COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-1
ARRÊT AU FOND
DU 21 NOVEMBRE 2019
N° 2019/ 385
N° RG 17/08440 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BAO34
SARL PROVENCE SERVICES TRADING
Société MUTUELLE DU MANS 'MMA IARD'
Société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES,
C/
Société TOPLIS & HARDING INTERNATIONALLTD
SA AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE
Société AIG EUROPE LIMITED
SAS ORTEC SERVICES INDUSTRIE
Société ALPHA LOGISTICS SERVICES (EPZ) LTD
Société KENFREIGHT EA LTD
Société AON KENYA INSURANCE BROKERS LTD
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me Ludovic ROUSSEAU
Me Joseph MAGNAN
Me Perrine GASTON
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 07 Avril 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 2014F03474.
APPELANTES
SARL PROVENCE SERVICES TRADING ET MOVING - T&M, dont le siège social est sis [Adresse 5]
représentée par Me Ludovic ROUSSEAU de la SCP ROUSSEAU & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Pierre-Yves GUERIN, avocat au barreau de PARIS, plaidant
S.A. MUTUELLE DU MANS 'MMA IARD' aux droits de COVEA FLEET dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Ludovic ROUSSEAU de la SCP ROUSSEAU & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Pierre-Yves GUERIN, avocat au barreau de PARIS, plaidant
MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, aux droits de COVEA FLEET dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Ludovic ROUSSEAU de la SCP ROUSSEAU & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Pierre-Yves GUERIN, avocat au barreau de PARIS, plaidant
INTIMEES
Société TOPLIS & HARDING INTERNATIONALLTD
dont le siège social est sis [Adresse 6] KENYA
défaillante
SA AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE, dont le siège social est sis [Adresse 4]
représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Hervé LA ROQUE, avocat au barreau de PARIS, plaidant
Société AIG EUROPE LIMITED société de droit étranger dont le siège social est sis [Adresse 9] - ROYAUME UNI dont le siège social spécial pour la France est [Adresse 2]
représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Hervé LA ROQUE, avocat au barreau de PARIS, plaidant
SAS ORTEC SERVICES INDUSTRIE, dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Hervé LA ROQUE, avocat au barreau de PARIS, plaidant
Société ALPHA LOGISTICS SERVICES (EPZ) LTD, demeurant [Adresse 13] KENYA
représentée par Me Perrine GASTON de la SELARL RAISON & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
Société KENFREIGHT EA LTD dont le siège social est sis [Adresse 14] KENYA, demeurant [Adresse 16] KENYA
défaillante
Société AON KENYA INSURANCE BROKERS LTD
dont le siège social est sis [Adresse 7] KENYA
défaillante
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 14 Octobre 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Pierre CALLOCH, Président
Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller
Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Novembre 2019.
ARRÊT
Par défaut,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Novembre 2019,
Signé par Monsieur Pierre CALLOCH, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
F A I T S - P R O C E D U R E - D E M A N D E S
Sont assurées :
- depuis le 1er janvier 2011 la S.A.S. aixoise ORTEC SERVICES INDUSTRIES [] auprès des compagnies AXA CORPORATE SOLUTIONS (apériteur) et CHARTIS INSURANCE, selon police n° 184098 ;
- depuis le 1er janvier 2013 la S.A.R.L. marseillaise PROVENCE SERVICES TRADING ET MOVING [], immatriculée le 17 janvier 1990 auprès de la compagnie COVEA FLEET en vertu d'une police n° 38004.
Le 24 octobre 2013 la société ougandaise EAST AFRICA CRANES Ltd [] a facturé à la société camerounaise CAMLEV la vente d'une grue GROVE GMK 3050 de seconde main, d'un poids d'environ 38 t avec une capacité de levage de 50 t, portant le numéro de série 30509535, au prix de 338 000 $ 00 et avec la précision Port [Localité 8] [Cameroun]$gt;. Le même jour la société kenyane ALPHA LOGISTICS SERVICES (EPZ) Ltd a émis une facture contre la société PROVENCE SERVICES pour le transport de cet engin 'FOT [Free On Truck c'est-à-dire que le chargement comme le déchargement de la marchandise incombent non au transporteur mais aux expéditeur et destinataire] [Localité 10] (Ouganda) à FOB [Free On Board] [Localité 15] (Kenya)' au prix de 15 000 $ 00.
