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28/01/2008 | FRANCE | N°05/00519

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 28 janvier 2008, 05/00519


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE


1ère CHAMBRE CIVILE


ARRÊT No 93 DU 28 JANVIER 2008


R. G : 05 / 00519


Décision déférée à la Cour : Ordonnance de référés du Tribunal de Grande Instance de POINTE-A-PITRE, décision attaquée en date du 28 janvier 2005, enregistrée sous le no 04 / 00436


APPELANTE :


SCI RESIDENCE CAPUCINE
dont le siège social est Meynard
97170 PETIT BOURG
Représentée par Me Camille CEPRIKA (TOQUE 27), avocat au barreau de LA GUADELOUPE


INTIMEE :


L'ADMINISTRATION CHA

RGEE DES FORETS EN LA PERSONNE DU DIRECTEUR REGIONAL DE L'OFFICE NATIONAL DES FORETS
dont le siège social est Jardin botanique
97100 BASSE-TER...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

1ère CHAMBRE CIVILE

ARRÊT No 93 DU 28 JANVIER 2008

R. G : 05 / 00519

Décision déférée à la Cour : Ordonnance de référés du Tribunal de Grande Instance de POINTE-A-PITRE, décision attaquée en date du 28 janvier 2005, enregistrée sous le no 04 / 00436

APPELANTE :

SCI RESIDENCE CAPUCINE
dont le siège social est Meynard
97170 PETIT BOURG
Représentée par Me Camille CEPRIKA (TOQUE 27), avocat au barreau de LA GUADELOUPE

INTIMEE :

L'ADMINISTRATION CHARGEE DES FORETS EN LA PERSONNE DU DIRECTEUR REGIONAL DE L'OFFICE NATIONAL DES FORETS
dont le siège social est Jardin botanique
97100 BASSE-TERRE
Représentée par la SCP PAYEN-PRADINES (T74), avocat au barreau de GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 05 novembre 2007, en audience publique, devant la cour composée de :
M. Robert PARNEIX, président de chambre, président,
Mme Claudine PAGE, vice-présidente placée faisant fonction de conseillère, rapporteure,
Mme Marie-Hélène CABANNES, conseillère,
qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 28 janvier 2008.

GREFFIER :

Lors des débats : Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative, faisant fonction de greffière, serment préalablement prêté.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du NCPC.
Signé par M. Robert PARNEIX, président de chambre, président et par Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative, faisant fonction de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE,

La SCI RESIDENCE CAPUCINE est propriétaire des parcelles... et... sur lesquelles elle a construit une résidence de tourisme sur la plage de la commune de Petit Havre. L'OFFICE NATIONAL DES FORETS a soutenu qu'elle avait étendu ses constructions sur la parcelle... classée forêt domaniale.
L'OFFICE NATIONAL DES FORETS a alors mis en oeuvre la procédure de l'article L 173-4 du code forestier et un arrêté préfectoral du 26 mai 2004 l'a autorisé à rétablir les lieux dans leur état primitif, les constructions ont été démolies.

La SCI RESIDENCE CAPUCINE a fait assigner en référé l'OFFICE NATIONAL DES FORETS pour l'entendre condamner à restituer les objets saisis sous astreinte, ordonner la remise en état des lieux également sous astreinte, être autorisée à le faire en cas de carence, obtenir une provision de 42 000 € en réparation de son préjudice financier, obtenir la publication de la décision dans deux journaux locaux et un journal parisien et la somme de 7000 € au titre de l'article 700.

Par ordonnance rendue le 28 janvier 2005, le Président du tribunal de grande instance de Pointe à Pitre statuant en référé a débouté la SCI RESIDENCE CAPUCINE de son action à l'encontre de l'OFFICE NATIONAL DES FORETS et l'a condamnée à payer la somme de 3000 € par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Il a considéré que la SCI qui se prévaut d'une voie de fait devait au préalable rapporter la preuve qu'elle est propriétaire du terrain sur lequel l'administration a commis cette voie de fait ce qu'elle ne faisait pas.

Par acte remis au greffe de la cour d'appel de Basse Terre le 17 février 2007, enrôlé le même jour, la SCI RESIDENCE CAPUCINE a fait appel de cette décision.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusions déposées au greffe le 14 mai 2007, la SCI RESIDENCE CAPUCINE demande à la cour d'infirmer l'ordonnance, de dire que les agissements de l'OFFICE NATIONAL DES FORETS sont constitutifs d'une voie de fait, d'ordonner la remise en état immédiate de la clôture, du terrain, des bâtiments dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt sous astreinte de 762, 25 € par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt, la restitution du matériel sous peine de la même astreinte, de dire qu'en cas de carence de l'OFFICE NATIONAL DES FORETS, la SCI RESIDENCE CAPUCINE sera autorisée à y procéder aux frais de ce dernier, de condamner l'OFFICE NATIONAL DES FORETS à payer la somme de 31000 € à titre de provision à valoir sur

son préjudice financier, celle de 30 000 € au titre du trouble de jouissance, de condamner l'OFFICE NATIONAL DES FORETS à faire publier à ses frais la décision à intervenir dans deux journaux locaux et un journal parisien, à payer la somme de 3000 € par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel avec distraction au profit de Maître Ceprika par application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

La SCI RESIDENCE CAPUCINE fait valoir qu'elle a un intérêt légitime à agir puisqu'elle est propriétaire des biens qui ont été détruits ou emportés, qu'elle est propriétaire du terrain sur lequel elle a construit pour en avoir toujours joui sans opposition de quiconque ; que le juge des référés en exigeant la preuve préalable de la propriété de la parcelle a statué ultra petita, que par ailleurs il lui est fait grief de ne pas avoir statué sur la qualification des faits.

Elle invoque une voie de fait commise car les destructions ont porté atteinte à la propriété privée, que la décision préfectorale est insusceptible d'être rattachée à un pouvoir de l'administration dans la mesure ou l'article L 173-4 du code forestier est rendu inapplicable par d'autres textes, les articles L311 et suivants du code forestier excluent les parcs et jardins clos attenants à une habitation principale, qu'en outre la décision n'a pas été prise à l'encontre du véritable propriétaire, qu'elle ne lui a pas été notifiée, qu'aucune preuve de l'empiétement n'est rapportée car les bornes ont été posées par le géomètre X... sans que les riverains aient été appelés et que l'administration dans des conditions irrégulières à exécuté une décision portant atteinte aux libertés fondamentales
*****

Par conclusions déposées au greffe le 20 octobre 2006, l'OFFICE NATIONAL DES FORETS demande à la cour de confirmer l'ordonnance, et faisant appel incident, de condamner la SCI RESIDENCE CAPUCINE à procéder à l'enlèvement des effets mobiliers visés au constat du 8 juin 2004 dénoncé le 19 août 2004 sous astreinte de 350 € par jour de retard dès le prononcé du présent arrêt, de la condamner à payer la somme de 4500 € par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel.

L'OFFICE NATIONAL DES FORETS fait valoir que le bornage de la forêt domaniale du littoral a été validé par les riverains en 1981 et 1982, que le géomètre X... n'a fait que replacer des bornes qui avaient été enlevées, que la SCI RESIDENCE CAPUCINE a construit sur la parcelle... et non sur les parcelles dont elle est propriétaire, que la procédure administrative est parfaitement régulière et que les objets enlevés des constructions démolies ont fait l'objet d'un constat d'huissier et sont tenus à la disposition de la SCI RESIDENCE CAPUCINE qui n'est jamais venue les enlever.

La cour se réfère expressément aux conclusions visées plus haut pour l'exposé des moyens de fait et de droit.

MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité,
Le fait que le premier juge ait retenu que la SCI n'était pas propriétaire du sol et n'avait donc pas d'intérêt à agir aurait dû le conduire à conclure à l'irrecevabilité de la demande. Il n'est pas contesté à tout le moins que les constructions qui ont été détruites appartenaient à la SCI RESIDENCE CAPUCINE, qu'elle justifie donc d'un intérêt légitime à agir et la demande ne peut qu'être déclarée recevable.
Sur la demande principale,
La SCI RESIDENCE CAPUCINE est propriétaire des seules parcelles... et... suivant acte notarié du 2 octobre 1989.
La forêt domaniale de Petit Havre, dont la parcelle..., a fait l'objet d'un procès verbal de délimitation le 5 mai 1981 qui a été approuvé par tous les riverains dont Mr Aimé Louis Y... le 2 novembre 1982 qui est l'ancien propriétaire de la parcelle ainsi qu'il ressort de l'attestation de sa fille, Josiane Y..., qui atteste en faveur de la SCI RESIDENCE CAPUCINE et déclare « c'est mon père qui a vendu le terrain objet du lotissement et ma famille et moi avons toujours contesté les prétentions de l'ONF sur notre propriété... »
Cette parcelle... est située sur la zone des 50 pas géométriques qui appartient à l'état depuis sa création par édit royal de 1676. La zone des 50 pas géométriques a été remise à l'OFFICE NATIONAL DES FORETS suivant procès verbal de remise définitive des 14 décembre 1976 et 4 janvier 1977. Cet acte constitue une décision d'incorporation au domaine forestier privé géré par l'Office en vu de sa gestion.
Par lettres des 22 juillet et 5 août 1991, la SCI RESIDENCE CAPUCINE a sollicité de l'OFFICE NATIONAL DES FORETS l'autorisation de privatiser les abords du terrain sur lequel elle était en train de construire suivant plan annexé pour y installer un bar de structure légère et des parasols. L'autorisation a été refusée par lettre du 4 septembre 1991. Le plan annexé relatif à la demande situe l'occupation sollicitée en retrait, sur la gauche de la résidence, précisément où la SCI RESIDENCE CAPUCINE va construire malgré le refus opposé.
La SCI RESIDENCE CAPUCINE est mal venue à contester la propriété de l'OFFICE NATIONAL DES FORETS sur le sol où elle a construit les bâtiments litigieux, tant au regard de l'autorisation précédemment demandée que de la réimplantation par Monsieur X... des bornes no 50 et 51 enlevées, au vu du procès verbal de délimitation du 5 mai 1981, bornes qui démontrent l'empiétement de la SCI RESIDENCE CAPUCINE sur la parcelle.... Ce défaut de propriété lui a été reproché par l'office en première instance.

L'article L 173-4 du code forestier précise : « quiconque procède à une occupation sans titre où à un empiétement de toute
nature entraînant la destruction de l'état boisé est puni (...) l'office national des forêts a, en outre, la faculté de procéder sur autorisation de l'autorité administrative et dès l'établissement d'un procès verbal constatant l'état des lieux, au rétablissement de ces derniers en l'état primitif au frais du délinquant... »
Les articles L 311 et suivants visés par la SCI RESIDENCE CAPUCINE s'appliquent au défrichement des bois des particuliers et non aux forêts domaniales.
Un procès-verbal d'infraction a été dressé par des agents assermentés le 21 janvier 2004 qui se sont rendus sur les lieux et ont sommé les personnes présentes d'arrêter les travaux. Une lettre recommandée a été envoyée à la SCI le 16 février 2004 demandant l'arrêt des travaux retournée non réclamée, le procès verbal a été clos le 3 mai 2004.
Par arrêté préfectoral du 26 mai 2004, l'OFFICE NATIONAL DES FORETS a été autorisé à rétablir les lieux dans leur état primitif au frais de la SCI RESIDENCE CAPUCINE. Il a donc été rendu à l'encontre de la personne propriétaire des constructions.
L'arrêté préfectoral du 26 mai 2004 a été notifié le 1er juin 2004. La personne rencontrée ayant refusé l'acte, la notification de l'arrêté a été déposée à la mairie de Gosier et le dépôt a été signifié par lettre recommandée qui n'a pas été retirée et par lettre simple qui n'a pas fait l'objet d'un retour à l'envoyeur. L'arrêté n'a fait l'objet d'aucune contestation.
Après un ultime délai de 72 h donné par la préfecture par lettre du 26 mai 2004, l'OFFICE NATIONAL DES FORETS va mettre la décision à exécution suivant procès verbal de constat du 8 juin 2004.

La destruction des constructions illicites a donc été valablement autorisée par l'arrêté préfectoral par application de l'article L 173-4 du code forestier qui donne explicitement pouvoir à l'administration de prendre une telle mesure dès lors qu'une occupation illicite est constatée, en conséquence, ces destructions ne sont pas constitutives d'une voie de fait et les demandes présentées par la SCI RESIDENCE CAPUCINE seront rejetées.
Sur l'appel incident de l'OFFICE NATIONAL DES FORETS
L'OFFICE NATIONAL DES FORETS a dénoncé à la SCI RESIDENCE CAPUCINE le procès-verbal de constat du 8 juin 2004 par acte du 19 août 2004, dans le même acte, il lui a été fait sommation dans le délai d'un mois d'enlever les objets mobiliers mentionnés dans le procès verbal sous peine de les faire déclarer abandonnés par le juge de l'exécution.
Il convient en conséquence de faire droit à la demande reconventionnelle et d'ordonner à la SCI RESIDENCE CAPUCINE de procéder à l'enlèvement des effets mobiliers visés au procès-verbal de constat du 8 juin 2004 dans le délai d'un mois après la notification de l'arrêt sans qu'il soit besoin d'ordonner une astreinte, l'OFFICE NATIONAL DES FORETS ayant la faculté passé ce délai de les faire déclarer abandonnés.

Sur les demandes accessoires,
Il serait inéquitable de laisser à la charge de l'OFFICE NATIONAL DES FORETS les frais exposés en appel non compris dans les dépens, il lui sera alloué la somme de 3000 €.
La SCI RESIDENCE CAPUCINE qui succombe en ses prétentions sera condamnée aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé civil et en dernier ressort, après en avoir délibéré,
Infirme l'ordonnance querellée,
Et statuant à nouveau,

Déclare les demandes recevables,

Les rejette comme étant infondées.

Ordonne à la SCI RESIDENCE CAPUCINE de procéder à l'enlèvement des effets mobiliers visés au procès verbal de constat du 8 juin 2004 dans le délai d'un mois après la notification de l'arrêt sans qu'il soit besoin d'ordonner une astreinte,
Condamne la SCI RESIDENCE CAPUCINE à payer à l'OFFICE NATIONAL DES FORETS la somme de 3000 € par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Et condamne la SCI RESIDENCE CAPUCINE aux dépens d'appel.
Et le président a signé avec la greffière.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Numéro d'arrêt : 05/00519
Date de la décision : 28/01/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Pointe-à-Pitre


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-01-28;05.00519 ?
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