COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
1ère CHAMBRE CIVILE
ARRÊT N° 735 DU 21 SEPTEMBRE 2009
R.G : 07/00647
Décision déférée à la Cour : Jugement du tribunal de grande instance de BASSE TERRE, décision attaquée en date du 26 avril 2007, enregistrée sous le n° 04/785
APPELANT :
Monsieur [C] [U]
C/o M. [G] [U] - [J] -
[Adresse 13]
[Localité 12]
Représenté par la SELARL BICHARA-JABOUR (TOQUE 14), avocat au barreau de GUADELOUPE
INTIMES :
Monsieur [X] [Z]
[Adresse 11]
[Localité 12]
Représenté par Me Harry Jawad DURIMEL (TOQUE 56), avocat au barreau de GUADELOUPE
Madame [S] [A]
[Adresse 14] -
[Adresse 14]
[Localité 6]
Représentée par Me Félix COTELLON (TOQUE 35), avocat au barreau de GUADELOUPE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 779 alinéa 3 du nouveau code de procédure civile, le conseiller de la mise en état à la demande des parties, a autorisé les avocats à déposer leur dossier au greffe de la chambre civile avant le 15 juin 2009.
Par avis du 15 juin 2009, le président a informé les parties que l'affaire était mise en délibéré devant la chambre civile de la cour composée de:
M. Jean-Luc POISOT, président de chambre, rapporteur,
Mme Marie-Hélène CABANNES, conseillère,
Mme Claire PRIGENT, conseillère,
Et que l'arrêt sera rendu par sa mise à disposition au greffe de la cour le 21 septembre 2009.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées.
Signé par M. Jean-Luc POISOT, président de chambre, et par Mme Murielle LOYSON, adjointe administrative faisant fonction de greffière serment préalablement prêté, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
Par acte notarié du 29 octobre 1923, publié à la conservation des hypothèques le 12 novembre 1923, Mme [F] [R] a vendu à M. [I] [U] un terrain d'une superficie de 30 ares situé sur le territoire de la commune de [Localité 12].
Après avoir fait dresser par un notaire les 9 et 15 juillet 1980 un acte de notoriété à la suite du décès de sa mère, [F] [R], et une attestation de propriété constatant la transmission des biens immobiliers dépendant de la succession de celle-ci, M. [R] a procédé à la vente de différentes parcelles provenant de cette succession soit directement à des particuliers, soit sous la forme de lots dans le cadre d'une opération de lotissement.
Dans le cadre de ces ventes, Mme [S] [A] a acquis la parcelle cadastrée AE [Cadastre 1] par acte notarié des 9 et 15 juillet 1980, Mme [Y] [K] le lot n° 5 cadastré AE [Cadastre 4] le 12 juin 1984, Mme [L] [T] le lot n° 6 cadastré AE [Cadastre 5] le 11 mai 1984 et M. [X] [Z] les lots n° 3 et 4 cadastrés AE [Cadastre 2] et AE [Cadastre 3] les 30 mars et 26 avril 1984.
M. [G] [U], qui a recueilli dans la succession de son père des droits indivis de propriété sur le terrain vendu par Mme [F] [R] le 29 octobre 1923, a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Basse-Terre, dans le cadre d'une action en revendication des parcelles cadastrées AE [Cadastre 4] et AE [Cadastre 5], M. [O] [R], Mme [S] [A], Mme [Y] [K], Mme [L] [T] et M. [X] [Z].
Par jugement en date du 24 septembre 1992, le tribunal de grande instance de BASSE TERRE a débouté Monsieur [G] [U] de son action en revendication et sa demande d'expulsion.
La cour d'appel de Basse-Terre a confirmé ce jugement en toutes ses dispositions par un arrêt en date du 30 mai 1994.
Par arrêt en date du 3 avril 1997, la Cour de Cassation a cassé et annulé l'arrêt prononcé par la cour d'appel de Basse-Terre et a renvoyé la cause et les parties devant ladite cour d'appel autrement composée.
