COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-4
ARRÊT AU FOND
DU 19 NOVEMBRE 2020
N° 2020/171
Rôle N° RG 17/13508 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BA4VL
[H] [W]
C/
SA SOCIETE GENERALE
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me JUSTON
Me GUEDJ
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de Grasse en date du 03 Septembre 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 13/03465.
APPELANT
Monsieur [H] [W]
né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 5] (06),
demeurant [Adresse 4]
[Localité 2]
représenté par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
INTIMEE
SA SOCIETE GENERALE
Poursuites et diligences de son représentant légal en exercice
Dont le siège est sis [Adresse 3]
représentée par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 13 Octobre 2020 en audience publique devant la cour composée de :
Madame Laure BOURREL, Président
Madame Françoise FILLIOUX, Conseiller
Madame Florence ALQUIE-VUILLOZ, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Rime GHORZI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Novembre 2020.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Novembre 2020,
Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Mme Rime GHORZI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
******
Faits, procédure, Prétentions et moyens des parties :
Suivant acte du 17 juin 2013, Monsieur [W] a assigné devant le tribunal de grande instance de Grasse la Société Générale afin de la voir condamnée à lui payer la somme de 159 422,86€ en réparation du préjudice causé par un manquement de la banque à son devoir de mise en garde sur les risques encourus lors de la commercialisation de produits financiers et 3 000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement contradictoire du 3 septembre 2015, le tribunal de grande instance de Grasse a débouté Monsieur [W] de ses demandes et l'a condamné au paiement d'une somme de1 500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile aux motifs que l'intéressé ne justifiait pas du préjudice invoqué.
Le 12 juillet 2017, Monsieur [W] a interjeté régulièrement appel de ce jugement.
Dans ses conclusions déposées et notifiées le 23 janvier 2020, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, il demande à la cour au visa des articles 1147 et 1315 anciens du code civil, 9, 563 et 565 du code de procédure civile et L 533-12 II du code monétaire et financier de :
* infirmer le jugement du 3 septembre 2015,
* dire que son action n'est pas prescrite et ses prétentions, pièces et moyens recevables,
*dire que la Société Générale a manqué à son devoir de conseil et de mise en garde à son égard alors qu'il est un client non averti,
* la débouter de ses demandes,
*la condamner à lui payer la somme de 146 174,67€ en réparation de son préjudice financier avec intérêt au taux légal à compter du 17 juin 2013,
*ordonner la capitalisation annuelle des intérêts,
A titre subsidiaire :
*ordonner une expertise afin de rechercher tous les ordres passés par Monsieur [W] en vue de l'achat de titres durant la période du 22 mars 2000 au 31 décembre 2007, ainsi que les sommes investies à l'occasion de chacun des ordres et les moins values lors de la vente de ces titres, déterminer les frais de courtage et donner tous éléments pour évaluer son préjudice,
*surseoir à statuer en l'attente de cette expertise,
En tout état de cause :
*condamner l'intimée à lui régler :
- 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
et à prendre en charge les dépens avec distraction au profit de Maître Badie.
Il soutient que ses demandes en cause d'appel sont similaires à celles exprimées en première instance et ne peuvent être qualifiées de nouvelles au sens de l'article 564 du code de procédure civile et que l'article 563 du dit code autorise expressément la production de pièces nouvelles en cause d'appel.
Concernant la prescription de son action, il souligne que la prescription commerciale, autrefois décennale, ne lui est pas applicable puisqu'elle n'est opposable qu'aux commerçants, qu'avant l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, la prescription civile était de 30 ans, qu'à compter du 19 juin 2008, date d'entrée en vigueur de la dite loi, ce délai pour agir a été réduit à cinq ans, que son assignation délivrée le 17 juin 2013 n'est pas tardive puisque les ordres de bourse antérieurs au 19 juin 2008 sont couverts par la prescription trentenaire.
