COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-1
ARRÊT AU FOND
DU 05 JANVIER 2021
D.D. A.S.
N° 2021/ 26
N° RG 20/01514 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BFQ57
Organisme CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE ([K] [E])
C/
[O] [Z]
S.A. GENERALI IARD
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Gilles MARTHA
Me Agnès ERMENEUX
Me Laurence BOZZI
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 09 Mars 2017 enregistrée au répertoire général sous le n° 14/09369.
APPELANTE
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE ([K] [E])
Prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié es qualité au siège social Etant précisé que la CPCAM des BDR agit en qualité d'auteur de la saisine de la Cour d'appel de renvoi
demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Gilles MARTHA de la SCP BBLM, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEES
Madame [O] [Z]
née le [Date naissance 1] 1995 à [Localité 5],
demeurant [Adresse 4]
assisté de Me Eric BAGNOLI de la SCP TERTIAN / BAGNOLI, avocat au barreau de MARSEILLE,
et représenté par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX-ARNAUD- CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
S.A. GENERALI IARD, prise en la personne de son représentant légal
sise [Adresse 2]
représentée par Me Laurence BOZZI de la SCP AZE BOZZI & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 24 Novembre 2020 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Danielle DEMONT, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Olivier BRUE, Président
Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller
Mme Danielle DEMONT, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : M. Rudy LESSI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Janvier 2021.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Janvier 2021,
Signé par Monsieur Olivier BRUE, Président et M. Rudy LESSI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
Le 9 décembre 1998, l'enfant mineure [O] [Z], alors âgée de 3 ans a été blessée par la chaîne d'une station de lavage exploitée par la société Pereira, assurée auprès de la société Generali IARD (l'assureur), sa jambe gauche ayant été happée par un élément mécanique de la station de lavage sise à [Localité 5] pendant que sa mère procédait au nettoyage intérieur de son véhicule.
Par exploits d'huissier des 22 et 23 juillet 2014 Mmes [O] et [W] [Z], et M. [F] [Z] (les consorts [Z]) ont assigné la SA Generali IARD, en présence de la CPAM des Bouches-du-Rhône, aux fins d'obtenir la condamnation de l'assureur, au visa des articles 1382 et suivants du code civil à payer à Mme [O] [Z] la somme de 282 347, 50 € au titre des frais de matériel prothétique et à M. [W] et [F] [Z] la somme de 10'000 € chacun au titre de leur préjudice moral.
Les consorts [Z] soutiennent que Mme [O] [Z] n'a pas été indemnisée pour ce poste de préjudice au titre de l'accident dont elle a été victime le 9 décembre 1998, l'arrêt correctionnel rendu sur les intérêts civils par la cour d'appel de renvoi de Lyon le 9 février 2006 n'ayant pas statué sur ce point.
Ses frères et s'urs, [W] et [F] [Z], ont sollicité pour leur part l'indemnisation de leur préjudice moral, ayant été présents sur les lieux au moment des faits et ayant souffert des répercussions de l'accident et de la séparation parentale qui s'ensuivit.
Par jugement en date du 19 janvier 2017 le tribunal de grande instance de Marseille a :
' déclaré irrecevables les demandes formées par Mme [O] [Z] à l'encontre de la Generali IARD ;
' débouté la CPAM des Bouches-du-Rhône de toutes ses demandes ;
' condamné la SA Generali IARD à payer la somme de 7000 € à Mlle [W] [Z] à titre de dommages intérêts au titre de son préjudice moral et celle de 7000 € à M. [F] [Z] au titre de son préjudice moral ;
' dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;
' et dit que chacune des parties supportera la charge de ses propres dépens et que la SA Generali IARD supportera outre la charge de ses propres dépens, ceux exposés par Mme [W] et M. [F] [Z] ;
' et ordonné l'exécution provisoire.
Le tribunal retient en ses motifs que Mme [O] [Z] n'a pas saisi la juridiction de la question de ses frais prothétiques lorsqu'elle a engagé la procédure qui a conduit à l'arrêt correctionnel rendu par la cour de renvoi de Lyon le 9 février 2006 ; qu'elle a seulement fait réserver ses droits pour les postes de préjudice relatifs à l'assistance par tierce personne et à l'aménagement d'un logement ; qu'elle ne se prévaut pas aujourd'hui d'une aggravation de son état ; que compte tenu du principe de concentration des moyens, les demandes que Mme [O] [Z] a formées à l'encontre de l'assureur ne sont pas recevables.