Par un arrêt du 21 février 2001, la cour d'appel a notamment :
- infirmé le jugement du 24 septembre 1992 en ce qu'il a débouté M. [G] [U] de son action en revendication et de sa demande d'expulsion,
- mis hors de cause M. [S] [A] et M. [X] [Z] ;
- déclaré fondée l'action en revendication de M. [G] [U] en ce qu'elle concerne les parcelles AE [Cadastre 4] et AE [Cadastre 5] situées sur la commune de [Localité 12] ;
- ordonné l'expulsion de Mme [Y] [K] et de tous occupants de son chef de la parcelle AE [Cadastre 4] et l'expulsion de Mme [L] [T] et de tous occupants de son chef de la parcelle AE [Cadastre 5].
Par un arrêt du 17 décembre 2002, la Cour de cassation a rejeté les pourvois en cassation contre l'arrêt rendu le 21 février 2001 par la cour d'appel de Basse-Terre ;
M. [C] [V] [U], qui a également recueilli dans la succession de son père des droits indivis de propriété sur le terrain vendu par [F] [R] le 29 octobre 1923, a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Basse-Terre Mme [S] [W] [A] et M. [X] [Z] par actes d'huissier en date des 29 juillet et 17 août 2004, en demandant, aux termes de ses conclusions récapitulatives, à cette juridiction de :
- constater que les parcelles de Madame [A] (AE [Cadastre 1]) et de M. [Z] (AE [Cadastre 2]-[Cadastre 3]) sont issues de la parcelle globale initialement référencée [Cadastre 9] et dont M. [I] [U] en est devenu le propriétaire en 1923, les références AE [Cadastre 4]-[Cadastre 5], AE [Cadastre 1], [Cadastre 2] et [Cadastre 3] n'en étant que des 'sous-divisions administratives» ;
- ordonner l'expulsion de Mme [A] et de M. [Z] des parcelles AE [Cadastre 1], AE [Cadastre 2]-[Cadastre 3], ainsi que celle de tous occupants de leur chef dans le mois de la signification à intervenir ;
- assortir cette expulsion d'une astreinte journalière de 500 € à l'issue du mois de la signification ;
- condamner chacune des parties à lui verser la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
- ordonner l'exécution provisoire du présent jugement.
Par jugement du 26 avril 2007, le tribunal de grande instance a :
- déclaré irrecevable la demande présentée par M. [C] [V] [U] en application des dispositions de l'article 122 du nouveau code de procédure civile
- condamné M. [C] [V] [U] à payer la somme de 2.000 € d'une part à M. [Z] et d'autre part à Mme [A] au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile
- débouté M. [Z] de sa demande en paiement de la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts
- condamné M. [C] [V] [U] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Durimel, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
M. [C] [V] [U] a interjeté appel de cette décision par déclaration enregistrée au greffe de la cour d'appel le 7 mai 2007.
Par conclusions du 18 décembre 2007, M. [C] [V] [U] demande à la cour de :
- débouter M. [X] [Z] de son exception de nullité
- dire recevable son appel
- au fond, le dire bien fondé;
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau :
- vu les articles 30 et 31 du nouveau code de procédure civile,
- vu l'article 815-2 du code civil,
- dire recevable l'action en revendication de M. [U] [C]
- dire et juger qu'il a bien intérêt à agir en la présente instance
- constater que les parcelles de Mme [A] [S] (AE [Cadastre 1]) et de M. [Z] [X] (AE [Cadastre 2] -[Cadastre 3]) sont issues de la parcelle globale initialement référencée [Cadastre 9], dont M. [U] [I] en est devenu le propriétaire en 1923, les références AE [Cadastre 4] - [Cadastre 5], AE [Cadastre 1], [Cadastre 2] et [Cadastre 3] n'en étant que des 'sous-divisions administratives'.
- recevoir en conséquence, l'action en revendication formée par M. [C] [U] à l'encontre de Mme [A] [S] et de M. [Z] [X], occupants desdites parcelles alors que M. [U] en est le seul et légitime propriétaire.
- en conséquence,
- ordonner l'expulsion de Mme [A] [S] et de M. [Z] [X], des parcelles AE [Cadastre 1], AE [Cadastre 2]-[Cadastre 3], ainsi que celle de tous occupants de leur chef dans le mois de la signification à intervenir
- assortir cette expulsion d'une astreinte journalière de 500.00 € à l'issue du mois de la signification
- condamner chacune des parties requises à verser à M. [U] [C] au titre des frais irrépétibles de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 3000 €
- condamner les mêmes aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de la Selarl Bichara Jabour.
Par conclusions du 31 mars 2008, M. [Z] demande à la cour
de :
- in limine litis
- déclarer nulle et non avenue la déclaration d'appel de M. [C] [U] enregistrée au greffe de la cour, le 7 mai 2007
- subsidiairement
- confirmer le jugement en date du 26 Avril 2007 en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action engagée contre M. [X] [Z] par M. [C] [V] [U].
- à titre infiniment subsidiaire,
- débouter M. [C] [V] [U] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.
- en tout état de cause et à titre reconventionnel
- déclarer recevable et bien fondée la demande reconventionnelle de M. [X] [Z].
- dire et juger abusive la procédure diligentée par M. [C] [V] [U]
- et en conséquence
- condamner M.[C] [V] [U] à payer à M.[X] [Z] la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile.
- plus subsidiairement,
- dire et juger que M. [X] [Z] est bien fondé à se prévaloir des dispositions de l'article 555 du code civil.
- ordonner une expertise de la maison appartenant à M. [X] [Z] afin d'en déterminer la valeur.
- condamner M. [C] [V] [U] à payer à M. [X] [Z] la somme de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens dont distraction au profit de Me Harry J. Durimel, conformément à l'article 699 du même code.
Par conclusions du 23 octobre 2008, Mme [A] demande à la cour de confirmer le jugement frappé d'appel et de condamner l'appelant au paiement d'une indemnité de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour entend se référer à leurs conclusions régulièrement déposées après avoir été échangées.
MOTIFS :
Sur l'exception d'irrecevabilité de l'appel :
Attendu que l'exception d'irrecevabilité de l'appel, tirée de la mention inexacte dans la déclaration d'appel de l'adresse de l'appelant, sera rejetée dès lors que l'adresse actuelle de M. [C] [U] a été précisée en cours d'instance et que l'irrégularité invoquée a disparu ;
Sur l'action en revendication exercée par M. [C] [V] [U] en qualité de coïndivisaire :
Attendu que si l'action en revendication engagée initialement par M. [G] [U] par assignations délivrées les 5 et 25 juillet 1990 et 22 octobre 1990 à M. [Z], Mme [T] , M. [R], Mme [A] et Mme [K] visait seulement à faire 'constater que les héritiers de M. [I] [U], acquéreur originaire, sont seuls titulaires du droit de propriété sur la parcelle de 30 ares s'étendant sur les parcelles AE [Cadastre 4] et AE [Cadastre 5]", cette revendication a été étendue en cours de procédure aux parcelles AE [Cadastre 2] et AE [Cadastre 3] acquises par M. [Z] et AE [Cadastre 1] acquise par Mme [A], qui avaient été assignés en même temps que Mme [K] et Mme [T], acquéreurs respectifs des parcelles AE [Cadastre 4] et A [Cadastre 3] ;
Attendu qu'après avoir arbitré entre les droits de propriété revendiqués par M. [G] [U], agissant en qualité de coïndivisaire de la succession [I] [U], et ceux des époux [A] les premiers juges énoncent, dans leur décision du 24 septembre 1992, 'qu'il convient de dire que les époux [A] sont seuls propriétaires de la parcelle AE [Cadastre 1] et de débouter M. [U] de l'action en revendication et expulsion dirigée contre eux' (page 9) ;
Que, statuant également à l'égard des acquéreurs de lots, après avoir analysé leur prétentions respectives et les éléments de preuve invoqués, ils ajoutent 'qu'il convient de juger que Mme [K] est seule propriétaire du lot 5, cadastré [Cadastre 7] et AE [Cadastre 4] et Mme [T] seule propriétaire du lot n° 6, cadastré AE [Cadastre 5], et M. [Z] est propriétaire des lots 3 et 4 cadastrés AE [Cadastre 2] et AE [Cadastre 3] et de débouter M. [U] [G] de ses actions en expulsion à leur encontre',
Qu'en concordance avec les énonciations ci-dessus rapportées, le jugement, dans son dispositif, 'déboute M. [U] de son action en revendication et expulsion contre M. [R] [O] [H], Mme [K], Mme [T], Mme [A] et M. [Z]' ;
