ARRET
N°
[C]
C/
S.A. ASSURANCES DU CREDIT MUTUEL IARD
CPAM DU LOIR ET CHER
CD/SGS
COUR D'APPEL D'AMIENS
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU SIX JUILLET
DEUX MILLE VINGT TROIS
Numéro d'inscription de l'affaire au répertoire général de la cour : N° RG 21/05104 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IICY
Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU PRESIDENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE COMPIEGNE DU SEPT SEPTEMBRE DEUXMILLEVINGT ET UN
PARTIES EN CAUSE :
Madame [Z] [C] épouse [W]
née le 29 Novembre 1959 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 7]
[Localité 4]
Représentée par Me Christophe GUEVENOUX GLORIAN de la SELARL GUEVENOUX GLORIAN CHRISTOPHE, avocat au barreau de COMPIEGNE
APPELANTE
ET
S.A. ASSURANCES DU CREDIT MUTUEL IARD
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me HUBERT substituant Me Anne BOLLIET de la SCP GOSSARD BOLLIET MELIN, avocat au barreau de COMPIEGNE
CAISSE PRIMAIRE ASSURANCE MALADIE DU LOIR ET CHER prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.
[Adresse 5]
[Localité 3]
Représentée par Me Fabrice CHIVOT de la SELARL CHIVOT-SOUFFLET, avocat au barreau D'AMIENS
INTIMEES
DEBATS :
A l'audience publique du 25 mai 2023, l'affaire est venue devant Mme Christina DIAS DA SILVA, magistrat chargé du rapport siégeant sans opposition des avocats en vertu de l'article 805 du Code de procédure civile. Ce magistrat a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 06 juillet 2023.
La Cour était assistée lors des débats de Mme Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Le magistrat chargé du rapport en a rendu compte à la Cour composée de Madame Christina DIAS DA SILVA, Présidente de chambre, Mme Véronique BERTHIAU-JEZEQUEL, Présidente de chambre et M. Pascal MAIMONE, Conseiller, qui en ont délibéré conformément à la Loi.
PRONONCE DE L'ARRET :
Le 06 juillet 2023, l'arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Christina DIAS DA SILVA, Présidente de chambre et Mme Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.
*
* *
DECISION :
Aux termes d'un contrat daté du 24 juin 2016 prenant effet le 1er septembre suivant, l'EURL l'épicerie d'art a souscrit un contrat d'assurance multirisque professionnelle auprès de la SA Assurances du Crédit Mutuel IARD ( ci-après la SA ACM IARD). Cette société a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 2 mai 2018.
Le 19 juillet 2017, alors qu'elle se trouvait dans la boutique de l'EURL l'épicerie d'art située [Adresse 2] à [Localité 8], Mme [Z] [C] épouse [W] a fait une chute dans les escaliers et s'est blessée.
Déclarant avoir subi une fracture de la cheville gauche à la suite de cette chute, Mme [W] a fait assigner, par exploit du 24 juillet 2019, la SA ACM IARD, assureur de responsabilité civile de l'EURL l'épicerie d'art et la CPAM du Loir et Cher aux fins notamment d'expertise médicale et d'indemnisation de son préjudice corporel.
Par jugement du 7 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Compiègne a :
- débouté Mme [W] de l'intégralité de ses demandes,
- condamné Mme [W] à payer à la SA Assurances du Crédit Mutuel IARD la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Mme [W] à payer à la CPAM du Loir et Cher la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté toute autre demande,
- condamné Mme [W] aux dépens,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision.
Par déclaration du 22 octobre 2021 Mme [W] a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses conclusions communiquées par voie électronique le 8 juin 2022, elle demande à la cour de :
- la dire recevable et bien fondée en son appel,
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- statuant à nouveau,
- dire qu'elle est recevable en ses demandes,
- dire que l'EURL L'épicerie d'art est responsable de ses dommages corporels,
- condamner la SA ACM IARD en qualité d'assureur de l'EURL l'épicerie d'art à lui payer une provision de 5 000 euros,
- débouter la SA ACM IARD de toutes ses demandes,
- ordonner une expertise médicale aux fins d'évaluer son préjudice corporel,
- condamner la SA ACM IARD en sa qualité d'assureur de l'EURL l'épicerie d'art à lui verser la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens sous le bénéfice de la distraction,
- déclarer la décision à intervenir opposable à la CPAM du Loir et Cher.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 7 octobre 2022, la société ACM IARD demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- à titre subsidiaire, en cas d'infirmation du jugement entrepris :
- à titre principal :
- déclarer les demandes formulées par Mme [W] et la CPAM du Loir et Cher à l'encontre de la SA ACM IARD mal fondées,
- en conséquence, les débouter de l'ensemble de leurs fins moyens et prétentions formulés à son encontre,
- à titre subsidiaire :
- prendre acte des plus extrêmes protestations et réserves de la SA ACM IARD,
- mettre à la charge de la demanderesse l'intégralité des frais d'expertise,
- débouter Mme [W] de sa demande de provision,
- débouter la CPAM de ses demandes indemnitaires formulées à l'encontre de la SA ACM IARD sur le fondement de l'article 1242 du code civil,
- subsidiairement :
- constater la faute commise par la victime, laquelle selon une jurisprudence constante exonère le gardien de la chose de sa responsabilité,
- en conséquence :