Il expose qu'il a ouvert le 22 mars 2000, un compte titre n°30003 00481 08050426379 associé à un compte espèce auprès de la Société Générale et souscrit un abonnement aux services 'Logitel' et 'Logitel net' de la dite banque permettant de réaliser des investissements boursiers, que la banque était tenue à son égard à un devoir d'information et de mise en garde, adapté aux instruments financiers utilisés et à sa connaissance des marchés, qu'eu égard à sa profession de pâtissier mentionné dans la convention d'ouverture de compte et son classement par la banque dans un courrier du 1er novembre 2007 en client 'non averti ', elle a la charge de la preuve du respect de son obligation d'information et de mise en garde et que le remise d'une notice d'information générale est à l'évidence insuffisante pour en justifier.
Il souligne qu'il établit son préjudice par la production de ses relevés de compte pour la période de 2003 à 2007 sur lesquels sont mentionnés des ordres boursiers très conséquents chaque mois et par son investissement d'une somme de 6 138,95€ en SICAV en 2000.
Il oppose à la Banque, qui nie toute relation contractuelle concernant les achats de titres, un courrier de réclamation envoyé le 20 mai 2006 à la suite duquel elle a procédé à un virement de 1 800€ à son profit sous l'intitulé 'virement geste commercial OPE Bourse' démontrant une relation commerciale certaine relative à la passation d'ordre de bourse.
Il précise que le volume des opérations ne permet pas à la banque de supposer son caractère averti et que le principe de non-ingérence invoqué ne dispense pas la banque de son obligation de mise en garde.
Sur les exclusions contractuelles dont se prévaut la banque, il indique qu'il a passé des ordres par le biais du service sur internet intitulé 'Logitel Net' et d'un compte titre ouvert auprès de la Société Générale qui aurait dû l'alerter sur l'enjeu de tels placements, que la production d'une capture d'écran d'une page internet comportant des mises en garde de la banque est dénuée de force probante.
Il indique qu'il a évalué son préjudice en relevant l'ensemble des sommes investies sur ses comptes.
Par conclusions du 17 février 2020,auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé la Société Générale demande à la cour :
*dire que les demandes formées par l'appelant au titre de la violation du devoir de conseil et d'information et tendant à voir ordonner une expertise sont des demandes nouvelles donc irrecevables en cause d'appel,
*constater que Monsieur [W] n'a pas respecté le principe de concentration des moyens qui prévaut dans toute instance judiciaire,
*écarter les moyens nouveaux soulevés en cause d'appel,
*rejeter comme tardives les pièces nouvelles communiquées en cause d'appel,
*constater que la demande est irrecevable car prescrite,
*débouter Monsieur [W] de ses demandes et le condamner au paiement d'une somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens distraits au profit de la SCP Cohen Guedj Montero Daval Guedj.
Elle expose qu'il incombait à Monsieur [W] de présenter dès la première instance, l'ensemble des moyens qu'il estimait de nature à fonder sa demande, que tous les moyens et pièces nouvelles devront être écartés des débats, que de surcroît, la demande d'expertise est une demande nouvelle irrecevable en cause d'appel et qui ne peut être ordonnée pour suppléer la carence des parties.
Elle souligne que les pièces jointes à l'assignation, à savoir deux courriers adressés par l'intéressé à la Société Générale respectivement en avril et juillet 2007, ne valent pas preuve d'un engagement contractuel, pas plus que les documents publicitaires généraux émanant de la Société Générale, que Monsieur [W] a produit également une convention de compte courant datée 22 mars 2000 et la souscription de services attachés mais qui ne concernent en rien les opérations sur titre, qu'il communique également une convention de compte titre mais dépourvue de signature et son relevé de compte daté du 31 décembre 2005 faisant état d'ordres boursiers pour un montant de 10 775,50€.
Elle précise que l'intéressé produit en cause d'appel de nouvelles pièces privant la banque d'un double degré de juridiction et en violation du principe du contradictoire, que ces pièces devront être écartées des débats.
Elle soutient qu'eu égard aux montants investis alors que l'intéressé ne justifie pas de revenu en qualité de pâtissier et au volume des opérations quotidiennes passées pendant plusieurs années, il doit être qualifié d'opérateur averti.
Elle fait valoir qu'elle a une obligation de non-ingérence lui interdisant de s'opposer aux opérations librement consenties par le client, que les achats de titres se sont faits de la propre initiative de Monsieur [W], sans l'intermédiaire de la banque qui les a subis puisqu'elle ne pouvait qu'exécuter les ordres de son client qui était libre de ses investissements.
Sur le préjudice, elle indique que Monsieur [W] n'en justifie nullement et tout état de cause qu'il résulte de ses erreurs de placements, qu'il ne justifie pas du contrat relatif aux SICAV dont il fait état et que les frais sont inhérents aux écritures bancaires selon la convention titre souscrite.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 février 2020.
Par conclusions du 25 février 2020, Monsieur [W] réitère ses demandes antérieures et sollicite la révocation de l'ordonnance de clôture afin de voir déclarer recevables ses conclusions.
L'ordonnance de clôture a été révoquée le 13 octobre 2020, les conclusions datées du 25 février 2020 de Monsieur [W] ont été déclarées recevables et l'instruction a été clôturée à nouveau avant débats.
Motifs :
Sur la prescription :
Antérieurement à la loi du 17 juin 2008 entrée en vigueur le 19 juin 2008, le code de commerce prévoyait le principe de la prescription décennale codifiée à l'article L 110-4 du dit code, cette règle s'appliquant pour toutes les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants et non commerçants.
Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, l'action en responsabilité relève de la prescription quinquennale.
La loi du 17 juin 2008 s'applique immédiatement aux prescriptions en cours. Les dispositions de la loi, qui réduisent la durée de la prescription, s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.
Par assignation en date du 17 juin 2013, Monsieur [W] met en cause la responsabilité de la banque pour des opérations réalisées dans le cadre d'un compte titre ouvert le 22 mars 2000 et réalisées jusqu'en 2007. La prescription de son action, qui était de 10 ans, a été réduite à 5 ans.
Les opérations litigieuses réalisées avant la date du 17 juin 2003 sont prescrites. En revanche, Monsieur [W] disposant d'un délai de 5 ans à compter du 19 juin 2008 pour exercer une action en responsabilité contre la banque, son assignation délivrée le 19 juin 2013 n'est pas tardive concernant les faits commis durant la période du 17 juin 2003 au 16 juin 2007.
Sur l'irrecevabilité des demandes nouvelles, moyens nouveaux et pièces nouvelles :
Par assignation délivrée le 17 juin 2013, Monsieur [W] a sollicité sur le fondement de l'article 1147 du code civil, la condamnation de la banque à réparer le préjudice financier subi en raison de la violation de son devoir de mise garde sur les risques encourus lors de la commercialisation d'actions. Par conclusions déposées le 20 février 2020, il revendique une condamnation pour un montant 146 174,67€ en visant un fondement similaire, mais en se référant également à l'article L 533-12 du code monétaire et financier et aux obligations d'information à la charge de l'organisme bancaire.
Il est constant qu'il appartient aux parties de présenter dès l'instance initiale l'ensemble des moyens qu'elles estimaient de nature à justifier le rejet total ou partiel de leurs demandes, le principe de l'autorité de la chose jugée leur interdisant de remettre en cause, par un nouveau moyen, qui n'avait pas été formé en temps utile, une condamnation irrévocable prononcée à leur encontre, alors même que leur nouvelle demande reposerait sur un fondement juridique différent.
Toutefois, tel n'est pas le cas en l'espèce, l'appelant étant fondé pour justifier ses prétentions en appel à invoquer des moyens nouveaux et produire des pièces nouvelles, conformément aux dispositions de l'article 563 du code de procédure civile.
Monsieur [W] a maintenu devant la cour d'appel des demandes identiques à celles antérieurement formulées devant la juridiction de premier degré à savoir la condamnation de la banque à l'indemniser de son préjudice financier et il est fondé à invoquer pour se faire des moyens nouveaux et à produire de nouvelles pièces.
En vertu des dispositions de l'article 15 du code de procédure civile, 'les parties doivent se faire connaître en temps utile... les éléments de preuve qu'elles produisent...afin que chacun soit à même d'organiser sa défense'.
L'intimée ne justifie d'aucune circonstance qui l'aurait empêchée de répondre à la production de pièces en octobre 2017 par Monsieur [W] dans une procédure pour laquelle la clôture a été prononcée le 13 octobre 2020. Cette communication, dont la tardiveté n'est pas démontrée, ne revêt pas d'aspect dilatoire.
Sur la responsabilité de la banque :
Le 22 mars 2000, Monsieur [W] a souscrit une convention de compte courant auprès des services de la Société Générale portant le numéro 00481 00050426379. Il produit les conditions générales de la souscription du dit contrat ainsi que son abonnement à la même date aux services sur internet offert par la Société Générale.
Sont également communiquées à la procédure, une notice portant sur les conditions générales applicables aux comptes titre ouverts à la société Générale éditée en octobre 2001 et une notice portant sur les conditions générales du service 'Vocalia ' offert aux clients de la société Générale afin de leur permettre de réaliser des opérations boursières en ligne. L'absence de signature ou mention d'acceptation apposée par Monsieur [W] sur ces documents leur ôte tout caractère contractuel.
Cependant, il résulte de la lecture des relevés du compte courant de Monsieur [W] qu'à compter du 19 décembre 2003 et jusqu'au 8 novembre 2007, ce dernier s'est livré à de très nombreux achats et ventes d'actions mobilières. Il a également le 5 avril 2000 procédé à l'achat de Sicav, via un compte titre n° 08050 0426379 au visa de l'agence de la société Générale et formulé onze ordres d'achats et de ventes au comptant à la banque du 12 novembre 2004 au 16 juillet 2007, ces ordres faisant expressément référence au dit compte titre ouvert par l'intéressé auprès de la Société Générale. Il produit enfin les comptes de liquidation de bourse établis durant la période du 1er novembre 2003 au 7 juillet 2005. La réalité de la relation contractuelle entre Monsieur [W] et la Société Générale portant sur des transactions de valeurs boursières est établie par ces documents communiqués à la procédure.
Le prestataire de services d'investissement est soumis à une obligation d'information qui s'impose aux teneurs de comptes titres. Une obligation d'information sur les risques tenant aux opérations spéculatives engagées par Monsieur [W] a pesé sur la Société Générale, nonobstant l'absence de convention de mandant afférente à la gestion des actions mobilières. La Société Générale, même en qualité de simple teneuse de compte titre, est soumise à une obligation d'information au bénéfice de son client portant sur les risques liés aux opérations spéculatives opérées par ce dernier. C'est à celui qui est légalement tenu d'un devoir d'information ou de conseil d'établir qu'il a satisfait à son obligation.
Il appartient donc à la société Générale de justifier qu'au vu des opérations complexes initiées par Monsieur [W], qui exerce la profession de pâtissier et qu'elle a classé par courrier du 1er novembre 2007 comme un 'client de détail devant bénéficier du régime d'information et de protection le plus élevé', qu'elle l'a mis en garde sur le caractère inadapté des instruments financiers choisis et qu'elle a attiré son attention sur les risques des opérations boursières entreprises pour un investisseur profane comme lui. Ce devoir implique pour la banque de vérifier le niveau de connaissance de son client avec le produit proposé ainsi que ses moyens financiers. Il s'agit d'éclairer le consentement du client en lui prodiguant lesdites informations.
Il lui incombe de justifier non seulement d'avoir informé Monsieur [W] des caractéristiques des produits proposés et également de s'être assuré de leur adéquation avec sa situation personnelle et ses attentes, en lui permettant de comprendre la nature et les risques associés aux instruments financiers afin qu'il puisse décider en toute connaissance de cause.
La Société Générale ne produit aucun document en ce sens, se prévalant uniquement de la convention de conditions générales des comptes titre qui n'est porteuse d'aucune signature ou mention d'acceptation donc dépourvue de force probante.
Si la banque doit informer Monsieur [W], elle n'est néanmoins pas tenue d'un devoir de conseil, réservé aux mandats de gestion de portefeuille ou de titres souscrits à la demande du client, l'intéressé ne produisant aucun contrat de ce type en l'espèce, l'abonnement au service de consultation par internet de la Banque intitulé ' Logitel' ne s'apparentant nullement à un contrat d'intermédiaire en investissement. Les relevés de compte et les bons pour des opérations sur OPCVM transmis par Monsieur [W] démontrent que la Société Générale n'intervenait pas dans les choix de gestion de ses placements et ne faisait que transmettre ses ordres dont il conservait la gestion.
Le préjudice résultant du manquement de la banque à son obligation d'information et de mise en garde s'analyse en une 'perte de chance d'échapper aux risques qui se sont réalisés', l'indemnisation ne portant pas sur l'intégralité de la perte financière, mais uniquement sur 'la perte de chance se mesurant à l'aune de la chance perdue '. En l'espèce, l'intégralité des pertes subie ne doit pas être réparée par la banque, car il convient de tenir compte de l'aléa boursier qui pèse sur le client et non sur l'organisme bancaire.
Il convient de noter que Monsieur [W] a persévéré dans des placements en actions mobilières de 2003 à 2007 soit durant 4 ans, continuant à s'exposer à des risques qu'il ne pouvait alors ignorer au vu des pertes subies dès l'origine. La lecture de ses relevés de compte démontre le caractère hautement spéculatif de ses investissements, l'intéressé passant parfois plusieurs ordres d'achats dans la même journée ou des opérations d'achat et de vente des mêmes titres dans la même journée ou à quelques jours d'intervalle acquérant ainsi la possibilité de prendre conscience des risques encourus.
Nonobstant le classement en client de détail opéré par la banque en novembre 2007, la technicité des opérations réalisées révèle en réalité une connaissance certaine acquise par Monsieur [W] du fonctionnement des instruments financiers et de la cotation des valeurs, ainsi qu'une aptitude à en suivre les mouvements. Par conséquent, la chance que Monsieur [W] renonce à de tels placements si la banque l'avait dûment informé des risques encourus, n'est nullement établie, alors qu'il aurait dû s'inquiéter des pertes financières éprouvées dès l'origine dont il avait forcément connaissance et freiner ainsi ses velléités de spéculateur néophyte.
En effet, Monsieur [W], qui a pris des risques déraisonnables et fait preuve d'une imprudence particulière en cherchant à compenser les pertes subies par des investissements qui n'ont fait qu'aggraver la situation débitrice de son compte, a eu un comportement fautif ayant contribué à la réalisation de son propre préjudice.
De surcroît, la perte de chance constitue un préjudice distinct de celui qui résulte de la perte en raison des opérations que Monsieur [W] a effectivement réalisées. Il s'agit d'une réparation proportionnelle à la probabilité que ladite chance avait de se réaliser. Il convient de noter que Monsieur [W] ne se prévaut d'aucun préjudice à ce titre.
Il convient de confirmer la décision du juge de première instance.
Sur l'article 700 du code de procédure civile :
Sur l'article 700 du code de procédure civile, la décision des premiers juges sera confirmée et il sera alloué en sus à l'intimée la somme de 1 500€ au titre des frais irrépétibles exposés en appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR par arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe,
Dit que les demandes pour la période antérieure au 17 juin 2003 sont prescrites,
Confirme le jugement déféré,
Condamne Monsieur [W] au paiement d'une somme de 1 500€ titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Monsieur [W] aux dépens d'appel avec distraction au profit de la SCP Cohen- Guedj-Montero- Daval-Guedj , avocats sur leur affirmation de droits.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT