ARRET
N° 907
S.A.S. [5]
C/
CPAM DES BOUCHES DU RHONE
COUR D'APPEL D'AMIENS
2EME PROTECTION SOCIALE
ARRET DU 15 NOVEMBRE 2022
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N° RG 20/05078 - N° Portalis DBV4-V-B7E-H4E7 - N° registre 1ère instance : 18/00677
JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE EN DATE DU 30 septembre 2020
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE
S.A.S. [5] agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié en cette qualité audit siège
A.T : Madame [S] [J]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me LECLERCQ-LEROY substituant Me Xavier BONTOUX de la SAS BDO AVOCATS LYON, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 1134
ET :
INTIME
CPAM DES BOUCHES DU RHONE agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié en cette qualité audit siège
Secteur Juridictions
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représenté par Me Carl WALLART de l'AARPI WALLART-RUELLAN, avocat au barreau D'AMIENS
DEBATS :
A l'audience publique du 16 Mai 2022 devant Mme Chantal MANTION, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 15 Novembre 2022.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Mélanie MAUCLERE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme Chantal MANTION en a rendu compte à la Cour composée en outre de:
Mme Jocelyne RUBANTEL, Président,
Mme Chantal MANTION, Président,
et Mme Véronique CORNILLE, Conseiller,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
Le 15 Novembre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, Président a signé la minute avec Mme Blanche THARAUD, Greffier.
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DECISION
Vu le jugement rendu le 30 septembre 2020 par le tribunal judiciaire (Pôle social) de Lille qui a :
- dit que la date de consolidation, dans les rapports entre la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône et la SAS [5], de l'accident du travail de Mme [S] [J] survenu le 15 novembre 2014, doit être fixée au 31 décembre 2015,
- dit que l'ensemble des soins et arrêts de travail délivrés à Mme [S] [J] sont opposables à la SAS [5],
- condamné la SAS [5] aux dépens qui comprendront le coût de l'expertise médicale judiciaire,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes plus amples ou contraires.
Vu l'appel formé par la SAS [5] par lettre recommandée avec accusé de réception adressée le 9 octobre 2020 du jugement qui lui a été notifié le 2 octobre 2020;
Vu la convocation des parties et leur comparution à l'audience de renvoi du 16 mai 2022;
Par conclusions préalablement communiquées et développées oralement à l'audience, la SAS [5] demande à la cour de:
- réformer le jugement de première instance et jugeant à nouveau,
- juger que la caisse primaire d'assurance maladie n'a pas transmis au médecin expert désigné par le tribunal l'ensemble des éléments médicaux en sa possession,
- juger que les arrêts de travail prescrits à Mme [S] [V] épouse [J], des suites de son accident du travail, inopposables à la SAS [5],
- condamner la CPAM au paiement de la somme de 541 euros à la SAS [5] au titre de la provision avancée sur les frais d'expertise,
- juger que la charge de l'expertise ordonnée par le tribunal sera supportée par la CPAM.
Par conclusions préalablement communiquées et développées oralement à l'audience, la CPAM des Bouches-du-Rhône demande à la cour de débouter la SAS [5]
de son recours et dire que l'ensemble des arrêts de travail consécutifs à l'accident du 5 novembre 2014 sont imputables et donc opposables à la SAS [5].
Conformément à l'article 455 du Code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties s'agissant de la présentation plus complète de leurs demandes et des moyens qui les fondent.
Motifs:
Il ressort des pièces produites et des débats que la SAS [5] est spécialisée dans le secteur d'activité de l'affrètement et de l'organisation des transports.
Mme [S] [J], salariée de la société depuis le 15 octobre 1990 en tant que magasinière, a fait l'objet d'une déclaration d'accident du travail établie le 15 novembre 2014 par Mme [G] [M], salariée de la SAS [5], qui indiquait : ' en tournant sur elle même pour poser un colis, la personne s'est plainte d'une douleur dans l'épaule puis dans le bras'.
Le certificat médical initial en date du 15 novembre 2014 fait état d'un traumatisme de l'épaule gauche.
A la suite de l'accident, Mme [S] [J] a bénéficié de 234 jours d'arrêt de travail pris en charge au titre de l'accident du travail du 15 novembre 2014.
La date de consolidation a été fixée au 31 décembre 2015 par le service du contrôle médical avec séquelles non indemnisables.
La SAS [5] a saisi la commission de recours amiable afin de contester le caractère professionnel des prestations prises en charges par la caisse comme étant sans rapport avec le sinistre initial.
Par décision du 27 mars 2018, la commission de recours amiable a rejeté la demande de l'employeur.
La SAS [5] a saisi la juridiction de sécurité sociale compétente en contestant la durée des arrêts de travail et leur lien avec l'accident, le tribunal ayant, par jugement en date du 8 juillet 2019, ordonné une mesure d'expertise judiciaire et désigné le Docteur [Y] pour y procéder.
Le Docteur [Y] a rendu son rapport en date du 31 octobre 2019 dont les conclusions sont les suivantes: ' Il est possible de dire que l'arrêt de travail et les soins directement causés par l'accident du travail de Mme [S] [J] étaient médicalement justifiés jusqu'au 31 décembre 2015 (...) sans pouvoir déterminer que les arrêts de travail n'ont pas une cause totalement étrangère à l'accident du travail du 15 novembre 2014 (..) en pouvant fixer la date de consolidation de Mme [S] [J] suite à son accident de travail du 15 novembre 2014 au 31 décembre 2015".
Pour contester le jugement frappé d'appel, la SAS [5] fait valoir que les conclusions du Docteur [Y] ont été prises sur la base d'éléments partiels comme le relève l'expert, la caisse primaire d'assurance maladie ayant omis de communiquer l'entier dossier médical de Mme [S] [J].
L'article L411-1 du code de la sécurité sociale dispose: ' Est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise'.
La présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail s'étend pendant toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime.
Il s'en déduit que l'ensemble des prestations visées jusqu'à la guérison ou la consolidation sont présumées nécessitées par l'accident de travail, l'employeur qui conteste l'imputabilité des soins et arrêts de travail ayant la charge de rapporter la preuve d'une cause étrangère liée à un état pathologique de la victime sans lien avec l'accident.
En l'espèce, la SAS [5] entend tirer argument des éléments relevés par le Docteur [Y] dans son rapport d'expertise qui fait état de l'ensemble des arrêts de travail de Mme [S] [J] depuis l'accident du 15 novembre 2014 jusqu'à la consolidation fixée au 31 décembre 2015 et a pu retracer le parcours de soins de l'assurée, notamment sur la base d'une note établie par le Docteur [O], médecin conseil de l'assurance maladie qui relate qu'à la suite de l'accident du travail du 15 novembre 2014, le médecin traitant a constaté un traumatisme de l'épaule gauche, une radiographie et échographie du 20 novembre 2014 ayant révélé un épaississement modéré plutôt inflammatoire avec une zone discrète de clivage intéressant la face profonde du sous scapulaire évoquant quelques stigmates inflammatoires secondaires et un discret phénomène de désinsertion partielle, sans signe direct de rupture de la coiffe des rotateurs.
L'arthroscanner de l'épaule gauche réalisé le 27 janvier 2015 a mis en évidence une opacification de la bourse sous- deltoïdio acromiale, consécutive à l'existence d'une micro-fissuration oblique, à peine visible transfixiante au niveau de la partie antérieure du tendon sus-épineux, sans rétraction tendineuse significative.
Enfin, un geste chirurgical a été réalisé le 12 juin 2015 soit une acromioplastie de l'épaule gauche et réparation de la coiffe gauche.
Ainsi et contrairement à ce qui est soutenu par la SAS [5], l'ensemble des pièces médicales en possession de la caisse a été transmis à l'expert qui a émis un avis précis et circonstancié, fondé sur les arrêts de travail produits et des résultats d'examens et geste chirurgical concernant exclusivement l'épaule gauche.
La note du Docteur [O] est précise et confirme la continuité des arrêts de travail jusqu'à la consolidation avec une période de reprise progressive d'activité de l'assurée à laquelle le service médical de la caisse a donné un avis favorable dont il est fait état dans une fiche de liaison du 9 avril 2015, le médecin traitant ayant préconisé une reprise du travail léger du 17/03/2015 au 19/04/2015, une nouvelle fiche de liaison ayant été établie dans les mêmes conditions le 8 octobre 2015 sur la base du certificat médical du 25 septembre 2015 du médecin traitant préconisant la poursuite de la reprise d'un travail léger pour la période du 01/10/2015 au 01/11/2015 qui a reçu l'avis favorable du service médical ainsi que son renouvellement du 01/12/2015 au 31/12/2015, ce dont l'expert a eu connaissance et dont il fait état dans son rapport.
Dès lors, aucun manquement ne saurait être reproché à à la caisse, les conclusions de l'expertise réalisée par le Docteur [Y] étant claires et dépourvues d'ambiguïté s'agissant de la continuité des soins de l'épaule gauche depuis l'accident du 15 novembre 2014 jusqu'à la consolidation du 31 décembre 2015, aucun élément sérieux n'étant produit par la SAS [5] pour renverser la présomption d'imputabilité des soins et arrêts de travail à la lésion initiale.
Sur ce point, il est notable que le Docteur [Y] qui a eu connaissance des observations du propre médecin conseil de l'employeur, le Docteur [F], qui affirme sans en rapporter la preuve que la pathologie décrite après l'accident n'est pas une pathologie traumatique mais une pathologie dégénérative, n'a pas conforté ce point de vue.
Ainsi, il y a lieu compte tenu de ce qui précède de débouter la SAS [5] des fins de son appel et de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
La SAS [5] qui succombe sera condamnée aux entiers dépens.
Par ces motifs,
La cour, statuant publiquement par décision rendue contradictoirement en dernier ressort par mise à disposition au greffe de la cour,
Déboute la SAS [5] des fins de son appel,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Condamne la SAS [5] aux entiers dépens postérieurs au 31 décembre 2018.
Le Greffier, Le Président,