La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/11/2022 | FRANCE | N°21/01970

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 10 novembre 2022, 21/01970


ARRET

N° 888





CPAM DES BOUCHES DU RHONE





C/



S.A. [3]













COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 10 NOVEMBRE 2022



*************************************************************



N° RG 21/01970 - N° Portalis DBV4-V-B7F-ICA7 - N° registre 1ère instance : 18/2037



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE (Pôle Social) EN DATE DU 09 février 2021





PARTIES EN

CAUSE :





APPELANT





La CPAM DES BOUCHES DU RHÔNE, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Secteur Juridictions

[Adresse 2]

[Adresse 2]







Représentée et plaid...

ARRET

N° 888

CPAM DES BOUCHES DU RHONE

C/

S.A. [3]

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 10 NOVEMBRE 2022

*************************************************************

N° RG 21/01970 - N° Portalis DBV4-V-B7F-ICA7 - N° registre 1ère instance : 18/2037

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE (Pôle Social) EN DATE DU 09 février 2021

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

La CPAM DES BOUCHES DU RHÔNE, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Secteur Juridictions

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée et plaidant par Me Carl WALLART, avocat au barreau d'AMIENS

ET :

INTIMEE

La société [3] (SA), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

( salariée : Mme [N] [H])

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée et plaidant par Me Marine GAINET DELIGNY, avocat au barreau de PARIS susbtituant Me Olivia COLMET DAAGE de la SELEURL OLIVIA COLMET DAAGE AVOCAT, avocat au barreau de PARIS

DEBATS :

A l'audience publique du 19 Mai 2022 devant Mme Elisabeth WABLE, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 10 Novembre 2022.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Blanche THARAUD

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme [K] [C] en a rendu compte à la Cour composée en outre de:

Mme Elisabeth WABLE, Président,

Mme Graziella HAUDUIN, Président,

et Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 10 Novembre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Elisabeth WABLE, Président a signé la minute avec Mme Marie-Estelle CHAPON, Greffier.

*

* *

DECISION

Vu le jugement rendu le 9 février 2021 par lequel le pôle social du tribunal judiciaire de Lille, statuant dans le litige opposant la société [3] à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, a':

- dit que la date de consolidation, dans les rapports entre la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône et la société [3], de l'accident du travail de Madame [N] [H] survenu le 3 février 2018 doit être fixée au 23 février 2018';

- dit que l'ensemble des soins et arrêts de travail délivrés à Madame [N] [H] à compter du 24 février 2018 sont inopposables à la société [3]';

- dit que la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône devra communiquer à la CARSAT compétente l'ensemble des informations nécessaires à la rectification des taux de cotisation AT/MP de la société [3]';

- condamné la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône aux dépens qui comprendront le coût de l'expertise médicale judiciaire ,

Vu la notification du jugement à la CPAM le 15 mars 2021 et l'appel relevé par celle-ci le 15 avril 2021,

Vu les conclusions visées le 19 mai 2022, soutenues oralement à l'audience, par lesquelles la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône prie la cour de':

- la déclarer recevable en son appel,

- annuler le rapport d'expertise du 5 mars 2020 du docteur [X],

- infirmer le jugement rendu le 9 février 2021 par le tribunal judiciaire de Lille ' pôle social, en ce qu'il a déclaré inopposable à la société [3] la prise en charge des soins et arrêts de travail liés à l'accident du travail du 3 février 2018 de Mme [N] [H] à compter du 24 février 2018,

- constatant qu'il subsiste une difficulté d'ordre médical, ordonner avant dire droit une nouvelle expertise médicale judiciaire sur pièces, avec mission reprise dans ses écritures,

- condamner la société [3] aux dépens,

Vu les conclusions visées le 19 mai 2022, soutenues oralement à l'audience, par lesquelles la société [3] prie la cour de':

- confirmer, en toutes ses dispositions, le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lille du 9 février 2021,

- débouter la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône de l'ensemble de ses demandes,

- entériner le rapport d'expertise médicale judiciaire établi par le docteur [X],

- dire que la prise en charge, au titre de la législation professionnelle, par la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, des prestations, soins et arrêts de travail prescrits postérieurement au 23 février 2018 est inopposable à la société [3],

- dire que la date de consolidation doit être fixée au 23 février 2018,

- dire que les frais d'expertise avancés par la société [3] seront remboursés par la caisse nationale d'assurance maladie,

- enjoindre la caisse primaire des Bouches-du-Rhône de transmettre à la CARSAT compétente le montant des prestations correspondant aux soins, arrêts de travail et toutes autres prestations prescrites déclarés inopposables à la concluante,

- condamner la caisse primaire des Bouches-du-Rhône aux dépens.

***

SUR CE, LA COUR,

Mme [N] [H], employée en qualité de vendeuse par la société [3], a été victime d'un accident du travail le 3 février 2018 , dans les circonstances ainsi décrites aux termes de la déclaration d'accident du travail en date du 5 février 2018 : «'[N] avait déjà mal à l'épaule droite'; elle utilisait au maximum son autre bras (le bras gauche). En montant sur le marchepied avec des vestes à la main, elle s'est déséquilibrée, et donc envoyé violemment la main droite pour se rattraper. Ce mouvement lui a déclenché une très forte douleur à l'épaule droite immédiatement'».

Le certificat médical initial établi le 5 févier 2018 a constaté un traumatisme de l'épaule droite.

Par courrier du 18 avril 2018, la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône a notifié à la société [3] une décision de prise en charge de l'accident déclaré au titre de la législation sur les risques professionnels.

Mme [N] [H] a été placée en arrêt de travail à compter du 14 février 2018 au titre d'un «'traumatisme de l'épaule droite avec rupture d'une macro-calcification du tendon supra-épineux'», puis, à compter du 4 septembre 2018, au titre d'une «'capsulite épaule droite suite calcification'».

Contestant l'opposabilité de la décision de prise en charge de l'accident ainsi que des soins et arrêts de travail dispensés à ce titre , la société [3] a saisi la commission de recours amiable qui a rejeté son recours, puis la juridiction de la sécurité sociale.

Par jugement avant dire droit du 26 novembre 2019, le pôle social du tribunal de grande instance de Lille a ordonné une expertise confiée à M. [X],avec mission notamment de' fixer la date de consolidation de Mme [N] [H] suite à son accident du travail du 3 février 2018, dire jusqu'à quelle date l'arrêt de travail et les soins directement causés par l'accident du travail du 3 février 2018 étaient médicalement justifiés, et dire si les arrêts de travail prescrits postérieurement au certificat médical initial sont directement et exclusivement imputables à l'accident du travail du 3 février 2018 ou s'ils sont rattachables, et dans quelle proportion, à une pathologie intercurrente ou une pathologie antérieure'.

Par jugement dont appel rendu après dépôt du rapport d'expertise, le tribunal judiciaire de Lille a fixé la date de consolidation au 23 février 2018 et dit inopposable à l'employeur l'ensemble des arrêts de travail et soins délivrés à Mme [N] [H] postérieurement à cette date.

La CPAM des Bouches-du-Rhône conclut à l'infirmation de la décision déférée et à la mise en 'uvre d'une nouvelle expertise médicale judiciaire en raison de la persistance d'une difficulté d'ordre médical.

Elle expose que Mme [N] [H] a bénéficié sans discontinuité des indemnités journalières du risque professionnel depuis le 14 février 2018, que son état de santé n'est à ce jour ni guéri, ni consolidé, et que la victime a continué à bénéficier, au delà du 2 janvier 2019, des indemnités journalières du risque professionnel sur la base de certificats médicaux de prolongation.

Elle fait valoir que Mme [N] [H] ne présentait pas d'état antérieur connu avant l'accident du 3 février 2018, qui l'a révélé en provocant la rupture d'une macro-calcification préexistante, laquelle a nécessité un geste chirurgical ayant lui-même entrainé par voie de complication une capsulite rétractile.

La CPAM estime ainsi qu'en l'absence du fait accidentel, il n'y aurait pas eu de rupture d'une macro calcification préexistante à l'épaule droite.

Elle observe que le rapport d'expertise médicale ne comporte pas mention du geste chirurgical ayant entraîné la capsulite, et considère que les arrêts de travail sont en rapport avec le fait accident accidentel aussi longtemps que la récupération fonctionnelle n'est pas intervenue.

La société [3] conclut à la confirmation de la décision entreprise.

Elle indique que le docteur [X], expert judiciaire, a clairement conclu que la durée des soins et arrêts en relation directe et unique avec l'accident s'étendait du 3 février 2018 au 23 février 2018, et qu'au-delà les arrêts de travail étaient en rapport ave une tendinopathie calcifiante de l'épaule droite, constitutive d'un état pathologique antérieur évoluant pour son propre compte, non aggravé , ni décompensé par l'accident du 3 février 2018.

Elle indique encore qu'il existe un consensus médical sur le fait que l'accident du 3 février 2018 a temporairement dolorisé un état antérieur de l'épaule droite de Mme [N] [H] .

Elle ajoute que la capsulite n'est pas la conséquence de l'accident du travail au vu du certificat médical du 4 septembre 2018 établissant l'imputabilité de celle-ci à la calcification présentée antérieurement.

Elle estime que les conclusions claires et précises du docteur [X] doivent être entérinées.

***

* Sur l'opposabilité à l'employeur des soins et arrêts de travail pris en charge par la caisse au titre de l'accident du travail et la demande d'expertise':

En application des articles L. 411-1, L. 431-1 et L. 433-1 du code de la sécurité sociale, la présomption d'imputabilité s'applique aux lésions initiales, à leurs complications, à l'état pathologique antérieur aggravé par l'accident du travail ou la maladie professionnelle, pendant toute la période d'incapacité, précédant la guérison complète ou la consolidation, et postérieurement aux soins destinés à prévenir une aggravation et plus généralement, à toutes les conséquences directes de l'accident du travail ou la maladie professionnelle.

La présomption d'imputabilité au travail de l'accident telle qu'elle résulte de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale s'étend ainsi pendant toute la durée de l'incapacité de travail précédant soit la guérison complète soit la consolidation.

Seule la circonstance d'une lésion totalement étrangère au travail permet d'écarter la présomption d'imputabilité.

La simple durée des arrêts de travail ne permet pas de présumer que ceux-ci ne sont pas la conséquence de l'accident initial.

En l'espèce, aux termes de son rapport d'expertise en date du 5 mars 2020, le Docteur [T] [X] indique:'»... le commentaire de la déclaration d'accident du travail a retenu que la salariée avait antérieurement à celui-ci un ressenti douloureux au niveau de l'épaule droite... et le diagnostic de révélation fonctionnelle aiguë d'une calcification tendineuse contemporaine des circonstances de l'accident du travail n'a jamais été occulté, ni par les commentaires des certificats médicaux, ni par les termes de l'observation du praticien conseil ' à l'occasion d'un mouvement de l'épaule droite au cours du travail, il s'agit d'une dolorisation d'un état pathologique antérieur . Après un délai de prise en charge médico-administrative de trois semaines, les arrêts de travail et les soins étaient à prendre en charge au titre de l'état antérieur. La consolidation médico-légale de l'accident du travail aurait dû être établie au 23 février 2018 en repère du commentaire du deuxième certificat de prolongation ( rappel: traumatisme de l'épaule droite avec rupture d'une macro-calcification du tendon du supra épineux).

Conclusion:

Il est possible de :

- dire que l'arret de travail et les soins directement causés par l'accident du travail du 3 février 2018 étaient médicalement justifiés jusqu'au 23 février 2018,

- dire que les arrêts de travail prescrits postérieurement au certificat médical initial sont directement et exclusivement imputables à l'accident du travail du 3 février 2018 jusqu'au 23 février 2018. Au-delà de cette date, ils sont totalement rattachables à une pathologie antérieure

- déterminer qu'à partir du 24 février 2018, les arrêts de travail ont une cause étrangère à l'accident du travail

- fixer la date de consolidation de Madame [N] [H] suite à son accident du travail du 3 février 2018, au 23 février 2018.'»

Le docteur [B] [Z], médecin mandaté par l'employeur, fait également état de l'existence d'un état antérieur.

Il indique que Madame [N] [H] a présenté le 3 février 2018 une rupture traumatique d'une macrocalcification préexistante du tendon supra épineux de l'épaule droite, et que l'accident est survenu en présence d'un état antérieur pathologique, préalablement symptomatique sur un plan algique et fonctionnel, transitoirement décompensé par le fait traumatique.

Il ajoute que le cerficat médical du 4 septembre 2018 rapporte formellement la capsulite notifiée aux conséquences de l'état antérieur, et qu'il y a lieu d'exclure l'imputabilité de cette capsulité à l'accident.

En considération de ces éléments clairs et circonstanciés,non utilement remis en cause par la caisse primaire, c'est à juste raison que les premiers juges ont dit que la date de consolidation devait être fixée au 23 février 2018', et que l'ensemble des soins et arrêts de travail pris en charge au titre de l'accident à compter du 24 février 2018 étaient inopposables à la société [3].'

La décision déférée sera confirmée de ces chefs, sans nécessité d'ordonner une nouvelle expertise dès lors que la première expertise régulièrement effectuée a levé la difficulté d'ordre médical.

* Sur les dépens :

Le décret n°2018-928 du 29 octobre 2018 (article 11) ayant abrogé l'article R.144-10 alinéa 1 du code de la sécurité sociale qui disposait que la procédure était gratuite et sans frais, il y a lieu de mettre les dépens de la procédure d'appel à la charge de la partie perdante, conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort,par mise à disposition au greffe ;

CONFIRME la décision déférée dans toutes ses dispositions,

Y AJOUTANT,

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ,

CONDAMNE la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône aux dépens.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 21/01970
Date de la décision : 10/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-10;21.01970 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award