La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/11/2010 | FRANCE | N°09/00134

France | France, Cour d'appel de Bastia, Ch. civile b, 17 novembre 2010, 09/00134


COUR D'APPEL DE BASTIA
Ch. civile B
ARRET du 17 NOVEMBRE 2010
R. G : 09/ 00134 R-PH
Décision déférée à la Cour : jugement mixte du 19 janvier 2009 Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO R. G : 07/ 845

Compagnie d'assurances GENERALI FRANCE IARD C...I...X...Association MMPF Y...

C/
C...I...X...Association MMPF CONSORTS Z... Y...

APPELANTE :
Compagnie d'assurances GENERALI FRANCE IARD prise en la personne de son représentant légal en exercice 7/ 9 Boulevard Haussmann 75456 PARIS CEDEX09

représentée par la SCP Antoine CANARELLI-Jean-Ja

cques CANARELLI, avoués à la Cour
assistée de Me Laurence BOZZI, avocat au barreau de MARSEILLE
...

COUR D'APPEL DE BASTIA
Ch. civile B
ARRET du 17 NOVEMBRE 2010
R. G : 09/ 00134 R-PH
Décision déférée à la Cour : jugement mixte du 19 janvier 2009 Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO R. G : 07/ 845

Compagnie d'assurances GENERALI FRANCE IARD C...I...X...Association MMPF Y...

C/
C...I...X...Association MMPF CONSORTS Z... Y...

APPELANTE :
Compagnie d'assurances GENERALI FRANCE IARD prise en la personne de son représentant légal en exercice 7/ 9 Boulevard Haussmann 75456 PARIS CEDEX09

représentée par la SCP Antoine CANARELLI-Jean-Jacques CANARELLI, avoués à la Cour
assistée de Me Laurence BOZZI, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMES :
Madame Emma C...épouse D...née le 08 Juin 1932 à COTI CHIAVARI (20138) ...20000 AJACCIO

représentée par la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avoués à la Cour
assistée de Me Jean-Claude RADIER, avocat au barreau de PARIS
Madame Dominique I...née le 18 Août 1958 à MARSEILLE (13000) ...20138 COTI CHIAVARI

représentée par la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avoués à la Cour
assistée de Me Jean-Claude RADIER, avocat au barreau de PARIS
Madame Danielle X......20000 AJACCIO

représentée par la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avoués à la Cour
assistée de Me Jean-Claude RADIER, avocat au barreau de PARIS
Association MMPF Association de gestion des parties communes de l'indivision de la maison située à COTI-CHIAVARI C/ Mr Gilbert I...20138 COTI CHIAVARI

Appelante provoquée
représentée par la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avoués à la Cour
assistée de Me Jean-Claude RADIER, avocat au barreau de PARIS
Monsieur Baptiste Joseph Jacques Z... Assigné en intervention forcée ...16000 ANGOULEME

défaillant
Monsieur Philippe Jean Jacques Z... ...20167 VALLE DI MEZZANA

défaillant
Mademoiselle Delphine Y...née le 18 Décembre 1970 à LIMOGES (87000) ...87430 VERNEUIL SUR VIENNE

Intervenante volontaire
représentée par la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avoués à la Cour
assistée de Me Jean-Claude RADIER, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 octobre 2010, devant Monsieur Philippe HOAREAU, Conseiller, chargé du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean BRUNET, Président de Chambre Monsieur Philippe HOAREAU, Conseiller Madame Marie-Paule ALZEARI, Conseiller

GREFFIER LORS DES DEBATS :
Madame Marie-Jeanne ORSINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 17 novembre 2010
ARRET :
Rendu par défaut,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Philippe HOAREAU, Conseiller, le président de chambre empêché, et par Madame Marie-Jeanne ORSINI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
* * Vu le jugement du tribunal de grande instance d'AJACCIO du 19 janvier 2009 qui a :

