très courts dans lesquels les banques ont donné leur accord sont symptomatiques du système mis en place et révèlent la validation en amont du montage qui leur était ainsi proposé. Spécialement, ils soutiennent que l'emprunteur est non averti et qu'il y avait un risque d'endettement excessif.
Le banquier dispensateur de crédit n'est tenu d'un devoir de mise en garde, qu'à la double condition que son cocontractant soit une personne non avertie et qu'il existe un risque d'endettement né de l'octroi du prêt lequel résulte de l'inadaptation du prêt aux capacités financières de l'emprunteur.
Il n'incombe pas au prêteur, contrairement à ce que font valoir les appelants, de vérifier l'opportunité économique de l'opération financée et ceux-ci échouent à démontrer que la CAGEFI, la NORFI ou le Crédit agricole connaissaient dès l'origine les faiblesses alléguées du montage auquel ils ont souscrit ou la surévaluation des loyers ou a fortiori « la fraude pyramidale » qu'ils invoquent, étant rappelé que les appelants n'ont jamais mis en cause aucune des sociétés du groupe Mona Lisa.
Contrairement à ce que soutiennent les appelants, la banque, quand bien même elle n'aurait pas rencontré les candidats emprunteurs, a eu communication de l'intégralité des documents concernant l'opération à financer et les revenus, patrimoine et épargne des époux [U]-[F].
Le caractère averti ou non de l'emprunteur, s'agissant d'une société, s'apprécie en la personne de son ou ses dirigeants au jour de la souscription des prêts et en l'espèce, en la personne de [V] [U].
Il n'est justifié par les banques d'aucune qualification particulière de [V] [U] permettant de la considérer comme avertie que ce soit en sa qualité de gérante des SARL Sylmar et Marsyl ou en sa qualité de caution de ces sociétés pour les prêts souscrits en 2002 et 2005.
Ces deux sociétés ont été constituées dans le seul but d'établir des bénéfices industriels et commerciaux venant en déduction des revenus des associés et il résulte des documents remis aux banques comportant notamment le dossier de réservation avec le projet de bail commercial et les garanties financières accordées ainsi que les remboursements de TVA induits par le régime de LMP choisi par ces sociétés, que le projet économique ainsi présenté était viable, non voué à l'échec et que les prêts ont d'ailleurs toujours été remboursés.
Il n'existait donc aucun risque d'endettement excessif et ni la CAGEFI, ni la NORFI, ni le Crédit agricole n'étaient donc tenus à un devoir de mise en garde à l'égard de la SARL Sylmar, de la SARL Marsyl ou de [V] [U], emprunteurs et caution non avertis.
Il résulte également des pièces produites aux débats et notamment de la copie des avis d'imposition et des déclarations de revenus fonciers remis aux banques par [R] [F], caution des engagements des SARL Sylmar et Marsyl, que ce dernier était président directeur général d'une SA comportant près de 300 salariés, qu'il avait déjà exercé des fonctions de direction au sein de sociétés comparables, et avait déjà procédé à des investissements immobiliers destinés à lui procurer des revenus locatifs à visée de défiscalisation de ses revenus (Périssol notamment).
Il doit en conséquence être considéré comme une caution avertie et ni la CAGEFI, ni la NORFI ni le Crédit agricole n'étaient tenus à son égard d'un devoir de mise en garde, étant rappelé qu'il ne démontre pas que les banques disposaient d'éléments que lui-même ignorait.
Les appelants font valoir que les banques ont également failli à leurs obligations d'information et de conseil dans le cadre de la souscription des instruments financiers censés garantir le remboursement du prêt in fine.
Ces prétentions ne sont assorties d'aucune pièce.
La fiche de renseignements établie par la CAFPI et la fiche de renseignements caution signée par [R] [F] montrent qu'il était déjà titulaire de valeurs mobilières et d'une assurance vie et il ne démontre pas en quoi les produits nantis présentaient une prise de risque nécessitant une mise en garde.
- Sur la responsabilité de la SA CAFPI :
Les appelants ne dénient pas que la SA CAFPI est intervenue à leur profit, pour rechercher le financement nécessaire à leur opération. Ils lui reprochent de n'avoir jamais été expressément mandatée par eux et de n'avoir présenté leur dossier qu'à une seule banque pour chacune des opérations, se bornant en réalité à mettre en forme le dossier de l'agent commercial de la SA Mona Lisa, sans jamais les informer ou les conseiller. Ils observent que le représentant de la SA CAFPI mis en cause pour des agissements similaires dans d'autres opérations, a été mis à l'écart par cette dernière.
Le courtier, qui doit seulement présenter aux emprunteurs, ses mandants, un financement correspondant à leurs capacités financières, n'a pas d'obligation de conseil quant à l'opération financée.
Les appelants, qui ne contestent pas que la SA CAFPI est intervenue à leur profit et ont ratifié le mandat en réglant ses honoraires et en acceptant l'offre transmise par le courtier, ne démontrent pas en quoi les prêts proposés par la CAGEFI, la NORFI et le Crédit agricole ne correspondaient pas à leurs besoins ou au financement qu'ils souhaitaient, ni que la SA CAFPI avait des informations sur l'opération qu'eux-mêmes ignoraient. C'est donc par des motifs pertinents que la cour adopte, que les premiers juges ont débouté les appelants de leurs demandes dirigées contre la SA CAFPI.
L'appel en garantie formé par la SA CAFPI à l'encontre de la CGPA est par conséquent sans objet.
-3- Sur la requalification des contrats de prêt :
Invoquant les dispositions des articles L312-1 à L312-10 du code de la consommation, les appelants sollicitent la déchéance totale du droit aux intérêts.
Cependant, les prêts n'ont été souscrits que pour l'acquisition de biens immobiliers destinés à la location sous le statut de loueur en meublé professionnel, l'inscription des SARL Sylmar et Marsyl au RCS étant effective dès les 5 décembre 2002 et 30 décembre 2004, pour pouvoir bénéficier des dispositions fiscales relatives à la récupération de la TVA.
Conclus pour l'exercice d'une activité professionnelle, même exercée à titre accessoire, les prêts ne sauraient être soumis aux dispositions du code de la consommation en application de son article L312-3.
-4- Sur la nullité des engagements de caution et des nantissements :
Les appelants n'indiquant pas en quoi les engagements de caution souscrits par actes authentiques ou les nantissements constatés dans les mêmes actes encourraient la nullité, le jugement est confirmé en ce qu'il a justement rejeté cette demande.
-5- Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive :
La SA CAFPI et [S] [E] ne démontrent pas que l'action a été engagée de manière téméraire ou malveillante, ni avoir subi un quelconque préjudice.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt contradictoire,
Met hors de cause [S] [E],
Infirme le jugement déféré en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action engagée par [V] [U] et [R] [F] à l'encontre de la CAGEFI, de la NORFI et du Crédit agricole,
Statuant à nouveau, déclare l'action de [V] [U] et [R] [F] à l'encontre de la CAGEFI, de la NORFI et du Crédit agricole recevable,
Les en déboute,
Confirme pour le surplus le jugement déféré,
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne in solidum [V] [U], [R] [F], la SARL Sylmar et la SARL Marsyl à payer :
- à Me Jean-Jacques Eyrolles la somme de trois mille euros,
- à la CAGFI la somme de trois mille euros,
- à la Caisse régionale normande de financement la somme de trois mille euros,
- à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire la somme de trois mille euros,
- à [S] [E] et la SA CAFPI, ensemble, la somme de trois mille euros,
Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la CGPA,
Condamne in solidum [V] [U], [R] [F], la SARL Sylmar et la SARL Marsyl aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT