ARRET
N° 1065
[S]
C/
Organisme CPAM DU HAINAUT
COUR D'APPEL D'AMIENS
2EME PROTECTION SOCIALE
ARRET DU 12 DECEMBRE 2022
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N° RG 19/07441 - N° Portalis DBV4-V-B7D-HQTW
JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE VALENCIENNES (Pôle Social) EN DATE DU 20 septembre 2019
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE
Madame [C] [S] épouse [E]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Aurélie GUYOT, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 80, postulant et ayant pour avocat Me Pascal HOLLENSETT, avocat au barreau de VALENCIENNES
ET :
INTIMEE
La CPAM DU HAINAUT, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentée et plaidant par Mme [O] [Z] dûment mandatée
DEBATS :
A l'audience publique du 05 Septembre 2022 devant Mme Véronique CORNILLE, Conseiller, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 12 Décembre 2022.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Marie-Estelle CHAPON
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme Véronique CORNILLE en a rendu compte à la Cour composée en outre de:
Mme Jocelyne RUBANTEL, Président,
Mme Chantal MANTION, Président,
et Mme Véronique CORNILLE, Conseiller,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
Le 12 Décembre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, Président a signé la minute avec Mme Marie-Estelle CHAPON, Greffier.
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DECISION
Par une décision du 14 août 2018, la caisse primaire d'assurance maladie du Hainaut (ci-après la CPAM) a rejeté la demande de pension d'invalidité formée par Mme [C] [S] épouse [E] au motif qu'elle ne remplissait pas les conditions administratives d'ouverture de droit à l'assurance invalidité.
Par jugement du 20 septembre 2019, le tribunal de grande instance de Valenciennes, pôle social, statuant sur la contestation par Mme [E] de la décision de rejet du 21 février 2019 de la commission de recours amiable de la CPAM, a :
- débouté Mme [C] [S] épouse [E] de l'ensemble de ses demandes,
- condamné Mme [C] [S] épouse [E] aux dépens.
Le 15 octobre 2019, Mme [E] a interjeté appel du jugement.
Les parties ont été convoquées à l'audience du 27 août 2020. L'affaire a fait l'objet de plusieurs renvois.
À l'audience du 5 septembre 2022, aux termes de conclusions reçues le 8 avril 2021 auxquelles elle s'est rapportée, Mme [E] demande à la cour de :
- déclarer son appel recevable et bien fondé,
- infirmer le jugement déféré,
Statuant à nouveau,
- infirmer la décision rendue par la commission de recours amiable de la CPAM en date du 21 février 2019,
- dire et juger qu'elle sera admise à l'attribution d'une pension d'invalidité,
- lui donner acte de ce qu'elle offre de se prêter à toutes expertises médicales afin que soit déterminé son taux d'invalidité et le montant de sa pension,
- condamner la CPAM du Hainaut au paiement d'une indemnité de procédure de 1500 euros.
Par conclusions visées par le greffe le 5 septembre 2022 soutenues oralement, la CPAM du Hainaut sollicite la confirmation du jugement en toutes ses dispositions.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour l'exposé des moyens.
MOTIFS
Sur la demande de pension d'invalidité
Aux termes de l'article R. 313-5 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, 'Pour invoquer le bénéfice de l'assurance invalidité, l'assuré social doit être affilié depuis douze mois au premier jour du mois au cours duquel est survenue l'interruption de travail suivie d'invalidité ou la constatation de l'état d'invalidité résultant de l'usure prématurée de l'organisme. Il doit justifier en outre :
a) Soit que le montant des cotisations dues au titre des assurances maladie, maternité, invalidité et décès assises sur les rémunérations qu'il a perçues pendant les douze mois civils précédant l'interruption de travail est au moins égal au montant des mêmes cotisations dues pour un salaire égal à 2 030 fois la valeur du salaire minimum de croissance au 1er janvier qui précède la période de référence ;
b) Soit qu'il a effectué au moins 600 heures de travail salarié ou assimilé au cours des douze mois civils ou des 365 jours précédant l'interruption de travail ou la constatation de l'état d'invalidité résultant de l'usure prématurée de l'organisme.'.
Il en résulte que les conditions d'ouverture des droits à une pension d'invalidité s'apprécient au jour du premier mois au cours duquel est survenu l'interruption de travail suivie d'invalidité ou la constatation médicale de l'état d'invalidité.
En l'espèce, Mme [E] a formé une demande de pension d'invalidité le 8 août 2018.
Figurent au dossier les éléments suivants :
- Mme [E], en arrêt de travail à compter d'avril 2011, a perçu des indemnités journalières au titre de la maladie jusqu'au 1er avril 2014, le médecin conseil de la CPAM ayant déclaré que l'arrêt de travail n'était plus médicalement justifié à compter de cette date, décision confirmée par l'expertise médicale effectuée à la demande de l'assurée le 25 août 2014, expertise qui n'a pas été contestée (pièces 1 et 2 CPAM) ;
- le 31 mars 2014, dans sa fiche médicale d'aptitude, le médecin du travail a fait état d'une inaptitude temporaire de Mme [E] à son poste de travail dans l'attente d'une visite de son médecin traitant ; le même médecin indique dans une fiche médicale d'aptitude en date du 13 octobre 2014 qu'elle doit revoir son médecin (pièces 5 et 7 assurée) ;
- un courrier du docteur [L], psychiatre, en date du 8 avril 2014, et un courrier du docteur [T] en date du 26 février 2018 révèlent que Mme [E] présente une dépression depuis 2011 qui serait survenue dans un contexte d'accident grave de son mari et de décès de sa mère d'une maladie de [R], dépression qui s'est progressivement enrichie de difficultés motrices (pièces 6 et 9 assurée) ;
- suite à une visite de reprise du 5 novembre 2018, un avis d'inaptitude au travail du 5 novembre 2018 avec dispense de l'obligation de reclassement a été rendu par le médecin du travail (pièce 8 assurée).
Il n'est pas contesté que du 1er avril 2014 au 30 octobre 2018, Mme [C] [S] épouse [E] n'a pas repris le travail et qu'elle était en arrêt de travail non indemnisé par la caisse.
Le tribunal a retenu une période de référence allant du 1er août 2017 au 31 juillet 2018, soit douze mois avant la demande d'invalidité, et considéré que pendant cette période, Mme [E], n'avait pas travaillé et ne justifiait pas des conditions nécessaires pour prétendre au bénéfice de l'assurance invalidité.
Mme [E] reproche à la décision critiquée d'avoir retenu qu'à la date du 19 mars 2014, elle aurait dû reprendre un travail au regard de l'avis du médecin conseil de la CPAM du 19 mars 2014 concluant que son arrêt de travail n'était plus médicalement justifié alors qu'un certificat de la médecine du travail du 31 mars 2014 l'a déclarée inapte temporaire à son poste. Elle soutient que la CPAM n'a pas qualité pour déclarer ou non un salarié apte au travail et que l'avis médical du 19 mars 2014 confirmé par une expertise du 25 août 2014 n'a eu pour effet que de supprimer les indemnités journalières et non de déterminer son aptitude à reprendre son poste ; que son arrêt de travail n'a pas pris fin le 31 mars 2014.
Elle fait valoir qu'en application de l'article R. 313-5 du code de la sécurité sociale, il convient de prendre en considération la date d'interruption de travail suivie de l'invalidité (et non la constatation de l'invalidité), ce qui correspond à son arrêt maladie d'avril 2011 alors qu'elle était infirmière salariée au sein de la polyclinique [5] depuis 1989 ; qu'elle était donc affiliée pendant la période de 12 mois précédant son interruption de travail de 2011 suivie d'invalidité et remplissait la condition tenant à l'exercice d'une activité salariée. Elle précise qu'elle n'a jamais repris le travail depuis 2011, souffrant d'un état dépressif suite à un accident grave de son conjoint et au décès de sa mère atteinte de la maladie de [R], maladie dont elle a appris être porteuse en août 2018 ; que la qualité de travailleur handicapée lui a été reconnue par décision du 8 avril 2015 ; que si du 31 mars 2014 jusqu'en 2018, elle n'était plus indemnisée par la caisse, elle était toujours salariée de la clinique qui ne l'avait pas licenciée.
