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12/05/2022 | FRANCE | N°20/05158

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 12 mai 2022, 20/05158


ARRET

N° 269





S.A.S.U. EURO DEPOT IMMOBILIER





C/



URSSAF NORD PAS DE CALAIS







VC





COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 12 MAI 2022



*************************************************************



N° RG 20/05158 - N° Portalis DBV4-V-B7E-H4J2



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE EN DATE DU 15 septembre 2020





PARTIES EN CAUSE :





APPE

LANTE





S.A.S.U. EURO DEPOT IMMOBILIER agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié en cette qualité audit siège

30/32 rue de la Tourelle

91310 LONGPONT SUR ORGE





Représentée et plaidant par Me Maxime LOIZ...

ARRET

N° 269

S.A.S.U. EURO DEPOT IMMOBILIER

C/

URSSAF NORD PAS DE CALAIS

VC

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 12 MAI 2022

*************************************************************

N° RG 20/05158 - N° Portalis DBV4-V-B7E-H4J2

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE EN DATE DU 15 septembre 2020

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.A.S.U. EURO DEPOT IMMOBILIER agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié en cette qualité audit siège

30/32 rue de la Tourelle

91310 LONGPONT SUR ORGE

Représentée et plaidant par Me Maxime LOIZEL, avocat au barreau de PARIS et Me Colin BERNIER, avocat au barreau des Hauts de Seine substituant Me Julie JACOTOT de la SCP FROMONT BRIENS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0107

ET :

INTIME

URSSAF NORD PAS DE CALAIS agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié en cette qualité audit siège

293 avenue du Président Hoover

BP 20001

59032 LILLE CEDEX

Représenté et plaidant par Me Gaelle DEFER, avocat au barreau d'AMIENS substituant Me Maxime DESEURE de la SELARL LELEU DEMONT HARENG DESEURE, avocat au barreau de BETHUNE

DEBATS :

A l'audience publique du 09 Novembre 2021 devant Mme Véronique CORNILLE, conseiller, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 10 Janvier 2022.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

M. Pierre DELATTRE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Véronique CORNILLE en a rendu compte à la Cour composée en outre de:

Madame Jocelyne RUBANTEL, Président,

Mme Chantal MANTION, Président,

et Mme Véronique CORNILLE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 10 janvier 2022, le délibéré a été prorogé au 12 mai 2022

Le 12 Mai 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Madame Jocelyne RUBANTEL, Présidente a signé la minute avec Mme Blanche THARAUD, Greffier.

*

* *

DECISION

La société EURO DEPOT IMMOBILIER a fait l'objet d'un contrôle par les services de l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Nord Pas de Calais (ci-après l'URSSAF) portant sur l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires « AGS », pour la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014.

Le 30 septembre 2015, l'URSSAF a adressé à la société EURO DEPOT IMMOBILIER une lettre d'observations comprenant 4 chefs de redressement et portant redressement à hauteur de 94.320 euros.

La société EURO DEPOT IMMOBILIER a contesté le redressement et l'URSSAF a ramené son montant à 91 860 euros.

Le 23 décembre 2015, une mise en demeure de payer la somme de 104 383 euros dont 12 523 euros de majorations a été notifiée à la société EURO DEPOT IMMOBILIER, laquelle a formé un recours devant la commission de recours amiable de l'URSSAF.

Saisi par la société EURO DEPOT IMMOBILIER d'une contestation de la décision de rejet du 11 décembre 2017 de la commission de recours amiable, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lille devenu tribunal judiciaire, pôle social, a par jugement du 15 septembre 2020 :

- dit la procédure de contrôle et le redressement réguliers ;

- confirmé les postes de redressement n°3 et 4 de la lettre d'observations ;

- condamné la SASU EURO DEPOT IMMOBILIER aux entiers dépens ;

- condamné la SASU EURO DEPOT IMMOBILIER à payer l'URSSAF Nord Pas-de-Calais la somme de 600 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par courrier recommandé avec accusé réception expédié le 14 octobre 2020, la société EURO DEPOT IMMOBILIER a interjeté appel du jugement qui lui avait été notifié le 17 septembre 2020.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 9 novembre 2021.

Par conclusions communiquées au greffe le 4 octobre 2021 soutenues oralement à l'audience, la société EURO DEPOT IMMOBILIER demande à la cour de :

- infirmer le jugement du 15 septembre 2020 en toutes ses dispositions ;

- s'agissant du chef de redressement n°3 « Actionnariat : attributions actions gratuites : conditions d'exonération » :

$gt; Sur l'année 2013 :

S'agissant des actions gratuites attribuées dans le cadre des plans qualifiés :

' constater que les conditions d'assujettissement aux contributions et cotisations de sécurité sociale des actions gratuites acquises par les salariés en 2013 n'étaient pas remplies;

' partant, annuler le redressement opéré à ce titre et, par conséquent, condamner l'URSSAF à rembourser la somme correspondante indûment versée et les majorations de retard y afférentes, avec intérêt au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir;

S'agissant des options de souscription d'actions à prix zéro attribuées dans le cadre des plans non qualifiés :

' constater que la société a valablement retenu le gain d'exercice réalisé par le salarié pour déterminer l'assiette des contributions et cotisations de sécurité sociale;

' partant, réévaluer l'assiette du redressement opéré à ce titre à la somme de 894,60 euros et, par conséquent, condamner l'URSSAF à rembourser la somme indûment versée à ce titre et les majorations de retard y afférentes, avec intérêt au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir ;

$gt; Sur l'année 2014 :

' constater que les conditions d'assujettissement aux contributions et cotisations de sécurité sociale des actions gratuites acquises par les salariés en 2014 n'étaient pas remplies;

' partant, annuler le redressement opéré à ce titre et, par conséquent, de condamner l'URSSAF à rembourser la somme correspondante indûment versée et les majorations de retard y afférentes, avec intérêt au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir;

- s'agissant du chef de redressement n° 4 «Location courte durée de voitures : avantage en nature » :

- annuler le redressement opéré;

- en conséquence, condamner l'URSSAF à lui rembourser la somme de 4 374 euros et les majorations de retard y afférentes, avec intérêt au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir ;

- en tout état de cause :

- débouter l'URSSAF de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner l'URSSAF à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions réceptionnées par le greffe le 29 octobre 2021 soutenues oralement à l'audience, l'URSSAF Nord Pas-de-Calais demande à la cour de:

- confirmer le jugement dont appel,

- débouter la société EURO DEPOT IMMOBILIER de ses demandes contraires,

- condamner la société EURO DEPOT IMMOBILIER à lui payer la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner aux dépens.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour l'exposé plus ample des moyens.

MOTIFS

Sur le point de redressement n° 3 : 'Actionnariat : attributions actions gratuites ' conditions d'exonération'

L'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, soit avant sa modification par la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013 s'agissant d'actions attribuées avant le 28 septembre 2012, dispose :

en son alinéa premier : 'Pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire';

et en son alinéa 13 : 'Les attributions gratuites d'actions effectuées conformément aux dispositions des articles L. 225-197-1 à L. 225-197-3 du code de commerce sont exclues de l'assiette des cotisations mentionnées au premier alinéa si elles sont conservées dans les conditions mentionnées au I de l'article 80 quaterdecies du code général des impôts et si l'employeur notifie à son organisme de recouvrement l'identité de ses salariés ou mandataires sociaux auxquels des actions gratuites ont été attribués définitivement au cours de l'année civile précédente, ainsi que le nombre et la valeur des actions attribuées à chacun d'entre eux. À défaut l'employeur est tenu au paiement de la totalité des cotisations sociales, y compris pour leur part salariale.

Ces dispositions sont également applicables lorsque l'attribution est effectuée, dans les mêmes conditions, par une société dont le siège est situé à l'étranger et qui est mère ou filiale de l'entreprise dans laquelle l'attributaire exerce son activité'.

Les articles L. 225-197-1 et suivants du code de commerce prévoient les modalités d'attribution des actions gratuites ouvrant droit à l'exonération des cotisations de sécurité sociale, à savoir :

- l'assemblée générale extraordinaire peut autoriser le conseil d'administration ou le directoire à procéder, au profit des membres du personnel salarié de la société ou de certaines catégories d'entre eux, à une attribution gratuite d'actions existantes ou à émettre,

- le conseil d'administration ou le directoire définit l'identité du bénéficiaire et fixe les conditions et les critères d'attribution,

- l'assemblée générale extraordinaire fixe le pourcentage maximal du capital social pouvant être attribué dans les conditions définies au premier alinéa,

- l'assemblée générale extraordinaire fixe la période d'acquisition au terme de laquelle l'attribution des actions à leur bénéficiaire est définitive dont la durée minimale ne peut être inférieure à deux ans, et elle fixe la durée minimale de l'obligation de conservation des actions par les bénéficiaires à compter de l'attribution définitive des actions qui ne peut être inférieure à deux ans ce qui amène la période d'indisponibilité minimale à quatre ans.

L'assemblée générale extraordinaire fixe également le délai pendant lequel l'autorisation donnée au conseil d'administration peut être utilisée, délai qui ne peut excéder trente-huit mois.

L'instruction générale 5F-17-06 du 10 novembre 2006 du bulletin officiel des impôts précise que certaines conditions formelles peuvent être adaptées pour les sociétés étrangères. Ainsi, l'autorisation d'attribuer des actions gratuites est donnée par l'organe ad hoc de la société étrangère habilité. S'agissant du délai de validité de l'autorisation, il est admis pour les sociétés étrangères que les autorisations données, en conformité avec la legislation commerciale étrangère applicable, pour une durée supérieure à trente-huit mois, ne font pas obstacle à l'application du régime spécifique attaché aux actions gratuites, à condition toutefois que cette autorisation ait été donnée pour une durée déterminée raisonnable.

Selon l'article 80 quaterdecies du code général des impôts dans sa version applicable aux actions attribuées avant le 28 septembre 2012, 'I. Les actions attribuées dans les conditions définies aux articles L. 225-197-1 à L. 225-197-3 du code de commerce sont imposées entre les mains de l'attributaire selon les modalités prévues au 6 bis de l'article 200 A lorsque les actions attribuées demeurent indisponibles sans être données en location pendant une période minimale de deux ans qui court à compter de leur attribution définitive.'

L'article 200 A6 bis du code générale des impôts précise que 'sauf option pour l'imposition à l'impôt sur le revenu selon les règles applicables aux traitements et salaires, l'avantage correspondant à la valeur à leur date d'acquisition des actions mentionnées à l'article 80 quaterdecies est imposé à 30%.'.

La société EURO DEPOT IMMOBILIER est une des filiales françaises de la société KINGFISCHER PLC, société de droit britannique, laquelle décide chaque année de plans d'attributions gratuites d'actions au profit de salariés de ses filiales.

Il est distingué les plans 'qualifiés'censés respecter les conditions des articles L. 225-197-1 et suivants du code de commerce et entrer dans le champ d'application de l'exonération des cotisations de l'article L.242-1, et les plans 'non qualifiés' ne respectant pas les règles des articles du code de commerce et dont les actions sont soumises à cotisations en tant qu'élément de rémunération.

Année 2013

-Plans qualifiés

L'URSSAF a réintégré dans l'assiette des cotisations, la valeur des actions attribuées gratuitement au cours des années 2009 et 2011 aux salariés [X] [V] et [F] [P] et acquises définitivement en 2013 à l'expiration du délai d'acquisition au titre du plan d'attribution dénommé 'PSP 2010 A FR', faute pour la société EURO DEPOT IMMOBILIER de remplir les conditions d'exonération prévues par les articles L.242-1 du code de la sécurité sociale, tenant en l'occurrence au respect des conditions resultant du code de commerce énoncées aux articles L.225-197-1 et suivants. Il est reproché à la société de ne pas avoir produit les pièces permettant de vérifier les critères et conditions d'attribution des actions.

La société EURO DEPOT IMMOBILIER oppose qu'elle a respecté ses obligations déclaratives dans sa DADS 2013 et que les spécificités du droit étranger applicable à la société attributrice imposent une adaptation des conditions formelles tandis que les conditions substantielles (durée des périodes d'acquisition et de conservation des titres notamment) doivent être respectées. Ainsi, le 'board of directors' est l'entité compétente pour autoriser un plan d'attribution gratuite d'actions et la decision est matérialisée dans un document 'deed of grant'. Elle soutient que la société KINGFISHER PLC a adopté des sous-plans afin de rendre certains plans conformes aux règles françaises du code de commerce ; que les actions attribuées en 2010 dans le cadre du 'PSP 2010 A FR' et définitivement acquises par les salariés en 2013 ont bien été réalisées dans le cadre d'un plan qualifié et sont donc éligibles au régime favorable de l'article L.242-1.

En l'espèce, la société EURO DEPOT IMMOBILIER verse au dossier (pièce 11) :

-en anglais et avec sa traduction, le règlement du plan PSP 2006 'Performance share plan' établi par la société FINGFISHER PL applicable à toutes les attributions réalisées au profit des bénéficiaires en dehors du Royaume-Uni et de l'Irlande et comportant une annexe A

( conditions applicables aux bénéficiaires résidant fiscaux en France) ou sous-plan,

-un document en anglais intitulé 'Deed of grant of awards'du 5 mai 2010, censé matérialiser la décision d'attribution des actions sans que la vérification soit possible, le document n'étant pas traduit,

-une liste en anglais 'KEG PSP LITE 2010 AWARD' du 5 mai 2010 comportant les noms de salariés de la société BRICO DEPOT FRANCE, dont ceux de [X] [V] et [F] [P] ,

- deux documents en anglais non traduits intitulés 'Minutes of a meeting of the Remuneration Committee held ''.

Toutefois, ces dcouments ne permettent pas de vérifier si les conditions d'exonération afférentes à la conformité du plan aux dispositions de l'article L.225-197-1 du code de commerce sont remplies, en particulier celle tenant à l'existence d'une autorisation d'attribuer des actions gratuites donnée par l'organe habilité de la société étrangère équivalent à l'assemblée générale extraordinaire. Il n'est d'ailleurs pas justifié des statuts permettant de déterminer cet organe ainsi que l'a relevé le tribunal. En outre, le 'deed of grant' qui est censé correspondre à la decision du conseil d'administration, ne comporte pas l'identité des bénéficiaires du plan alors que l'article L.225-197-1 l'exige.

Le jugement ayant validé le redressement de ce chef est donc confirmé.

-Plans non qualifiés

L'URSSAF a procédé à une rectification d'assiette des cotisations, considérant que la société avait sous-évalué les avantages en actions attribués à MM. [X] [V] et [F] [P] dans le cadre des plans dénommés 'KISS' et 'PSP'. La rectification tient compte du montant facturé par la société mère émettrice des titres à la société fille et porte sur 59 663 euros.

La société EURO DEPOT IMMOBILIER expose que les attributions dans le cadre de ces plans correspondent non pas à des attributions gratuites d'actions mais à des options à prix zero, permettant aux bénéficiaires d'acquérir gratuitement des actions KINGFISHER PLC en exerçant les options attribuées (plan KISS), et, qu'elles ont été traitées comme complément de rémuneration : le gain réalisé par les salariés bénéficiaires lors de la levée de leurs options correspondant à la valeur des actions à leur date d'acquisition.

Elle précise que la valeur de l'avantage réalisé est différente de la somme refacturée par la société mère à la société fille retenue par l'URSSAF comme base des cotisations de sécurité sociale ; qu'en cas d'attribution d'options d'achat d'actions, la société doit acheter ses actions à la date d'attribution des options et elle doit les conserver pour les distribuer le jour de la levée des options ; qu'ainsi la somme facturée par la société mère à la société fille correspond à la valeur des actions qu'elle a achetées à la date d'attribution et non à la valeur des actions à la date de la levée d'option.

Elle fait valoir que c'est le gain réalisé par le salarié qui doit être assujetti (différence entre la valeur réelle du titre à la date de la levée d'option et son prix effectif de souscription ou d'achat) et que le montant du gain assujetti est indépendant du montant refacturé à la société.

Il sera relevé que la société EURO DEPOT IMMOBILIER ne démontre pas en quoi les attributions litigieuses diffèrent des attributions d'actions gratuites, une option d'achat à prix zéro n'étant pas différente d'une attribution gratuite d'action.

Comme le souligne l'URSSAF, le principe de l'attribution d'options d'achats d'actions (stock-options) n'est pas d'acquérir les actions gratuitement lors de la levée d'option mais d'avoir la possibilité de les acquérir à la date de la levée d'option pour leur valeur fixée à la date d'attribution de l'option, ce qui présente un intérêt en cas de hausse de la valeur de l'action.

Par ailleurs, le tableau établi par la société EURO DEPOT IMMOBILIER (pièce 12) qui n'est ni certifié ni signé, retraçant la valeur des actions à la date de la levée d'option et le montant du gain devant être assujetti en 2013 en application du taux de change et aboutissant à une minoration du redressement, ne constitue pas un élement de preuve suffisant.

En l'absence d'éléments objectifs permettant de vérifier la valeur des actions à la date de la levée d'option, l'URSSAF était bien fondée à retenir la valeur des actions à la date de la décision d'attribution, soit la valeur refacturée à la société fille.

Le redressement est confirmé.

Année 2014

L'URSSAF a réintégré dans l'assiette des cotisations, la valeur des actions déclarées en 2014 dans la DADS attribuées gratuitement aux salariés [X] [V] et [F] [P], soit un montant de 14 844 euros.

Elle considère que la société EURO DEPOT IMMOBILIER ne remplit pas les conditions d'exonération prévues par les articles L.242-1 du code de la sécurité sociale, tenant au respect des conditions resultant du code de commerce énoncées aux articles L.225-197-1 et suivants. Elle reproche à la société comme pour l'année 2013, de ne pas avoir produit les pièces permettant de vérifier les critères et conditions d'attribution des actions, la liste des salariés attributaires des plans d'actions au cours de l'année 2014, les conditions prévues à l'article L.225-197-1 tenant au nombre total d'actions attribuées gratuitement qui ne peut excéder 10% du capital social à la date de leur attribution par le conseil d'admnistration ou le directoire.

La société EURO DEPOT IMMOBILIER oppose que les actions acquises en 2014 ont été attribuées en 2011 dans le cadre du plan PSP et que les attributions sont comme celles effectuées en 2010, réalisées dans le cadre d'un plan qualifié, et éligibles au régime favorable de l'article L.242-1.

En l'espèce, la société EURO DEPOT IMMOBILIER verse au dossier (pièce 13) :

- en anglais et avec sa traduction, le règlement du plan PSP 2006 'Performance share plan' établi par la société FINGFISHER PL et son annexe A,

-un document en anglais intitulé 'Deed of grant of awards'du 17 juin 2011, censé matérialiser la décision d'attribution des actions sans que la vérification soit possible, le document n'étant pas traduit,

- une liste en anglais ''KEG PSP AWARD 2011' du 17 juin 2011 comportant les noms de salariés de la société BRICO DEPOT FRANCE, dont ceux de [X] [V] et [F] [P],

- deux documents en anglais non traduits intitulés 'Minutes of a meeting of the Remuneration Committee held ''.

Comme pour l'année 2013, les pièces produites ne permettent pas de vérifier l'existence d'une autorisation d'attribuer des actions gratuites donnée par l'organe habilité de la société étrangère équivalent à l'assemblée générale extraordinaire en application de l'article L.225-197-1 du code de commerce. Le 'deed of grant' ne comporte pas l'identité des bénéficiaires des plans.

Le jugement ayant validé le redressement de ce chef est donc confirmé.

Sur le point de redressement n° 4 : 'Location courte durée de voitures : avantage en nature'

En application de l'article L. 242-1 alinéa 1 du code de la sécurité sociale, tout avantage en nature alloué en contrepartie ou à l'occasion du travail est soumis à cotisations.

Il résulte de l'article 3 de l'arrêté du 10 décembre 2002 relatif à l'évaluation des avantages en nature que l'utilisation privée d'un véhicule mis à disposition du salarié de façon permanente constitue un avantage en nature et que cet avantage est évalué sur la base des dépenses réellement engagées ou sur la base d'un forfait annuel estimé en poucentage du coût d'achat du véhicule ou du coût global annuel comprenant la location, l'entretien et l'assurance du véhicule en location.

L'URSSAF a retenu que la société louait des véhicules mis à disposition de certains salairiés pour les besoins professionnels et que la société ne rapportant pas la preuve d'une interdiction formelle d'un usage à titre privé, il s'agissait d'un avantage en nature. Elle a constaté ainsi que M. [E] avait bénéficié de la mise à disposition d'un véhicule de location du 6 janvier au 19 décembre 2012, du 2 janvier au 31 décembre 2013, du 1er janvier au 20 septembre 2014, et M. [L], du 27 mars au 31 décembre 2012, du 2 janvier au 24 décembre 2013 et du 1er janvier 2014 au 23 juillet 2014. Elle a reconstitué l'assiette des cotisations en calculant l'avantage en nature sur la base forfaitaire de 12% du coût du véhicule. Le redressement porte sur un montant de 4 374 euros pour les années 2012, 2013 et 2014.

La société EURO DEPOT IMMOBILIER oppose que le règlement intérieur de la société interdit d'utiliser les véhicules de l'entreprise ou de location à des fins personnelles (article 4) ; qu'il est indéniable qu'il est appliqué au sein de sa société même s'il s'agit du règlement intérieur de la société BRICO DEPOT dès lors qu'elles font partie du même groupe et qu'elles sont dans les mêmes locaux ; que la circulaire du 19 août 2005 n'impose pas que l'interdiction soit précisément énoncée dans le règlement intérieur de l'entreprise mais que tout écrit est suffisant ; que la commission de recours amiable qui a écarté le règlement intérieur, ajoute une condition non prévue par les textes ; qu'elle fournit des attestations de salariés certifiant de la non-utilisation à titre privé des véhicules.

Il n'est pas contesté que le règlement intérieur de la société BRICO DEPOT versé au dossier n'est pas un document interne de la société EURO DEPOT IMMOBILIER. Or l'appartenance des sociétés au même groupe ne suffit pas à établir la preuve de l'application dudit règlement indifféremment à toutes les sociétés du groupe. La société EURO DEPOT IMMOBILIER ne fournit aucun écrit (courriel, circulaire professionnelle, mention du contrat de travail) faisant état de l'application du règlement intérieur de la société BRICO DEPOT à ses salariés ou de façon générale de la prohibition de l'utilisation des véhicules en dehors des périodes de travail.

Par ailleurs, les attestations produites émanent de trois salariés de la société BRICO DEPOT qui ne sont pas concernés par le redressement de sorte qu'elles ne permettent pas d'établir l'interdiction faite par la société EURO DEPOT IMMOBILIER à ses propres salariés d'utiliser les véhicules à titre privé.

Ce chef de redressement est donc confirmé.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

La société EURO DEPOT IMMOBILIER qui succombe sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu publiquement par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement entrepris,

Rejette la demande de la société EURO DEPOT IMMOBILIER au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société EURO DEPOT IMMOBILIER aux dépens de l'instance d'appel.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 20/05158
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;20.05158 ?
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