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12/12/2022 | FRANCE | N°21/03549

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 12 décembre 2022, 21/03549


ARRET

N° 1069





[V]





C/



CPAM DE [Localité 3]













COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 12 DECEMBRE 2022



*************************************************************



N° RG 21/03549 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IFBA - N° registre 1ère instance : 18/00463



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE DOUAI (Pôle Social) EN DATE DU 31 mai 2021





PARTIES EN CAUSE :
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APPELANT





Monsieur [L] [V]

[Adresse 2]

[Localité 4]





Représenté par Me POPU, avocat au barreau de LILLE substituant Me Stéphane JANICKI, avocat au barreau de LILLE, vestiaire : 0227











ET :





INTIME





La CPA...

ARRET

N° 1069

[V]

C/

CPAM DE [Localité 3]

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 12 DECEMBRE 2022

*************************************************************

N° RG 21/03549 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IFBA - N° registre 1ère instance : 18/00463

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE DOUAI (Pôle Social) EN DATE DU 31 mai 2021

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur [L] [V]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me POPU, avocat au barreau de LILLE substituant Me Stéphane JANICKI, avocat au barreau de LILLE, vestiaire : 0227

ET :

INTIME

La CPAM DE [Localité 3], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée et plaidant par Mme [T] [U] dûment mandatée

DEBATS :

A l'audience publique du 05 Septembre 2022 devant Mme Véronique CORNILLE, Conseiller, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 12 Décembre 2022.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Marie-Estelle CHAPON

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Véronique CORNILLE en a rendu compte à la Cour composée en outre de:

Mme Jocelyne RUBANTEL, Président,

Mme Chantal MANTION, Président,

et Mme Véronique CORNILLE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 12 Décembre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, Président a signé la minute avec Mme Marie-Estelle CHAPON, Greffier.

*

* *

DECISION

M. [L] [V], salarié de la société [6] [Localité 7] en qualité de réceptionniste de nuit a été victime d'un accident le 15 juillet 2018, dans les circonstances suivantes : « serait tombé dans un escalier. Siège des lésions : dos. Natures des lésions : ecchymose », documenté par un certificat médical initial du 16 juillet 2018 indiquant : « traumatisme rachidien avec contact sur les apophyses épineuses L4-L5 + traumatisme de la pulpe de l'index de la main droite + douleurs adducteurs droits après une chute survenue dans un escalier ».

L'accident a été connu par l'employeur le 27 juillet 2018, lequel a établi une déclaration d'accident du travail le 1er août 2018, accompagnée de réserves.

Après avoir diligenté une enquête administrative, la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 7]-[Localité 3] (ci-après la CPAM) a, le 24 octobre 2018, notifié à M. [V] une décision de refus de prise en charge de l'accident au titre de la législation sur les risques professionnels pour le motif suivant : « Il n'existe pas de preuve que l'accident invoqué se soit produit par le fait où à l'occasion du travail, ni même de présomptions favorables précises et concordantes en cette faveur. Or, il incombe à la victime ou à ses ayants-droit d'établir les circonstances de l'accident autrement que par leurs propres affirmations. La preuve d'un accident survenu au temps et au lieu de travail n'a pu être établie du fait des contradictions constatées ».

Contestant cette décision, M. [V] a formé un recours devant la commission de recours amiable laquelle, par décision du 5 décembre 2018, l'a débouté de sa demande, puis il a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale.

En application de la loi du 18 novembre 2016, la procédure a été transférée le 1er janvier 2019 au pôle social du tribunal de grande instance, devenu tribunal judiciaire à compter du 1er janvier 2020.

Par jugement du 31 mai 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Douai a :

- rejeté la demande de M. [V] tenant à la prise en charge, au titre de la législation professionnelle de l'accident du 15 juillet 2018, déclaré le 30 juillet 2018,

- condamné M. [V] aux éventuels dépens.

Le 6 juillet 2021, M. [V] a interjeté appel du jugement qui lui avait été notifié le 10 juin 2021.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 5 septembre 2022.

Par conclusions visées le 5 septembre 2022 et soutenues oralement, M. [V] demande à la cour de :

- réformer la décision déférée,

- juger que son arrêt de travail est d'origine professionnelle,

- juger qu'il a été victime d'un accident de travail le 15 juillet 2018,

- condamner la CPAM de [Localité 7]-[Localité 3] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- laisser à la charge de la CPAM de [Localité 7]-[Localité 3] les frais et dépens de la procédure.

Il explique qu'avant son accident, il ne souffrait pas de traumatisme rachidien, ni de traumatisme de la pulpe de l'index de la main droite, ni de douleurs aux adducteurs droits ; qu'il a pris son poste de travail sans difficulté ; que suite à sa chute dans les escaliers durant la vacation de nuit du 15 au 16 juillet 2018, il a laissé un mot manuscrit pour prévenir sa directrice ; qu'il a contacté M. [W] afin qu'il vienne le chercher, lequel en a attesté le 5 novembre 2018.

Il fait valoir que l'arrêt de travail lui a été délivré le 16 juillet 2018 par le docteur [E] immédiatement à la sortie de la vacation, lequel a constaté les lésions.

Il soutient que la version de son employeur sert ses intérêts dans le cadre d'une procédure prud'homale ; qu'il est de mauvaise foi quand il dit avoir reçu l'arrêt de travail le vendredi 27 juillet 2018 puisque dans un échange avec la CPAM, il dit avoir reçu « la semaine dernière » l'arrêt du 18 au 19 juillet et quand il affirme que son salarié était mis à pied pendant cette période, celle-ci ayant été reçue le 20 juillet 2018 ; qu'il indique d'ailleurs à la CPAM dans un courriel avoir classé les arrêts dans un autre dossier « pour absence injustifiée » préparant son licenciement.

Il considère qu'il se trouvait au temps et au lieu du travail ; que le constat médical a été dressé dès le 16 juillet au matin dès la fin de sa nuit de travail ; qu'un témoin affirme avoir été alerté durant la vacation de l'accident et l'avoir emmené chez le médecin.

Par conclusions visées le 5 septembre 2022 et soutenues oralement lors de l'audience, la CPAM de [Localité 7]-[Localité 3] demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu,

- dire n'y avoir lieu à la prise en charge, au titre de la législation sur les risques professionnels, de l'accident du 15 juillet 2018,

- condamner M. [V] aux entiers dépens.

Elle fait valoir que les affirmations de M. [V] ne sont corroborées par aucun élément objectif, d'autant plus que l'enquête administrative a fait ressortir que ces affirmations étaient discordantes.

Elle précise, en effet, que la déclaration d'accident du travail ne comporte aucun horaire, que l'employeur indique n'avoir été informé que le 27 juillet 2018, soit 12 jours après l'accident et que l'assuré n'a cité aucun témoin, aucune première personne avisée ; que ce n'est que lors de son entretien préalable au licenciement que M. [V] a informé son employeur de la survenance de l'accident, étant précisé qu'il avait fait l'objet d'une mise à pied conservatoire le 16 juillet 2018.

Elle ajoute que M. [V] n'a pas prévenu sa collègue qui l'a relayé à l'issue de la nuit de l'accident prétendu ; qu'il aurait prévenu sa directrice le lendemain en laissant un mot manuscrit qui n'est pas daté ; qu'il n'a évoqué l'existence d'un témoin que devant la commission de recours amiable, lequel n'a pas été témoin mais ne fait que relater la version de l'assuré ; que le certificat médical ne fait que constater des lésions et ne dit pas qu'elles ont eu lieu au travail.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des demandes des parties et des moyens qui les fondent.

MOTIFS

Sur la demande de reconnaissance de l'accident du travail

En vertu des dispositions de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme un accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.

Constitue ainsi un accident du travail un événement ou une série d'événements précis survenus soudainement par le fait ou à l'occasion du travail, à l'origine d'une lésion corporelle ou d'ordre psychologique.

Il appartient au salarié qui allègue avoir été victime d'un accident du travail d'établir autrement que par ses seules affirmations la réalité du fait accidentel et son caractère professionnel.

En l'espèce, la déclaration d'accident du travail établie le 30 juillet 2018 fait état d'un accident survenu le 15 juillet 2018 connu par l'employeur le vendredi 27 juillet 2018, soit 12 jours plus tard, M. [V], veilleur de nuit, dont les horaires de travail sont 22h-8h, ayant déclaré être tombé dans un escalier. La lésion notée est une ecchymose au dos. Aucun horaire de l'accident n'est indiqué.

Le certificat médical du 16 juillet 2018 mentionne : « traumatisme rachidien avec contact sur les apophyses épineuses L4-L5 + traumatisme de la pulpe de l'index de la main droite + douleurs adducteurs droits après une chute survenue dans un escalier » et prescrit un arrêt de travail jusqu'au 22 juillet 2018.

L'employeur a émis des réserves lors de l'établissement de la déclaration d'accident du travail en joignant une lettre rédigée en ces termes : «aucun témoin n'était présent lors de l'accident et il n'a pas non plus informé sa collègue qui prenait son service à 6h30 des faits.

Ce n'est que le 27 juillet 2018 vers midi, lors de son entretien préalable au licenciement, soit 12 jours après la survenance de l'accident, que M. [V] nous a informé de celui-ci.

Nous émettons des réserves sur le caractère professionnel de cet accident.

En effet, il nous a été déclaré presque 2 semaines après l'incident, et, également celui-ci serait survenue exactement le même jour, soit le lundi 16 juillet 2018, où nous avons notifié par mail à M. [V] d'une mise à pied à titre conservatoire à effet immédiat ».

Dans le questionnaire assuré transmis lors de l'enquête de la CPAM, M. [V] déclare que l'accident a eu lieu à 23h45 et le décrit comme une chute « due à un fait soudain » ; qu'il a avisé son employeur par téléphone le 16 juillet le matin et en fin d'après-midi ainsi qu'en laissant un message à sa directrice le matin du 16 juillet 2018. Il verse au dossier un mot manuscrit rédigé ainsi : « Bonjour [X], Je suis tombé ce soir du 15 au 16 juillet 2018 ds les escaliers au sous-sol, un peu mal et de bleu mais de pb grave ».

Toutefois, il y a lieu de relever que ce mot ne comporte aucune date et qu'aucun autre élément du dossier ne permet d'établir que M. [V] a informé le jour de l'accident ou le lendemain son employeur qui de son côté, a toujours indiqué (dans la lettre de réserves et le questionnaire employeur) qu'il avait été informé de l'accident le vendredi 27 juillet 2018 par M. [V] lors de son entretien préalable au licenciement et que ce dernier ne l'avait signalé à personne pas même à sa collègue qui prenait son service à 6h30.

Le fait que la CPAM ait écrit à M. [V] le 27 juillet 2018 un courrier visant un AT MP du 15 juillet 2018 pour lui demander une attestation de salaire complétée par son employeur ne démontre pas pour autant que M. [V] avait informé son employeur avant cette date. Il en est de même du mail de l'employeur à la CPAM du mardi 31 juillet 2018 dans lequel il indique avoir reçu l'arrêt de travail « la semaine dernière » et que M. [V] lui a remis le certificat d'accident du travail vendredi dernier (le 27 juillet).

Il est également relevé que par lettre du 16 juillet 2018, l'employeur a notifié à M. [V] une mise à pied à titre conservatoire à effet immédiat. Si M. [V] affirme avoir reçu sa mise à pied conservatoire par lettre recommandée seulement le 20 juillet 20108, l'employeur a indiqué dans la lettre de réserves avoir adressé un mail à son salarié à cet effet dès le 16 juillet 2018 que M. [V] ne conteste pas avoir reçu.

Devant la commission de recours amiable et pour la première fois, M. [V] a fait état d'un témoin, M. [W], qu'il aurait appelé pour qu'il vienne le chercher.

Dans son attestation du 5 novembre 2021, M. [W] déclare : « M. [V] m'a appelé la nuit du 15 au 16 juillet 2018, me demandant de venir le chercher à son lieu de travail à cause de sa chute dans les escaliers. Je me suis présenté devant son [6] centre [Adresse 5] [Localité 7] le 16 juillet 2018 vers 8 h du matin, vu sa souffrance je l'ai ramené directement chez le médecin afin de l'examiner ».

Cette attestation, particulièrement tardive, n'est en outre pas conforme aux exigences de l'article 202 du code de procédure civile en l'absence de copie de la pièce d'identité de son auteur. Elle est donc dépourvue de valeur probante.

En tout état de cause, l'absence de témoignage peut être suppléée par un ensemble de présomptions précises et concordantes permettant de se convaincre de la réalité de l'accident allégué.

Or le seul certificat médical initial qui ne fait pas référence à une chute au travail ne suffit pas, en l'absence d'éléments autres que les affirmations du salarié et au regard du caractère tardif de la déclaration d'accident, à attester de la survenance d'un fait accidentel au temps et lieu de travail. Il en est d'ailleurs de même des éléments médicaux produits par l'assuré (scanner lombaire du 26 septembre 2018, IRM de l'épaule et du coude des 29 novembre, 12 et 20 décembre 2018, scanner du rachis du 5 août 2019, etc).

Ainsi, les éléments du dossier, en dehors des allégations du salarié, ne sont pas suffisamment précis et concordants pour établir avec certitude la matérialité de l'accident allégué, de sorte que contrairement à ce que soutient l'appelant, la présomption d'imputabilité ne s'applique pas.

Faute pour M. [V] de rapporter la preuve qui lui incombe de la survenance d'un accident au temps et au lieu du travail à l'origine des lésions constatées dans le certificat médical initial.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de Monsieur [V] tenant à la prise en charge, au titre de la législation sur les risques professionnels, de l'accident du 15 juillet 2018, déclaré le 30 juillet 2018.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens

Partie succombante, M. [V] est condamné aux dépens d'appel, conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, et débouté de sa demande en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,

Déboute M. [V] de l'ensemble de ses demandes,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 31 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Douai, pôle social,

Y ajoutant,

Déboute M. [V] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Le condamne aux dépens de l'instance d'appel,

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 21/03549
Date de la décision : 12/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-12;21.03549 ?
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