Ch. civile B
ARRET
du 04 MAI 2011
R. G : 10/ 00384 C-PH
Décision déférée à la Cour : ordonnance de référé du 09 avril 2010 Tribunal de Commerce de BASTIA R. G :
X...
C/
S. A ORENGA
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU QUATRE MAI DEUX MILLE ONZE
APPELANTE :
Madame Katia X... épouse Y...née le 27 Décembre 1969 à BASTIA (20200) ...20222 ERBALUNGA
représentée par la SCP CANARELLI Antoine CANARELLI Jean Jacques, avoués à la Cour
assistée de Me Jean-Pierre POLETTI, avocat au barreau de BASTIA
INTIMEE :
SA ORENGA Prise en la personne de son représentant légal 6 Boulevard Paoli 20200 BASTIA
représentée par la SCP RIBAUT BATTAGLINI, avoués à la Cour
assistée de Me Georges COSTA, avocat au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 mars 2011, devant Monsieur Philippe HOAREAU, Conseiller, chargé du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean BRUNET, Président de Chambre Monsieur Philippe HOAREAU, Conseiller Madame Marie-Paule ALZEARI, Conseiller
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Madame Marie-Jeanne ORSINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 04 mai 2011.
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Jean BRUNET, Président de Chambre, et par Madame Marie-Jeanne ORSINI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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* *Vu l'ordonnance de référé rendue le 9 avril 2010 par le Président du Tribunal de commerce de BASTIA qui s'est déclaré incompétent, a renvoyé les parties à mieux se pourvoir devant les juges du fond et mis les dépens à la charge de Madame Katia X... veuve Y....
Vu la déclaration d'appel déposée le 19 mai 2010 pour Madame Katia X....
Vu les dernières conclusions déposées le 12 octobre 2010 pour la société à responsabilité limitée ORENGA aux fins de confirmation de l'ordonnance entreprise, de voir débouter Madame X... de l'ensemble de ses prétentions et de la voir condamner au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens dont distraction au profit de son avoué.
Vu les dernières conclusions déposées le 25 octobre 2010 pour Madame X... aux fins d'infirmation de l'ordonnance entreprise et de condamnation de la société ORENGA, sous astreinte de 3 000 euros par jour de retard, à lui laisser le libre accès et la libre exploitation du stand de boucherie et à remettre le stand dans l'état de stock et d'équipement équivalent au jour de son expulsion et de condamnation de la société ORENGA à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 15 décembre 2010.
EXPOSE DU LITIGE :
La société à responsabilité limitée ORENGA, qui exploite à BASTIA au numéro 6 du boulevard Paoli un magasin à l'enseigne SPAR, a conclu le 7 février 2006 avec Monsieur Antoine Y...pour une durée de onze ans, un contrat de stand relatif à l'exploitation dans ce magasin d'un stand de boucherie moyennant une redevance mensuelle égale à 10 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé durant le mois concerné, les parties ayant convenu d'un chiffre d'affaires annuel hors taxes minimum de 323 803 euros hors taxes et d'une redevance ramenée à 8 % pour la partie du chiffres d'affaires annuel excédant ce montant.
Monsieur Antoine Y...étant décédé le 11 septembre 2008, un avenant était établi entre la société ORENGA et Madame Katia Y...née X... qui convenaient que le contrat de stand conclu le 7 février 2006 se poursuivrait avec Madame X... en qualité d'exploitante du stand, toutes les clauses et conditions du contrat de stand demeurant inchangées.
Par lettre recommandée du 24 février 2010, la société ORENGA avisait Madame X... de ce que, suite à sa faute lourde, elle mettait fin au contrat de stand à partir du premier mars 2010.
La société ORENGA faisait dresser le premier mars 2010 un inventaire par Maître Pierre Paul B..., huissier de justice, préalable à la reprise du stand.
Madame X... faisait établir le 3 mars 2010 un constat par Me Philippe C..., huissier de justice, de ce que le gérant du magasin ne lui permettait plus d'accéder au stand de boucherie.
Par acte d'huissier du 15 mars 2010, Madame X... assignait en référé la société ORENGA en invoquant l'existence d'une voie de fait.
Par ordonnance du 9 avril 2010, le juge des référés du Tribunal de commerce de BASTIA, qui relevait l'existence de contestations sérieuses, considérait que la faute lourde invoquée par la société ORENGA relevait de l'appréciation du juge du fond et se déclarait incompétent pour connaître des demandes de Madame X....
Devant la Cour, l'appelante se fonde sur un contrat de location de stand du 5 février 2006 et fait valoir que le délai d'un mois, à compter de la sommation de payer ou d'exécuter demeurée infructueuse, prévu à l'article afférent à la résiliation n'a pas été respecté, qu'il appartenait à la société ORENGA de faire sommation et de saisir une juridiction plutôt que de commettre une voie de fait.
Elle soutient que l'existence de contestations sérieuses ne pouvait autoriser le juge des référés à se déclarer incompétent.
Elle invoque les dispositions de l'article 873 du code de procédure civile et considère que la clause numéro 12 de la convention sur laquelle se fonde la société ORENGA est trop avantageuse pour le bailleur et trop imprécise pour que sa nullité ne puisse être retenue.
Elle souligne que la société ORENGA n'a pas qualifié la faute lourde reprochée et n'a fourni aucune preuve de ses allégations, que le dépôt d'une plainte est insuffisant à démontrer sa culpabilité et qu'il est illicite de se faire justice à soi-même.
Elle considère que l'absence de mise en demeure préalable établit la voie de fait qui justifie la condamnation sous astreinte qu'elle demande.
La société ORENGA réplique en soutenant que seules les dispositions du contrat de stand du 7 février 2006, qui a remplacé celui du 5 février 2006 qui était nul, et l'avenant du dit contrat sont applicables entre les parties.
Elle indique qu'aucune forme ni délai n'est imposé pour la résiliation du contrat et qu'elle était fondée à procéder à cette résiliation au motif que Madame X... sortait régulièrement de la viande sans remettre les tickets aux caisses du magasin et détournait ainsi 10 % du prix de vente.
Elle précise que le chiffre d'affaires du stand de boucherie a diminué de 22 % en 2009 et considère que cette pratique déloyale justifie la résiliation et doit entraîner la confirmation de l'ordonnance entreprise.
Elle signale qu'elle a poursuivi, en application des dispositions des articles L 1224-1 et L 1224-2 du code du travail, les contrats de travail des employés du stand boucherie et soutient qu'il n'y a pas en l'espèce de trouble manifestement illicite.
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MOTIFS DE LA DECISION :
L'avenant qui a permis la reprise de l'exploitation du stand de boucherie du magasin SPAR par Madame X... à compter du 11 septembre 2008, se réfère au contrat de stand conclu le 7 février 2006 pour onze ans.
L'appelante ne peut en conséquence invoquer utilement les modalités de résiliation prévues dans le contrat de stand du 5 février 2006 qu'elle a versé aux débats.
L'article 12 du contrat du 7 février 2006 stipule que l'inexécution d'une des conditions du contrat sans l'accord préalable de la société ORENGA " entraînera ipso facto la résiliation du contrat, si bon semble à cette dernière ".
Les modalités de calcul de la redevance prévues à l'article 10 du contrat constituent un élément essentiel de l'accord de volontés des co-contractants.
La lettre du 24 février 2010, visant la faute lourde, confirmait à Madame X... la volonté de la société ORENGA de mettre fin au contrat à partir du premier mars 2010.
Madame X... était informée des intentions du bailleur et pouvait agir avant le 1er mars 2010.
La société ORENGA a mis en oeuvre les stipulations de l'article 12 du contrat dont l'appréciation de la validité excède la compétence du juge des référés. Elle a pris soin de faire établir un constat du stock existant à la résiliation.
L'existence d'une voie de fait n'apparaît pas acquise à ce stade de la procédure du fait que seul le juge du fond est en mesure d'apprécier l'existence de la faute lourde invoquée par la société ORENGA qui a produit le procès-verbal de plainte du 7 juin 2010.
Le juge des référés a en conséquence fait une juste application des articles 872 et 873 du code de procédure civile en se déclarant incompétent et sa décision du 9 avril 2010 mérite confirmation.
L'équité ne commande pas de prononcer en l'espèce une quelconque condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
L'appelante qui succombe supportera les entiers dépens de l'instance.
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PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Confirme l'ordonnance de référé rendue le 9 avril 2010 par le Président du Tribunal de commerce de BASTIA,
Y ajoutant,
Rejette les demandes des parties présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Madame Katia X... aux dépens et autorise l'avoué de l'intimée à faire application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT