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25/01/2012 | FRANCE | N°10/00014

France | France, Cour d'appel de Bastia, Chambre civile, 25 janvier 2012, 10/00014


Ch. civile B
ARRET No
du 25 JANVIER 2012
R. G : 10/ 00014 C-MPA
Décision déférée à la Cour : jugement du 30 novembre 2009 Tribunal de Commerce d'AJACCIO R. G : 08/ 2198

X...
C/
X...

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT CINQ JANVIER DEUX MILLE DOUZE

APPELANTE :
Madame Michèle X...née le 02 Juin 1952 à PORTO-VECCHIO (20137) ...20137 PORTO-VECCHIO
assistée de Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA et de Me Albert PELLEGRI, avocat au barreau de BASTIA

INTIME :
Monsieur René Lucie

n X...né le 10 Avril 1954 à PORTO VECCHIO (20137) ... 20137 TRINITE DE PORTO VECCHIO
assisté de la SCP René JOBIN Ph...

Ch. civile B
ARRET No
du 25 JANVIER 2012
R. G : 10/ 00014 C-MPA
Décision déférée à la Cour : jugement du 30 novembre 2009 Tribunal de Commerce d'AJACCIO R. G : 08/ 2198

X...
C/
X...

COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT CINQ JANVIER DEUX MILLE DOUZE

APPELANTE :
Madame Michèle X...née le 02 Juin 1952 à PORTO-VECCHIO (20137) ...20137 PORTO-VECCHIO
assistée de Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA et de Me Albert PELLEGRI, avocat au barreau de BASTIA

INTIME :
Monsieur René Lucien X...né le 10 Avril 1954 à PORTO VECCHIO (20137) ... 20137 TRINITE DE PORTO VECCHIO
assisté de la SCP René JOBIN Philippe JOBIN, avocats au barreau de BASTIA et de Me Pascale CHIRON, avocat au barreau d'AJACCIO

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 01 décembre 2011, devant la Cour composée de :
Monsieur Pierre LAVIGNE, Président de chambre Monsieur Philippe HOAREAU, Conseiller Madame Marie-Paule ALZEARI, Conseiller
qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DEBATS :
Madame Marie-Jeanne ORSINI.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2012.

ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Pierre LAVIGNE, Président de chambre, et par Madame Marie-Jeanne ORSINI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*
* *
FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES

Par acte sous seing privé en date du 12 juin 2003, Madame Marie B...épouse X...née le 4 janvier 1918 a cédé à Monsieur René Lucien X..., son fils, 125 parts sociales de la SARL LA BAIE DES VOILES pour le prix global de 12 250 euros soit 98 euros la part.
Madame Marie B...est décédée le 1er février 2004.
Par acte d'huissier du 11 juin 2008, Madame Michèle X...a saisi le tribunal de commerce d'AJACCIO afin d'obtenir la nullité de l'acte de cession du 12 juin 2003.

Vu le jugement en date du 30 novembre 2009 par lequel le tribunal de commerce d'AJACCIO a constaté que l'action intentée par Madame Michèle X...était prescrite pour les faits de la cause, en conséquence l'a débouté de l'ensemble de ses demandes et condamné Madame Michèle X...à payer la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu la déclaration d'appel formalisée par Madame Michèle X...le 8 janvier 2010.

Vu les dernières conclusions déposées dans l'intérêt de cette dernière le 8 mars 2011.
Elle prétend à l'infirmation du jugement entrepris et au prononcé de la nullité de la cession de parts intervenue entre Madame Marie B...et Monsieur René Lucien X...portant sur 125 parts sociales de la SARL LA BAIES DES VOILES ainsi que la nullité de tous les actes subséquents pour absence de détermination du prix de cession, absence du paiement du prix, non-respect de l'article 19 des statuts et vice du consentement.
Elle réclame le paiement des sommes de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts et 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions de Monsieur René Lucien X...du 11 mai 2011.
Il s'oppose aux moyens adverse tenant à la nullité pour indétermination du prix, prix dérisoire, défaut de paiement et défaut d'accomplissement de la notification à la société ainsi que des autres demandes.
Il prétend que Madame Michèle X...est irrecevable en sa demande de nullité pour vice du consentement.
Subsidiairement et sur le vice du consentement, il sollicite un sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale initiée suite à son dépôt de plainte à l'encontre de Madame Michèle X...pour des agissements irréguliers constatés dans la gestion de la SARL.
Très subsidiairement et à défaut, il soutient que Madame Michèle X...ne rapporte pas la preuve de l'insanité d'esprit de sa mère au moment de l'acte de cession alors qu'elle a procédé à la confirmation de l'acte incriminé pendant la gestion de la société.
Il réclame le paiement des sommes de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 7 septembre 2011 ayant renvoyé l'affaire pour être plaidée à l'audience du 13 octobre 2011.

