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15/11/2022 | FRANCE | N°21/02166

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 15 novembre 2022, 21/02166


ARRET

N° 911





S.A.R.L. [11]





C/



URSSAF DU NORD PAS-DE-CALAIS













COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 15 NOVEMBRE 2022



*************************************************************



N° RG 21/02166 - N° Portalis DBV4-V-B7F-ICND - N° registre 1ère instance : 18/02108



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE EN DATE DU 09 mars 2021





PARTIES EN CAUSE :>




APPELANTE





S.A.R.L. [11] agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 7]





Présence de Mme [Y], gérante de la société,assistée de Me Em...

ARRET

N° 911

S.A.R.L. [11]

C/

URSSAF DU NORD PAS-DE-CALAIS

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 15 NOVEMBRE 2022

*************************************************************

N° RG 21/02166 - N° Portalis DBV4-V-B7F-ICND - N° registre 1ère instance : 18/02108

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE EN DATE DU 09 mars 2021

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.A.R.L. [11] agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 7]

Présence de Mme [Y], gérante de la société,assistée de Me Emmanuel FOSSAERT, avocat au barreau de LILLE substituant Me Georges SIMOENS de la SELARL SIMOENS GEORGES ET ASSOCIES, avocat au barreau de LILLE, vestiaire : 0175

ET :

INTIMEE

URSSAF DU NORD PAS-DE-CALAIS agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentée et plaidant par Me Maxime DESEURE de la SELARL LELEU DEMONT HARENG DESEURE, avocat au barreau de BETHUNE

DEBATS :

A l'audience publique du 16 Mai 2022 devant Mme Chantal MANTION, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 15 Novembre 2022.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Mélanie MAUCLERE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Chantal MANTION en a rendu compte à la Cour composée en outre de:

Mme Jocelyne RUBANTEL, Président,

Mme Chantal MANTION, Président,

et Mme Véronique CORNILLE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 15 Novembre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, Président a signé la minute avec Mme Blanche THARAUD, Greffier.

*

* *

DECISION

Vu le jugement du tribunal judiciaire (Pôle social) de Lille en date du 9 mars 2021 qui a:

- dit la procédure de redressement notifiée par l'Urssaf du Nord Pas-de-Calais régulière,

- confirmé les chefs de redressment n°1, n°2 et n°3,

- condamné la société [11] à payer à l'Urssaf du Nord Pas-de-Calais la somme de 228 859 euros en deniers ou quittances valables des sommes qui auraient pu être versées depuis et sauf à parfaire des majorations de retard qui courrent jusqu'à complet paiement,

- condamné la société [11] aux dépens de l'instance,

- débouté la société [11] de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société [11] à payer à l'Urssaf du Nord Pas-de-Calais la somme de 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu la notification du jugement par lettre recommandée avec accusé de réception reçue le 25 mars 2021 par la société [11],

Vu la déclaration d'appel de la société [11] reçue au greffe de la cour le 21 avril 2021,

Vu la convocation des parties et leur comparution à l'audience du 16 mai 2022,

Par conclusions préalablement communiquées et développées oralement à l'audience, la société [11] demande à la cour de:

- dire et juger l'appel recevable et bien fondé,

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Pôle social du tribunal judiciaire de Lille le 9 mars 2021,

En conséquence, et statuant à nouveau,

- dire et juger que tant le principe du contradictoire que celui des droits de la défense n'ont pas été respectés durant la période de contrôle,

- rejeter des débats les procés-verbaux d'audition libre de M. [P] [C] et de Mme [V] [Y] (pièce 8 et 9),

- débouter l'Urssaf du Nord Pas-de-Calais de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- dire et juger que M. [P] [C] n'exerçait pas son activité sous la subordination juridique de la société [11],

- dire et juger que la société [11] ne s'est pas rendue coupable du délit de travail dissimulé,

- annuler en conséquence, la mise en demeure en date du 6 juin 2018 et le redressement de cotisations opéré par l'Urssaf du Nord Pas-de-Calais ainsi que l'annulation des réductions générales de cotisations et des réductions patronales " loi TEPA" subséquentes à hauteur de la somme de 228 859 euros,

- condamner l'Urssaf du Nord Pas-de-Calais à payer à la société [11] la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions préalablement communiquées et développées oralement à l'audience, l'Urssaf du Nord Pas-de-Calais demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et condamner la société [11] à lui payer la somme de 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Conformément à l'article 455 du Code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties s'agissant de la présentation plus complète de leurs demandes et des moyens qui les fondent.

Motifs:

Il ressort des débats et des pièces que la société [11], spécialisée dans la pose de cuisines industrielles et de systèmes de froid et de climatisation, a fait l'objet de la part de l'Urssaf du Nord Pas-de-Calais d'un contrôle comptable d'assiette portant sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016, qui s'est terminé le 27 février 2018.

L'Urssaf du Nord Pas-de-Calais a adressé une lettre d'observations en date du 27 février 2018 dont il ressort que dans le cadre de l'examen de la comptabilité, a été constaté l'enregistrement de nombreuses factures relatives à des "rémunérations" versées à "[18]" pour des "prestation effectuées sur des chantiers Memphis" dans différentes villes de France.

Le montant global des factures s'élèvent à :

- 36 042 euros en 2014

- 26 424 euros en 2015

- 49 311 euros en 2016

L'analyse des factures a permis de révéler que "[18]" a le statut d'autoentrepreneur mais elles ne comportent aucun numéro Siren. Une facture est établie pour chacun des chantiers (Memphis [Localité 10], Memphis [Localité 14], Memphis [Localité 17], Memphis [Localité 15], etc). Outre le montant de la prestation "[C] F" facture des frais de déplacement, des frais de matériel et de fourniture et d'autres frais non précisés.

Par ailleurs, l'examen du compte " déplacements personnel" et "déplacements, missions et réceptions", révèle que la société [11] prend en charge des notes d'hôtel et de restaurant concernant M. [P] [C] et M. [F] [Y], lorsqu'ils sont en déplacement sur différents chantiers du client [16].

Sur demande de l'Urssaf, Mme [V] [Y] gérante de la société [11],

a produit trois contrats de prestations de service conclus entre la société et M. [P] [C]:

- le premier en date du 14/01/2014 couvrant la période jusqu'au 30/12/2014

- le deuxième daté du 19/01/2015 couvrant la période jusqu'au 30/12/2015

- le troisième du 15/01/2016 convrant la période jusqu'au 30 décembre 2016.

L'examen des contrats a permis de relever les informations suivantes:

- concernant le prestataire, il est indiqué que "[18]" est auto entrepreneur, que son siège social est situé à [Adresse 13] [Localité 2] et que son Siren est le n°[N° SIREN/SIRET 8];

- concernant l'objet ( article 1), il s'agit de "contrat de prestation de services" ayant pour objet une aide en main-d''uvre sur différents sites de France, lorsque le personnel de la société [11] sera indisponible;

- concernant le prix ( article 2) , les prestations sont "facturées au forfait" et le tarif du forfait est "calculé proportionnellement aux travaux effectués, au nombre d'heures et de jours travaillés".... "Il conviendra en outre que soient facturés les frais de déplacement, séjour et autres du prestataire";

- concernant le lieu d'exécution (article 3 bis) " la prestation se déroulera à l'adresse qui sera donnée au prestataire après confirmation des dates exécution";

- concernant l'exécution de la prestation ( article 4) le prestataire procédera toujours en compagnie d'un technicien de l'entreprise [Y] et la prestation consiste à réceptionner, mettre en place et installer le matériel ainsi qu'à vérifier son fonctionnement;

- concernant la durée d'exécution (article 5) elle sera entre deux et huit jours maximum par site;

- concernant les responsabilités (article 8) la responsabilité éventuelle du prestataire à raison de l'exécution des obligations prévues au contrat sera limitée à un montant n'excédant pas la somme totale effectivement payée par le client (Sarl [Y]) pour les services ou tâches fournies par le prestataire. En outre, le prestataire dégage sa responsabilité à l'égard des dommages matériels pouvant atteindre les immeubles, installations, matériel, mobilier du client.

Or, les recherches entreprises auprès du régime social des indépendants (RSI) ont permis de constater que M. [P] [C] n'a jamais été inscrit auprès de ce service

La lettre d'observations précise que sur l'ensemble de documents qui lui ont été demandés, M. [P] [C] a présenté les contrats de prestations de service conclus avec la société [11] et qu'il a déclaré ne pas être inscrit au RSI et ne pas disposer d'assurance responsabilité dans le cadre de son activité d'autoentrepreneur.

L'audition de Mme [V] [Y], dont il est fait état dans la lettre d'observations, relate que la société [11] a pour client les " [16]" et que sur les conseils de son fils qui lui a loué les compétences professionnelles et la mobilité géographique de M. [P] [C], Mme [V] [Y] a décidé de recourir aux services de ce dernier pour les installations frigorifiques et d'extraction sur les différents chantiers "[16]" ceux-ci n'offrant pas un travail constant et régulier et les salariés de la société ne souhaitant pas effectuer de grands déplacements.

Mme [V] [Y] a déclaré qu'elle a proposé un poste de salarié à M. [P] [C]

mais que celui-ci a décliné l'offre car cela supposerait qu'il vienne travailler dans le nord lorsque l'entreprise ne dispose pas de chantiers "Memphis coffee".

Pour sa part, M. [P] [C] n'a présenté que les contrats de prestations de service conclus avec la société [11] et sa facturation établie à l'égard de cette société. Il a déclaré exercer l'activité de frigoriste pour le compte de la société [11] et intervenir uniquement sur les chantiers "[16]" et toujours avec [F] [Y] (exceptionnellement avec un autre salarié de la société).

Enfin des vérifications entreprises auprès du RSI ont confirmé que M. [P] [C] n'est pas inscrit au RSI et qu'il n'a donc déclaré aucun revenu pour chacune des années 2014, 2015 2016 et 2017.

Considérant que ces éléments sont révélateurs d'un délit de travail dissimulé par soustraction intentionnelle à l'une des formalités prévues à l'article L.8221-5 du code du travail, l'Urssaf du Nord Pas-de-Calais a indiqué vouloir procéder à la réintégration dans l'assiette des cotisations de la société [11] des montants facturés par M. [P] [C] estimant que ceux-ci constituent des salaires nets servis par la société.

Par l'intermédiaire de son conseil, la société [11] a répondu à la lettre d'observations, le 3 avril 2018, et s'est vue notifier une mise en demeure en date du 6 juin 2018 d'avoir à payer la somme de 228 859 euros.

Ayant saisi la commission de recours amiable le 29 juin 2018 et à défaut de réponse, la société [11] a saisi le juridiction de sécurité sociale compétente qui a rendu le jugement dont appel.

1°) Sur la procédure et le respect du principe du contradictoire:

Au soutien de son appel, la société [11] fait valoir que la procédure de redressement méconnaît le principe du contradictoire organisé par les articles L.8271-6-1 du code du travail et R.243-59 du code de la sécurité sociale et les droits de la défense tels que prévus par l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme (CEDH), fondement du droit à un procès équitable, en ce que l'inspecteur du recouvrement a fondé ses constatations sur la base de l'audition de M. [P] [C], alors que la société [11] n'en a pas eu connaissance, malgré la demande qu'elle a formulée le 22 mars 2018, l'inspecteur du recouvrement ayant refusé de communiquer la copie du procès-verbal d'audition de M. [P] [C].

L'Urssaf du Nord Pas-de-Calais s'oppose à la demande de la société [11] au motif que l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale fixe avec précision les documents qui doivent être remis par l'inspecteur du recouvrement à l'issue du contrôle et n'impose par la transmission du procès-verbal d'audition, s'agissant d'un élément qui relève de la procédure pénale, couvert par le secret de l'instruction, et qui pouvait être réclamé par la société [11] auprès du Procureur de la République.

L'Urssaf du Nord Pas-de-Calais ajoute que ledit procès-verbal a finalement fait l'objet d'une communication en première instance de telle sorte que la société [11] a été mise en mesure de formuler des arguments complémentaires, ce qu'elle n'a pas fait.

La cour rappelle que l'URSSAF n'est pas tenue en application des textes susvisés de joindre à la lettre d'observations le procès-verbal constatant le délit de travail dissimulé, aucune violation du principe du contradictoire n'ayant lieu d'être retenue alors que, devant la juridiction de sécurité sociale et devant notre juridiction, sont produits les procès verbaux d'audition libre de M. [P] [C] et de Mme [V] [Y], le moyen tiré du non respect du principe du contradictoire et des droits de la défense ayant lieu d'être rejeté.

Par ailleurs, la société [11] ne fonde pas sa demande tendant au rejet des pièces constituées par ces auditions dont elle a demandé la communication.

2°) Sur le bien fondé du redressement :

L'article L311-2 du code de la sécurité sociale dispose: "Sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d'une pension, toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l'un ou de l'autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat."

La qualité de salarié implique nécessairement l'existence d'un lien juridique de subordination qui ne peut dépendre de la qualification que les parties ont donné au contrat qu'elles ont conclu mais qui suppose que soit caractérisée l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

Pour justifier l'existence d'un lien juridique de subordination, l'Urssaf du Nord Pas-de-Calais se fonde sur l'analyse des factures réglées par la société [11] à M. [P] [C], une facture distincte étant établie pour chacun des lieux de chantier où l'intéressé a travaillé, les factures mentionnant outre le montant de la prestation, des frais de matériel et de fournitures et d'autres frais non précisés.

L'Urssaf du Nord Pas-de-Calais retient par ailleurs, que M. [P] [C] avait pour seul client la société [11], qu'il n'apportait que sa main d'oeuvre, qu'il était rémunéré proportionnellement aux travaux effectués, au nombre d'heures et de jours travaillés et qu'il était remboursé de ses dépenses, frais de déplacement et frais d'hôtel et de restaurant.

Il ressort de l'audition libre de M. [P] [C] que ce dernier a déclaré être inscrit depuis le 5 décembre 2013 au Régime Social des Indépendants (RSI) comme autoentrepreneur sous le numéro Siret [N° SIREN/SIRET 8] dont il n'a pas été trouvé trace, l'intéressé ayant admis qu'il ne s'est pas inscrit et qu'il a décidé seul de créer sa propre activité, ayant acquis du petit outillage et étant rémunéré au titre des contrats de prestations de services qui ont été produits, sur la base d'un montant forfaitaire pour chaque chantier, le délai d'exécution étant arrêté d'un commun accord en fonction de la complexité du chantier et le coût réglé en fin de chantier sur la base des factures qu'il établissait lui même.

Le fait que les factures comportent des frais de matériel, de founitures ou de déplacement n'est pas suffisant pour caractériser un lien de subordination selon la définition ci-dessus, la société [11] faisant observer, sans être contredite, que M. [P] [C] a travaillé pour son compte de façon discontinue moins de 27 semaines cumulées sur la période considérée du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016, M. [P] [C] ayant admis qu'il ne travaille pas au quotidien pour la société [Y] mais que cela lui suffit.

En outre, la société [Y] démontre que M. [P] [C] a travaillé au moins une fois pour un autre donneur d'ordre dans le cadre d'un contrat d'entretien en date du 1er janvier 2016 au bénéfice de " [Adresse 12] à [Localité 9]" conclu au nom de " Concept and Cook M. Vella [Adresse 4] [Localité 1]" alors que la société [11] a son siège social "[Adresse 3] [Localité 7]".

C'est d'ailleurs, cet éloignement géographique qui a été évoqué par M. [P] [C] pour refuser un contrat de travail avec la société [11], ainsi qu'il ressort des propos recueillis par l'inspecteur du recouvrement.

S'agissant du fait que M. [P] [C] devait travailler en présence d'un autre salarié de la société [11] et qu'il devait respecter les lieux, dates et délais d'exécution prévus pour les différents chantiers " [16]", ces éléments ne sont pas suffisants pour retenir l'existence d'un lien de subordination dans la mesure où il n'est pas démontré que [F] [Y] avait le pouvoir de donner des ordres ou de prendre des mesures notamment en matière de sécurité pour lesquelles il aurait reçu délégation de l'employeur de droit ou de fait, M. [P] [C] indiquant qu'il s'occupait personnellement du système des fluides et de l'extraction tandis qu'[F] s'occupait plus de l'électricité.

Ainsi, aucun élément de la procédure ne permet de retenir pour établi que M. [P] [C] recevait des ordres de la part de M.[F] [Y], salarié de la société chargé des chantiers "[16]" avec lequel il travaillait sur les chantiers éloignés, ni qu'il devait rendre compte à la société [11] et que cette dernière avait le pouvoir de le sanctionner en cas de manquement.

L'absence de paiement de la prestation à laquelle il s'expose en cas de travail mal fait ne caractérise pas un lien de subordination, ni le fait d'être affecté chez des clients indiqués par la société [Y] qui ne peut, dans le contexte décrit, être assimilé au fait de recevoir des ordres de son employeur.

Enfin, il est établi par les échanges de mails entre M. [P] [C] et la gérante de la société [11] que, cette dernière lui ayant demandé de justifier de son inscription au RSI dans le cadre du contrôle, il n'a pas hésité à lui fournir des documents falsifiés ayant par ailleurs indiqué à l'inspecteur du recouvrement qu'il avait avoué ne pas être inscrit au RSI et que depuis, la société [11] ne fait plus appel à lui, ce qu'il considère comme légitime.

Ainsi, l'Urssaf du Nord Pas-de-Calais manque à faire la preuve d'un travail dissimulé au sens de l'article L.8221-5 du code du travail dont le caractère intentionnel n'est pas établi à l'encontre de la société [11] qui a seulement admis un manquement à son obligation de vigilance, ce qui pourrait tout au plus lui imposer une solidarité par rapport aux redressement éventuellement notifié à M. [P] [C].

Ainsi, il y a lieu de dire que le redressement opéré sur la base de la lettre d'observations du 27 février 2018 est mal fondé et d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris.

3°) Sur les frais et dépens:

L'équité ne commande pas de faire application en l'espèce de l'article 700 du code de procédure civile.

Enfin, l'Urssaf du Nord Pas-de-Calais sera condamnée aux entiers dépens.

Par ces motifs,

La cour, statuant publiquement par décision rendue contradictoirement en dernier ressort par mise à disposition au greffe de la cour,

Faisant droit à l'appel,

Dit que le redressement est mal fondé,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne l'Urssaf du Nord Pas-de-Calais aux entiers dépens.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 21/02166
Date de la décision : 15/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-15;21.02166 ?
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