Attendu que l'arrêt du 30 mai 1994 ayant confirmé le jugement en toutes ses dispositions, M. [U] a alors formé un pourvoi en cassation faisant grief à cet arrêt, dans les deux moyens de cassation soulevés, de l'avoir débouté 'de son action en revendication et de sa demande d'expulsion, diligentée à l'encontre de M. [R], de Mme [K], de Mme [T], de M. [Z] et de Mme [A] relatives aux parcelles de terres cadastrées [Cadastre 8] dans la commune de [Localité 12] (Guadeloupe) acquises par l'auteur de M. [U] [F] [R] par acte notarié du 29 octobre 1923 et publié à la conservation des hypothèques le 12 novembre 1923" ;
Attendu que, statuant dans les limites des moyens de cassation qui ne critiquaient pas le rejet de l'action en revendication visant les parcelles AE [Cadastre 1], AE [Cadastre 2] et [Cadastre 3], l'arrêt rendu le 3 avril 1997 par la troisième chambre civile de la Cour de cassation a cassé l'arrêt du 30 mai 1994 'mais seulement ce qu'il a débouté M. [U] ([G]) de son action en revendication et de sa demande d'expulsion dirigée à l'encontre de M. [R], Mmes [K], [T], M. [Z] et Mme [A], concernant la parcelle cadastrée [Cadastre 8] dans la commune de [Localité 12] et condamné M. [R] à garantir M. [U]' ;
Que, dès lors que la cassation était ciblée sur le rejet de l'action en revendication des parcelles AE [Cadastre 4]-[Cadastre 5] et des demandes qui s'y rattachent, c'est à juste titre qu'appelée à statuer à nouveau, la présente cour, désignée comme cour de renvoi, a, par arrêt du 21 février 2001, statué à l'égard des propriétaires de ces deux parcelles et mis hors de cause Mme [A] et M. [Z] qui n'en sont pas propriétaires ;
Que cette décision du 21 février 2001 est devenue irrévocable à la suite du rejet des pourvois de Mme [K] et Mme [T] par l'arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation du 17 décembre 2002 et du désistement du pourvoi (n° E 01-14.751) de M. [U] dirigé contre Mme [T], Mme [K] et le receveur des impôts de [Localité 10] ;
Attendu que s'agissant, devant la cour de renvoi, d'une action en revendication concernant les seules parcelles AE [Cadastre 4] et AE [Cadastre 5], il ne peut être tiré de la mise hors de cause de Mme [A] et de M. [Z] une fin de non recevoir fondée sur la chose jugée qui ferait obstacle à une action visant les parcelles dont ils sont les propriétaires ;
Qu'à défaut pour M. [G] [U] d'avoir dirigé son pourvoi contre les chefs de l'arrêt 30 mai 1994 ayant rejeté son action en revendication des parcelles AE [Cadastre 2] et [Cadastre 3] de M. [Z] et AE [Cadastre 1] de Mme [A], le rejet de cette action et des demandes afférentes par le jugement du 24 septembre 1992, qui a été confirmé par des dispositions de cet arrêt non frappées de pourvoi, est devenu irrévocable ;
Que ce rejet est opposable à M. [C] [V] [U] dès lors que celui-ci, en qualité de cohéritier, était engagé, en vertu d'un mandat tacite, par l'action en revendication exercée pour le compte de l'indivision par M. [G] [U] et qu'il résulte de la chose jugée sur ce point par l'arrêt du 30 mai 1994 que les droits des coïndivisaires à revendiquer les parcelles de Mme [A] et de M. [Z] ont été épuisés par l'exercice de cette action et que les prétentions identiques de M. [C] [V] [U] sont dès lors irrecevables ;
Qu'enfin il convient de relever que son action en justice ne revêt pas de caractère abusif et n'a créé aucun préjudice ouvrant droit à réparation,
PAR CES MOTIFS,
La Cour,
Déclare recevable l'appel interjeté par M. [C] [V] [U]
Confirme en toutes ses dispositions le jugement du 26 avril 2007
Et y ajoutant,
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. [C] [V] [U] et le condamne à payer à Mme [A] une somme de 2 000 € et à M. [Z] une somme de 2 000 €
Condamne M. [C] [U] aux dépens avec distraction au profit de Me Durimel en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Et ont signé le présent arrêt.
La greffière, Le président.