À cette audience l'affaire a été renvoyée au 1er décembre 2011, date à laquelle elle a été mise en délibéré.

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* *

MOTIFS :

Attendu sur l'application de l'article 1591 Code civil, que l'acte de cession des 125 parts sociales du 12 juin 2003 mentionne un prix principal de 12 250 euros ; que cette mention suffit à considérer que le prix a été déterminé dans l'acte de vente ;

Attendu sur le caractère dérisoire du prix qu'il convient de constater que la cession de 125 parts sociales pour un montant de 12 500 euros revient à évaluer chaque part au prix de 98 euros ; que sur ce point, Monsieur René Lucien X...verse au débat les comptes sociaux pour l'exercice clos au 31 décembre 2002 ; qu'à cette date, les capitaux propres de la société s'élevaient à la somme de 61 502 euros établissant ainsi la valeur mathématique de la part sociale à hauteur de 123 euros ;

Attendu qu'il convient de noter que la société exploitait et exploite toujours son fonds en location-gérance ; que ce mode d'exploitation constitue nécessairement un facteur de minoration de la valeur de la société ; qu'en considération de cet élément, l'évaluation de la part sociale à un montant nominal de 98 euros ne peut être considéré comme dérisoire ; que le moyen tiré de la détermination du prix et de son caractère non sérieux sera donc écarté ;

Attendu sur le paiement du prix qu'il est expressément précisé dans l'acte de cession que Madame Marie B...reconnaît expressément que celui-ci a été acquitté le jour de la vente et hors comptabilité du rédacteur d'acte et en a consenti bonne et valable quittance sous réserve d'encaissement ;

Attendu que la quittance ainsi donnée dans l'acte de vente a nécessairement valeur libératoire ; que de ce chef, la réserve d'encaissement ne saurait imposer à Monsieur René Lucien X...la preuve de la réalité de cet encaissement ;

Attendu au demeurant que le non-paiement du prix ne peut être sanctionné que par une demande de résolution et ne saurait avoir pour effet d'entraîner la nullité du contrat ; que ce moyen sera donc également rejeté ;

Attendu sur la demande de nullité de la cession de parts fait à un étranger sans le consentement des autres associés qu'il ressort de l'article 17 des statuts que les parts sociales sont librement transmissibles entre conjoints, ascendants et descendants ; qu'il n'est pas contesté que Monsieur René Lucien X...était le fils de Madame Marie B...; que cette cession entre donc incontestablement dans le champ d'application de l'article 17 des statuts ;

Attendu sur l'application de l'article 19 des statuts relatifs à la cession de parts faite à un étranger qui stipule un agrément dans cette hypothèse qu'il convient de rappeler que le régime de nullité des sociétés ou des actes en modifiant les statuts sont soumis aux dispositions des articles L235-1 à L235-14 du code de commerce ;

Attendu qu'en application de l'article L235-9 du code de commerce les actions en nullité de la société ou d'actes postérieurs à sa constitution se prescrivent par trois ans à compter du jour où la nullité est encourue ; que la cession est intervenue le 12 juin 2003 alors que la demande de nullité a été introduite le 11 juin 2008 ; qu'il convient donc de considérer que cette demande est atteinte par la prescription en application de l'article précité ;

Attendu sur l'absence de signification de la cession à la société qu'il convient d'indiquer que ce défaut de notification ne peut être sanctionné par la nullité de l'acte mais seulement par son inopposabilité à la société ;

Attendu d'autre part qu'il n'est pas contesté que postérieurement à la cession, le cessionnaire a été convoqué aux assemblées, la société manifestant ainsi sa connaissance de la cession mais également son acceptation de celle-ci ;

Attendu en effet qu'il n'est pas contredit que la gérante de la société a mis à jour les statuts, a effectué les formalités de dépôt au greffe et a toujours convoqué Monsieur René Lucien X...aux assemblées générales ; que le moyen tiré de la nullité de l'acte de cession pour absence de notification à la société sera donc également rejeté ;

