ARRET
N°
[V]
[V]
C/
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE LA BANQUE SOLFEA
S.E.L.A.R.L. MMJ
CD/SGS
COUR D'APPEL D'AMIENS
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU SIX JUILLET
DEUX MILLE VINGT TROIS
Numéro d'inscription de l'affaire au répertoire général de la cour : N° RG 22/01966 - N° Portalis DBV4-V-B7G-INOK
Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE TRIBUNAL JUDICIAIRE LAON DU SEPT MARS DEUX MILLE VINGT DEUX
PARTIES EN CAUSE :
Monsieur [L] [V]
né le 05 Février 1948 à [Localité 8]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 1]
Madame [S] [V]
née le 05 Janvier 1947 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentés par Me Audrey BOUDOUX D'HAUTEFEUILLE, avocat au barreau D'AMIENS
Ayant pour avocat plaidant Me Maître Aurélie ABBAL, avocat au barreau de MONTPELLIER
APPELANTS
ET
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE LA BANQUE SOLFEA
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentée par Me ROBIT substituant Me Franck DELAHOUSSE de la SELARL DELAHOUSSE ET ASSOCIÉS, avocat au barreau D'AMIENS
Ayant pour avocat plaidant Me Francis DEFFRENNES avocat au Barreau de Lille
S.E.L.A.R.L. MMJ, ès-qualités de « Mandataire liquidateur » de la SARL SYN ENERGY, immatriculée sous le numéro 523 935 666 RCS PONTOISE, dont l'adresse est [Adresse 5] placée en liquidation judiciaire sans poursuite d'activité suivant jugement du tribunal de commerce de Pontoise du 09/12/2013, la SELARL MMJ étant représentée par Maître [I]
[Adresse 3]
[Localité 7]
Assigné à secrétaire le 01 juillet 2022
INTIMEES
DEBATS :
A l'audience publique du 25 mai 2023, l'affaire est venue devant Mme Christina DIAS DA SILVA, magistrat chargé du rapport siégeant sans opposition des avocats en vertu de l'article 805 du Code de procédure civile. Ce magistrat a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 06 juillet 2023.
La Cour était assistée lors des débats de Madame Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Le magistrat chargé du rapport en a rendu compte à la Cour composée de Mme Christina DIAS DA SILVA, Présidente de chambre, Mme Véronique BERTHIAU-JEZEQUEL, Présidente de chambre et M. Pascal MAIMONE, Conseiller, qui en ont délibéré conformément à la Loi.
PRONONCE DE L'ARRET :
Le 06 juillet 2023, l'arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Christina DIAS DA SILVA, Présidente de chambre et Mme Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.
*
* *
DECISION :
Suivant bon de commande daté du 18 février 2013, M. et Mme [V] ont commandé une installation de panneaux photovoltaïques auprès de la société Syn Energy.
Suivant offre préalable acceptée le même jour, la banque Solfea leur a consenti un prêt personnel d'un montant de 26 900 euros destiné à financer cette installation.
Par jugement du 9 décembre 2013 la société Syn Energy a été placée en liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de Pontoise.
Suivant exploits délivrés les 27 et 29 avril 2021, les époux [V] ont fait assigner la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la banque Solfea et la société Syn Energy aux fins de voir prononcer la nullité du contrat de vente et du contrat de crédit affecté.
Par jugement du 7 mars 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Laon a :
- déclaré irrecevables les époux [V] en leur action en nullité du contrat de vente et du contrat de crédit affecté,
- déclaré recevables les époux [V] en leur action en résolution du contrat de vente du 18 février 2013,
- débouté les époux [V] de l'intégralité de leurs demandes,
- condamné in solidum les époux [V] à la somme de 150 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens,
- rappelé que la décision est assortie de l'exécution provisoire.
Par déclaration du 22 février 2022, les époux [V] ont interjeté appel de cette décision.
Aux termes de leurs conclusions communiquées par voie électronique le 12 juillet 2022 ils demandent à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré recevable l'action en résolution du contrat en date du 18 décembre 2013,
- le réformer pour le surplus et notamment en ce que les premiers juges ont déclaré la demande en nullité comme prescrite et rejeté l'ensemble des autres prétentions des consorts [V],
- et statuer à nouveau ;
- vu le bon de commande en date du 18 février 2013
- vu le contrat de crédit BNPPPF en date du même jour ;
- vu les articles L 111-1, L 111-2, L 121-17, L 121-18, L 121-23, L 311-32 du code de la consommation ;
- à titre principal :
- prononcer la nullité du contrat principal de commande de panneaux photovoltaïques conclu entre les époux [V] et la société Syn Energy,
- en conséquence :
- prononcer la nullité du contrat de crédit affecté,
- constater que la société BNP Paribas a commis une faute dans le déblocage des fonds au bénéfice de Syn Energie,
- en conséquence :
- dire que la société BNP Paribas est privée de son droit à réclamer la restitution du capital prêté ;
- condamner la société BNP Paribas à restituer les mensualités (capital, intérêts, frais et accessoires) qui ont été versées par M. et Mme [V],
- condamner la société BNP Paribas au paiement de la somme de 15 000 euros au titre des dommages et intérêts.
- condamner la société BNP Paribas à leur payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 24 octobre 2022, la société BNP Paribas Personal Finance demande à la cour de :
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- déclarer M. et Mme [V] irrecevables en leurs prétentions, pour cause de prescription de leur action,
- les débouter de l'intégralité de leurs prétentions telles que formulées à l'encontre de la S.A. BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la S.A. Banque Solfea,
- à titre subsidiaire, si la cour estimait devoir réformer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevables les époux [V] en leur action en nullité dirigée contre le contrat de vente du 18 février 2013 et le contrat de crédit affecté,
- juger que le bon de commande régularisé par les époux [V] avec la société Syn Energy respecte les dispositions des anciens articles L.121-23 et suivants du code de la consommation (dans leur version applicable en la cause),
- à défaut, constater, dire et juger que les époux [V] ont amplement manifesté leur volonté de renoncer à invoquer la nullité du contrat au titre des prétendus vices l'affectant sur le fondement des anciens articles L.121-23 et suivants du code de la consommation et ce, en toute connaissance des dispositions applicables,
- constater la carence probatoire des époux [V],
- juger que les conditions d'annulation du contrat principal conclu le 18 février 2013 avec la société Syn Energy sur le fondement d'un prétendu dol ne sont pas réunies et qu'en conséquence le contrat de crédit affecté conclu par les époux [V] n'est pas annulé,
- juger que les conditions de résolution judiciaire du contrat principal conclu le 18 février 2013 avec la société Syn Energy ne sont pas réunies et qu'en conséquence le contrat de crédit affecté conclu par les époux [V] avec la banque n'est pas résolu,
- en conséquence, débouter les époux [V] de l'intégralité de leurs demandes telles que formulées à son encontre et notamment de leur demande en remboursement des sommes d'ores et déjà versées dans le cadre de l'exécution du contrat de crédit affecté qui leur a été consenti par la S.A. Banque Solfea selon offre préalable acceptée le 18février 2013,
- à titre très subsidiaire, si par extraordinaire la cour décidait de réformer le jugement entrepris
et prononcer l'annulation ou la résolution judiciaire du contrat principal de vente conclu le 18 février 2013 entre les époux [V] et la société Syn Energy entraînant l'annulation ou la résolution du contrat de crédit affecté :
- constater, dire et juger que la S.A. Banque Solfea n'a commis aucune faute,
- par conséquent, débouter les époux [V] de l'intégralité de leurs demandes formulées contre elle,
- condamner solidairement les époux [V] à lui rembourser le montant du capital prêté au titre du contrat de crédit affecté litigieux, déduction faite des paiements d'ores et déjà effectués par les emprunteurs,
- à titre infiniment subsidiaire, si la cour devait considérer que la banque a commis une faute dans le déblocage des fonds,
- juger que le préjudice subi du fait de la perte de chance de ne pas contracter le contrat de crédit affecté litigieux ne peut être égal au montant de la créance de la banque,
- juger que les époux [V] conserveront l'installation des panneaux photovoltaïques qui ont été livrés et posés à leur domicile par la société Syn Energy (puisque ladite société est en liquidation judiciaire et qu'elle ne se présentera donc jamais pour récupérer les matériels installés au domicile des époux [V]), que l'installation photovoltaïque fonctionne parfaitement puisque ladite installation est raccordée au réseau ERDF-ENEDIS, que l'installation a bien été mise en service et que les époux [V] perçoivent chaque année des revenus énergétiques grâce à l'installation photovoltaïque litigieuse,
- par conséquent, juger que l'établissement financier prêteur ne saurait être privé de sa créance de restitution du capital prêté, compte tenu de l'absence de préjudice avéré pour les époux [V],
- par conséquent, débouter les époux [V] de l'intégralité de leurs demandes formulées à son encontre à l'exception des sommes qui auraient éventuellement été versées par eux au-delà du montant du capital prêté,
- condamner solidairement les époux [V] à lui rembourser le montant du capital prêté au titre du contrat de crédit affecté litigieux, déduction faite des paiements d'ores et déjà effectués par les emprunteurs,
- à défaut, réduire à de bien plus justes proportions le préjudice subi par les époux [V] et dire et juger qu'ils doivent à tout le moins restituer à la concluante une fraction du capital prêté, fraction qui ne saurait être inférieure aux deux tiers du capital prêté,
- en tout état de cause,
- débouter les époux [V] de leur demande en paiement de dommages et intérêts en l'absence de faute imputable à la banque, à défaut de justifier de la réalité et du sérieux d'un quelconque préjudice qui serait directement lié à la prétendue faute que les époux [V] tentent de mettre à la charge de l'établissement financier prêteur,
- condamner solidairement les époux [V] à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum les époux [V] aux dépens sous le bénéfice de la distraction.
