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30/08/2024 | FRANCE | N°23/00068

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 2ème chambre, 30 août 2024, 23/00068


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE



2ème CHAMBRE CIVILE



ARRET N° 452 DU 30 AOUT 2024





N° RG 23/00068 - N° Portalis DBV7-V-B7H-DQ46



Décision déférée à la cour : jugement du juge chargé des contentieux de la protection du tribunal de proximité de SAINT-MARTIN/SAINT-BARTHELEMY en date du 9 décembre 2022, dans une instance enregistrée sous le n° 22/00077.



APPELANT :



Monsieur [E] [B]

[Adresse 2]

[Localité 1]



Représenté par Me Emmanuelle DESAILLOUD, de la SAS ED CONS

EILS SBH, avocate au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTHELEMY (TOQUE 89)





INTIME :



Monsieur [O] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 1]



Non représenté





COMP...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

2ème CHAMBRE CIVILE

ARRET N° 452 DU 30 AOUT 2024

N° RG 23/00068 - N° Portalis DBV7-V-B7H-DQ46

Décision déférée à la cour : jugement du juge chargé des contentieux de la protection du tribunal de proximité de SAINT-MARTIN/SAINT-BARTHELEMY en date du 9 décembre 2022, dans une instance enregistrée sous le n° 22/00077.

APPELANT :

Monsieur [E] [B]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Me Emmanuelle DESAILLOUD, de la SAS ED CONSEILS SBH, avocate au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTHELEMY (TOQUE 89)

INTIME :

Monsieur [O] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Non représenté

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 février 2024, en audience publique, devant M. Frank ROBAIL, président, chargé du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposé.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Frank ROBAIL, président,

Mme Annabelle CLEDAT, conseillère,

M.Thomas Habu GROUD, conseiller.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 7 juin 2024. Elles ont ensuite été informées de la prorogation de ce délibéré, in fine, à ce jour.

GREFFIER :

Lors des débats : Mme Valérie SOURIANT, greffière principale.

Lors du prononcé : Mme Yolande MODESTE, greffière.

ARRÊT :

- prononcé par défaut et publiquement, par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC.

- signé par M. Frank ROBAIL, président et par Mme Yolande MODESTE, greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* *

FAITS ET PROCEDURE

Par acte sous seing privé en date du 1er mai 2015, M. [E] [B], bailleur, a conclu un contrat de bail d'habitation meublé avec M. [O] [Z] ayant pour objet un appartement situé [Adresse 2] à Saint-Barthélemy, moyennant un loyer mensuel hors charge de 1650 euros.

Le bail s'est poursuivi par tacite reconduction.

Par acte d'huissier délivré le 31 mars 2022, M. [B] a fait assigner M. [Z] à comparaître devant le juge chargé des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Saint-Martin et Saint-Barthélemy siégeant en audience foraine à Saint-Barthélemy, aux fins de voir, au visa de l'article 1224 du code civil :

- prononcer aux torts exclusifs de M. [Z], la résolution judiciaire du bail du 1er mai 2015 pour défaut de paiement des loyers et charges,

- ordonner son expulsion des lieux loués,

- condamner M. [Z] à lui payer les sommes suivantes :

* 7 080 euros au titre d'arriérés de loyers, sauf à parfaire,

* 107 euros au titre des arriérés de charges, sauf à parfaire,

* 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

En réplique, M. [Z] a demandé au juge chargé des contentieux de la protection de :

A titre principal,

- déclarer M. [B] irrecevable en son action, faute de justifier de sa qualité à agir,

- déclarer irrecevable la demande en résolution du bail pour violation des dispositions du paragraphe 3 de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989,

- dire que M. [B] était défaillant dans l'administration de la preuve tirée du moyen de la déspécialisation du bail,

- débouter M. [B] de sa demande de résolution judiciaire fondée sur la déspécialisation du bail,

- dire que M. [B] manquait à son obligation de délivrance d'un logement décent et à son obligation de lui assurer la jouissance paisible des lieux,

- dire qu'il était bien fondé à opposer les dispositions de l'article 1219 du code civil qui l'autorisent à refuser d'exécuter son obligation de payer les loyers selon les termes convenus,

- ordonner l'exécution du contrat à charge pour le bailleur de remédier aux désordres suivants :

*remise en état de la salle de bain,

*remise en état des prises électriques et téléphoniques dans la partie chambre,

*remise en état de la cuisine (électricité rebouchage saignée de la hotte et peinture etc')

*changer les baies vitrées de l'entrée,

*remise en état du local technique et remplacement du sèche-linge,

*changer le store extérieur,

*refaire le deck entrée terrasse,

*traitement des termites,

*réfection des peintures extérieures,

*remise aux normes des écoulements des eaux usées,

*modifier l'écoulement pluvial de la villa,

-fixer le montant du loyer à 70 % de son montant depuis 2017 jusqu'à la réalisation des travaux et ordonner la compensation de cette réduction avec le montant des loyers non payés par le locataire jusqu'à extinction de la dette locative,

- condamner M. [B] à lui rembourser la somme provisionnelle de 1.890 € au titre des dépenses avancées et incombant au propriétaire, représentant :

* les frais d'installation de la porte coulissante, soit 640 euros

* l'achat d'une bâche, soit 1250 euros

- débouter le demandeur de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

A titre subsidiaire,

- dire que les faits qui lui étaient reprochés ne présentaient pas les critères de gravité suffisants pour prononcer la résolution judiciaire du contrat de bail,

- dire qu'il pourrait s'acquitter de l'arriéré locatif sur une période de 6 mois en plus du règlement des loyers en cours,

- condamner M. [B] à lui verser une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.

Par ses dernières conclusions, M. [B] a demandé que M. [Z] soit débouté de ses demandes et a réitéré ses prétentions en actualisant sa créance comme suit :

- 15 930 euros au titre des arriérés de loyers,

- 113,46 euros au titre des arriérés de charges.

Il a également sollicité la condamnation de M. [Z] à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Par jugement du 9 décembre 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Saint-Martin et Saint-Barthélemy a :

- déclaré irrecevable la demande en résiliation du bail présentée par M. [E] [B] à l'encontre de M. [O] [Z], pour défaut de respect des formalités afférentes à la notification au représentant de l'Etat dans la collectivité territoriale ;

- condamné M. [O] [Z] à verser à M. [E] [B], la somme de 15.930 euros au titre des arriérés de loyers au mois de septembre 2022 ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

- condamné M. [O] [Z] à verser à M. [E] [B] une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de la procédure.

M. [B] a interjeté appel de cette décision par déclaration remise au greffe de la cour par voie électronique le 13 janvier 2023, en limitant son appel aux chefs de jugement par lesquels le juge des contentieux de la protection a:

- déclaré irrecevable la demande en résiliation du bail présentée par M. [E] [B] à l'encontre de M. [O] [Z], pour défaut de respect des formalités afférentes à la notification au représentant de l'Etat dans la collectivité territoriale ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes.

La procédure a fait l'objet d'une orientation à la mise en état.

En réponse à l'avis donné par le greffe le 19 avril 2023, M. [B] a fait signifier, le 21 avril 2023, sa déclaration d'appel, ledit avis et ses conclusions d'appelant à M. [Z]. Cette signification a été faite par dépôt à l'étude du commissaire de justice.

M. [Z] n'a pas constitué avocat, de sorte que la présente décision sera rendue par défaut.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 2 octobre 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience du 26 février 2024, à l'issue de laquelle la décision a été mise en délibéré au 7 juin 2024 ; les parties ont ensuite été avisées de la prorogation de ce délibéré à ce jour, par mise à disposition au greffe, en raison de l'absence d'un greffier et de la surcharge des magistrats.

PRETENTIONS ET MOYENS

M. [E] [B], appelant :

Vu les dernières conclusions remises au greffe par la voie électronique le 30 juin 2023 par lesquelles M. [B] demande à la cour de :

- réformer pour partie la décision déférée,

- déclarer recevable sa demande en résiliation de bail,

- condamner M. [O] [Z] à lui payer :

* 14 160 euros d'arriéré de loyers et charges venant en sus de la somme de 15 930 euros pour laquelle il avait déjà été condamné, et à laquelle il conviendrait d'ajouter les charges mensuelles impayées s'élevant à ce jour à la somme de 250 euros en sus de la somme de 113 46 euros pour laquelle il avait déjà été condamné.

* une somme de 4 000 euros au titre du remboursement des frais de 1ère instance, non compris dans les dépens,

* une somme de 4 000 euros au titre des frais d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile

- Le condamner aux entiers dépens d'appel.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux dernières conclusions pour un exposé détaillé des prétentions et moyens.

MOTIFS DE L'ARRET

A titre liminaire, il convient de rappeler qu'il résulte de l'article 472 du code de procédure civile que si, en appel, l'intimé ne comparaît pas et qu'il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés.

Sur la recevabilité de l'appel

Il ne résulte d'aucun des éléments du dossier que l'appel formé à l'encontre du jugement déféré ne l'aurait pas été dans les délais de la loi.

Il sera donc jugé à cet égard recevable.

Sur la recevabilité de la demande de résiliation du bail

En vertu des lois organiques 2007-223 et 2007-224 du 21 février 2007, à effet du 15 juillet 2007 (article 18 VII de la loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007), la collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy a compétence exclusive en matière de logement.