- déclaré Madame Danielle Z... épouse X...recevable en son intervention volontaire,
- déclaré l'association MMPF irrecevable à agir,
- déclaré Monsieur Jules H...irrecevable à agir,
- déclaré recevable l'action conservatoire introduite par Madame Emma C...épouse D..., Madame Dominique Z... épouse I...et Madame Danielle Z... épouse X..., en leur qualité de propriétaires indivis de l'immeuble d'habitation cadastré section B numéro 400 sur la commune de COTI CHIAVARI,
- dit que la clause stipulée au paragraphe " Ce que nous garantissons ", 1o, point 7 des conditions générales du contrat souscrit auprès de la compagnie d'assurances GENERALI, s'analyse en une clause d'exclusion de garantie,
- dit que cette clause n'est pas valable et ne saurait trouver application,
- condamné la compagnie GENERALI à garantir Monsieur Benjamin J...des conséquences pécuniaires lui incombant en raison des dommages causés à Mesdames C..., I...et Z... du fait de l'incendie survenu le 23 juin 2006,
- condamné la compagnie GENERALI à leur verser une indemnité provisionnelle de 150. 000 euros,
- ordonné avant dire droit une expertise et commis en qualité d'expert Monsieur Claude K...,
- fixé à 1. 800 euros la consignation à valoir sur la rémunération de l'expert mise à la charge de Mesdames D..., I...et X...,
- réservé les dépens.
Vu la déclaration d'appel du 12 février 2009 déposée au greffe par la compagnie GENERALI.
Vu la signification du jugement par acte d'huissier du 11 mars 2009 à l'association MMPF à la requête de la compagnie GENERALI et du 12 mars 2009 à Monsieur Jules H....
Vu les assignations délivrées les premier avril et 4 mai 2009 à la requête de la compagnie GENERALI à mesdames D..., I...et X....
Vu l'intervention volontaire et l'appel interjeté par l'association MMPF et Mademoiselle Delphine Y..., en qualité d'héritière de feu Jean H....
Vu l'assignation à la requête des intimées et de l'association MMPF délivrée par actes des 20 avril et 7 juin 2010 à Messieurs Philippe Z... et Baptiste Z..., en leur qualité de co-indivisaires, qui n'ont pas constitué avoué.
Vu l'ordonnance de jonction du 9 juin 2010.
Vu les dernières conclusions du 12 janvier 2010 de Mesdames D..., I...et X..., de l'association MMPF et de Mademoiselle Y....
Vu les dernières conclusions du 21 avril 2010 de la compagnie GENERALI France IARD.
Vu l'ordonnance de clôture du 8 septembre 2010.
*
* *
EXPOSE DU LITIGE :
Dans la nuit du 23 juin 2005 à COTI CHIAVARI un incendie s'est déclaré au premier étage d'un immeuble indivis dans la chambre occupée par Monsieur Benjamin J...qui était hébergé à titre gratuit, à la demande de son employeur, par Monsieur Philippe Z..., co-indivisaire qui avait l'usage de cet appartement.
Monsieur Benjamin J..., qui avait souscrit le 16 décembre 2004 un contrat d'assurances responsabilité civile auprès de la compagnie GENERALI, a été condamné par jugement du Tribunal correctionnel de TROYES du 24 juin 2008 pour des faits de dégradation involontaire par explosion ou incendie dû à un manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement.
Seul Monsieur Philippe Z... s'est constitué partie civile et la juridiction pénale a déclaré sa constitution recevable, dit que Monsieur Benjamin J...était responsable de son préjudice et renvoyé l'affaire à l'audience du 29 janvier 2009.
Une déclaration à la préfecture de Corse du sud intervenait le 9 décembre 2005 à l'initiative de l'association Z... MARC PASCAL FRERE (MMPF) créée le 5 décembre 2005 dont l'objet était la gestion immobilière des parties communes de la maison située à COTI-CHIAVARI.
Mesdames D...et I...ainsi que Monsieur Jules H..., en leur qualité de co-indivisaire assignaient devant le tribunal de grande instance d'AJACCIO le 19 juin 2007 la compagnie GENERALI qui refusait de garantir Monsieur J.... Madame Danielle Z... épouse X...et l'association MMPF intervenaient volontairement à l'instance.
Par jugement du 19 janvier 2009, le Tribunal d'Ajaccio déclarait irrecevables les actions de Monsieur H..., faute pour lui de justifier de sa qualité de co-indivisaire, de l'association MMPF au motif qu'elle n'a pas la qualité de propriétaire indivis. Le Tribunal analysait la clause invoquée par la compagnie GENERALI comme une clause d'exclusion non valide et non comme une clause de non-garantie. Il condamnait l'assureur de Monsieur J...à verser une provision de 150. 000 euros à Mesdames D..., I...et X...et ordonnait une expertise.
Devant la Cour, la compagnie GENERALI demande de :
- rejeter l'appel formé par Mademoiselle Y..., le déclarer irrecevable comme tardif et, en toutes hypothèses, confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action de Monsieur Jules H...dont Mademoiselle Y...n'établit pas la qualité pour agir,
- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes formées par l'association MMPF qui n'a pas la qualité de tiers lésé au sens de l'article L 124-3 du code des assurances et dont l'objet ne lui permet d'agir afin de voir réparer les dommages subis par l'immeuble,
- infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé des condamnations au profit de Mesdames D..., I...et X...alors que la demande de condamnation a été présentée au profit de l'association MMFP,
- déclarer irrecevables comme nouvelles les demandes de condamnation présentées par elles pour la première fois en cause d'appel en violation des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile et les en débouter,
- prononcer sa mise hors de cause et condamner in solidum les appelants à lui verser la somme de 5. 000 euros sur fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,
- déclarer irrecevable l'action diligentée par quatre des co-indivisaires non majoritaires qui ne peut être qualifiée de conservatoire et ce en l'absence d'un administrateur désigné par le président du tribunal de grande instance d'AJACCIO et de la production d'un mandat spécial conféré à Madame X...par l'ensemble des co-indivisaires,
- à titre plus subsidiaire, réformer le jugement en ce qu'il a retenu la garantie due au titre du contrat la liant à Monsieur J...alors que ce contrat ne garantit pas la responsabilité contractuelle de celui-ci à l'égard des copropriétaires indivis de l'immeuble,
- à titre infiniment plus subsidiaire, si l'action était déclarée fondée au plan quasi-délictuel, déclarer que la clause précisant la condition de la mise en oeuvre de la garantie accident doit produire son entier effet et entraîner la mise hors de cause de l'assureur,
- en toute hypothèse, vu les dispositions de l'article 1315 du code civil, dire que la réalité du préjudice allégué n'est pas établie, faute pour les intimées de justifier de l'absence de toute garantie d'assurance susceptible de prendre en charge la reconstruction du bien litigieux, réformer le jugement en ce qu'il a fixé l'indemnité provisionnelle à 150. 000 euros, la limiter à 100. 000 euros, confirmer en son principe la désignation d'un expert et, y ajoutant, dire que l'expert aura pour mission de chiffrer le coût des travaux de remise en état des parties communes et celui des travaux de remise en état des parties privatives, lot par lot,
- à titre infiniment plus subsidiaire encore, rejeter l'appel incident formé tant par les personnes physiques et l'association MMPF portant sur l'allocation d'une indemnité de 500. 000 euros, confirmer la somme de 150. 000 euros figurant dans le jugement entrepris et condamner tout succombant au paiement de la somme de 5. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La compagnie GENERALI entend obtenir la confirmation du jugement du 19 janvier 2009 en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action de l'association MMPF et de Monsieur Jules H.... Elle considère que Mademoiselle Y...ne prouve pas plus que Monsieur H...sa qualité de co-indivisaire et que l'absence de demande de condamnation présentée par les personnes physiques en première instance ne permettait pas à la juridiction de leur allouer une provision et rend irrecevables leurs demandes en cause d'appel.
Elle conteste l'analyse faisant de l'action visant à la prise en charge d'un sinistre par une garantie incendie une action conservatoire susceptible d'être mise en oeuvre par des co-indivisaires ne réunissant pas l'intégralité ou les deux tiers des droits détenus sur le bien indivis.
Elle invoque les dispositions des articles 815-3 et 815-6 du code civil et souligne qu'aucun indivisaire n'a été désigné comme administrateur ou séquestre. Elle se réfère à l'article L 124-3 du code des assurances et soutient que l'action directe en réparation du préjudice subi ne peut être exercée pour leur compte par des co-indivisaires qui ne justifient d'aucun mandat spécial alors que bon nombre des titulaires des lots demeurent inconnus. Elle distingue cette situation de celle dans laquelle le co-indivisaire est l'assuré et a vocation à recueillir de l'assureur, même en l'absence des autres co-indivisaires l'indemnité réparant les dommages subie par le bien.
Elle souligne que Monsieur Philippe Z... a choisi de poursuivre seul à l'encontre du seul Monsieur J...la réparation des préjudices nés de l'incendie.
Elle demande la réformation du jugement qui a retenu sa garantie en faisant valoir qu'il existait un contrat de prêt à usage ou commodat dans les relations entre l'assuré et le propriétaire de l'immeuble, que ce rapport contractuel caractérisé par l'attestation produite par l'employeur de Monsieur J...est opposable aux co-indivisaires et que dès lors seule la responsabilité contractuelle de Monsieur J...en sa qualité d'occupant est susceptible d'être recherchée, or le contrat ne garantit que la responsabilité civile aux articles 1382 à 1386 du code civil.
Elle soutient qu'en toutes hypothèses, les conditions de la garantie due par l'assureur ne sont pas remplies, que l'assuré était clairement informé de ce que le contrat de responsabilité civile familiale ne couvrait pas le risque locatif et que la clause litigieuse ne fait que rappeler la nature des garanties souscrites et ne saurait s'analyser en une clause d'exclusion de garantie. Elle critique le jugement entrepris qui a rejeté l'application de cette clause alors qu'elle était claire et lisible et que le contrat attire l'attention de l'assuré " notamment " sur le fait que le risque incendie n'est garanti qu'à la condition que le dommage prenne naissance en dehors du bâtiment occupé.
A titre infiniment subsidiaire, elle fait valoir que deux co-indivisaires, Messieurs Philippe et Baptiste Z..., étaient assurés et que la compagnie AGF leur a versé la somme de 42. 800 euros et a vocation à garantir la reconstruction du bien. Elle en conclut que la preuve du préjudice subi par les intimées n'est pas rapportée et indique que l'indemnité réclamée ne saurait en tous cas excéder la somme de 100. 000 euros en l'état des devis produits.
Les intimées et les intervenantes volontaires demandent la confirmation du jugement attaqué en ce qu'il a déclaré recevables en leur action Mesdames D..., I...et X...et désigné Monsieur K...en qualité d'expert avec mission d'évaluer les dommages, sa réformation en ce qu'il a déclaré irrecevables l'association MMPF et Monsieur Jules H..., subsidiairement recevoir l'intervention volontaire de cette association et de Mademoiselle Y...devant la Cour, déclarer la compagnie GENERALI mal fondée en son appel, la débouter de ses demandes, confirmer le jugement en ce qu'il a dit que la clause litigieuse constituait une exclusion de garantie et y ajoutant, prononcer la nullité de ladite clause.
Elles demandent également la réformation du jugement sur le quantum de la provision et, statuant à nouveau, la condamnation de la compagnie GENERALI au paiement à titre provisionnel de la somme de 500. 000 euros à Mesdames D..., I...et X...et à Mademoiselle Y..., à titre principal, à l'association MMPF à titre subsidiaire.
