COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
2ème CHAMBRE CIVILE
ARRÊT No DU 11 FEVRIER 2008
R. G : 05 / 00099
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal mixte de Commerce de POINTE-A-PITRE, décision attaquée en date du 22 Octobre 2004, enregistrée sous le no 03 / 177
APPELANTS :
Monsieur Pierre X...
...
97122 BAIE-MAHAULT
représenté par Me Hubert JABOT (TOQUE 43), avocat au barreau de GUADELOUPE
Monsieur Maurice Y...
...
97122 BAIE MAHAULT
représenté par Me Pascal SEREMES (TOQUE 67), avocat au barreau de GUADELOUPE
INTIMES :
Monsieur Pierre X...
...
97122 BAIE-MAHAULT
représenté par Me Hubert JABOT (TOQUE 43), avocat au barreau de GUADELOUPE
Monsieur Maurice Y...
...
97122 BAIE MAHAULT
représenté par Me Pascal SEREMES (TOQUE 67), avocat au barreau de GUADELOUPE
SA LA BANQUE DES ANTILLES FRANCAISES
Place de la Victoire
97110 POINTE A PITRE
représentée par Me Daniel WERTER (TOQUE 8), avocat au barreau de GUADELOUPE
CREDIT LYONNAIS
18 rue de la République
69002 LYON 02
représenté par Me Daniel WERTER (TOQUE 8), avocat au barreau de GUADELOUPE
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 07 Mai 2007, en audience publique devant la Cour composée de :
M. Antoine MOREL, Président de chambre, Président, rédacteur
Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseillère,
Mme Monique BEHARY-LAUL-SIRDER, Conseillère.
qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait rendu par sa mise à disposition au greffe de la cour 10 SEPTEMBRE 2007 puis le délibéré a été successivement prorogé jusqu'au 11 FEVRIER 2008
GREFFIER :
lors des débats : Mme Maryse PLOMQUITTE, Greffière.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du NCPC.
Signé par M. Antoine MOREL, Président de chambre, Président et par Mme Maryse PLOMQUITTE, Greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par MM. Y... et X... d'un jugement rendu le 22 octobre 2004 par le tribunal mixte de commerce de Pointe-à-Pitre, qui :
- a déclaré non fondés les moyens opposés par M. X... à la Banque des Antilles Françaises (BDAF) ;
- a condamné M. X... à payer à la BDAF la somme de 32. 928, 99 € au titre des huit lettres de change acceptées, échues, impayées, et la somme de 45. 537, 48 € au titre du solde débiteur de son compte courant en date du 31 décembre 1998 sur lequel ont été contre-passés certains effets ;
- a dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 24 juin 1998, et a prononcé la capitalisation des intérêts à échoir, année par année, conformément à l'article 1154 du Code civil ;
- a rejeté la demande reconventionnelle de M. X... contre la BDAF ;
- a rejeté la demande de sursis à statuer formée par M. Y... ;
- a condamné M. Y... à garantir M. X... de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre au profit de la BDAF ;
- a rejeté la demande en paiement de dommages intérêts formée par M. X... contre M. Y... ;
- a déclaré nulle l'assignation en garantie délivrée le 25 février 2003 par M. Y... à la société Le Crédit Lyonnais ;
- a condamné M. X... à payer à la BDAF la somme de 1. 500 €, et M. Y... à payer à M. X... la même somme de 1. 500 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
- a dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;
- a condamné M. X... aux dépens et a dit qu'il sera garanti par M. Y....
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Les faits sont exactement rapportés dans la décision entreprise à laquelle il est expressément référé à cet égard.
Par conclusions déposées le 26 mars 2007 M. X..., appelant, prie la cour d'infirmer partiellement le jugement entrepris, de constater que les sommes réclamées par la BDAF concernant le débit de son compte n'ont pour origine que les effets impayés Y... et que la différence ne provient, presque exclusivement, que des frais et agios passés par la BDAF au débit de son compte à la suite des impayés des lettres de change, de dire que par son comportement la BDAF lui a causé un préjudice qui doit être évalué au montant exact des sommes qu'elle lui réclame, d'ordonner la compensation et de dire en conséquence qu'il ne doit aucune somme.
Il la prie également de condamner M. Y... à réparer son préjudice pour les mêmes sommes et de confirmer en tant que de besoin le jugement entrepris en ce qu'il a condamné M. Y... à la garantie de toutes condamnations prononcées au profit de la BDAF.
Il sollicite la condamnation de la BDAF à lui payer la somme de 150. 000 € à titre de dommages intérêts, et la condamnation solidaire de la BDAF et de M. Y... à lui payer la somme de 10. 000 € à titre de dommages intérêts complémentaires, ainsi que celle de 8. 000 € en vertu de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Par conclusions déposées le 1er mars 2007, M. Y..., également appelant, prie la cour, au cas où la BDAF devrait obtenir paiement du reliquat de traites impayées, de dire qu'il serait contraire à la transaction no 2 qu'il a signée avec la BDAF, qu'il en supporte la charge finale, et de débouter M. X... de toutes ses demandes à son encontre.
Il la prie d'autre part de dire que le Crédit Lyonnais a eu un comportement fautif en soutenant dans son seul intérêt des entreprises de façon artificielle même si la BDAF en était l'auteur apparent, et que ces agissements fautifs l'ont empêché d'honorer certaines traites à leur échéance, de sorte que le Crédit Lyonnais doit être déclaré responsable, et condamné au paiement, le cas échéant, de la contre-valeur des sommes que lui-même devrait rembourser à M. X... en garantie des condamnations prononcées contre lui.
Il sollicite la condamnation de M. X... et du Crédit Lyonnais à lui payer chacun 3. 000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.
La BDAF, intimée, par conclusions déposées le 29 janvier 2007, sollicite la confirmation du jugement et la condamnation de M. X... à lui payer la somme de 5. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Le Crédit Lyonnais, également intimé, par conclusions déposées le 5 février 2007, prie la cour de dire M. Y... mal fondé en son appel du jugement en ce qu'il a déclaré nulle l'assignation qui lui a été délivrée le 25 février 2003, de dire en tout cas n'y avoir lieu d'évoquer le fond du litige et le cas échéant de renvoyer l'instance mais l'oppose à M. Y... devant le tribunal mixte de commerce de Pointe-à-Pitre, très subsidiairement de débouter M. Y... de toutes ses demandes à son encontre, et de le condamner en réformant sur ce seul point le jugement à lui payer 10. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Il est renvoyé aux écritures des parties pour l'exposé exhaustif de leurs moyens de fait et de droit.
Les appels ont fait l'objet de quatre dossiers distincts (no 05 / 99, 05 / 128, 05 / 147, 06 / 1788 (ancien 05 / 517). Par ordonnance du 26 août 1999, le conseiller de la mise en état a décidé de joindre les trois derniers au premier.
SUR CE
Attendu que dans ses dernières conclusions devant la cour M. X... indique ne plus prétendre, si, comme c'est le cas, les relevés de compte produits démontrent le contraire, que la contre-passation du crédit d'escompte de 648. 000 F créditée deux fois et débitée une fois l'a été avec les frais d'escompte indûment facturés ni que la demande de la BDAF soit irrecevable faute de déclaration de créance au passif de M. Y... dès lors que ce dernier, partie personnellement à la présente instance, n'a pas fait l'objet d'une procédure collective personnelle ;
Attendu qu'en revanche M. X... persiste à soutenir que la BDAF ne peut exercer de recours cambiaire puisqu'elle ne justifie pas avoir respecté les dispositions des articles L 511-39 et L 511-49 et suivants du Code de commerce ; qu'un tel moyen ne peut cependant être retenu, la BDAF fondant son action essentiellement sur la convention d'escompte ; que la banque dispose à l'encontre de M. X... d'un recours cambiaire fondé sur la lettre de change, et surtout d'un recours non cambiaire fondé sur le contrat d'escompte non soumis à l'article 511-12 du Code de commerce dont se prévaut également mais en vain M. X... ; que le mécanisme institué par ce texte suppose que le débiteur cambiaire actionné par le porteur puisse se prévaloir d'une exception personnelle issue de ses relations avec le tireur ou un porteur antérieur, alors qu'en l'espèce M. X... n'entend opposer aucune exception autre que celles issues de son rapport personnel avec la BDAF ;
