COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-6
ARRÊT AU FOND
DU 21 JANVIER 2021
N°2021/36
N° RG 19/13623
N° Portalis DBVB-V-B7D-BEZPH
[O] [P] divorcée [R]
C/
[X] [C]
Société LA SHAM
Etablissement Public ONIAM CAUX (ONIAM)
Organisme CPAM DES BOUCHES DU RHÔNE RHÔNE
Copie exécutoire délivrée le :
à :
-Me Martine LELIEVRE-BOUCHARAT
- SELARL INTER-BARREAUX CARLINI & ASSOCIES
-SCP JOURDAN / WATTECAMPS ET ASSOCIES
-SCP VINSONNEAU PALIES,NOY, GAUER ET ASSOCIES
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 11 Juillet 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 18/07283.
APPELANTE
Madame [O] [P] divorcée [R]
Assurée sociale le n° 2 63 12 13 055 094/51
née le [Date naissance 6] 1963 à [Localité 9] (13),
demeurant [Adresse 4]
représentée et assistée par Me Martine LELIEVRE-BOUCHARAT, avocat au barreau de MARSEILLE, postulant et plaidant.
INTIMES
Monsieur [X] [C]
né le [Date naissance 3] 1946 à CASABLANCA,
demeurant [Adresse 8]
représenté et assisté par Me Philippe CARLINI de la SELARL INTER-BARREAUX CARLINI & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE, postulant et plaidant.
Société LA SHAM,
demeurant [Adresse 5]
représentée par Me Philippe CARLINI de la SELARL SELARL INTER-BARREAUX CARLINI & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE
ONIAM
Office National des Indemnisations des Accidents Médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales,
demeurant [Adresse 13]
représentée par Me Jean-François JOURDAN de la SCP JOURDAN / WATTECAMPS ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
CPAM DES BOUCHES DU RHÔNE,
demeurant [Adresse 7]
représentée par Me Régis CONSTANS de la SCP VINSONNEAU PALIES,NOY, GAUER ET ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Décembre 2020 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président, et Madame Anne VELLA, Conseillère, chargés du rapport.
Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président
Madame Anne VELLA, Conseillère
Madame Danielle DEMONT, Conseillère
Greffier lors des débats : Madame Charlotte COMBARET.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Janvier 2021.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Janvier 2021,
Signé par Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président et Madame Charlotte COMBARET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Mme [P] souffrant de cervico-dorsalgies a passé le 2 octobre 2001 un échodoppler qui a mis en évidence une compression artérielle sous-clavière à droite et à gauche, au niveau des défilés thoraco-brachiaux, avec arrêt des flux nets à gauche et sténose serrée à droite. Elle a consulté M. [C], neurochirurgien, le 15 novembre 2001 qui a lui soumis le principe et les modalités d'une résection de la première côte gauche.
Mme [P] a été admise du 18 au 23 novembre 2001 à l'Hôpital [11] Résidence du [10]. Elle fait état de difficultés à lever le bras gauche, en présence de M. [C], aussitôt après l'intervention du 20 novembre 2001, lors de man'uvres de testing.
En janvier 2002, un électro-myogramme a mis en évidence une dénervation du grand dentelé gauche et un déficit subséquent de la force musculaire et de l'élévation du bras gauche.
Par ordonnance du 14 décembre 2011, le juge des référés a commis aux fins d'expertise judiciaire le docteur [Z]. Le rapport déposé le 2 octobre 2012 conclut à un accident médical non fautif.
Le 29 septembre 2016, Mme [P] a saisi la CCI PACA aux fins d'indemnisation. La CCI a missionné le docteur [V] aux fins d'expertise médicale. Le rapport déposé le 14 février 2017 conclut à l'insuffisance fautive de protection du nerf grand dentelé, à l'origine d'une perte de 98'% de chance d'éviter le dommage.
Pour autant, la CCI a considéré par avis du 5 avril 2017 qu'aucun lien de causalité n'était caractérisé entre le manquement et les dommages invoqués.
Par assignation des 13, 14, 18 et 19 juin 2018, Mme [P] a saisi le TGI de [Localité 9] de demandes indemnitaires, au contradictoire de M. [C], la SHAM, l'ONIAM et la caisse primaire centrale d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône.
Par jugement contradictoire du 11 juillet 2019, le TGI de [Localité 9] a':
- déclaré irrecevable comme prescrites, les demandes indemnitaires formulées à l'encontre de l'ONIAM,
- condamné in solidum M. [C] et la SHAM à payer à Mme [P] une somme de 6000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice d'impréparation aux risques inhérents à l'intervention,
- débouté Mme [P] du surplus de ses demandes indemnitaires,
- débouté la caisse primaire d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône de l'ensemble de ses demandes,
- condamné in solidum M. [C] et la SHAM aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile,
- condamné in solidum M. [C] et la SHAM à payer à Mme [P] une indemnité de 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu d'assortir le jugement de l'exécution provisoire.