Selon bon de commande du 27 novembre 2013 la société ORTEC a pour cette grue confié à la société PROVENCE SERVICES les prestations suivantes : forfait pour le transport depuis [Localité 11] [Ouganda] à rendu CFR [Localité 8] + FOT [Localité 10] à FOB [Localité 15] + transfert de quai [Localité 12]/[Localité 12] + fret [Localité 15]-[Localité 12] et fret [Localité 15]/[Localité 8] + depuis FOT [Localité 10] à rendu [Localité 8], avec livraison à la société CAMLEV à [Localité 8], le tout pour le prix de 38 000 euros 00 H.T. Mais la facture émise le 27 janvier 2014 a réduit cette somme à 36 000 euros 00 sans T.V.A., en précisant un transport terrestre de [Localité 10] à [Localité 15], un transport maritime de [Localité 15] à [Localité 12], dans cette dernière ville un déchargement puis un embarquement, et enfin un transport maritime de [Localité 12] à [Localité 8].
Pour la partie terrestre de ce transport la société PROVENCE SERVICES a fait appel à la société kenyane ALPHA LOGISTICS SERVICES (EPZ) LTD, et en a été facturée le 24 octobre 2013 pour la somme de 15 000 $ 00 avec la mention 'FOT [Localité 10] à FOB [Localité 15]'. La société kenyane KENFREIGHT EA Ltd a émis le 12 décembre 2013 un manifeste de transport routier mentionnant que la marchandise est transportée aux risques de son propriétaire, et indiquant comme chargeur la société EAC, et comme consignee la société CAMLEV. La prestation a semble-t-il été réalisée par la société ougandaise MS HAJINUR & SONS Ltd, bien que sur ce point aucun document ne soit communiqué par les parties.
Lors de ce trajet terrestre le 14 décembre 2013 le camion transportant la grue, fortement gêné près de la localité kenyane de TIMBOROA par un autre immobilisé sur la route et par un troisième arrivant en sens inverse, est sorti de la route et s'est renversé ; la grue a subi des dégâts très importants.
La société ORTEC a signé en faveur des assureurs AXA CORPORATE SOLUTIONS pour 80 % et AIG EUROPE pour 20 % deux actes de subrogation précisant 'grue endommagée au cours d'un transfert au Kenya 15/12/2013' :
- le premier le 11 juin 2014 pour un acompte de 110 000 euros 00,
- le second le 24 novembre suivant pour la somme de 68 381 euros 92 : préjudice de 180 381 euros 92 moins cet acompte moins la franchise de 2 000 euros 00.
La société ERGET, missionnée dès le 17 décembre 2013 par le courtier d'assurance de la société ORTEC, a établi le 19 novembre 2014 un précisant :
- la grue GMK 3050-1 rapatriée en France chez la société MANITOWOC filiale du constructeur la société allemande MANITOWOC, mise en service le 1er janvier 2008, a une valeur d'achat de 275 000 euros 00, et une valeur vénale de 240 305 euros 17 le jour de l'accident ;
- le préjudice H.T. comprend la remise en état de la grue (171 491 euros 09) et des frais de transport (5 000 euros 00), soit au total la somme de 176 491 euros 09 ;
et a émis 3 factures d'honoraires et de frais les 26 juin 2014 et 17 novembre 2014 pour la somme de 11 153 euros 13 T.T.C.
Ont été assignées successivement :
- le 11 décembre 2014 la société PROVENCE SERVICES et la société COVEA FLEET par la société AXA, la société AIG et la société ORTEC ;
- le 9 janvier 2015 la société ALPHA, la société KENFREIGHT, la société AON KENYA domiciliées chez la société TOPLIS & HARDING par la société PROVENCE SERVICES et la société COVEA FLEET ;
- le 11 mai 2015 la société KENFREIGHT par la société ALPHA ;
- le 18 juin 2015 la société ALPHA, la société KENFREIGHT, la société AON KENYA et la société TOPLIS & HARDING par la société PROVENCE SERVICES et la société COVEA FLEET.