La CPAM réplique qu'il n'y a pas de continuité entre l'interruption de travail de l'assurée de 2011 à 2014 et la demande d'invalidité ; que l'évènement ouvrant l'étude des droits à l'invalidité est la constatation de l'affection invalidante, soit la demande de pension d'invalidité faite dans les suites de résultats médicaux du 1er août 2018 transmis à l'appui de la requête auprès de la commission de recours amiable ; que l'assurée n'a perçu aucune ressource lui permettant d'ouvrir les droits à l'invalidité durant la période de référence (1er août 2017 au 31 juillet 2018).
S'agissant de la date d'appréciation des droits à pension d'invalidité pouvant être soit l'interruption de travail suivie d'invalidité soit la constatation de l'état d'invalidité résultant de l'usure prématurée de l'organisme selon les termes de l'article R. 313-5 du code de la sécurité sociale, la cour relève qu'à la suite de l'avis du médecin conseil de la CPAM et de l'expertise médicale du 25 août 2014 le confirmant, effectuée à la demande de l'assurée, aucun arrêt de travail n'était justifié médicalement à compter du 31 mars 2014 de sorte que l'assurée ne relevait plus de l'assurance maladie et qu'elle n'était plus indemnisée. Si Mme [E] considère que l'arrêt de travail n'a pas cessé à cette date, elle n'a pas contesté l'expertise médicale, et la fiche médicale du 31 mars 2014 de la médecine du travail qui l'a déclarée inapte uniquement temporairement à son poste ne saurait en tout état de cause contredire l'avis du médecin conseil puis de l'expert qui ont reconnu une capacité physique de reprendre le travail.
Ainsi, il résulte du dossier que la constatation de l'état d'invalidité ne peut se situer dans la continuité des arrêts maladie qui n'étaient plus médicalement justifiés à compter du 31 mars 2014.
Mme [E] ne peut donc valablement soutenir que l'interruption de travail de 2011 a été directement suivie d'invalidité et que la période de référence visée par l'article R.313-5 du code de la sécurité sociale a pour point de départ l'interruption de travail de 2011.
Ce faisant, aucune des parties ne justifie de la date de première constatation de l'état d'invalidité résultant de l'usure prématurée de l'organisme.
C'est donc à juste titre que le tribunal a retenu la déclaration d'invalidité du 8 août 2018 et la période de douze mois la précédant pour apprécier les conditions d'ouverture des droits de l'assurance invalidité conformément à l'article R.313-5.
Il appartient dès lors à Mme [E] de démontrer qu'elle remplissait au jour de sa demande soit la condition tenant au montant des cotisations sur les rémunérations perçues pendant la période de référence, soit celle tenant à l'exercice effectif d'un minimum d'heures d'une activité salariée ou assimilée pendant ladite période.
Or tel n'est pas le cas, puisque Mme [E], qui n'a pas repris l'exercice de son activité depuis 2011, se contente d'indiquer sans autre précision qu'elle était toujours salariée de la clinique qui ne l'avait pas licenciée.
Les conditions permettant de bénéficier de la pension d'invalidité n'étaient donc pas remplies au jour de la demande.
Le jugement ayant rejeté le recours de Mme [E] sera confirmé.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens
Partie succombante en cause d'appel, Mme [C] [S] épouse [E] sera condamnée aux dépens d'appel conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile et déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement du 20 septembre 2019 du tribunal de grande instance de Valenciennes, pôle social,
Y ajoutant,
Déboute Mme [C] [S] épouse [E] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme [C] [S] épouse [E] aux dépens de l'instance d'appel.
Le Greffier, Le Président,