ARRET
No
X...
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Y...
Dar. / JL
COUR D' APPEL D' AMIENS
5ème chambre sociale cabinet B
PRUD' HOMMES
ARRET DU 19 DECEMBRE 2007
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RG : 06 / 03917
JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD' HOMMES DE BEAUVAIS en date du 15 décembre 2005
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE
Madame Sophie X...
...
44270 PAULX
Représentée, concluant et plaidant par Me François GAIRIN, avocat au barreau de BEAUVAIS
ET :
INTIME
Monsieur John Y...
...
...
60110 AMBLAINVILLE
Représenté, concluant et plaidant par Me Christian GARNIER, avocat au barreau de BEAUVAIS
DEBATS :
A l' audience publique du 09 Octobre 2007 ont été entendus les avocats en leurs conclusions et plaidoiries respectives devant Mme DARCHY, Président de chambre, siégeant en vertu des articles 786 et 945- 1 du nouveau Code de procédure civile et sans opposition des parties, qui a renvoyé l' affaire à l' audience publique du 05 Décembre 2007 pour prononcer l' arrêt par mise à disposition au greffe de la copie.
GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme LEROY
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme DARCHY en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, cabinet B de la Cour composée en outre de :
Mme LECLERC- GARRET, Conseiller,
Mme SEICHEL, Conseiller,
qui en a délibéré conformément à la loi.
Le 05 décembre 2007, le délibéré a été prolongé au 19 décembre 2007 pour prononcé de l' arrêt par mise à disposition au greffe.
PRONONCE :
A l' audience publique du 19 Décembre 2007, l' arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme DARCHY, Président de chambre et Mme LEROY, Greffier, présente lors du prononcé.
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DECISION :
Vu le jugement rendu le 15 décembre 2005 par le conseil de prud' hommes de BEAUVAIS qui a débouté Sophie X... de ses demandes.
Vu l' appel de cette décision interjeté le 23 décembre 2005 par Sophie X....
Vu les conclusions et observations orales des parties à l' audience du 9 octobre 2007 auxquelles il est renvoyé pour l' exposé détaillé des prétentions et moyens présentés devant la Cour.
Vu les conclusions récapitulatives enregistrées au greffe le 11 juillet 2007, reprises à l' audience par lesquelles Sophie X... demande à la Cour :
- d' infirmer le jugement entrepris,
- de constater la rupture de son contrat de travail aux torts et griefs de son employeur,
- de condamner John Y... à lui payer les sommes de :
. 14. 190, 30 € à titre de rappel de salaire de 2001 à septembre 2003,
. 1. 419, 03 € à titre de congés payés sur ce rappel,
. 4. 862, 54 € à titre d' indemnité de préavis (deux mois),
. 486, 25 € à titre de congés payés sur préavis,
. 3. 000 € sauf à parfaire à titre d' indemnité de licenciement,
. 14. 587, 62 € à titre d' indemnité sur le fondement des dispositions de l' article L 324- 11- 1 du code du travail pour travail dissimulé,
. 20. 000 € à titre d' indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 2. 000 € au titre de l' article 700 du nouveau code de procédure civile,
en faisant essentiellement valoir :
- qu' à partir de son mariage, Monsieur B..., cadre administratif, devait se montrer de plus en plus désagréable avec elle, lui imposant des changements d' horaires injustifiés, lui refusant ses congés, adoptant à son égard une attitude hostile ainsi qu' un comportement intrusif, par exemple en se mettant à vérifier le contenu de son ordinateur et en s' ingérant dans sa vie privée, ce comportement étant accompagné de courriers désagréables et de propos déplaisants,
- que la détérioration de son état de santé devait être la cause d' arrêts de travail avant même le début de la période légale de son congé maternité,
- qu' à son retour, Monsieur B... persistait dans son comportement de sorte qu' elle devait se trouver en arrêt maladie à compter du 14 octobre 2003 à raison de la dépression dont elle souffrait par suite du harcèlement moral dont elle était victime,
- qu' elle a accompli de nombreuses heures de travail impayées et que son contrat de travail aurait dû être modifié pour être considéré comme l' équivalent d' un temps plein,
- qu' au 1er janvier 2002 son employeur s' est abstenu de mettre en application la loi sur les 35 heures, notamment en ce qui concerne les dispositions relatives aux heures complémentaires et aux heures récupérées,
- que la pratique de l' employeur consistant à partir de novembre 2000 à soumettre ses heures supplémentaires au régime des récupérations afin de la déclarer à temps partiel alors qu' elle était employée à plein temps, est illégale et justifie sa demande d' indemnité pour travail clandestin,
- que les manquements de son employeur : non paiement de la totalité des heures de travail, non respect de la loi sur les 35 heures, suppression de son logement de fonction, harcèlement continuel, justifiaient la rupture à ses torts exclusifs du contrat de travail, cette rupture étant intervenue bien avant le licenciement mis en place par l' employeur,
- que ses demandes sont donc justifiées.
Vu les conclusions enregistrées au greffe le 20 mars 2007, soutenues à l' audience, par lesquelles, contestant et réfutant les moyens et l' argumentation de l' appelante, John Y..., sollicite la confirmation du jugement et la condamnation de Sophie X... à lui payer la somme de 3. 000 € au titre de l' article 700 du nouveau code de procédure civile,
en faisant principalement valoir :
- qu' il verse aux débats un tableau comportant de juin 2000 à décembre 2003 l' intégralité des jours travaillés par Sophie X..., les heures prises pour congés payés ou pour absence autorisée et le temps effectif de travail,
- que l' appelante a été rémunérée pour les heures de travail qu' elle a accomplies et que c' est à tort qu' elle invoque les dispositions relatives au statut des heures complémentaires, des heures de récupération, du repos compensateur de remplacement ainsi que de la réduction du temps de travail, toutes dispositions qui n' étaient pas applicables à son contrat,
- que les accusations de harcèlement et les griefs de la salariée à l' encontre de Monsieur B... sont infondés,
- qu' en réalité celle- ci abusait de la confiance qui lui était accordée en utilisant à des fins personnelles le matériel informatique de l' employeur, commettait des erreurs dans son travail et s' abstenait de toute initiative,
- que Sophie X... ne disposait pas d' un logement de fonction et que c' est de son plein gré qu' elle a choisi de déménager,
- que contrairement à ce que soutient l' appelante aucun tabagisme ne lui a été imposé durant sa grossesse, étant d' ailleurs observé que durant cette période elle a eu de nombreux arrêts de travail,
- que Sophie X... ne s' étant plus présentée à son travail à compter du 14 décembre 2003 et n' ayant plus justifié ses absences, malgré un courrier recommandé de son employeur, son licenciement pour faute grave était justifié en raison de son abandon de poste,
SUR CE :
Attendu que suivant contrat à durée déterminée en date du 23 juin 2000, Sophie C... devenue épouse X... et qui auparavant avait déjà travaillé pour le même employeur aux termes de contrats à durée déterminée, a été engagée jusqu' au 22 septembre 2000 en qualité du secrétaire " par le domaine de SANDRICOURT " appartenant à John Y... moyennant une rémunération brute mensuelle de 9. 295 F pour un horaire mensuel moyen de 169 heures ;
Attendu que suivant contrat à durée indéterminée à temps partiel en date du 13 septembre 2000, elle était embauchée par le même employeur à compter du 23 septembre 2000 en qualité de secrétaire bilingue moyennant une rémunération brute mensuelle de 5. 164, 36 F pour un horaire moyen de 84, 50 heures, soit 19 heures 30 par semaine ;
Attendu qu' il était précisé au contrat de travail, s' agissant des heures complémentaires :
" En fonction des besoins de l' entreprise, le salarié pourra être conduit à effectuer des heures complémentaires dans la limite de 10 % de la durée hebdomadaire fixée par le présent contrat.
En accord avec la réglementation du travail à temps partiel, les heures complémentaires seront payées comme heures de travail normales et ne seront en aucun cas majorées ".
Attendu qu' à compter de mai 2001 la durée hebdomadaire de travail était portée à 32 heures ;
Attendu qu' à l' expiration d' un congé maternité et de congés payés, Sophie X... reprenait son travail le 26 août 2003 ;
Attendu qu' à compter du 14 octobre 2003, elle était en arrêt de travail pour maladie ; que le 28 octobre 2003, invoquant divers manquements de son employeur à ses obligations, elle saisissait le conseil de prud' hommes de BEAUVAIS aux fins, notamment, de voir constater la rupture de son contrat de travail aux torts et griefs de l' employeur ;
Attendu que par courrier du 16 février 2004 elle était convoquée à un entretien préalable au licenciement, entretien fixé au 27 février 2004, puis était licenciée pour faute grave par une lettre en date du 8 mars 2004 pour " absence injustifiée depuis plus de deux mois et demi ", y étant indiqué :
" Vous avez été absente pour maladie du 14 octobre 2003 au 13 décembre 2003. Depuis lors, vous ne vous êtes pas présentée au travail et n' avez nullement justifié d' un motif d' absence, malgré mon courrier recommandé avec accusé de réception du 23 décembre 2003 vous mettant en demeure de justifier de votre absence ".
Attendu que déboutée de ses demandes par jugement du 15 décembre 2005, Sophie X... en a régulièrement interjeté appel ;
Attendu que s' il résulte de l' article L 212- 1- 1 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n' incombe spécialement à aucune des parties, il incombe cependant au salarié de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ;
Attendu que soutenant qu' elle aurait travaillé à temps plein et qu' elle n' aurait pas été rémunérée de toutes ses heures de travail, Sophie X... réclame la somme de 14. 190, 30 € à titre de rappel de salaire de 2001 à septembre 2003 ;
Attendu qu' il résulte des pièces versées aux débats, et qu' il n' est d' ailleurs pas contesté par la salariée, qui l' a admis dans ses courriers du 26 août 2003 et du 23 septembre 2003, que son horaire de travail était passé à compter du 1er mai 2001 à 32 heures par semaine, et ce sans aucune protestation de sa part ;
Attendu que les bulletins de salaire correspondant à la période visée par la réclamation mentionnent régulièrement le paiement d' heures complémentaires et d' heures supplémentaires à 125 % et à 150 % ;
Attendu que les tableaux et listings informatiques établis par la salariée elle- même et ses calculs, qui ne reposent sur aucun élément objectif, ne permettent pas d' établir qu' elle aurait effectué des heures de travail qui ne lui auraient pas été payées, alors que pour sa part l' employeur a établi un décompte tenant compte notamment des congés payés et des absences, duquel il ressort qu' elle a été remplie de ses droits et qu' elle n' était pas employée à temps plein, même si elle effectuait des heures complémentaires et parfois des heures supplémentaires ;
Attendu qu' il s' ensuit qu' il ne peut être reproché à l' employeur de n' avoir pas mis en application au 1er janvier 2002 la loi sur les 35 heures, notamment en ce qui concerne les dispositions relatives aux heures complémentaires et aux heures récupérées ;
Attendu que Sophie X... a donc été à juste titre déboutée de ses demandes de rappel de salaires, de congés payés y afférents et par voie de conséquence d' indemnité pour travail dissimulé ;
Attendu qu' elle ne peut reprocher à son employeur de lui avoir retiré le logement de fonction qu' elle occupait avec son mari, alors qu' il ressort du procès- verbal de restitution de logement, qu' elle a signé, qu' elle avait " informé son employeur, et propriétaire du logement, de son désir de délaisser celui- ci " et que les parties ont convenu " de mettre un terme à cette convention d' occupation précaire accessoire au contrat de travail ", la salariée n' établissant pas avoir délaissé son logement sous la contrainte ;
Attendu que les attestations qu' elle verse aux débats ne permettent pas d' étayer ses griefs à l' égard de son employeur ou de Monsieur B... son supérieur hiérarchique, ces attestations émanant de personnes étrangères au lieu de travail et n' ayant donc fait aucune constatation personnelle, se bornant pour la plupart à faire état de ses dires, ou étant même pour certaines sans rapport avec le litige ;
Attendu qu' elle ne peut sérieusement reprocher à Monsieur B... un comportement intrusif pour avoir vérifié le contenu de l' ordinateur mis à sa disposition pour ses besoins professionnels alors qu' il apparaît des pièces produites, notamment d' un constat d' huissier qu' elle en faisait un usage abusif à des fins personnelles, ni de lui avoir refusé des congés payés les 21 et 22 janvier 2002 alors que sa demande était tardive ;
Attendu que les faits qu' elle allègue à l' appui de son accusation de harcèlement ne reposent que sur ses affirmations ;
Attendu qu' elle n' établit pas avoir été durant sa grossesse victime du tabagisme de M. B..., l' attestation de Robert D... permettant d' écarter cette accusation ;
Attendu que les courriers échangés entre les parties, dans un contexte conflictuel, traduisent des désaccords et des griefs réciproques qui ne peuvent être assimilés à de l' hostilité et à une agressivité gratuite ;
Attendu qu' à défaut par la salariée d' établir la réalité et le sérieux des manquements reprochés à son employeur, elle a été à juste titre déboutée de sa demande tendant à voir prononcer la rupture à ses torts ;
Attendu que les motifs énoncés dans la lettre de licenciement déterminent les limites du litige ; qu' il appartient à l' employeur qui invoque l' existence d' une faute grave d' en rapporter la preuve ;
Attendu que Sophie X... était en arrêt de travail du 14 octobre 2003 au 13 décembre 2003 ; qu' elle ne conteste pas ne pas avoir repris son travail à l' issue de cet arrêt de travail et n' avoir pas justifié de son absence malgré la demande de son employeur faite par courrier recommandé du 23 décembre 2003 ;
Attendu qu' elle ne peut justifier sa carence et son abandon de poste par le fait que son employeur aurait voulu modifier ses horaires de travail, alors qu' elle ne s' explique pas sur ses horaires antérieurs à son congé maternité ; qu' il ressort de son courrier du 26 août 2003 qu' elle a repris son travail " tout à fait normalement " suite à son congé et que c' est elle qui a demandé implicitement un changement de ses horaires, se disant indisponible " les matinées du lundi 4, mardi 5 et vendredi 6 septembre " ; qu' enfin elle n' a pas répondu au courrier du 13 octobre 2003 lui proposant un contrat de travail à temps plein, s' abstenant même de toute discussion à ce sujet ;
Attendu que son abandon de poste ainsi caractérisé rendait impossible son maintien dans l' entreprise, même pendant le préavis ; que son licenciement reposant sur une faute grave, elle a été à juste titre déboutée de l' ensemble de ses demandes ;
Attendu que succombant en son appel elle réglera à John Y... la somme de 500 € au titre de l' article 700 du nouveau code de procédure civile et supportera l' intégralité des dépens ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Reçoit l' appel régulier en la forme,
Au fond,
Confirme le jugement,
Déboute en conséquence Sophie X... de toutes ses demandes,
La condamne à payer à John Y... la somme de 500 € au titre de l' article 700 du nouveau code de procédure civile,
La condamne aux dépens de 1ère instance et d' appel.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,