Par déclaration du 22 août 2019, Mme [P] a interjeté appel du jugement du TGI de [Localité 9]'en ces termes : appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières conclusions n°2 en appel partiel notifiées par RPVA le 7 août 2020, Mme [P] demande à la cour de':
- recevoir l'appel partiel de Mme [P] et le dire bien fondé,
A titre liminaire :
- juger que l'action n'est pas prescrite à l'égard de l'ONIAM,
- confirmer la décision de première instance en ce qu'elle a retenu un droit à indemnisation de madame [P] au titre du défaut d'information sur le risque d'atteinte neurologique qui s'est réalisé, à l'origine d'un préjudice qualifié de préjudice d'impréparation, à hauteur de 6.000 €,
- confirmer la décision de première instance en ce qu'elle a condamné le docteur [C] et son assureur in solidum aux entiers dépens et au versement d'une somme de 2.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- réformer la décision pour le surplus,
A titre principal :
- juger que les préjudices subis par madame [P] sont bien imputables à l'intervention litigieuse,
- juger que le docteur [C] a commis une faute par insuffisance de moyens pour éviter la survenue de l'atteinte du nerf du grand dentelé lors de l'opération chirurgicale réalisée le 20 novembre 2001, faute à l'origine d'une perte de chance de 98 % d'éviter cette atteinte,
- juger que cette faute engage la responsabilité du docteur [C] et de son assurance,
- juger que le docteur [C] a commis une faute en n'informant pas Mme [P] du risque neurologique inhérent à la technique chirurgicale choisie, à savoir une voie d'abord axillaire, en ne l'informant pas qu'il ne prendrait pas de précaution particulière de protection du nerf du grand dentelé, notamment par l'utilisation d'un électro-stimulateur, privant ainsi Mme [P] d'un choix éclairé entre les deux voies d'abord envisageables,
- juger que cette faute engage la responsabilité du docteur [C] et de son assureur la SHAM in solidum, pour perte de chance d'échapper au dommage qui s'est réalisé, à hauteur de 98%,
- condamner in solidum le docteur [C] et sa compagnie d'assurance la SHAM à indemniser madame [P] des préjudices découlant de l'accident médical à hauteur du taux de perte de chance retenu par l'expert à hauteur de 98%,
- condamner l'ONIAM à verser à Mme [P] le complément de l'indemnisation intégrale de son préjudice, pour la part non couverte au titre de la perte de chance que fixera la cour,
A titre subsidiaire :
- juger que l'accident médical dont a été victime Mme [P] relève de la solidarité nationale,
- condamner l'ONIAM à indemniser intégralement Mme [P] des préjudices subis,
- condamner le ou les succombants à verser à Mme [P] les sommes suivantes :
o 2.580 € au titre des frais divers,
o 4.370 € au titre de l'aide humaine avant consolidation,
o 9.000 € au titre du déficit fonctionnel temporaire,
o 10.000 € au titre des souffrances endurées,
o 2.000 € au titre du préjudice esthétique temporaire,
o 80.000 € au titre de l'incidence professionnelle, étant expressément précisé que cette indemnisation ne comprend pas l'indemnisation de l'incidence de l'accident sur la retraite, Mme [P] n'étant pas en mesure d'en chiffrer l'étendue à ce jour, faute d'avoir pu obtenir une simulation de retraite,
o 40.664 € au titre de la tierce personne du 20 septembre 2003 au 20 mai 2020,
o 46 € multiplié par le nombre de semaines écoulées entre le 20 mai 2020 et la date de la décision à intervenir au titre de la tierce personne durant cette période,
o 66.540,65 € au titre de la tierce personne future,
o 25.000 € au titre du déficit fonctionnel permanent,
o 6.000 € au titre du préjudice esthétique permanent,
o 5.000 € au titre du préjudice d'agrément
- juger que le préjudice des pertes de gains avant consolidation est constitué des débours de la caisse primaire d'assurance-maladie, à hauteur de 19.407,11 € tel que présenté dans ses débours, montant qui constitue l'assiette de ce poste de préjudice et qui ne pourra s'imputer sur aucun autre poste de préjudice,
- juger que le préjudice professionnel est constitué des débours de la caisse primaire d'assurance-maladie au titre des indemnités journalières versées après consolidation et de la pension d'invalidité catégorie 1 allouée à Mme [P], qui constitue l'assiette de ce poste de préjudice et qui ne peut s'imputer ni sur l'indemnisation de l'incidence professionnelle, ni sur l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent auxquelles peut prétendre Mme [P],
- en tout etat de cause, confirmer la décision de première instance sur l'existence d'un défaut d'information sur le risque neurologique qui s'est réalisé et sur l'indemnisation allouée à ce titre à hauteur de 6.000 €,
- condamner le ou les succombants à verser à Mme [P], en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure, un montant de 10.000 €,
- condamner le ou les succombants aux dépens d'instance, au profit de Maître [H] sur son affirmation de droits,
- condamner les succombants au versement des intérêts au taux légal à compter de la demande en justice, ces intérêts étant capitalisés par année entière à compter de cette même date, en application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil.
* * *
Aux termes de ses dernières conclusions d'intimé n°2 aux fins d'appel incident, notifiées par RPVA le 15 juillet 2020, M. [C] et la SHAM demandent à la cour, au visa des articles L.1111-2 et L.1142-1 du code de la santé publique, de':
- réformer le jugement rendu par le TGI de [Localité 9] en ce qu'il a :
* condamné M. [C], in solidum avec la SHAM, à payer à Mme [P] une somme de 6.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice d'impréparation aux risques inhérents à l'intervention ;
* condamné M. [C] in solidum avec la SHAM, aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
* condamné M. [C] in solidum avec la SHAM, à payer à Mme [P] une indemnité de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- reconventionnellement, condamner Mme [P] à rembourser à la SHAM la somme de 8.000 euros en exécution du jugement rendu par le TGI de [Localité 9] ;
- confirmer le surplus du jugement';
- condamner Mme [P] aux entiers dépens de l'instance.
* * *
Aux termes de ses dernières conclusions n°3 notifiées par RPVA le 27 novembre 2020, l'ONIAM demande à la cour, au visa de l'article L.1142-28 du code de la santé publique, de':
- recevoir l'ONIAM en ses écritures, les disant bien fondées,
A titre principal,
- confirmer le jugement rendu par le TGI de [Localité 9] le 11 juillet 2019 en ce qu'il a déclaré irrecevables car prescrites les demandes de Mme [P] formulée à l'encontre de l'ONIAM,
A titre subsidiaire,
- si par extraordinaire la cour de céans ne déclarait pas prescrites les demandes de Mme [P] formulées à l'encontre de l'ONIAM,
- constater l'existence d'une faute commise par M. [C], directement et exclusivement à l'origine des dommages de Mme [P],
- prononcer la mise hors de cause de l'ONIAM,
En toute hypothèse,
- condamner tout succombant à verser une somme de 3.000 euros à l'ONIAM au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens dont distraction au profit de Maître Jean-François Jourdan, avocat au barreau d'Aix-en-Provence, conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
À titre infiniment subsidiaire,
- dans l'hypothèse où, par impossible, la cour entrerait en voie de condamnation à l'encontre de l'ONIAM,
- rejeter les prétentions indemnitaires de Mme [P] au titre du préjudice esthétique temporaire et du préjudice d'agrément,
- réduire à de plus justes proportions les prétentions indemnitaires de Mme [P] comme suit :
o frais divers : 700 €
o incidence professionnelle : 1000 €
o déficit fonctionnel temporaire : 3280 €
o souffrances endurées : 5894 €
o déficit fonctionnel permanent : 13120 €
o préjudice esthétique permanent : 2951 €
- surseoir à statuer s'agissant de la tierce personne temporaire et permanente, dans l'attente de la production de tout document utile sur l'absence de perception d'aides par Mme [P],
À titre subsidiaire sur ces deux postes de préjudice,
- réduire l'indemnisation sollicitée par Mme [P] au titre de la tierce personne temporaire à 2578 €
- réduire l'indemnisation sollicitée par Mme [P] au titre de la tierce personne permanente à 22817 euros jusqu'au 31 août 2020, et à la rente trimestrielle de 338 euros à compter du 1er septembre 2020, dont le versement sera soumis à la justification chaque trimestre des sommes perçues par la patiente au titre de la tierce personne,
- rejeter toute autre demande.
* * *
Aux termes de ses dernières conclusions n°3 notifiées par RPVA le 18 août 2020, la caisse primaire centrale d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône demande à la cour de':
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il déboute la caisse primaire d'assurance-maladie des bouches du rhône de l'ensemble de ses demandes ;
- fixer à la somme de 82520,51 € le montant du recours de la caisse concluante, en relation directe avec l'accident dont Mme [P] a été victime des suites de l'intervention chirurgicale pratiquée le 20 novembre 2011 par M. [C] ;
- dire et juger que le préjudice des pertes de gains avant consolidation s'imputera si nécessaire, sur un autre poste de préjudice ;
- dire et juger que le préjudice professionnel s'imputera si nécessaire, sur l'indemnisation de l'incidence professionnelle et sur l'indemnisation du déficit permanent ;
- en cas d'infirmation du jugement déféré, condamner in solidum M. [C] avec son assureur, la SHAM, au paiement de ladite somme, dans les conditions ci-dessus décrites,
- dire, que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la date de communication des premières écritures de la concluante soit le 18 septembre 2018 ;
- condamner, in solidum le docteur [C] et son assureur, la SHAM, au paiement d'une indemnité de 2000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et au paiement de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par l'article l. 376-1 du code de la sécurité sociale, d'un montant de 1 091 € ;
- condamner in solidum M. [C] et son assureur, la société SHAM, aux entiers dépens.