Le Tribunal de Commerce de MARSEILLE par jugement du 7 avril 2017 réputé contradictoire vu la non-comparution des sociétés KENFREIGHT, AON KENYA INSURANCEBROKERS Ltd, et TOPLIS & HARDING INTERNATIONAL Ltd, a :
* joint les 4 instances ;
* reçu la S.A. MMA IARD immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés le 30 novembre 2001 et la société civile MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES immatriculée le 28 octobre 2002, venant toutes deux aux droits de la société COVEA FLEET, en leur intervention volontaire ;
* rejeté les demandes de la société PROVENCE SERVICES et des sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES relatives à :
- l'injonction de révéler le nom de la compagnie d'assurance,
- la production des garanties d'assurances couvant les responsabilités des parties
intervenues dans l'accident du 14 décembre 2014 [en réalité 2013] au KENYA,
- la production du rapport de police ;
* en conséquence, dit n'y avoir lieu de surseoir à statuer ;
* dit recevable l'action de la société AXA, de la société AIG et de la société ORTEC à l'encontre de la société PROVENCE SERVICES et des sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES ;
* condamné la société PROVENCE SERVICES et les sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES à payer :
- aux sociétés AXA et AIG la somme de 174 491 euros 09 au titre du sinistre, et la somme de 11 153 euros 13 au titre des frais d'expertise, lesdites sommes avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;
- à la société ORTEC la somme de 2 000 euros 00 au titre de la franchise, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;
* dit que les intérêts au taux légal se capitaliseront par périodes annuelles et porteront intérêts au même taux ;
* débouté la société PROVENCE SERVICES et les sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES de leurs appels en garantie à l'encontre de la société ALPHA, de la société KENFREIGHT, de la société AON KENYA et de la société TOPLIS & HARDING ;
* dit sans objet l'appel en garantie de la société ALPHA à l'encontre de la société KENFREIGHT, et a débouté la première de ses demandes à l'encontre de la seconde ;
* débouté la société AXA, la société AIG et la société ORTEC de leur demande en paiement de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
* condamné la société PROVENCE SERVICES et les sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES à payer au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
- aux sociétés AXA, AIG et ORTEC la somme totale de 10 000 euros 00 ;
- à la société ALPHA la somme de 3 000 euros 00 ;
* condamné la société PROVENCE SERVICES et les sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES aux dépens ;
* ordonné pour le tout l'exécution provisoire ;
* rejeté pour le surplus toutes autres demandes contraires.
La S.A.R.L. PROVENCE SERVICES TRADING ET MOVING - T & M, la S.A. MUTUELLE DU MANS 'MMA IARD' et la société civile MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES toutes deux aux droits de la société COVEA FLEET, ont régulièrement interjeté appel le 28 avril-2 mai 2017, et par conclusions n° 3 du 9 septembre 2019 demandent à la Cour de :
* les recevoir en leur appel comme justifié au fond ;
* infirmer le jugement en toutes dispositions contraires aux présentes ;
* débouter les intimés de toutes prétentions plus amples ou contraires :
* et de manière récapitulative :
A - Sur l'action formée à titre principal par les sociétés AXA, AIG et ORTEC :
* à titre principal sur les fins de non recevoir, vu les articles 31 et 32, particulièrement les articles 1103 et 1732 du Code Civil, et 122 du Code de Procédure Civile :
- juger que lors de l'événement, les réparations incombent à la société EAC propriétaire et expéditeur réel de la grue ;
- juger que la société ORTEC ne peut bénéficier de plus de droit que la société EAC ;
- juger que la renonciation contractuelle à recours est opposable tant à la société EAC qu'à sa maison mère la société ORTEC et à leurs assureurs ;
- juger que la société EAC n'a pas exercé le moindre recours et serait désormais irrecevable à le faire ;
- juger les demandeurs les sociétés AXA, AIG et ORTEC irrecevables ; les en débouter ;
* subsidiairement, vu le contrat stipulé , ensemble les articles 1103 et 1104 du Code Civil :
- juger que la sous-traitance d'une prestation ne fait pas la commission, surtout si comme en l'espèce la prestation en cause est un simple enlèvement aux conditions FOT ;
- juger que la société PROVENCE SERVICES est transitaire au transport terrestre et la mettre comme ses compagnies d'assurance les sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES hors de cause ;
* plus subsidiairement, vu l'article L 132-5 du Code de Commerce, et les stipulations de la lettre de voiture KENFREIGHT :
- juger notamment que la preuve du droit local - la loi d'autonomie - résulte des stipulations mêmes de la lettre de voiture KENFREIGHT, à défaut pour les intimés d'établir le contraire ;
- débouter les intimés de toutes demandes ;
* encore plus subsidiairement, vu l'appel incident de la société ALPHA :
- juger que l'événement résulte d'un cas de force majeure ;
- juger que la société PROVENCE SERVICES n'a commis aucune faute personnelle en relation directe avec les dommages, qui résultent uniquement d'un accident caractérisé par le fait du tiers - et en toute hypothèse du cas de force majeure ;
- débouter de plus fort les sociétés AXA, AIG et ORTEC de l'ensemble de leurs demandes ;
* à titre infiniment subsidiaire :
- juger en cas de faute personnelle de la société PROVENCE SERVICES, si elle était jugée causale, que la responsabilité devra être strictement proportionnelle au lien de causalité le cas échéant déterminé par la Cour ;
* en toutes hypothèses, vu la valeur vénale déclarée aux assureurs, ensemble les articles 1150 et 1151 du Code Civil devenus 1231-2 et 1231-3 :
- limiter le préjudice indemnisable à la somme de 163 242 euros 00, subsidiairement à la somme de 178 381 euros 92 ;
- débouter les sociétés AXA, AIG et ORTEC pour le surplus et les intimés de toutes autres prétentions ;
- ordonner la restitution par les sociétés AXA, AIG et ORTEC in solidum d'une part, la société ALPHA d'autre part, aux sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES des causes du jugement soit :
. par les sociétés AXA, AIG et ORTEC la somme de 202 025 euros 12, outre intérêts légaux,
. par la société ALPHA la somme de 3 226 euros 90, outre intérêts légaux ;
- ordonner la capitalisation des intérêts selon l'article 1343-2 du Code Civil ;
- statuer comme ci-après requis sur l'article 700 du Code de Procédure Civile et les dépens ;
B - sur l'action en garantie de la société PROVENCE SERVICES et des sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES aux droits de COVEA FLEET, vu les articles L. 132-1, L. 133-1 et suivants du Code de Commerce, le cas échéant codifiés au Code des Transports, ensemble les articles 1103 et 1104, voire 1382 et 1384 du Code Civil (anciens), vu les actes de nouveau délivrés devant la Cour en date du 10 août 2017 :
* condamner in solidum les sociétés ALPHA et KENFREIGHT d'une part, les sociétés AON KENYA et TOPLIS & HARDING INTERNATIONAL d'autre part, à garantir la société PROVENCE SERVICES et les sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES, sans limites, de toute condamnation susceptible d'intervenir à leur encontre au profit des sociétés AXA, AIG et ORTEC comme de toute partie au procès, majorées des intérêts légaux de droit à compter de l'exploit introductif d'instance du 9 janvier 2015 ou de celui du 18 juin 2015, et ordonner la capitalisation des intérêts par application de l'article 1343-2 du Code Civil ;
* en tout état de cause si la Cour ne qualifiait pas les sociétés AON KENYA et TOPLIS & HARDING d'assureurs, vu la sommation introductive d'instance, l'article L. 124-3 du Code des Assurances, ordonner aux sociétés ALPHA, KENFREIGHT, AON KENYA et TOPLIS & HARDING de révéler à la société PROVENCE SERVICES et aux sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES le nom de la compagnie d'assurance et les garanties d'assurance souscrites couvrant les responsabilités civile contractuelle ou professionnelle des parties intervenues dans l'accident du 14 décembre 2013, sous telle astreinte qu'il plaira à la Cour de fixer, d'un montant de 100 euros 00 par jour à compter du prononcé de sa décision ;
* en toute hypothèse :
- condamner in solidum les sociétés AXA, AIG et ORTEC à payer aux sociétés PROVENCE et MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES aux droits de COVEA FLEET la somme de 15 000 euros 00 au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
- condamner in solidum les sociétés ALPHA et KENFREIGHT, comme les sociétés AON KENYA et TOPLIS & HARDING, à payer aux sociétés PROVENCE et MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES aux droits de COVEA FLEET la somme de 15 000 euros 00 au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les sociétés AXA, AIG et ORTEC de leur demande dommages et intérêts pour résistance abusive ;
- condamner tous succombants in solidum aux entiers dépens en ce compris les frais de traduction des assignations et ceux de l'instance en garantie ;
- laisser à la charge de la société ALPHA les dépens afférents à la mise en cause de
la société KENFREIGHT.