A titre infiniment subsidiaire, elles demandent ce versement à Madame X...en qualité d'indivisaire désignée pour recevoir les fonds, à charge pour elle de les employer à la réparation et à la reconstruction de l'immeuble, l'élargissement de la mission de l'expert à une évaluation lot par lot, outre les parties communes. En tout état de cause, elles demandent la condamnation de la compagnie GENERALI au paiement de la somme de 5. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens distraits au profit de leur avoué.
Elles produisent plusieurs actes notariés et relevés hypothécaires qui précisent les droits des indivisaires sur l'immeuble et soutiennent que les premiers juges qui ont déclaré irrecevables les demandes de l'association MMPF ont estimé que l'association avait demandé une provision au nom et pour le compte de Mesdames D..., I...et X..., prises en leur qualité d'indivisaires. Elles indiquent que les demandes comportaient également l'évaluation des préjudices personnels et que leurs actions étaient recevables, de même que leurs demandes en cause d'appel.
Elles invoquent les dispositions de l'article 815-2 alinéa premier du code civil pour soutenir que l'action, de nature conservatoire, pouvait être intentée par un seul indivisaire soucieux de la conservation du bien indivis et demandent à titre subsidiaire, en application des dispositions de l'article 815-6 du code civil, la désignation de Madame X..., aux fins de perception de la provision et de la réalisation des travaux de réparation de l'immeuble.
Elles partagent l'analyse des premiers juges qui ont considéré que la clause litigieuse était une clause d'exclusion non valable en application des dispositions de l'article L 112-4 du code des assurances. Elles indiquent que l'incendie constitue un événement garanti de manière générale par la police et que ce n'est que lorsqu'il survient dans une circonstance particulière que la garantie cesse d'être acquise, en l'occurrence en fonction de la localisation de son point de départ. Elles critiquent la rédaction de la clause qui n'attire pas l'attention du lecteur sur un aspect essentiel de la garantie et insiste sur ce qui est garanti plutôt que sur ce qui est exclu.
Elles font valoir à titre subsidiaire que même si la Cour devait rejeter la qualification de clause d'exclusion, l'interprétation de la clause devrait s'effectuer en faveur de l'assuré au motif que la liste des exclusions mentionnées au contrat ne reprend pas la situation de Monsieur J....
Elles précisent que Monsieur J...n'a vis à vis d'elles aucun lien contractuel, que Monsieur Z... a prêté à son employeur une chambre et que l'incendie est intervenu en dehors des heures de travail à l'occasion d'une activité privée sans lien avec celle de cuisinier et que la responsabilité de Monsieur J...doit être recherchée sur le fondement de sa responsabilité délictuelle qui entre dans le champ de la garantie par la compagnie GENERALI.
Elles se fondent sur un rapport du cabinet DEA expertise pour justifier le montant de la provision sollicitée à hauteur de 500. 000 euros et soutiennent que le montant versé par l'assureur de Monsieur Philippe Z... est sans lien avec le coût de réparation de l'accident et que la compagnie GENERALI ne rapporte pas la preuve de l'existence de garanties d'assurance de dommages et ne peut exiger que le tiers lésé exerce une action contre un autre débiteur éventuel.
*
* *
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur la recevabilité :
L'association MMPF a été créée postérieurement au sinistre. Elle a pour objet la gestion immobilière des parties communes qui ne se confond pas avec la conservation de l'immeuble. Elle n'a pas la qualité d'indivisaire et ne constitue pas un tiers lésé au sens de l'article L 124-3 du code des assurances. Le jugement du 19 janvier 2009 sera en conséquence confirmé en ce qu'il a dit irrecevable l'action de l'association MMPF.
Le jugement a été signifié le 12 mars 2009 à Monsieur Jules H...qui n'a pas interjeté appel. L'appel contenu dans les conclusions déposées le 12 janvier 2010 pour Mademoiselle Y...est en conséquence tardif et ne peut conduire à l'infirmation du jugement en ce qu'il concerne les demandes présentées par Monsieur Jules H....
Mademoiselle Y..., petite fille héritière de Monsieur H..., décédé le 23 octobre 2009, a cependant, si elle établit sa qualité de propriétaire indivis, la possibilité d'intervenir volontairement à l'instance. Elle a produit trois relevés de propriété relatifs à l'immeuble mentionnant le nom de Monsieur H...qui apparaît également dans la répartition cadastrale des lots de la parcelle sur laquelle est édifiée la maison familiale.
Cette qualité de propriétaire indivis n'est de plus contestée par aucun des autres indivisaires, tous représentés ou assignés devant la Cour. Le rapport établi le 22 février 2008 par Monsieur L..., chargé de proposer un récapitulatif des millièmes de copropriété, mentionne d'ailleurs les lots ayant appartenu à Monsieur H...et permet de vérifier que tous les indivisaires ont été appelés en la cause ou y sont intervenus volontairement. L'intervention volontaire de Mademoiselle Y...sera en conséquence déclarée recevable.
La recevabilité de l'intervention volontaire n'étant pas contestée, il y aura lieu de confirmer le jugement entrepris sur ce point.
Le jugement entrepris a condamné la compagnie GENERALI à verser une provision de 150. 000 euros à Mesdames D..., I...et X..., en leur qualité de propriétaires indivis de l'immeuble alors que la condamnation avait été réclamée au profit de l'association MMPF qui a été déclarée irrecevable à agir. Devant la Cour, la compagnie GENERALI soulève l'irrecevabilité des demandes de provision présentées par les personnes physiques pour la première fois en cause d'appel en violation de l'article 564 du code de procédure civile mais les demandes de provision présentées par les personnes physiques tendent aux mêmes fins que celles présentées au profit de l'association MMPF en vue d'obtenir les moyens de réparer l'immeuble et résultent de la survenance d'un fait, en l'espèce l'irrecevabilité de l'action de cette association. ces demandes sont en conséquence recevables, par application des dispositions des articles 565 et 564 du code de procédure civile.
La compagnie GENERALI soulève également l'irrecevabilité de l'action des intimées sur le fondement des articles 815-3 et 815-6 du code civil et soutient que si la mise en oeuvre d'une mesure d'expertise constitue une mesure conservatoire pouvant être demandée par un ou plusieurs co-indivisaires ne réunissant pas l'intégralité ou les deux tiers des droits indivis, il n'en est pas de même de l'action en vue d'obtenir une indemnité provisionnelle, fut-elle destinée à la remise en état du bien indivis.
L'appelante soutient que seul un administrateur désigné par le président du tribunal de grande instance d'AJACCIO est recevable à intenter une telle action et fait valoir qu'il n'est justifié d'aucun mandat spécial conféré à Madame X..., donné par l'ensemble des co-indivisaires lui donnant pouvoir de recueillir l'indemnité sollicitée mais l'action par laquelle des indivisaires réclament, pour le compte de l'indivision, une provision permettant de procéder à des travaux nécessaires à la remise en état et à la conservation du bien indivis, s'analyse comme un acte conservatoire permis par l'article 815-2 du code civil qui ne nécessite pas l'unanimité ou une majorité qualifiée des indivisaires. La lettre du maire de la commune de COTI-CHIAVARI du 4 novembre 2009 démontre d'ailleurs l'urgence à mettre fin aux désordres constatés avant un arrêté municipal de péril. Il y aura lieu en conséquence de rejeter la fin de non-recevoir tirée de la violation des articles 815-3 et 815-6 du code civil proposée par l'appelante.
Sur la garantie :
La compagnie GENERALI a opposé aux intimées un refus de garantie au motif que Monsieur J...n'était pas assuré au titre de sa responsabilité contractuelle et, qu'en matière de dommages matériels consécutifs à un incendie, la garantie n'est acquise qu'à la condition que l'événement ait pris naissance en dehors du bâtiment occupé par l'assuré.
L'appelante soutient que Monsieur J...occupait les lieux en vertu d'un prêt à usage ou commodat consenti par Monsieur Philippe Z... et que sa présence relève d'un rapport contractuel opposable aux autres co-indivisaires mais le local avait été prêté par Monsieur Z... à l'employeur de Monsieur J..., Mademoiselle M..., pour l'hébergement de son cuisinier. Au contraire, il n'existe aucun rapport contractuel entre l'occupant des lieux et un co-indivisaire. Le sinistre n'a pas pour cause une activité liée à l'emploi de Monsieur J..., mais résulte d'un accident : une cigarette allumée tombée dans une penderie alors que Monsieur J...était sous l'emprise de l'alcool. Il ne relève pas de la responsabilité contractuelle de Monsieur J...mais de sa responsabilité quasi-délictuelle et entre dans le champ du contrat d'assurance " Responsabilité civile " qu'il a souscrit.
Les parties s'opposent sur la question de la nature de la clause stipulée au paragraphe " Ce que nous garantissons ", 1o, point 7 des conditions générales du contrat. Les intimées considèrent qu'il s'agit d'une clause d'exclusion tandis que la compagnie GENERALI l'analyse comme une clause fixant les conditions de garantie.
Les conditions générales du contrat mentionnent que le risque incendie est assuré. Il est significatif que l'incendie n'apparaît pas en page 11 du contrat à la rubrique " Ce qui est exclu " mais qu'il est question en point 2 des dommages immatériels consécutifs à des dommages matériels non garantis. La clause litigieuse a pour effet de priver l'assuré du bénéfice de la garantie en considération de circonstances particulières, en l'occurrence en fonction de la localisation du point de départ de l'incendie. Elle constitue une clause d'exclusion même si l'expression " à condition que " est employée.
Cette clause apparaît après une énumération d'activités ou de dommages garantis, précédée de l'adverbe " notamment ", sans que l'attention du souscripteur soit attirée d'une quelconque façon sur l'exclusion de garantie relative aux incendies apparus dans le bâtiment occupé par lui.
Les dispositions de l'article L 112-4 du code des assurances conduisent en conséquence à considérer que cette clause n'est pas valable et la compagnie GENERALI doit garantir Monsieur J...des
conséquences dommageables de l'incendie et sera déboutée de sa demande de mise hors de cause.
Sur l'expertise :
La mesure d'instruction ordonnée par les premiers juges est nécessaire à la détermination des dommages causés par l'incendie. Il y aura lieu de confirmer la désignation de l'expert K...en complétant sa mission afin qu'il procède à l'évaluation des dommages supportés par les parties communes, après avoir pris connaissance du rapport établi par Monsieur Paul L...le 22 février 2008.
Sur la provision :
Les premiers juges ont condamné la compagnie GENERALI à verser une provision de 150. 000 euros à Mesdames D..., I...et X...en leur qualité de propriétaires indivis de l'immeuble.
Les intimées demandent devant la Cour une provision de 500. 000 euros qui, à titre principal, leur serait versée et, à titre subsidiaire, qui serait versée à Madame X..., indivisaire désignée pour recevoir les fonds.
Le montant de la provision allouée est critiqué par la compagnie GENERALI et par les intimées qui se réfèrent à un rapport d'expertise privée mais les photographies et constatations qui figurent au dossier, de même que le premier rapport de Monsieur K...justifient le montant alloué à titre provisionnel en première instance.
Ce montant n'a pas vocation à remplir de leurs droits les indivisaires ni à financer la rénovation de l'immeuble. Il y aura lieu en conséquence de confirmer ce montant.
La lettre de Monsieur N...du 22 juillet 2009 produite pas les intimées mentionne la perception par Messieurs Philippe et Baptiste Z... d'une somme totale de 42. 800 euros à titre d'acompte versé par leur assureur, la compagnie AGF. Il apparaît en conséquence utile de centraliser les règlements des provisions.
La compagnie GENERALI a regretté l'absence de mise en oeuvre des dispositions permettant au président du Tribunal de grande instance de désigner un indivisaire comme administrateur mais la juridiction du fond, en vertu de sa compétence générale d'attribution peut, dans le respect du principe du contradictoire, faire application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 815-6 du code civil. Aucun indivisaire ne s'étant opposé à la désignation de Madame X..., il y aura lieu de l'autoriser à percevoir pour le compte de l'indivision la provision destinée à faire face aux réparations nécessitées par l'incendie et à faire procéder aux travaux mentionnés dans la lettre de l'expert K...du 15 avril 2009 adressée au magistrat chargé du contrôle des expertises du tribunal de grande instance d'AJACCIO.
Sur les autres demandes :
L'équité ne commande pas, à ce stade de la procédure de prononcer une condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Les demandes présentées de ce chef seront rejetées et il y aura lieu de mettre à la charge de l'appelante les dépens de l'instance d'appel.
*
* *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Confirme le jugement du tribunal de grande instance d'AJACCIO du 19 janvier 2009 en ce qu'il a :
- déclaré Madame Danielle Z... épouse X...recevable en son intervention volontaire,
- déclaré Monsieur Jules H...et l'association MMPF irrecevables à agir,
- déclaré recevable l'action conservatoire exercée par Mesdames D..., I...et X..., en leur qualité de propriétaires indivis de l'immeuble d'habitation cadastré section B numéro 400 sur la commune de COTI CHIAVARI,
- dit que la clause stipulée au paragraphe " Ce que nous garantissons ", 1o, point 7 des conditions générales du contrat souscrit auprès de la compagnie d'assurances GENERALI, s'analyse en une clause d'exclusion de garantie,
- dit que cette clause n'est pas valable et ne saurait trouver application,
- condamné la compagnie GENERALI à garantir Monsieur Benjamin J...des conséquences pécuniaires lui incombant en raison des dommages causés du fait de l'incendie survenu le 23 juin 2006,
- ordonné avant dire droit une expertise et commis en qualité d'expert Monsieur Claude K...,
- fixé à 1. 800 euros la consignation à valoir sur la rémunération de l'expert mise à la charge de Mesdames D..., I...et X...,
- réservé les dépens,
L'infirme pour le surplus et, statuant à nouveau,
Condamne la compagnie GENERALI à verser à titre provisionnel la somme de CENT CINQUANTE MILLE EUROS (150. 000 euros) à Madame X..., indivisaire désignée pour accepter, pour le compte de l'indivision, cette provision destinée à faire face aux réparations nécessitées par l'incendie et faire procéder aux travaux mentionnés dans le lettre de l'expert K...du 15 avril 2009 adressée au magistrat chargé du contrôle des l'expertises du tribunal de grande instance d'AJACCIO,
Y ajoutant,
Dit que l'expert K...devra en outre procéder à l'évaluation des dommages, lot par lot de chaque indivisaire en distinguant les dommages supportés par les parties communes, après avoir pris connaissance du rapport établi par Monsieur Paul L...le 22 février 2008,
Dit recevable l'intervention volontaire Mademoiselle Delphine Y..., en sa qualité de propriétaire indivis,
Dit n'y avoir lieu, à ce stade de la procédure, de condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette le surplus des prétentions des parties,
Met les dépens de l'instance d'appel à la charge de la compagnie d'assurances GENERALI FRANCE IARD.
LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Ch. civile b
Numéro d'arrêt : 09/00134
Date de la décision : 17/11/2010
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2010-11-17;09.00134 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award