* * *
La clôture a été prononcée le 1er décembre 2020.
Le dossier fixé au 15 décembre 2020 a été renvoyé au 16 décembre 2020 et mis en délibéré au 21 janvier 2021. Les parties ont été invitées à communiquer une note en délibéré concernant l'effet dévolutif de l'appel du 22 août 2019.
* * *
Aux termes d'une note en délibéré sur l'effet dévolutif de l'appel reçue le 8 janvier 2021, le conseil de Mme [P] indique avoir joint concomitamment à la déclaration d'appel un document intitulé « conclusions en appel partiel » comportant :
- non seulement le détail des chefs de jugement critiqués et dont il est demandé réformation en appel, et ceux dont il est demandé confirmation,
- mais aussi les conclusions de l'appelant.
Précision étant faite que ces deux pièces étaient signifiées aux intimés par acte d'huissier de justice du 14 octobre 2019, rédigé en ces termes dans les termes suivants':
Je vous remets ci-joint :
- d'une déclaration d'appel n°19711714 en date du 22 août 2019, effectuée par l'avocat du requérant, Maître [H], [Adresse 2], dans l'affaire référencée RG 19/13623 ' n° Portalis DBVB - V - B 7 D - BEZPH devant la chambre 1-6 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence à l'encontre d'un jugement au fond rendu par le tribunal de grande instance de marseille en date du 11 juillet 2019,
- d'un avis d'avoir à signifier la déclaration d'appel émis par le greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 8 octobre 2019,
- des conclusions en appel partiel déposées par l'avocat du requérant, Maître [H], [Adresse 1].
* * *
Par note en délibéré du 7 janvier 2021 reçue le 11 janvier 2021, le conseil de la caisse primaire d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône considère que la difficulté soulevée a une portée limitée dans la mesure où les conclusions jointes à la déclaration d'appel font état dans le détail des chefs de jugement critiqués.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la nature de la décision rendue':
L'arrêt rendu sera contradictoire, conformément à l'article 467 du code de procédure civile.
Sur l'effet dévolutif de la déclaration d'appel du 22 août 2019 :
La déclaration d'appel du 22 août 2019 indique que l'appel est limité aux chefs de jugement expressément critiqués.
En vertu de l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret 2017-891 du 6 mai 2017, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s'opérant pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. En outre, seul l'acte d'appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement. Il en résulte que, lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation d'un jugement sans mentionner expressément les chefs de jugement critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas.
Un arrêté du 20 mai 2020 du Garde des [Localité 12] définissant les modalités des échanges par voie électronique a bien été pris en application de l'article 930-1 dernier alinéa du code de procédure civile. L'article 8 précité dispose que le message de données relatif à une déclaration d'appel provoque un avis de réception par les services du greffe, auquel est joint un fichier récapitulatif reprenant les données du message. Ce récapitulatif, accompagné le cas échéant de la pièce jointe établie sous forme de copie numérique annexée à ce message et qui fait corps avec lui, tient lieu de déclaration d'appel.
En l'espèce, cependant, aucune annexe à la déclaration d'appel ne vient expliciter les chefs du jugement que l'appelant à entendu critiquer. Le périmètre de l'effet dévolutif étant indéterminé, ledit effet n'a pas opéré.
Il n'apparaît pas que l'appelant ait mis à profit le délai de trois mois imparti par l'article 908 du code de procédure civile pour régulariser une nouvelle déclaration d'appel.
Un appel incident peut résulter de conclusions. Au contraire, un appel principal ne peut résulter ni de conclusions ni d'une assignation.
L'irrégularité affectant l'acte d'appel du 22 août 2019 ne saurait être régularisée par la concomitance des conclusions. La notification de ces dernières atteste du respect du contradictoire mais n'a aucun effet en soi sur la saisine de la cour ' ce d'autant moins que l'acte d'appel est intangible alors que les conclusions sont évolutives (article 954 du code de procédure civile).
La cour n'est pas valablement saisie de la déclaration d'appel du 22 août 2019 de Mme [P].
Sur les demandes annexes':
L'équité ne justifie pas l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Conformément à l'article 699 du code de procédure civile, Mme [P] sera condamnée aux dépens de l'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Se déclare non saisie par la déclaration d'appel du 22 août 2019.
Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne Mme [P] aux dépens de l'appel.
Le greffier Le président