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.
La SELARL MMJ en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Syn Energy, régulièrement assignée par exploit du 1er juillet 2022, remis à personne habilitée à recevoir l'acte n'a pas constitué avocat.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 janvier 2023 et l'affaire a été renvoyée pour être plaidée à l'audience du 25 mai suivant.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Les époux [V] demandent de prononcer la nullité du contrat principal de vente pour non respect des dispositions de l'article L221-5 du code de la consommation.
La banque soulève l'irrecevabilité d'une telle demande en raison de la prescription.
Ainsi que l'indique à juste titre le premier juge l'action en nullité est soumise à la prescription quinquennale prévue par l'article 1304 du code civil dans sa version applicable à la cause et le délai commence à courir à compter du jour où le consommateur a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer cette action.
L'examen des pièces versées aux débats permet de constater que le bon de commande contient une reproduction lisible des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable aux contrats conclus hors établissement. Cette reproduction a permis aux époux [V] de prendre connaissance des éventuels vices résultant de l'inobservation de ces dispositions. C'est dès lors à bon droit que le premier juge a dit que le délai pour agir en nullité du contrat a commencé à courir le 18 février 2013 de sorte que l'action ayant été engagée par les époux [V] par exploits des 27 et 29 avril 2021 était prescrite.
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a dit que les époux [V] étaient irrecevables en leur action en nullité du contrat de vente du 18 février 2013 et du contrat de crédit affecté pour non respect des dispositions du code de la consommation.
Au demeurant il sera ajouté que l'installation litigieuse est en place depuis plus de 8 ans et qu'elle fonctionne parfaitement, les époux [V] ayant signé avec EDF un contrat d'achat de l'électricité produite par leur centrale photovoltaïque et produisant les factures y afférentes. Ils ne justifient donc d'aucun préjudice en lien avec le matériel vendu par la société Syn Energy et financé par la banque Solfea.
S'agissant de la demande de résolution du contrat de vente en raison de l'insuffisance de production électrique des panneaux photovoltaïques formée à titre subsidiaire par les époux [V], le jugement doit être confirmé en ce qu'il a dit que celle-ci n'est nullement prescrite, les demandeurs ne pouvant avoir eu connaissance de cette insuffisance qu'après plusieurs années d'exploitation de l'installation litigieuse.
S'agissant du bien fondé de l'action il convient de rappeler que la rentabilité économique ne constitue une caractéristique essentielle d'une installation photovoltaïque au sens de l'article L. 111-1 du code de la consommation, qu'à la condition que les parties l'aient fait entrer dans le champ contractuel (1ère Civ., 21 octobre 2020, pourvoi n° 18-26.761).
C'est par une juste appréciation des éléments de la cause et notamment du bon de commande et des documents contractuels versés aux débats que le premier juge a dit que la société Syn Energy ne s'était pas engagée sur la rentabilité économique de l'installation qu'elle a vendu aux époux [V]. Il n'est produit en appel aucune pièce permettant de contredire cette appréciation.
Les appelants procèdent par affirmations lorsqu'ils soutiennent que la société Syn Energy a usé de manoeuvres dolosives, s'agissant de la promesse d'autofinancement de l'installation, dans le dessein de les tromper pour les inciter à contracter.
Dès lors le jugement doit être confirmé en toutes ses dispositions.
Les époux [V] qui succombent en leur recours doivent être condamnés in solidum aux dépens d'appel sous le bénéfice de la distraction et payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Leur demande faite à ce titre est nécessairement mal fondée.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement entrepris ;
Y ajoutant ;
Condamne in solidum M. [L] [V] et Mme [S] [V] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 1 500 euros au titre des dispositions prévues par l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne in solidum M. [L] [V] et Mme [S] [V] aux dépens d'appel sous le bénéfice des dispositions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE