ARRET No
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14 Février 2007
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06 / 00019
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Laurent DE X...
C /
SA HYPERMARCHE RAFFALLI
----------------------Décision déférée à la Cour du :
16 décembre 2004
Conseil de Prud'hommes de BASTIA
03 / 00180
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CD
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU : QUATORZE FEVRIER DEUX MILLE SEPT
APPELANT :
Monsieur Laurent DE X...
...
84110 ROAIX
Représenté par Me Paul-Laurent FILIPPI, avocat au barreau de BASTIA
INTIMEE :
SA HYPERMARCHE RAFFALLI, prise en la personne de son représentant légal,
20213 FOLELLI
Représentée par la SCP TOMASI-SANTINI-VACAREZZA-BRONZINI DE CARAFFA, avocats au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :
L'affaire a été débattue le 12 Décembre 2006 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur MUCCHIELLI, Président de Chambre
Monsieur HUYETTE, Conseiller,
Mme DEZANDRE, Conseiller
qui en ont délibéré.
GREFFIER :
Monsieur DALESSIO, lors des débats.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 14 Février 2007
ARRET Nopage 2
ARRET
Contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe.
Signé par Monsieur MUCCHIELLI, Président de Chambre et par Monsieur DALESSIO, greffier présent lors de la mise à disposition de la décision.
***
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS
Monsieur Laurent DE X... a été embauché par la S.A HYPERMARCHE RAFFALI en qualité de manager de département, niveau VII, position cadre, selon contrat à durée indéterminée écrit du 23 février 2001.
Après convocation du 24 juin 2003 à un entretien préalable au licenciement fixé au 1er juillet, M. DE X... a été licencié pour cause réelle et sérieuse le 16 juillet 2003, l'employeur concluant une très longue lettre de licenciement en ces termes : " Je constate que l'état d'abandon manifeste du mois de juin précédé par une gestion désastreuse (financière, commerciale et humaine) de votre département durant ce premier semestre 2003 relève d'un manque évident de professionnalisme de votre part ".
M. DE X... a saisi la juridiction prud'homale le 9 septembre 2003 d'une demande en paiement de diverses sommes, et par jugement du 16 décembre 2004, le Conseil de prud'hommes de Bastia l'en a débouté.
M. DE X... a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Il demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris, constater que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, condamner la S.A HYPERMARCHE RAFFALI à lui verser à ce titre 38 418 euros, outre 8 000 euros pour rupture abusive de contrat, ainsi qu'une somme de 17 493,30 euros arrêtée au 1er octobre 2004, à parfaire jusqu'au 16 juillet 2005, en application de la clause de non-concurrence.
ARRET Nopage 3
La S.A HYPERMARCHE RAFFALI sollicite la confirmation du jugement entrepris, outre condamnation de M. DE X... à lui payer 1 500 euros au titre de l'article 700 du NCPC, en soutenant d'une part que les motifs énoncés dans la lettre de licenciement sont justifiés par les pièces qu'elle verse aux débats et constituent de réels manquements du salarié à ses obligations contractuelles, d'autre part que M. DE X..., qui a retrouvé un emploi dès le 23 octobre 2003, n'a subi aucun préjudice en liaison avec la clause contractuelle de non-concurrence, dont il n'a pas demandé d'être libéré ; elle observe qu'en toute hypothèse l'indemnité calculée à hauteur de 1 162,22 euros par mois est démesurée.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la rupture
Attendu qu'aux termes des articles L. 122-14-2 et-14-3 du Code du travail, il appartient au juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige,
Qu'il convient ainsi de rechercher si les griefs reprochés à M. DE X... se rapportent à des faits établis et suffisamment sérieux pour justifier la rupture du contrat,
Attendu, sur la mauvaise gestion des stocks, que si l'augmentation des stocks dans le département géré par M. DE X... apparaît comptablement établie, il ressort des pièces du dossier qu'elle est due à 80 % à un achat important de vins négocié à très bon prix, en vue d'une revente sur la période de l'été, opération dont il n'est pas démontré qu'elle n'a pas été profitable à l'entreprise, étant observé que la lettre du négociant en date du 20 septembre 2003 ne pouvait pas être retenue à l'appui du licenciement intervenu plus de deux mois auparavant,
Attendu que ce premier grief n'est donc pas sérieux,
Attendu, sur l'état général du département, qu'il est d'abord reproché à M. DE X... un nombre important de produits en rupture de stock dans les rayons sous sa responsabilité,
ARRET Nopage 4
Attendu cependant que le salarié verse au dossier un document intitulé " FLASH RUPTURES ", dont il ressort que le magasin connaissait à l'époque des difficultés d'approvisionnement en raison de problèmes rencontrés par ou avec ses fournisseurs, notamment sur le continent, et qu'il n'est au contraire pas établi, comme l'affirme l'employeur sans élément de fait à l'appui, que " les réserves regorgeaient à l'époque de produits absents des rayons ",
Attendu ensuite qu'il ressort de l'attestation très circonstanciée et précisément chiffrée de M.Y..., supérieur hiérarchique de M. DE X..., dont les termes ne sont pas sérieusement contredits par la S.A HYPERMARCHE RAFFALI, d'une part que l'augmentation tarifaire reprochée au salarié est directement liée à la méthode de calcul pratiquée à la demande de l'employeur, par incorporation nouvelle des coûts de transport moyens dans les prix, et d'autre part que le dernier chiffrage de la marge brute dans les différents secteurs de la responsabilité de M. DE X... fait apparaître un taux sensiblement supérieur à celui invoqué par l'employeur,
Attendu en outre qu'il n'est pas établi par les pièces du dossier que l'insuffisante progression de marge brute reprochée est due à un manquement professionnel de M. DE X...,
Que de façon plus générale, aucune faute prouvée de gestion imputable à M. DE X..., en liaison directe avec les insuffisances chiffrées relevées par l'employeur, ne ressort des éléments de fait versés à l'appui de son argumentation,
Attendu enfin, sur les manquements en matière de gestion du personnel, que M. DE X... produit des attestations de salariés sous ses ordres faisant état de ses qualités humaines, qu'il apparaît aussi que les démissions évoquées ne sont pas liées à un conflit avec lui, et que le fait de faire passer un salarié du rayon " liquide " au rayon " épicerie " au sein d'un même département est un changement dans les conditions de travail qui ne nécessite pas une modification du contrat,
Attendu que les insuffisances reprochées à M. DE X... en matière de gestion de personnel ne sont donc pas sérieuses,
Attendu qu'il ressort de cette analyse de l'ensemble des éléments soumis à appréciation que le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse,
ARRET Nopage 5
Attendu que le jugement sera donc infirmé de ce chef,
Attendu qu'à la date de la rupture du contrat de travail, M. DE X... justifiait de plus de deux ans d'ancienneté dans une société comptant au moins 11 salariés,
Attendu qu'en application de l'article L. 122-14-4 du Code du travail, il sera donc alloué à M. DE X... la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts, toutes causes confondues,
Sur la clause de non-concurrence
Attendu que l'article 11 du contrat de travail stipule une interdiction de concurrence, directe et indirecte, d'une durée de deux ans dans un rayon allant de Borgo à Ghisonaccia, assortie d'une contrepartie pécuniaire de 20 % du salaire mensuel moyen,
Attendu que l'employeur n'a pas délié M. DE X... de cette obligation dans les quinze jours de la notification de la rupture, comme il est prévu contractuellement qu'il en a la possibilité,
Attendu que la clause de non-concurrence a donc reçu application et qu'elle a été respectée par le salarié, employé depuis octobre 2003 sur le continent,
Attendu en conséquence que la contrepartie pécuniaire est due, et que le jugement sera donc infirmé sur ce point,
Attendu qu'au vu des bulletins de salaire versés au dossier, l'indemnité s'établit à 640 euros brut par mois, soit 15 360 euros brut pour la période de deux ans écoulée,
PAR CES MOTIFS
L A C O U R
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,
Infirme le jugement entrepris,
Statuant à nouveau,
ARRET Nopage 6
Condamne la S.A HYPERMARCHE RAFFALI à verser à M. DE X... Laurent :
-20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-15 360 euros brut au titre de l'indemnité de non concurrence,
Déboute M. DE X... du surplus de sa demande,
Condamne la S.A HYPERMARCHE RAFFALI à verser à M. DE X... Laurent la somme de 700 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Condamne la S.A HYPERMARCHE RAFFALI aux dépens.
LE GREFFIERLE PRESIDENT