Attendu sur l'origine des parts sociales cédées qu'il est expressément précisé dans l'acte de vente que le cédant est légitimement propriétaire des parts sociales et en a la pleine et entière disposition, celles-ci ne faisant l'objet d'aucun démembrement de propriété ; qu'il est ajouté la date de constitution de la société ainsi que la précision de la propriété de la totalité des parts sociales, Madame Marie B...disposant à l'époque de 250 parts ; que ce moyen, au demeurant non fondé, doit donc être rejeté ;

Attendu sur le moyen tiré de la prescription de l'action qu'il convient de constater que celui-ci n'est plus soutenu en cause d'appel par l'intimé ; que la demande introductive d'instance a été délivrée le 11 juin 2008 ; que l'acte de cession étant en date du 12 juin 2003, il convient effectivement de considérer que l'action de Madame Michèle X...n'est pas prescrite, le jugement entrepris étant infirmé sur ce point ;
Attendu sur la demande de nullité au regard d'un vice du consentement qu'en application de l'article 414-2 du Code civil, après la mort de l'intéressé, les actes faits par lui ne peuvent être attaqués par ses héritiers pour insanité d'esprit que si l'acte porte en lui-même la preuve d'un trouble mental, que s'il a été fait alors que l'intéressé était placé sous sauvegarde de justice, que si une action a été introduite avant son décès aux fins d'ouverture d'une curatelle ou d'une tutelle ou si effet a été donné au mandat de protection future ;

Attendu qu'il est constant que Madame Marie B...n'a jamais fait l'objet d'une mesure de sauvegarde de justice ; qu'aucune action n'a été introduite avant son décès aux fins d'ouvrir une mesure de tutelle ou de curatelle ;

Attendu sur le point numéro un de l'article 412-2 qu'il ne peut être considéré que l'acte portait en lui-même la preuve d'un trouble mental dans la mesure où il ressort des motifs précédents que le prix de cession des parts sociales n'était pas dérisoire ;

Attendu d'autre part que si effectivement il est établi que six ans après Monsieur René Lucien X...a acquis d'un de ses frères des parts sociales à un prix plus élevé, il convient de constater au regard des bilans produits par l'intimé que le chiffre d'affaires de la société a considérablement augmenté à partir de l'année 2007 ; qu'il convient également d'observer que cette amélioration significative coïncide avec la gérance de Monsieur René Lucien X...qui a remplacé sa soeur Madame Michèle X...à cette fonction ;

Attendu dans ces conditions que les seuls témoignages produits quant à l'état de santé mentale de Madame Marie B...ne peuvent suffire à entacher l'acte de cession au regard des dispositions de l'article 412-2 du Code civil ; qu'ainsi, le moyen de nullité tiré de l'existence d'un trouble mental de la cessionnaire ressortant de l'acte lui-même doit être écarté ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, la demande de nullité de la cession de parts intervenue entre Madame Marie B...et Monsieur René Lucien X...portant sur 125 parts sociales de la société LA BAIE DES VOILES et de tous les actes subséquents sera rejetée sans qu'il soit nécessaire d'examiner les moyens subsidiaires invoqués par l'intimé ;

Attendu qu'en l'état de ce rejet, Madame Michèle X...doit être déboutée en sa demande en paiement de dommages et intérêts ; qu'à l'opposé, à défaut de démonstration d'un préjudice direct et distinct du fait de la présente procédure, la demande en paiement de dommages et intérêts de Monsieur René Lucien X...doit être écartée ;
Attendu que Madame Michèle X..., qui succombe, doit supporter la charge des dépens, conformément aux dispositions de l'article 696 du Code de procédure civile et être déboutée en sa demande fondée sur l'article 700 du même code ; qu'en outre aucun élément tiré de l'équité ou de la situation économique de Madame Michèle X...ne permet d'écarter la demande de Monsieur René Lucien X...formée sur le fondement de cet article.
*
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PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Infirme le jugement du tribunal de commerce d'AJACCIO en date du 30 novembre 2009 en toutes ses dispositions,
Rejette toutes les demandes de Madame Michèle X...,
Condamne Madame Michèle X...aux entiers dépens d'appel et de première instance dont distraction au profit de la SCP JOBIN,
Condamne Madame Michèle X...à payer à Monsieur René Lucien X...la somme de TROIS MILLE EUROS (3 000 €) par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Rejette toutes les autres demandes des parties.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bastia
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 10/00014
Date de la décision : 25/01/2012
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bastia;arret;2012-01-25;10.00014 ?
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