Mme [Z] a relevé appel de cette décision le 20 avril 2017.
*
Par arrêt en date du 13 septembre 2018 la 10e chambre de la cour d'appel de ce siège a :
' infirmé ce jugement en toutes ses dispositions concernant Mme [O] [Z] et la CPAM des Bouches-du-Rhône,
statuant à nouveau des chefs infirmés et ajoutant,
' condamné la SA Generali IARD à verser :
' à Mme [O] [Z] les sommes suivantes :
-37'842,13 € au titre du coût d'achat des prothèses ;
-244'505 € au titre du coût du renouvellement des prothèses ;
-2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile applicable en première instance et en cause d'appel ;
' à la CPAM des Bouches-du-Rhône les sommes suivantes :
-201'982,22 € au titre des frais futurs de prothèses ;
-1066 € au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;
-1200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile applicable en première instance et en cause d'appel ;
' et condamné la SA Generali IARD aux dépens de première instance de Mme [O] [Z] et de la CPAM des Bouches-du-Rhône et aux dépens d'appel.
L'arrêt retient les motifs suivants :
'Sur la recevabilité des demandes
Il ressort de l'arrêt de la 7e chambre correctionnelle de la cour d'appel de Lyon en date du 9 février 2006 que M. [C] [Z] agissant en qualité de représentant légal de sa fille mineure [O] [Z] n'avait pas formulé devant la cour de Lyon de demande d'indemnisation des frais prothétiques de l'enfant, que ce soit avant ou après consolidation.
M. [Z] agissant ès qualités n'était pas tenu de présenter lors de cet instance toutes les demandes tendant à l'indemnisation des divers postes de son préjudice corporel et la circonstance qu'il n'ait pas sollicité que le poste des frais de prothèses soit réservé, et que Mme [O] [Z] ne justifie pas d'une aggravation de son état, sont sans incidence.
Si la cour d'appel de Lyon a alloué à la CPAM la somme de 31'149,41 €, ce qui en toute hypothèse ne pouvait priver Mme [O] [Z] du droit de demander la réparation des frais futurs de prothèses demeurant à sa charge, elle n'a pas détaillé cette créance et aucun élément ne permet d'affirmer qu'elle correspondait aux frais futurs de prothèses, étant précisé que la 'notification des débours' en date du 17 décembre 2004 et le 'calcul du capital appareillage' en date du 17 novembre 2005 émanant de la CPAM ne permettent pas d'aboutir à ce montant .
En outre la cour d'appel de Lyon a chiffré les dommages de [O] [Z] en se fondant sur le rapport d'expertise du Dr [P] en date du 25 juin 2002 et celui-ci a précisé qu'au jour de son examen l'état de l'enfant était stabilisé sur le plan de son appareillage mais qu'il serait nécessaire de la réexaminer, une fois au début de sa puberté, et une fois après sa puberté, ce qui induit que les frais futurs de prothèses pour la période postérieure à la fin de la puberté dont il est demandé la réparation dans le cadre de la présente instance, qui ne pouvaient pas être déterminés au jour du rapport d'expertisé de l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, n'ont donc pas pu être indemnisés par cette décision.
L'autorité de chose jugée le 9 février 2006 par la cour d'appel de Lyon ne fait donc pas obstacle à la recevabilité des demandes de Mme [O] [Z] et de la CPAM.
Sur l'évaluation des frais futurs de prothèses
L'assureur ne conteste pas le détail ni le montant des sommes demandées tant par Mme [O] [Z] que par la CPAM.
La somme de 8065, 50 € et sa capitalisation viagère qui ne correspondent pas aux frais futurs de prothèses objets des demandes dont est saisie la présente cour n'ont pas être déduites.
Il y a lieu pour les motifs qui précèdent de condamner l'assureur à verser à Mme [O] [Z] les sommes de 37'842,13 € au titre du coût d'achat des prothèses et de 244'505 € correspondant au coût de leur renouvellement et à la CPAM la somme de 201'982,22 €.
*
Par arrêt en date du 12 décembre 2019 la Cour de cassation a cassé et annulé en toutes ses dispositions cet arrêt, remis la cause les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyés devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée, condamné Mme [Z] et la Caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône aux dépens, et dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
La Cour de cassation retient en ses motifs que pour condamner l'assureur à verser à Mme [Z] les sommes notamment de 37'840,13 € au titre du coût d'achat des prothèses et 244'505 € au titre du coût de renouvellement des prothèses et à la caisse, les sommes notamment de 201'982,22 € au titre des frais futurs de prothèses et 1066 € au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, l'arrêt se prononce au vu des conclusions de l'assureur du 25 mai 2018 et celles de la caisse du 15 décembre 2017, auxquelles il fait expressément référence pour l'énoncé du détail de leur argumentation ; qu'en statuant ainsi alors qu'il résulte des productions que la caisse avait respectivement notifié, avant l'ordonnance de clôture via le RPVA les 5 et 7 juin 2018, des conclusions développant une argumentation supplémentaire, la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs dont il ne résulte pas quelle aurait pris en considération ces dernières conclusions, et les moyens qui y étaient développés, a violé les textes susvisés.
*
Par déclaration aux fins de saisine en date du 30 janvier 2020, la Caisse primaire d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône a saisi la cour de ce siège autrement composée.
Mme [O] [Z] a saisi également la cour de ce siège le 17 mars 2020 (n° 20/4162).
Les deux procédures d'appel ont été jointes sous le premier numéro 20/1514.
Par conclusions du 23 juin 2020 Mme [O] [Z] demande à la cour, au visa des articles 1382, 1383 et 1384 anciens du code civil :
' de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes qu'elle a formées à l'encontre de la SA Generali IARD et rejeté sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
' de déclarer recevables les demandes qu'elle a formulées au titre des frais d'appareillage futurs;
' de condamner la société d'assurance Generali IARD à lui payer la somme de 37'842,13 € correspondant au coût d'achat des différentes prothèses et celle de 338'414,33 € à correspondant au coût futur des prothèses nécessaires pour tous les actes essentiels de la vie courante par capitalisation ;
' de dire que ne peut être déduite de ces indemnisations la somme de 8065, 50 €
correspondant au coût des prothèses provisoires objet de la créance de la CPAM des Bouches-du-Rhône du 17 novembre 2005 ;
' de condamner la société d'assurance Generali IARD à lui payer la somme de 60'000 €, au titre de son préjudice d'établissement ;
' à titre subsidiaire, de désigner de nouveau le Dr [P], aux fins d'examiner Mme [O] [Z], avec pour mission de déterminer les appareillages nécessaires à celle-ci du fait de l'accident dont elle a été victime le 9 décembre 1998, de les décrire, et d'en chiffrer le coût ;
' et de condamner la société d'assurance Generali IARD aux dépens de première instance et d'appel.
Par conclusions du 27 mars 2020 la Caisse primaire d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône demande à la cour de ce siège :
' de réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
statuant à nouveau
' de fixer la créance définitive de la caisse primaire d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône à la somme de 201'982,22 € ;
' de condamner la société Generali IARD à lui verser cette somme avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir, et celle de 1091 € au titre de l'indemnité forfaitaire de l'article L376-1 alinéa 9 du code de la sécurité sociale ;
' et de condamner la SA Generali IARD à lui verser la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens avec distraction.
Par conclusions du 18 août 2020 la société d'assurance Generali IARD demande à la cour, au visa des articles 480 du code de procédure civile et 1351 du code civil :
à titre principal
' de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
' de constater que Mme [Z] n'invoque aucune aggravation de son état ; qu'elle bénéficiait déjà d'un appareillage depuis l'année 1999, soit environ 7 ans avant le prononcé de la décision; et qu'elle avait connaissance, de même que la CPAM qui formait une réclamation d'un montant de 8065,50 € en capital, au titre de frais prothétiques futurs, de la nécessité d'être dotée d'une prothèse définitive après l'achèvement de sa croissance ;