L'article LO6214-3, I, 2° du code général des collectivités territoriales dispose que cette collectivité fixe les règles applicables dans les matières suivantes : 'Urbanisme; construction ; habitation ; logement'.

L'article LO6213-1 du même code précise que les dispositions législatives et réglementaires sont applicables de plein droit à Saint-Barthélemy, à l'exception de celles intervenant dans les matières qui relèvent de la loi organique en application de l'article 74 de la Constitution ou de la compétence de la collectivité en application de l'article LO 6214-3.

L'exclusion de plein droit des matières relevant de loi organique entraîne que les lois adoptées par le Parlement français en matière de baux d'habitation et promulguées après le 15 juillet 2007, ne sont pas de plein droit applicables à Saint-Barthélemy.

Or, depuis la création de cette collectivité territoriale, celle-ci n'a pris aucune législation ou réglementation relative aux baux d'habitation, de sorte que seules les dispositions en vigueur dans les départements français avant le 15 juillet 2007 s'appliquent dans cette collectivité aux baux de logements meublés.

En l'espèce, pour déclarer irrecevable la demande de résiliation judiciaire présentée par M. [B], le premier juge a retenu que le bailleur ne justifiait pas de la notification au représentant de l'Etat dans la collectivité prescrite par l'article 24-III de la loi du 6 juillet 1989.

Cependant, comme le fait justement valoir l'appelant, l'article 24-III de la loi du 6 juillet 1989 est issu de l'article 6 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014, dite loi ALUR, lequel, postérieur au 15 juillet 2007, est inapplicable au bail meublé litigieux.

C'est donc en vertu d'une disposition inapplicable à Saint-Barthélemy que le premier juge a déclaré irrecevable la demande de l'appelant.

Par conséquent, le jugement entrepris sera infirmé de ce chef et M. [B] déclaré recevable en sa demande de résiliation.

Sur la résiliation du bail

Aux termes de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif.

En l'espèce, la demande de résiliation qui avait été présente en première instance était recevable. Mais cette demande ne figure pas au « dispositif » des conclusions de l'appelant.

La cour ne peut dès lors que constater qu'elle n'a été saisie d'aucune prétention au titre de la résiliation du bail litigieux.

Sur la demande de condamnation au paiement des loyers impayés

En vertu de l'article 1728 du code civil, le preneur est tenu de deux obligations principales :

1° d'user de la chose louée raisonnablement, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d'après les circonstances, à défaut de convention ;

2° de payer le prix du bail aux termes convenus.

En l'espèce, M. [Z] qui avait comparu en première, n'avait pas contesté, selon les énonciations de la décision entreprise, les arriérés de loyers et les versements irréguliers d'où il découlait une dette locative de 15.930 euros au 12 septembre 2022.

L'appelant indique que le locataire n'acquitte plus du tout son loyer mensuel de 1 770 euros depuis octobre 2022 de sorte que l'arriéré de loyers d'octobre 2022 à mai 2023 inclus est de 14 160 euros.

Par conséquent, M. [Z] sera condamné à payer à M. [B] la somme de 14 160 euros d'arriérés de loyers pour la période d'octobre 2022 à mai 2023.

Relativement aux charges réclamées, M. [B] verse uniquement aux débats une facture d'électricité établi en son nom pour en justifier ainsi qu'un document manuscrit établi par lui-même.

Ces pièces ne permettant pas de prouver sa créance, sa demande de chef sera donc écartée.

Sur les dépens et frais irrépétibles

M. [Z], qui succombe dans ses prétentions, sera condamné aux entiers dépens de l'instance d'appel. Le jugement sera par ailleurs confirmé en ce qu'il l'a condamné aux entiers dépens de première instance.

En outre, l'équité commande de confirmer le jugement déféré du chef des frais irrépétibles de première instance mis à la charge du locataire et de condamner le même locataire à payer à M. [B] la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare recevable l'appel de M. [E] [B],

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions déférées, sauf en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande en résiliation du bail présentée par M. [E] [B] à l'encontre de M. [O] [Z],

Statuant à nouveau de ce seul chef et y ajoutant,

Déclare recevable la demande de M. [E] [B] en résiliation du bail meublé du 1er mai 2015,

Constate qu'aucune prétention n'est formée par M. [E] [B] au titre de la résiliation de ce bail,

Condamne M. [O] [Z] à payer à M. [E] [B] la somme de 14 160 euros au titre des arriérés de loyers pour la période d'octobre 2022 à mai 2023,

Déboute M. [E] [B] de sa demande au titre des charges,

Condamne M. [O] [Z] à payer à M. [E] [B] la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

Condamne M. [O] [Z] aux entiers dépens de l'instance d'appel.

Et ont signé,

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23/00068
Date de la décision : 30/08/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 07/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-08-30;23.00068 ?
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