Attendu que M. X... estime que la responsabilité de la banque à son égard est par ailleurs engagée ; qu'il soutient que les dirigeants de la BDAF étaient informés des difficultés financières du groupe Y..., auquel ont été apportés de nombreux concours et qui a été soutenu artificiellement par la banque ; qu'il s'appuie sur un rapport d'enquête interne du 14 avril 1998 ; que cependant ce rapport rédigé plus d'un an après l'opération d'escompte réalisée par l'appelant et ne mentionnant nullement les effets émis par M. X... et tirés sur M. Y... ne concerne nullement le cas d'espèce ; que rien n'interdisait à M. X... de réclamer à M. Y... directement le paiement comptant des travaux que ce dernier venait de réaliser, sur son compte, et que c'est lui-même qui en toute connaissance de cause lui a accordé des délais de paiement sur 24 mois, en acceptant de sa part un règlement en 24 lettres de change échelonnées entre le 30 avril 1997 et le 30 mars 1999 ; qu'il a par la suite mis les effets à la banque, qui a accepté de les escompter en lui versant immédiatement le montant nominal des effets ; que certains d'entre eux n'ont pas été honorés par le tiré ; qu'en réclamant à M. X... le remboursement du crédit qui lui a été consenti, la banque n'a commis aucune faute ; qu'au surplus, si les effets n'avaient pas été escomptés auprès de la banque et avaient été présentés à leur échéance, ils auraient été rejetés faute de paiement par M. Y... ; que, pas plus que la preuve d'une faute, M. X... ne rapporte celle d'un préjudice ; qu'il sera débouté de ses demandes contre la BDAF ;
Attendu que M. Y..., étant débiteur de M. X... au titre des travaux effectués, devra garantir ce dernier de la condamnation prononcée au titre des huit lettres de changes impayées ; que d'autre part il résulte des pièces produites que le débit du compte bancaire ouvert par M. X... dans les livres de la BDAF résulte de la contre-passation des effets impayés par M. Y... et des intérêts et commissions en découlant ; que M. Y... devra garantir de M. X..., auquel ne peut être opposée la transaction no 2 passée entre la BDAF et M. Y..., la totalité des condamnations prononcées à son encontre ; que la demande de dommages intérêts supplémentaires formée par M. X... contre M. Y... n'est en revanche pas justifiée ;
Attendu que les premiers juges ont à juste titre retenu que M. Y... n'expliquait ni en droit ni en fait le fondement de son action contre le Crédit Lyonnais pour réclamer une garantie sur le paiement d'effets de commerce auxquels cette banque est étrangère, n'ayant jamais été en relation contractuelle avec lui ni son groupe, de sorte que dans son assignation, pas plus d'ailleurs que dans ses conclusions postérieures, il ne lui avait permis d'organiser sa défense ; qu'ils ont à juste titre annulé l'assignation ; qu'au surplus il ne résulte en rien des longues tentatives d'explications proposées par M. Y... dans ses conclusions d'appel, ni des pièces produites devant la cour, que le Crédit Lyonnais ait, ainsi qu'il le prétend, commis des fautes en lien avec le présent litige qui, consisteraient en des faits d'ingérence fautive suivis de brusques ruptures qui auraient empêché M. Y... de payer ses traites ; que faute par lui de rapporter la preuve de comportements fautifs et même d'un préjudice lié à ces comportements M. Y... doit être débouté de l'ensemble de ses demandes comme le demande le Crédit Lyonnais à titre subsidiaire ;
Attendu que la décision entreprise, qui a par ailleurs fait une juste application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au profit de la BDAF et de M. X..., sera confirmée, sauf en ce qu'elle a rejeté la demande du Crédit Lyonnais sur le fondement de ce texte, alors que celui-ci, bien que cité irrégulièrement, avait été contraint de se défendre et par suite d'exposer lui aussi des frais irrépétibles qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge ;
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;
DECLARE M. X... et M. Y... recevables mais mal fondés en leurs appels ; les en déboute ;
CONFIRME la décision entreprise, sauf en ce qu'elle a débouté le Crédit Lyonnais de sa demande au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
CONDAMNE, sur le fondement de ce texte :
- M. X... à payer à la BDAF la somme complémentaire de 1. 700 € ;
- M. Y... à payer à M. X... la somme complémentaire de 1. 700 € ;
- M. Y... à payer au Crédit Lyonnais la somme de 2. 200 € ;
REJETTE comme irrecevable ou mal fondée toute autre demande des parties ;
CONDAMNE solidairement MM. Y... et X... aux dépens d'appel dont distraction au profit de Me WERTER.
Et ont signé le présent arrêt
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,