Les assignations par la société PROVENCE SERVICES et les sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES le 10 août 2018 de la société KENFREIGHT EA Ltd, de la société AON KENYA INSURANCE BROKERS Ltd et de la société TOPLIS & HARDING INTERNATIONAL Ltd ne sont pas parvenues à destination.
Par conclusions du 7 septembre 2017 la société ALPHA LOGISTICS SERVICES (EPZ) Ltd demande à la Cour de :
* à titre principal, sur la loi applicable :
- confirmer le jugement en ce qu'il a retenu l'application de la loi kenyane ;
- le réformer en ce qu'il a appliqué la loi française par défaut ;
* à titre subsidiaire, sur les responsabilités : confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la qualité de sous-commissionnaire de transport de la société ALPHA, retenu l'absence de faute commise par la société ALPHA, jugé que la responsabilité de la société ALPHA n'était pas engagée, débouté les sociétés PROVENCES, MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES de leur appel en garantie formulé contre la société ALPHA, condamné les sociétés PROVENCES, MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES à payer à la société ALPHA la somme de 3 000 euros 00 au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi que les dépens ;
*subsidiairement, sur la force majeure :
- infirmer partiellement le jugement en ce qu'il a considéré que les conditions de la force majeure n'étaient pas remplies ; dire et juger que la force majeure exonère tous les intervenants au transport ;
- débouter les demanderesses ;
* plus subsidiairement, sur l'absence de responsabilité de la société KENFREIGHT :
- juger que l'absence de responsabilité de la société KENFREIGHT chargée du transport exonère la société ALPHA de toute responsabilité ;
- débouter de plus fort les demanderesses,
* très subsidiairement, sur le quantum :
- infirmer partiellement le jugement en ce qu'il a considéré que le quantum des dommages ne devait pas être limité à la valeur vénale de la marchandise ;
- en conséquence réduire le montant de l'indemnité à la somme de 163 242 euros 00 ;
* à titre superfétatoire :
- faire droit à l'appel en garantie formulé contre la société KENFREIGHT ;
- condamner la société KENFREIGHT à garantir la société ALPHA de toutes condamnations en principal frais et intérêts ;
* en tout état de cause condamner tout succombant au paiement d'une somme de 10 000 euros 00 au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions n° 3 du 16 septembre 2019 la S.A. AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE, la société AIG EUROPE LIMITED et la S.A.S. ORTEC SERVICES INDUSTRIES demandent à la Cour de :
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions, y compris en ce qu'il [leur] a alloué la somme de 10 000 euros 00 au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
statuant à nouveau, vu les articles L. 132-1 et suivants du Code de Commerce et notamment l'article L. 132-5, les articles 1104,1193 ,1217,1231 et 1384 alinéa 1 du Code Civil, l'article L. 121-12 du Code des Assurances :
- constater que la société ORTEC dispose de la qualité et l'intérêt à agir à l'encontre de la société PROVENCE SERVICES, et de ses assureurs les sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES venant aux droits de la société COVEA FLEET ;
- constater que les compagnies AXA et AIG sont légalement subrogées dans les droits de la société ORTEC ;
- constater qu'il n'existe aucune renonciation à recours ;
en conséquence, confirmer le jugement ;
- dire et juger les demandes de la société ORTEC et des compagnies AXA et AIG parfaitement recevables ;
- constater que la societé PROVENCE SERVICES est intervenue en qualité de commissionnaire de transport pour le transport litigieux ;
- dire et juger la société PROVENCE SERVICES responsable de plein droit des dommages à la grue ;
- débouter la société PROVENCE SERVICES de ses prétentions au titre de la force majeure ; - en conséquence :
- condamner la société PROVENCE SERVICES et ses assureurs les sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES venant aux droits de la société COVEA FLEET à payer aux compagnies AXA et AIG la somme de 178 391 euros 82 [en réalité 92], outre 11 153 euros 13 de frais d'expertise sauf à parfaire, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;
- condamner la société PROVENCE SERVICES et ses assureurs les sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES venant aux droits de la société COVEA FLEET à payer à la société ORTEC la somme de 2 000 euros 00, sauf à parfaire, avec au taux légal à compter de l'assignation ;
- ordonner la capitalisation des intérêts conformément à l'article du Code Civil ;
- condamner la société PROVENCE SERVICES et ses assureurs les sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES venant aux droits de la société COVEA FLEET, ou tout succombant, à payer aux sociétés AXA, AIG et ORTEC la somme de 25 000 euros 00 au titre des frais de procédure de première instance et d'appel, en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 septembre 2019. Par conclusions du 3 octobre suivant la S.A.S. ORTEC SERVICES INDUSTRIES, la société AIG EUROPE LIMITED et la S.A. AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE, demandent à la Cour de révoquer cette ordonnance de clôture pour accueillir leurs conclusions ci-dessus.
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M O T I F S D E L ' A R R E T
Sur la procédure :
Les conclusions des sociétés AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE, AIG EUROPE LIMITED et ORTEC SERVICES INDUSTRIES du 16 septembre 2019, bien que datées du jour même de l'ordonnance de clôture, n'ont pas été contestées par leurs adversaires les sociétés PROVENCE SERVICES TRADING ET MOVING - T & M, MUTUELLE DU MANS 'MMA IARD' et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES toutes deux aux droits de la société COVEA FLEET. Par suite il n'y a besoin de procéder à cette révocation.
Sur la recevabilité des demandes de la société ORTEC ainsi que de la société AXA et de la société AIG :
La grue GROVE GMK 3050 n° 30509535 a certes été vendue au prix de 338 000 $ 00 selon facture du 24 octobre précédent par la société ougandaise EAC à la société camerounaise CAMLEV ; mais son transport de [Localité 10] à [Localité 8] en passant par [Localité 15] et [Localité 12], au cours duquel elle a accidentée le 14 décembre 2013, a été commandé non par ce propriétaire la société CAMLEV, mais uniquement par la société ORTEC selon bon du 27 novembre 2013 émis vis-à-vis de la société PROVENCE SERVICES, laquelle est assurée auprès de la compagnie COVEA FLEET aux droits desquelles viennent aujourd'hui les sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES.
De plus le dommage a été subi par la société ORTEC et les sociétés AXA et AIG qui seules ont financièrement supporté son montant (2 000 euros 00 pour la première, et 178 381 euros 92 pour les deux autres), à l'exclusion de la société CAMLEV.
Par suite, et en raison de l'indépendance du contrat de vente et du contrat de transport, la société ORTEC expéditeur de la grue comme ses assureurs les sociétés AXA et AIG sont recevables à agir en responsabilité contre la société PROVENCE SERVICES et ses assureurs les sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES.
C'est donc à bon droit que le Tribunal a dit recevable l'action de la société AXA, de la société AIG et de la société ORTEC à l'encontre de la société PROVENCE SERVICES et des sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES.
Sur la société PROVENCE SERVICES :
Cette dernière, mandatée par la société ORTEC pour transporter la grue de [Localité 10] à [Localité 8] par voies terrestre puis maritime, a choisi de faire exécuter sa mission par un tiers c'est-à-dire la société ALPHA, laquelle l'en a facturée le 24 octobre 2013. La même a ainsi librement sélectionné son sous-traitant, et a conclu directement avec lui un contrat de transport, ce qui lui attribue la qualité de commissionnaire de transport vis-à-vis de la société ORTEC son donneur d'ordre.
Les conditions générales de la société KENFREIGHT sous-traitante de la société PROVENCE SERVICES stipulent notamment que la grue était transportée aux risques de son propriétaire c'est-à-dire en réalité la société ORTEC donneur d'ordre ; mais ces stipulations constitutives du droit local kenyan, pour n'avoir été ni acceptées par cette dernière ni même connues d'elle, lui sont inopposables ainsi qu'à ses assureurs les sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES, d'autant qu'aucune relation n'a jamais existé entre la société KENFREIGHT et la société ORTEC.
L'article 3.22 alinéa 1 de la police d'assurance n° 184098, souscrite par la société ORTEC auprès de la société AXA apériteur, stipule notamment que 'Les assureurs renoncent à tous recours contre ceux (...) au bénéfice desquels l'assuré lui-même entend renoncer à l'exercice du recours'. Mais cet assurée n'a jamais renoncé à son recours contre la société PROVENCE SERVICES puisque, tout comme cet assureur, elle a assigné ce commissionnaire de transport ainsi que ses assureurs aujourd'hui les sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES.
La circonstance que l'accident du 14 décembre 2013 soit survenu alors que la grue transportée était entre les mains officiellement de la société KENFREIGHT, en réalité semble-t-il celles de la société MS HAJINUR, ne suffit pas à exonérer de toute responsabilité la société PROVENCE SERVICES, laquelle est responsable des fautes de ses substituées ; par ailleurs ladite société ne peut invoquer le bénéfice de la force majeure pour cet accident, la présence sur une route de véhicules soit arrêtés soit venant en sens inverse ne constituant pas un fait imprévisible ni même irrésistible, et cet accident n'étant aucunement dû à la grue transportée.
Sur le recours en garantie de la société PROVENCE SERVICES contre la société ALPHA et la société KENFREIGHT :
Aucun élément du droit local kenyan, seul applicable à ces 2 dernières entités kenyannes, ne permet de qualifier juridiquement leur intervention dans le transport litigieux, ni de détermienr si elles ont engagé leur responsabilité vis-à-vis de la société PROVENCE SERVICES.
Le jugement est donc confirmé pour avoir mis hors de cause tant la société ALPHA que la société KENFREIGHT.
Sur les sociétés AON LENYA et TOPLIS & HARDING :
Les pièces communiquées par la société PROVENCE SERVICES et ses assureurs les sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES ne permettent pas de caractériser les qualités d'assureurs tant de la société AON KENYA que la société TOPLIS & HARDING, ce qui exclut tout recours contre elles.
Pour le même motif il ne peut être enjoint à ces 2 dernières entités de révéler sous astreinte à la société PROVENCE SERVICES et aux sociétés MMA et MMA ASSURANCES MUTUELLES le nom de la compagnie d'assurance et les garanties d'assurance souscrites couvrant les responsabilités civile contractuelle ou professionnelle des parties intervenues dans l'accident du 14 décembre 2013.
Sur le montant du préjudice :
Ce dernier a été chiffré par la société ERGET, expert missionné par le courtier d'assurance de la société ORTEC, à la somme de 176 491 euros 09, à laquelle s'ajoutent les 3 factures d'honoraires et de frais à hauteur de 11 153 euros 13 T.T.C.
Ces derniers ne sont pas sérieusement contestés tant par la société PROVENCE SERVICES et ses assureurs, que par la société ALPHA, ce qui justifie que le Tribunal les ait retenus.
La somme principale ci-dessus est inférieure à la valeur vénale de la grue au jour de l'accident qui selon cet expert était de 240 305 euros 17, et ne peut en conséquence être contestée par la société PROVENCE SERVICES et ses 2 assureurs sur la seule base d'une déclaration unilatérale de la société EAC à hauteur de 163 242 euros 00 non vérifiée par l'expert ; le jugement est confirmé pour avoir chiffré le préjudice à cette somme de 176 491 euros 09.
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D E C I S I O N
La Cour, statuant en dernier ressort et par arrêt de défaut.
Confirme tout le jugement du 7 avril 2017.
Entre outre, vu l'article 700 du Code de Procédure Civile, condamne in solidum la S.A.R.L. PROVENCE SERVICES TRADING ET MOVING ainsi que la S.A. MMA IARD et la société civile MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES à payer au titre des frais exposés en appel et non compris dans les dépens :
* une indemnité unique de 5 000 euros 00 à la S.A.S. ORTEC SERVICES INDUSTRIES ainsi qu'à la S.A. AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE et à la société AIG EUROPE LIMITED ;
* une indemnité de 5 000 euros 00 à la société kenyane ALPHA LOGISTICS SERVICES (EPZ) Ltd.
Condamne in solidum la S.A.R.L. PROVENCE SERVICES TRADING ET MOVING ainsi que la S.A. MMA IARD et la société civile MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES aux dépens d'appel, avec application de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
Rejette toutes les autres demandes.
Le GREFFIER Le PRÉSIDENT