' de dire qu'en l'absence de réserves des droits relatifs à l'indemnisation des dépenses de santé future, une fois sa croissance achevée, qui auraient été émises par les appelantes lors de l'instance ayant donné lieu à l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 9 février 2006, quant au montant de sa créance relative aux frais prothétiques évalués sur la base viagère, fondement de sa demande, une telle décision a évalué de manière définitive le préjudice soumis à recours de l'organisme social à la somme de 422'249,41 € dont 23'083,91 € pour les frais médicaux passés et futurs et la somme de 8 065,50 € correspondant au frais futurs d'appareillage en fonction de l'évaluation viagère du coût d'un tel équipement ;
' de dire que le paiement de cette dernière somme, que l'assureur a effectuée en exécution de l'arrêt rendu, a éteint toute créance à son égard ;
' de dire en conséquence que les demandes formées par Mme [Z] et la CPAM se heurtent à l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Lyon en date du 9 février 2006;
' de confirmer en conséquence le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevables les prétentions émises au titre des frais d'appareillage futurs, postérieurs à la date du prononcé de cette décision ;
à titre subsidiaire
' de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré les demandes irrecevables par application du principe prétorien de concentration des moyens ;
' de débouter Mme [Z] de la demande d'indemnisation complémentaire formée au titre d'un préjudice d'établissement dont elle ne justifie ni du principe ni du quantum ;
à titre subsidiaire sur ce point, de réduire à plus justes proportions le montant de l'indemnité allouée de ce chef ;
' de condamner tout succombant à payer à la société d'assurance Generali IARD la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens avec distraction ;
à titre très subsidiaire
' de dire que Mme [Z], désormais équipée de prothèses définitives, n'est pas fondée à invoquer des frais d'appareillage et de renouvellement d'appareillages sur la base de simples devis ; qu'en l'absence de production des factures d'acquisition de ces prothèses définitives malgré la sommation de communiquer qui lui a été notifiée, Mme [Z] ne rapporte pas la preuve du montant du préjudice réellement subi à ce titre ;
' de la débouter en conséquence d'une telle prétention ou à tout le moins de surseoir à statuer dans l'attente de la production des factures d'acquisition d'un tel matériel ;
' de débouter en toute hypothèse Mme [Z] de sa demande de désignation d'un expert pour déterminer la nature et le coût d'un matériel à l'acquisition duquel elle a déjà procédé en application des dispositions de l'article 146 du code de procédure civile ;
À titre infiniment subsidiaire
' d'ordonner la capitalisation des dépenses de santé futures à échoir en tenant compte d'un renouvellement effectué au cours de l'année 2020, tel qu'envisagé par Mme [Z] devant le tribunal, soit à l'âge de 25 ans ;
' même dans l'hypothèse du rejet du recours sub rogatoire formé par l'organisme social dont l'action serait déclarée irrecevable,
de déduire des indemnités allouées au titre des frais prothétiques futurs :
-la somme de 8065,50 € correspondant au titre de créance émis par la CPAM le 17 novembre 2005 relatif aux 'capital appareillage' évalué de manière viagère, d'ores et déjà régler à Mme [Z]
-la somme de 201'982,22 € correspondant au titre de créances émis par la CPAM le 22 mai 2017 relative aux frais futurs d'appareillage ;
' de limiter le montant de l'indemnité forfaitaire de gestion qui serait allouée par impossible à la CPAM à la somme de 1066 € ;
' de réduire à plus justes proportions l'indemnité sollicitée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile par Mme [Z] et de débouter la CPAM de ses demandes de ce chef;
' et de statuer ce que de droit sur les dépens avec distraction.
La cour renvoie aux écritures précitées pour l'exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties.
Motifs
Attendu en premier lieu, sur la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de chose jugée soulevée par la SA Generali, que Mme [Z] appelante fait valoir qu'il était impossible aux différentes juridictions qui ont eu à connaître du litige et particulièrement à la cour d'appel de Lyon en son arrêt du 9 février 2006 sur les préjudices, de statuer sur le poste « dépenses de santé futures », dans la mesure où la nécessité de se pourvoir d'un appareillage spécifique n'était pas avérée au jour ou l'expert [P] a déposé son rapport, pas plus qu'à la date du prononcé de la décision, la victime étant alors âgée de 11 ans, et sa croissance, toujours en cours ; qu'elle soutient être recevable à saisir à nouveau le tribunal au titre de l'indemnisation des préjudices non encore réparés ; que la CPAM sollicite la réformation du jugement entrepris et l'admission de sa créance définitive, reprenant à son compte l'argumentation développée par Mme [Z] ;
Mais attendu que Mme [O] [Z] ne justifie pas d'une aggravation de son état de santé depuis le rapport établi par l'expert [P] le 25 juin 2002 et l'arrêt rendu par la cour d'appel de Lyon le 9 février 2006 ;
Attendu que l'arrêt de la 7e chambre correctionnelle de la cour d'appel de Lyon en date du 9 février 2006, statuant sur renvoi de cassation a réformé le jugement du tribunal correctionnel qui avait retenu à tort un partage de responsabilité entre la mère, pour défaut de surveillance, et la station de lavage, laquelle n'était pas conforme aux normes, pour retenir l'entière responsabilité de la SARL Peirera dans la réalisation du dommage ;
Qu'il est précisé en page 3 dudit arrêt correctionnel que le représentant légal de [O] [Z] avait demandé à cette cour la réformation du jugement sur les intérêts civils, que la société Pereira soit déclarée entièrement responsable du préjudice causé du fait de l'accident du 9 décembre 1998, que la station Pereira soit condamnée à payer à [O] [Z] la somme totale de 650'250 €, que l'arrêt soit déclaré opposable à la Generali assurances et sollicité que soit seulement réservé l'indemnisation éventuelle de [O] [Z] quant à la nécessité de s'adjoindre les services d'une tierce personne au jour de sa majorité, ainsi que d'amenager son futur logement ;
Attendu que la cour d'appel de Lyon a chiffré les dommages de [O] [Z] en se fondant sur le rapport d'expertise du Dr [P] en date du 25 juin 2002 qui précisait au jour de son examen, que l'état de l'enfant était stabilisé sur le plan de son appareillage, mais qu'il serait nécessaire de la réexaminer, une fois au début de sa puberté, et une fois après sa puberté ; que les frais de prothèses futures pour la période postérieure à la fin de la puberté, dont il est demandé la réparation dans le cadre de la présente instance, ne pouvaient pas être déterminés au jour du rapport d'expertise par l'arrêt de la cour d'appel de Lyon et n'ont donc pas pu être indemnisés par cette décision ;
Attendu que M. [Z] agissant ès qualités qui était tenu de présenter lors de cette instance, toutes les demandes tendant à l'indemnisation des divers postes du préjudice corporel de Mlle [O] [Z], devait, lorsque ces postes étaient certains, mais futurs et non encore précisément chiffrables, solliciter qu'ils soient réservés ;
Attendu que le conseil de la victime n'a émis aucune prétention, ni réserve s'agissant des frais prothétiques futurs, alors qu'il n'a pas omis de le faire pour d'autres postes de préjudices, tels que l'aide par tierce personne et l'aménagement du logement ;
Attendu qu'à l'opposé, dans le cadre de l'instance liquidative du préjudice de Mme [Z], des frais futurs d'appareillage ont été réclamés et chiffrés sans réserve ; et qu'une indemnité a été allouée à ce titre ;
Attendu que contrairement à ce que prétend la CPAM, sa créance a nécessairement été produite devant la cour d'appel de Lyon ; que c'est ainsi que la cour d'appel de Lyon, statuant sur les intérêts civils, a alloué à la CPAM la somme de 31'149,41 €, sans préciser le détail de la créance de cet organisme ;
Attendu que celle-ci correspond toutefois pour partie à des frais de prothèses futures dans la mesure où la 'notification des débours' en date du 17 décembre 2004 (23'083,91 €) et l'intitulé 'calcul du capital appareillage' du second titre de créance du 17 novembre 2005 fixe à la somme de 8065,50 € le coût de l'appareillage définitif et du renouvellement de celui-ci, évalué sur la base d'un point de rente viagère tenant compte de l'âge de l'enfant à la date de sa liquidation ;
Que le cumul de ces deux sommes conduit à 31'140,41 €, montant retenu par la cour d'appel de Lyon et qui a déjà été réglé à Mme [Z] par l'assureur ;
Attendu qu'il y a lieu de constater qu'en l'absence de réserve émise par le conseil du représentant légal de [O] [Z] relative aux frais prothétiques futurs importants annoncés par l'expert [P], les frais d'appareillage ont été liquidés d'une manière définitive par la cour d'appel de Lyon du 9 février 2006 ;
Attendu que l'autorité de chose jugée le 9 février 2006 par la cour d'appel de Lyon fait en conséquence obstacle à la recevabilité des demandes de Mme [O] [Z] et de la CPAM ;
Attendu que le jugement qui a déclaré irrecevables les demandes de Mme [O] [Z] et les prétentions émises par la CPAM doit donc être approuvé ; qu'il n'y a pas lieu dès lors d'ordonner quelque mesure d'instruction ;
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement contradictoirement et en dernier ressort,
Dit n'y avoir lieu d'ordonner une mesure d'instruction,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
Dit n'y avoir lieu de faire application de ce texte.
LE GREFFIERLE PRESIDENT