- débouter la CPAM et le cas échéant Mme [W] de ses demandes indemnitaires formulées à l'encontre de la SA ACM IARD sur le fondement de l'article 1242 du code civil,
- à titre infiniment subsidiaire :
- constater la faute commise par la victime qui, si elle ne revêt pas les caractères de la force majeure, exonère partiellement le gardien de la chose de sa responsabilité,
- en conséquence,
- réduire à de plus justes proportions les montants en cause,
- en tout état de cause :
- constater que la franchise contractuelle de 235 euros est opposable au tiers qui invoque le bénéfice de la police d'assurance,
- constater que la garantie de la SA ACM IARD est limitée à 1 500 000 euros,
- en conséquence,
- faire application de la franchise contractuelle de 235 euros du montant des dommages et du plafond de garantie au bénéfice de la SA ACM IARD en sa qualité d'assureur de l'EURL l'épicerie d'art,
- condamner Mme [W] à verser à la SA ACM IARD la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 28 février 2022, la CPAM du Loir et Cher demande à la cour de :
- vu l'article 1242 du code civil,
- la déclarer recevable en son appel incident,
- infirmer le jugement entrepris et statuant à nouveau,
- déclarer l'EURL l'épicerie d'art seule et entièrement responsable de l'accident dont a été victime Mme [W] dans ses locaux le 19 juillet 2017,
- déclarer bien fondée l'action directe engagée contre son assureur la SA ACM IARD par Mme [W] et les demandes dirigées contre elle par la CPAM subrogée dans les droits et actions de son assurée sociale,
- vu l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale,
- surseoir à statuer sur le montant définitif de la CPAM dans l'attente des conclusions à venir de l'expertise médicale sollicitée par Mme [W],
- condamner la SA ACM IARD à lui payer la somme provisionnelle de 30 396,70 euros au titre de sa créance provisionnelle arrêtée au 30 décembre 2019, ladite somme augmentée des intérêts au taux légal à compter de la notification des premières conclusions de la CPAM soit le 9 mars 2020,
- vu l'arrêté du 14 décembre 2021,
- condamner la SA ACM IARD à lui payer la somme de 1 114 euros au titre de l'article L 376-1 al 9 du code de la sécurité sociale et celle de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SA ACM IARD aux dépens de première instance et d'appel sous le bénéfice des dispositions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 décembre 2022 et l'affaire a été renvoyée à l'audience de plaidoiries du 25 mai 2023.
SUR CE LA COUR
L'article 1242 du code civil dispose :
'On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde'.
Ainsi que l'a rappelé à juste titre le premier juge, la responsabilité de l'exploitant d'un magasin, dont l'entrée est libre, ne peut être engagée, à l'égard de la victime d'une chute survenue dans ce magasin et dont une chose inerte serait à l'origine, que sur le fondement de l'article 1242 du code civil, excluant l'application des dispositions de l'article L 421-3 du code de la consommation, à charge pour la victime de démontrer que cette chose, placée dans une position anormale ou en mauvais état, a été l'instrument du dommage ( 1re Civ, 9 septembre 2020, pourvoi n°19-11.882).
Mme [W] n'est dès lors pas fondée à soutenir qu'il pèse sur l'exploitant du magasin dans lequel elle a chuté une responsabilité de plein droit compte tenu de son obligation de sécurité de résultat et il lui appartient de rapporter la preuve que la chose, à l'origine de sa chute, a été l'instrument de son dommage et se trouvait dans une position anormale ou en mauvais état pour voir prospérer son action en responsabilité.
Il est constant que le 19 juillet 2017 Mme [W] a chuté dans les escaliers du local commercial exploité par la société l'épicerie d'Art. Les pièces qu'elle verse aux débats, mentionnées précisément par le premier juge, ne permettent nullement d'établir que l'escalier sur lequel elle a chuté était placé dans une position anormale ou qu'il était en mauvais état.
Mme [W] invoque le non respect des dispositions de la loi n°2005-102 du 11 février 2005 relatif à l'absence de signalisation visuelle et sensorielle de l'escalier. Cependant le non respect de cette législation, qui vise à rendre accessibles les locaux aux personnes handicapées, n'est pas, à lui seul, de nature à établir le caractère anormalement dangereux de l'escalier pour une personne n'ayant pas une mobilité réduite comme c'est le cas de l'appelante.
Enfin elle se contente d'affirmer, sans en rapporter la preuve, que l'escalier serait dangereux en raison de sa non- conformité au DTU.
Il s'ensuit que l'action en responsabilité de Mme [W] à l'encontre de la société l'épicerie d'art et de son assureur ne peut prospérer et doit être rejetée. Il en est de même de l'action subrogatoire de la CPAM du Loir et Cher. Le jugement est en conséquence confirmé en toutes ses dispositions.
Mme [W] qui succombe doit être condamnée aux dépens d'appel et à verser à la SA ACM IARD la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, sa demande faite à ce titre étant nécessairement mal fondée.
L'équité commande de laisser à la charge de la CPAM les frais de procédure exposés dans le cadre de l'instance d'appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant ;
Condamne Mme [W] à payer à la SA ACM IARD la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute Mme [W] et la CPAM du Loir et Cher de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [W] aux dépens d'appel.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE